Étant donné que 40 % des aliments produits par l’agro-industrie va directement à la poubelle pourquoi faire des réserves de gibier quand on gaspille autant? Je comprends que tout le monde n’est pas végétarien, mais il y a suffisamment d’animaux de consommation (même d’énormes surplus inutilisés) pour contenter tout le monde. Enfin… le plaisir de tuer y est peut-être pour quelque chose; un «sport» c’est supposé faire plaisir.
«Après l'émancipation des esclaves, puis celle des femmes, viendra un jour prochain le tour des animaux, tant il est vrai que ‘la risée d'une génération peut devenir la préoccupation de celle qui suit’. C'est là une nécessité qu'on pourrait dire inscrite dans le ‘sens de l'histoire’. Car avec la grande révolution de 1789, ce sentiment d'humanité qui n'était ressenti jusqu'alors que par un homme, peut-être, sur un million, commence à se développer peu à peu et à se manifester comme un trait essentiel de la démocratie.» (Les droits de l'animal dans leur rapport avec le progrès social - Henry Salt in Le nouvel ordre écologique - Luc Ferry)
«Vivre sa propre vie, réaliser sa propre personnalité, tel est le but moral le plus élevé de l'homme et de l'animal ensemble; et il est difficile de mettre en doute le fait que les animaux possèdent eux aussi le sentiment de leur individualité. Les animaux ont-ils des droits? Sans aucun doute si les hommes en ont.» (Les droits de l'animal dans leur rapport avec le progrès social – Henry Salt)
~ Henry Salt, humaniste et homme de lettre britannique
Voyez le texte d’appoint du même auteur après le poème.
Tous les ramiers sont morts
Anne-Marie Kegels (1912-1994)
Tous les ramiers sont morts. Les forêts sont éteintes
où luisait leur envol.
Leur soyeux va-et-vient n’a laissé d’autre empreinte
qu’un peu de sang au sol.
J’ai retrouvé leurs corps exilés des feuillages
gisant dans les sentiers.
Celui qui les tirait savourait ce carnage.
Pas un n’eut sa pitié.
Tous les ramiers sont morts. Je marche sur des plumes
de terrible douceur.
Ils se sont débattus follement dans la brume
avant de perdre cœur.
Je fais craquer les os qui furent fuite tendre
sous la haute futaie.
Je foule tant d’amour retourné à la cendre
et piétine les plaies.
Que vienne le néant sur ces formes légères,
le travail des fourmis.
Les sous-bois ravagés dans l’aube douce-amère
n’ont besoin que d’oubli.
Haute Vigne
Source :
Cent poèmes pour l’écologie
Choisis par René Maltête
Le cherche midi éditeur; 1991
Le sport (Sport)
Henry. S. Salt (1851-1939)
[Extraits, traduction maison]
L'essence de ce prétendu «sport» consiste en une sorte d’excitation dérivant de la poursuite et de la mise à mort des animaux. Il me semble qu'il y ait deux instincts qui se font la guerre dans l'esprit des hommes; l'un d'eux est la passion brutale, qui l'incite à poursuivre et à abattre d’innocentes créatures, une passion, qui, malheureusement, a été renforcée par des siècles d'habitude, et qui, chez certaines personnes, est greffée comme une seconde nature; l'autre, la bienveillance et certainement pas moins naturelle, qui nous fait éprouver de la pitié, de la sympathie, et à sauver. Je crois que ce dernier instinct est destiné éventuellement à triompher du premier, et son triomphe serait plus rapide, si ce n'était de certaines circonstances concomitantes qui s’allient pour attribuer un charme fictif à nos activités nationales de plein air, et ainsi nous empêcher de réaliser la grande cruauté qu’ils sous-tendent. Concernant la chasse par exemple, le plus populaires de toutes les activités de plein air, le cadre agréable, l'excitation des «rencontres», la beauté du paysage, la force et la vitesse des chevaux et la compétence des cavaliers font oublier aux hommes la nature détestablement barbare et inhumaine de l’affaire.
Les excuses présentées par les sportifs, pour justifier ou pallier leur poursuite, sont en effet tellement remarquables, et parfois si ingénieuses, qu’elles méritent une attention particulière. Les rédacteurs de Land and Water et autres revues sportives nous rappellent souvent que les activités de plein air sont «nationales», et que par conséquent, elles sont dignes de louanges; par commodité on ignore ou on oublie qu'il existe des erreurs nationales, ainsi que des vertus nationales, mais qu'une erreur nationale est encore plus désastreuse qu’une erreur individuelle. Une autre justification amusante est que l'animal a «une chance de s'échapper», et qu'il n'y a donc aucune cruauté; comme si l’incertitude angoissante étaient mieux que la mort prompte et miséricordieuse! Encore une fois, on affirme souvent que la chasse, la pêche, etc., doivent avoir un effet bénéfique sur les sportifs puisqu'ils sont en contact avec la nature dans les bois et les ruisseaux. Il est certain que le contact avec la nature est bénéfique; mais cela pourrait-il se faire sans tuer des oiseaux et des poissons? Et ces hommes peuvent-ils être de vrais et parfaits amoureux de la nature s’ils fréquentent ses sentiers avec le but de semer la mort et la destruction d’animaux inoffensifs? Les dynamiteurs qui traversent l'Atlantique pour faire sauter une ville anglaise se basent sans doute sur ce principe pour justifier leur voyage en affirmant que le voyage en mer les met en contact avec les influences exaltantes et enrichissantes de l'Atlantique.
Mais, parmi les arguments du sportsman, le fleuron de l’absurdité, une absurdité qui bat toutes les faussetés servies par Sydney Smith dans «Noodle’s Oration», est la l’affirmation que le sport ennoblie le caractère car il adoucie et humanise! Le vrai sportsman, comme le vrai soldat, n'est jamais cruel. Il est miséricordieux, chevaleresque, réfléchi, il a le cœur tendre et est sympathique. Ces qualités résultent de sa pratique du sport. Elles ne s’acquièrent pas (comme on pourrait l’imaginer à première vue) chez les bouchers, car la boucherie n'est pas un «sport», elles sont la glorieuse possession de ces individus désintéressés qui consacrent leur vie à la chasse et à la pêche. J'ai plusieurs fois entendu ce plaidoyer sérieusement défendu pour justifier des activités, de sorte qu'il peut être utile de signaler (avec des excuses à mes lecteurs de l’apparente insulte à leurs capacités de raisonnement) que cela ne donne pas grand crédit au sportif qui commet systématiquement des actes de cruauté en tuant des créatures innocentes dans un but récréatif, de sorte qu’on pourrait lui demander instamment de cesser de torturer inutilement ses victimes. Peut-être pas; mais alors, quoi? Il est parfois difficile de rester sérieux quand on essaie de réfuter de tels nonsenses, et je terminerai par une brève citation tirée du livre le plus connu de De Quincey «Murder, considered as one of the Fine Arts». Dans cet essai il traite du meurtre avec humour – un peu comme le sportsman qui décrit son sport – à savoir «qu’il s’agit d’une une profession honorable, un art des plus nobles qui développe la dextérité manuelle et anoblie le caractère de ceux qui le pratiquent.»
Il ne fait guère de doute que la principale force du sport réside, non pas dans les ridicules arguments avancés par ses apôtres, mais dans le fait que l'institution des abattoirs est encore considérée par la grande majorité comme nécessaire et indispensable. Il y a, bien sûr, une différence entre tuer des animaux pour se nourrir et l'abattage amateur dignifié par son titre de sport; le premier peut, en théorie, être justifiable, le second ne peut jamais l’être. Mais encore, il y a tellement de ressemblances entre les deux, qu'il est presque impossible d'amener les gens à les traiter séparément. «Si nous mettions fin à la chasse aux pigeons», déclarait Earl Fortescue durant un débat à la Chambre des Lords, «nous pourrions être appelés à mettre fin à l'abattage du bétail». Possible, en effet. Ceux qui détestent la cruauté ne cesseront pas de réclamer son abolition, quelle que soit la manière dont elle peut se manifester. La chasse sportive est peut-être la plus stupide et la plus vulgaire de toutes les formes de cruauté; mais nous ne devons pas être surpris si elle persiste jusqu'à ce que les hommes aient reconnu la folie et la brutalité de l'abattage des animaux pour la nourriture. Tant que les animaux seront considérés comme de simples «bêtes qui périssent», ils subiront toutes sortes de traitements cruels de la part des hommes.
Article complet en anglais :
http://www.henrysalt.co.uk/blog/?tags=Vegetarianism&start=0
Nombreux articles de Salt :
http://www.henrysalt.co.uk/bibliography/articles/
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