29 novembre 2017

22 novembre 2017

Changer de rue ne suffit plus

On vit dans un monde où il est de plus en plus difficile de choisir ce qu’on veut regarder. Détournez le regard et vous butez aussitôt sur un autre panneau publicitaire, puis un autre et un autre. Panneaux géants en bordure des autoroutes, sur les murs, les abris bus, dans le métro, affichage animé dynamique, olfactif... pollution visuelle, énergétique, électrique, sonore et psychologique. Impossible d’y échapper – c’est une «chasse agressive aux consommateurs de la part des multinationales» (Naomi Klein, No Logo). Et, changer de rue ne règlera pas mon problème.

La philosophe Simone Weil (1909-1943) y voyait une menace directe contre la liberté d'opinion et une insulte à l'intelligence. La publicité est principalement critiquée pour son invasion de l'espace public, de la vie courante (télévision, radio, boîtes aux lettres, téléphone, journaux, cinéma, Internet, panneaux publicitaires, ainsi que sur les vêtements) et son emploi de techniques nuisibles et agressives comme le matraquage (plus de 3 000 messages publicitaires par jour) ou la manipulation mentale. Une autre sorte de critique affirme que la publicité prise dans son ensemble diffuse un message politique fort, prônant la société de consommation, incitant au gaspillage et à la pollution.
Source : Mouvement Antipub https://fr.wikipedia.org/wiki/Antipub

Photo : (Juin 2009) Un trompe-l’œil pour surprendre et faire ralentir les cyclistes trop audacieux sur le trottoir de Regent's Canal à Londres. Une commande de la British Waterways au célèbre tandem Joe Hill et Max Lowry (ce dernier est décédé en 2010).

Autobiographie en cinq courts chapitres
Par Portia Nelson*

Chapitre 1
Je marche dans la rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir.
Je tombe dedans.
Je suis perdue … je suis impuissante.
Ce n’est pas de ma faute.
Ça me prend un temps fou pour en sortir.

Chapitre 2
Je marche dans la même rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir.
Je fais semblant de ne pas le voir.
Je tombe encore dedans.
Je n’arrive pas à croire que je suis à la même place.  
Mais, ce n’est pas de ma faute.
Ça me prend encore beaucoup de temps pour en sortir.

Chapitre 3
Je marche dans la même rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir.
Je le vois là.
Je tombe encore dedans … par habitude. 
J’ai les yeux ouverts.
Je sais où je suis.
C’est de ma faute.
J’en sors immédiatement.

Chapitre 4
Je marche dans la même rue.
Il y a un trou profond dans le trottoir.
Je le contourne.

Chapitre 5
Je marche dans une autre rue.

Poème publié dans :
There’s a Hole in My Sidewalk: The Romance of Self-Discovery 

* Portia Nelson (1920-2001) : chanteuse et actrice américaine. Elle a joué entre autres dans La Mélodie du bonheur; Le Dortoir des anges; Mystery of the Chinese Junk; L'Extravagant docteur Dolittle.

En complément :

The Illusionists
Elena Rossini 2015  | 53:50

The Illusionists examines how global advertising firms, mass media, and the beauty, fashion, and cosmetic-surgery industries have together colonised the way people all around the world define beauty and see themselves. Taking us from Harvard to the halls of the Louvre, from a cosmetic surgeon’s office in Beirut to the heart of Tokyo’s Electric Town, The Illusionists shows how these industries saturate our lives with narrow, Westernised, consumer-driven images of so-called beauty that show little to no respect for biological realities or cultural differences. Featuring voices from prominent sociologists, magazine editors, scientists, artists, and activists, The Illusionists documents a truly global phenomenon, with hegemonic results.


Human Resources
Scott Noble 2010 | 1:59:23 metanoia-films.org

Human Resources Social Engineering in the 20th Century is about the rise of mechanistic philosophy and the exploitation of human beings under modern hierarchical systems. The film captures how humans are regarded as a resource by corporations something to be exploited for pecuniary gain by following the history of psychological experiments in behaviour modification, conditioning and mind control; applying the outcomes to modern day establishment experiments such as institutionalised education, military training, and social engineering by way of things like television…


Non satisfaits d’avoir fait de la terre un dépotoir, nous faisons la même chose avec le ciel. La prolifération des débris pourrait éventuellement perturber le trafic aérien (possibles collisions avec des avions).

Space junk


Nearly fifty years into mankind's space exploration, we have littered the heavens with our garbage. There is an incredible amount of debris that is literally stuck in Earth's gravitational field, with each piece traveling at about 18,000 miles per hour. Of the estimated 600,000 pieces of old spacecraft parts, spent rocket stages, satellites that no longer work, fragments from small collisions, solid rocket fuel slag and even paint flakes from aging satellites or equipment, only about 20,000 can be tracked. So each time we send new things into space such as the shuttle or satellites, we have to worry about the possibility for a major collision with some of that debris.

Adrift
Cath Le Couteur 2016 | 11:03

Adrift is a short film that explores the phenomenon of space junk, where human-made objects launched into space and are now defunct orbit the Earth literally as garbage. The film makes visible some of the immediate impacts and dangers of the technological escalation of this culture, where old satellites, spent rocket stages, and other items orbit the Earth, only to collide with one another at high velocities, generating smaller fragments that collide with other items, and so on. The end point is a cascading complex of junk that engulfs the entire space around the Earth. Adrift aims to make this phenomenon visible, putting a big question mark against the claims made by many futurists and technologists that future space colonisation would even be possible, if only it were a tenable or sensible idea in the first place…

18 novembre 2017

«Comment rétablir le respect entre les individus?»

Veillée pour honorer la mémoire de Tina Fontaine, une jeune autochtone retrouvée morte dans les eaux de la rivière Rouge en décembre 2015. Photo : Journal de Montréal.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) reconnaît, dans un rapport datant de 2014, 1200 cas de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées entre 1980 et 2012. Toutefois, les groupes de femmes autochtones évoquent plutôt, dans des estimations documentées, un chiffre supérieur à 4000. Plusieurs facteurs expliquent cette confusion au sujet des chiffres, notamment un phénomène de sous-déclaration de la violence à l’égard des femmes et des filles autochtones, l’absence d’une base de données efficace en la matière et l’incapacité à recenser les cas de ce type en fonction du groupe ethnique d’origine des victimes.

Beaucoup de gens adhèrent encore, au 21e siècle, à cette définition (même pas caricaturale) du cynique et lucide Bierce : «Aborigènes : Personnes de moindre importance qui encombrent les paysages d'un pays nouvellement découvert. Ils cessent rapidement d'encombrer; ils fertilisent le sol.» ~ Ambrose Bierce, 1842-1914 (Dictionnaire du Diable)

Quand on ne les tue pas, de vicieux trafiquants d’humains les vendent à l’encan comme en témoigne une récente vidéo sur CNN.

Le Cri
Laetitia Sioen

Vois-tu ?
Vois-tu ce qui sommeille en moi?
Vois-tu l’eau qui a coulé sous mes pieds?
Vois-tu mes mains qui inspirent?
Vois-tu mes yeux dans les tiens?
Vois-tu ma bouche qui dicte mes mots?
Vois-tu la création dans ma tête?
Vois-tu mon mur d’expression?
Vois-tu les murmures de mes maux? 
Vois-tu mes larmes qui coulent en silence?
Vois-tu mon coeur qui bat la mesure de mon âme?
Vois-tu le cri de mon être?
Vois-tu la liberté qui coule dans mes veines?
Vois-tu la femme que je suis?  


~~~

Journal d’un écrivain; Mémoire d’encrier 2013
Dany Laferrière

199. Le roman de la vie (p. 304/307)

[...] Personne ne peut être certain de finir ses jours où il est né. Je ne fais pas grand cas de cette notion de terre qui n’a servi jusqu’à aujourd’hui qu’à provoquer des guerres. Le vertige que l’on ressent quand le sol se dérobe sous nos pieds devrait remettre en question pour de bon la notion de terre ferme.
   Ce n’est pas pourtant la seule de nos illusions : la race n’a de sens que si on y croit. Quand des gens de même couleur (enfin, je dis couleur faute de mieux) se regroupent massivement sur un même espace, ils finissent par fonder leur identité sur une fausseté. La notion de race n’existe pas quand on fait face à quelqu’un d’une autre race. Alors, on échafaude mille théories, les unes plus fumeuses que les autres, dans l’unique but de faire croire à l’autre qu’on lui est supérieur (personne n’a jamais cherché à démontrer son infériorité). Mais profondément, on n’y croit pas soi-même. Et cette haute idée de soi ne suffit pas toujours à nous rassurer. Il suffit de rejoindre notre tribu pour que l’argument de la race se dissipe. Les vieilles angoisses reviennent et on reprend sa place dans la société selon des critères économiques moins flous que ceux de la race.
   Après la race arrive la question de classe. Quand on observe bien une classe sociale, on voit qu’elle fonctionne comme une secte. Des gens qui achètent les mêmes choses aux mêmes endroits, habitent le même espace délimité, partagent les mêmes loisirs et se nourrissent souvent des mêmes idées politiques. Ils le font pour se garder au chaud, car ils croient que cette communauté d’intérêts pourra les apaiser. La quête d’identité est donc une tentative pour répondre à cette panique enfouie dans notre chair. Si on arrive à planter notre tente, on n’est pas pour autant exempt de vertige face à ce vaste espace étoilé qui semble vouloir nous aspirer.
   C’est ici que la religion se propose de faire le lien entre les individus. C’est aussi la définition du mot religion – de religare, qui veut dire «relier». On cherche depuis toujours à ne pas rompre ce lien qui nous permet de ne pas perdre le groupe dans «la forêt obscure». C’est ainsi qu’on nous propose des prières afin de distiller en nous une angoisse que seule la foi pourra calmer – c’est connu, on crée le désir du produit qu’on voudrait vendre. Si on reste ensemble, on aura moins peur, espère-t-on. On comprend aussi qu’il ne doit exister qu’un seul chemin et qu’une seule foi. Et quand la foi est aveugle, la route lumineuse se change alors en un fleuve de sang. Le sang, le sang, voilà le prix de cette interminable nuit. Pourquoi les chemins qui s’offrent successivement à nous deviennent-ils des fleuves de sang? L’histoire, la religion, la race ou la classe.
   Il ne reste que ce chemin secret que l’on emprunte déjà, sans discours, et qu’on n’aperçoit que quand la vie court un grave danger. Notre instinct de survie est tissé d’une incroyable énergie qui possède sa propre intelligence, et que l’esprit humain ne parvient pas à embrigader. Cette énergie circule de corps à corps ou de cœur à cœur, selon la situation, évitant l’air pollué d’idéologies. Cette énergie évite de distinguer, avant de passer d’un corps à un corps, ou parfois d’un cœur à un cœur, la race comme la classe des individus en présence. Cette énergie ne sait pas raisonner. Elle n’obéit à aucun ordre, elle ne sait que bondir. Et depuis que les nouvelles technologies permettent d’accélérer le mouvement, nous pouvons à peine imaginer ce qui se passe en ce moment sur une planète où la distance se résume à un clic. Nos vieilles habitudes, qui exigeaient toujours un chemin bien balisé pour sortir de la nuit, sont-elles aujourd’hui à ranger dans un placard? Car ce sont des milliards de chemins qui se présentent à nous. Et qui vont dans toutes les directions. Jusqu’à ce que l’on comprenne que la peur ne vient pas du fait qu’on ne trouve pas son chemin, mais plutôt du fait qu’il n’y a qu’un seul chemin. Ce qui est excitant, c’est qu’on n’a même pas à le chercher. On le trouve d’instinct. C’est la simple vie qui se fait roman.

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Le harcèlement moral, la violence perverse au quotidien; Pocket 1998
Marie-France Hirigoyen

Conclusion (p. 241/242)

[...] L’imagination humaine est sans limites quand il s’agit de tuer chez l’autre la bonne image qu’il a de lui-même; on masque ainsi ses propres faiblesses et on se met en position de supériorité. C’est la société tout entière qui est concernée dès qu’il est question de pouvoir. De tout temps, il y a eu des êtres dépourvus de scrupules, calculateurs, manipulateurs pour qui la fin justifiait les moyens, mais la multiplication actuelle des actes de perversité dans les familles et dans les entreprises est un indicateur de l’individualisme qui domine dans notre société. Dans un système qui fonctionne sur la loi du plus fort, du plus malin, les pervers sont rois. Quand la réussite est la principale valeur, l’honnêteté paraît faiblesse et la perversité prend un air de débrouillardise.
   Sous prétexte de tolérance, les sociétés occidentales renoncent peu à peu à leurs propres interdits. Mais, à trop accepter, comme le font les victimes des pervers narcissiques, elles laissent se développer en leur sein des fonctionnements pervers. De nombreux dirigeants ou hommes politiques, qui sont pourtant en position de modèles pour les jeunes, ne s’embarrassent pas de morale pour liquider un rival ou se maintenir au pouvoir. Certains abusent de leurs prorogatives, usent de pressions psychologiques, de la raison d’État ou du «secret défense» pour protéger leur vie privée. D’autres s’enrichissent grâce à une délinquance astucieuse faite d’abus de biens sociaux, d’escroqueries ou de fraude fiscale. La corruption est devenue monnaie courante. Or, il suffit d’un ou de plusieurs individus pervers dans un groupe, dans une entreprise ou dans un gouvernement pour que le système tout entier devienne pervers. Si cette perversion n’est pas dénoncée, elle se répand de façon souterraine par l’intimidation, la peur, la manipulation. En effet, pour ligoter psychologiquement quelqu’un, il suffit de l’entraîner dans des mensonges ou des compromissions qui le rendront complice du processus pervers. C’est la base elle-même du fonctionnement de la mafia ou des régimes totalitaires. Que ce soit dans les familles, les entreprises ou les États, les personnes narcissiques s’arrangent pour porter au crédit des autres le désastre qu’ils déclenchent, afin de se poser en sauveurs et de prendre ainsi le pouvoir. Il leur suffit ensuite de ne pas s’embarrasser de scrupules pour s’y maintenir. L’histoire nous a montré de ces hommes qui refusent de reconnaître leurs erreurs, n’assument pas leurs responsabilités, manient la falsification et manipulent la réalité afin de gommer les traces de leurs méfaits.
   Au-delà de la question individuelle du harcèlement moral, ce sont des questions plus générales qui se posent à nous. Comment rétablir le respect entre les individus? Quelles sont les limites à mettre à notre tolérance? Si les individus ne stoppent pas seuls ces processus destructeurs, ce sera à la société d’intervenir en légiférant. Récemment un projet de loi a été déposé, se proposant d’instituer un délit de bizutage, réprimant tout acte dégradant et humiliant en milieu scolaire et socio-éducatif. Si nous ne voulons pas que nos relations humaines soient complètement réglementées par des lois, il est essentiel de faire acte de prévention auprès des enfants.

10 novembre 2017

L’oiseau sur le fil

Mon article porte sur les oiseaux, mais avant, quelques mots à propos de Cohen que nous continuons de célébrer.

Tout d’abord on peut dire un immense merci à Adam Cohen et à tous les artistes qui ont participé au concert en hommage à son père. Extrêmement émouvant. Je suppose qu’un coffret souvenir sera éventuellement offert au public...

Ensuite, il y a l’exposition Leonard Cohen : Une brèche en toute chose / A Crack in Everything présentée par CBC/Radio-Canada au Musée d’art contemporain. Elle s’inscrit dans la programmation officielle des activités du 375e anniversaire de Montréal. Inspirée de l’univers, des grands thèmes de la vie et de l’œuvre de Leonard Cohen, elle est la première exposition à être entièrement consacrée à l’imaginaire et à l’héritage de cette icône planétaire montréalaise, grand auteur-compositeur et homme de lettres.
   Six salles sont consacrées à la célébration critique, à l’hommage affectueux et, un an après son décès, à la commémoration paisible d’une grande réussite artistique et d’une vie inspirante.
L’exposition se terminera le 9 avril 2018 : http://macm.org/expositions/leonard-cohen/

Enfin, une publication qui réconfortera les inconditionnels :
McClelland & Stewart publiera un livre posthume de Leonard Cohen en octobre 2018. Une collection de poèmes inédits, prose, notes et illustrations qu’il a lui-même préparée et terminée quelques jours avant son décès.  

[The Flame] is an unprecedentedly intimate look inside the life and mind of a unique artist and thinker.
   McClelland and Stewart publisher Jared Bland said, "It is a solemn honour to publish this profound book, which is full of Leonard Cohen's signature combination of grace, humour, wisdom, and heartbreaking insight into the fragility and beauty of this world we all share. It will endure as a testament to his humanity and genius, and delight his millions of fans around the world."
   Robert Kory, Leonard Cohen’s manager and Trustee of the Cohen Estate, said, “During the final months of his life, Leonard had a singular focus completing this book taken largely from his unpublished poems and selections from his notebooks. The flame and how our culture threatened its extinction was a central concern. Though in declining health, Leonard died unexpectedly. Those of us who had the rare privilege of spending time with him during this period recognized that the flame burned bright within him to the very end. This book, finished only days before his death, reveals to all the intensity of his inner fire.


J’ai choisi cette vidéo pour la chronologie de superbes photos de Leonard.
Publiée en hommage à Cohen le 11 novembre 2016 par Bine P.



Bird on the Wire (Album: Songs from a Room, 1969)

Like a bird on the wire,
Like a drunk in a midnight choir
I have tried in my way to be free.
Like a worm on a hook,
Like a knight from some old fashioned book
I have saved all my ribbons for thee.
If I, if I have been unkind,
I hope that you can just let it go by.
If I, if I have been untrue
I hope you know it was never to you.
[...]

Retour aux oiseaux...

On a identifié jusqu’à 10 500 espèces d’oiseaux qu’on retrouve dans tous les coins du monde. Chaque espèce est unique et capable de survivre dans de nombreux environnements. Certaines de leurs caractéristiques les rendent encore plus fascinants. En voici quelques-unes.  

Les oiseaux ont les os creux
Les os creux allègent le poids de l’oiseau pour rendre son vol plus facile, mais ce n'est pas tout. Une étude de l'Université du Massachusetts a constaté que les os des oiseaux peuvent peser autant que ceux d'autres animaux. La différence est que leurs os ont une plus grande densité osseuse que ceux des mammifères, ce qui les rend plus solides. Souvent ils présentent également une courbure, ou une torsion, qui donne plus de force à la poussée pendant le vol.
   Le squelette de l'oiseau est adapté pour le vol (même chez les oiseaux qui ne volent pas) et possède des caractéristiques reliées au poids. Les os sont très légers mais assez forts pour résister aux efforts du décollage, du vol et de l'atterrissage.

Certains oiseaux peuvent voler plus haut que le mont Everest
Le vautour de Rüppell vole plus haut que n'importe quel oiseau. Il peut atteindre une altitude de 10 900 mètres. Pour mettre le tout en perspective, la plupart des avions volent entre 9 144 et 12 192 mètres d’altitude. Et, le mont Everest s’élève à environ 8 850 mètres. Le vautour de Rüppell vole au-dessus de l'Himalaya lors de ses migrations annuelles et l’on peut en voir à des hauteurs de plus de 6 400 mètres. L’Oie à tête barrée vient en deuxième place.

Vautour pris en vol au Népal, dans la vallée du Khumbu (Himalaya). Très grande envergure. Il a longtemps plané au-dessus de nous avant de s'en aller...
Source photo/commentaire : www.fond-ecran-image.com

Les crocodiles sont les plus proches parents des oiseaux
Les oiseaux et les crocodiles descendent du même groupe de reptiles apparu il y a plus de 200 millions d'années. Ces reptiles sont devenus les dinosaures. Les dinosaures ont été anéantis lors d’une extinction il y a environ 65 millions d'années; néanmoins les crocodiles et les oiseaux ont survécu et continué à s'épanouir.

Évoluer simultanément et cohabiter n’est pas synonyme de sécurité...

Les oiseaux ne font pas pipi
Chez les mammifères, uriner élimine les déchets du sang stockés dans la vessie. Ce phénomène augmenterait considérablement le poids de l’oiseau, alors, il n’a pas de vessie. Au lieu de stocker l'urine, les oiseaux produisent une substance blanche pâteuse éliminée par les excréments. C'est pourquoi on voit souvent des déjections d'oiseaux avec des rayures noires et blanches.

Les oiseaux communiquent par les sons et les couleurs
Les perroquets sont connus pour être de bons communicateurs. Ils utilisent des attitudes corporelles et leurs plumes colorées pour transmettre de l'information. Leurs cris uniques, et leur capacité d’imiter les paroles humaines est célèbre. On a démontré que les perroquets ne répètent pas seulement les mots, ils peuvent les mémoriser et les associer, poser des questions, reconnaître les objets et demander ce qu'ils veulent avoir.  


L’autruche est le plus grand oiseau du monde
Les autruches mâles peuvent mesurer jusqu'à 2,5 mètres de haut et peser jusqu'à 150 kilogrammes. De tous les autres animaux terrestres c’est l’autruche qui a les plus grands yeux, et elle dotée d’une vision exceptionnelle. La taille de son cerveau est équivalente à son œil. On prétend qu’elle est stupide. [On sait maintenant que la taille du cerveau ne garantit pas l’intelligence...]  


Les oisillons sont nidifuges ou nidicoles
Les oisillons nidifuges, ou précoces, peuvent se lever et courir très rapidement après la naissance. Les poussins du Pluvier kildir en sont un bon exemple, de même que ceux des canards et des cailles. Les oisillons nidicoles sont plus courants. Ils naissent aveugles, nus et sans défense, notamment les merles, les geais bleus et les aigles. Les nouveau-nés doivent rester dans le nid et dépendent entièrement de leurs parents pour leur alimentation et leur protection.

Pluvier kildir. Photo : birdatlas.bc.ca

La plupart des espèces d'oiseaux sont monogames
Pour les oiseaux, la monogamie peut signifier rester avec un partenaire pour une seule saison de reproduction, puis emprunter des chemins différents et trouver d’autres partenaires l'année suivante. Mais certains oiseaux s'engagent pour la vie. Par exemple, un couple de Flamants peut rester ensemble plus de 50 ans.

Flamants roses. Photo : provence7.com

Certains oiseaux peuvent dormir en vol
La Sterne fuligineuse s’endort plusieurs fois pendant une à deux secondes en cours de vol. Cela lui permet de rester dans les airs pendant de très longues périodes. Elle vit dans les eaux tropicales et se nourrit de poissons et de crustacés, mais elle ne peut pas atterrir sur l'eau parce que ses plumes ne sont pas hydrofuges. Les Sternes fuligineuses passent la majorité de leur vie dans les airs; elles ne s’arrêtent que pour nicher et élever leurs petits.

Sterne fuligineuse. Photo : Kevin Schafer

Les colibris sont les seuls oiseaux à voler comme un hélicoptère  
La plupart des oiseaux volent en battant les ailes de haut en bas. Cependant, la structure osseuse des ailes du Colibri lui confère une flexibilité qui lui permet de battre des ailes dans toutes les directions, d’avancer et de reculer, et de réaliser des acrobaties inégalées. Les œufs des Colibris sont les plus petits du règne aviaire. Même si l'ovule est de la taille d'un minuscule pois, l’oeuf peut peser jusqu'à 10% du poids de la mère lors de la ponte.


Certains oiseaux sont vénéneux
Le Pitohui est un type d'oiseau répandu, notamment en Nouvelle Guinée. Au moins trois espèces de Pitohui (bicolore, huppé et noir) sont vénéneuses. Les chercheurs croient que les oiseaux ne produisent pas eux-mêmes le poison contenu dans les plumes et la peau; leur régime alimentaire en serait la cause. Le poison, un dérivé de la batrachotoxine, est l'un des plus violents; on le retrouve entre autres chez les coléoptères et les batraciens.

Pitohui. Photo : Markus Lilje

Source de l'article : Zoe Blarowski; Care2

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La plus grande centrale d'énergie solaire du monde grille les oiseaux en plein air
Grégoire Fleurot | 19.08.2014


La plus grande centrale solaire du monde est une construction formidable... sauf pour les oiseaux qui ont la mauvaise idée de la survoler et qui prennent littéralement feu en plein air. Et il y en a beaucoup, rapporte l'agence de presse américaine Associated Press dans un long article consacré au sujet.
   Selon les enquêteurs environnementaux fédéraux qui ont visité la gigantesque centrale solaire d'Ivanpah, au sud-ouest de Las Vegas dans le désert de Mojave en Californie, un oiseau y est victime des reflets des rayons du soleil toutes les deux minutes.
Article intégral :

Certains humains sont d’indécrottables égoïstes qui n’hésitent pas à recourir au pillage et au braconnage pour se procurer des espèces rares en voie d’extinction. C’est lamentable. Qui peut payer 885 pour un perroquet? Les wézos des paradis fiscaux?

La souffrance est la matière première de tout ce que nous consommons.

Un contrebandier inhumain avait placé des perroquets rares dans des bouteilles plastiques

Newsly | La rédaction | 9 mai 2015

Arrêté par la douane indonésienne, un passager avait fourré des cacatoès dans des bouteilles en plastique.

Faut vraiment être malade mental pour faire ça! Répugnant. 

Une vingtaine de cacatoès, une espèce de perroquet menacée d’extinction, ont été secourus par la police après avoir été retrouvés à l’intérieur de plusieurs bouteilles d’eau à destination du commerce illégal. Les contrebandiers avaient entassé les cacatoès à crête jaune dans des bouteilles vides afin qu’ils puissent passer les douanes au port de Tanjung Perak, Aldy Sulaiman.
   Mais la police indonésienne a découvert les pauvres oiseaux, qui peuvent se vendre à près de 885€ chacun sur le marché parallèle, et les a libéré de leur cage de plastique afin qu’ils puissent recevoir des soins médicaux. Le cacatoès à crête jaune a été répertorié comme une espèce gravement menacée d’extinction par l’Union internationale pour la conservation de la nature en 2007.
Article intégral :

Le point de vue de Victor Hugo :  

De quel droit mettez-vous des oiseaux dans des cages?
De quel droit ôtez-vous ces chanteurs aux bocages,
Aux sources, à l'aurore, à la nuée, aux vents?
De quel droit volez-vous la vie à des vivants?
Homme, crois-tu que Dieu, ce père, fasse naître
L'aile pour l'accrocher au clou de ta fenêtre?
Ne peux-tu vivre heureux et content sans cela?
Qu'est-ce qu'ils ont donc fait tous ces innocents-là
Pour être au bagne avec leur nid et leur femelle?
Qui sait comment leur sort à notre sort se mêle?
Qui sait si le verdier qu'on dérobe aux rameaux,
Qui sait si le malheur qu'on fait aux animaux
Et si la servitude inutile des bêtes
Ne se résolvent pas en Nérons sur nos têtes?
Qui sait si le carcan ne sort pas des licous?
Oh! de nos actions qui sait les contre-coups,
Et quels noirs croisements ont au fond du mystère
Tant de choses qu'on fait en riant sur la terre?
Quand vous cadenassez sous un réseau de fer
Tous ces buveurs d'azur faits pour s'enivrer d'air,
Tous ces nageurs charmants de la lumière bleue,
Chardonneret, pinson, moineau franc, hochequeue,
Croyez-vous que le bec sanglant des passereaux
Ne touche pas à l'homme en heurtant ces barreaux?
Prenez garde à la sombre équité. Prenez garde!
/...  
À tous ces enfermés donnez la clef des champs!
Aux champs les rossignols, aux champs les hirondelles!
/...
Respect aux doux passants des airs, des prés, des eaux!
Toute la liberté qu'on prend à des oiseaux
Le destin juste et dur la reprend à des hommes.
Nous avons des tyrans parce que nous en sommes.

La Légende des siècles

5 novembre 2017

Leonard Cohen honoré à Montréal

Quand on s’ennuie de lui, on peut au moins plonger dans le virtuel...  


«Mon père, qui a été lucide jusqu'à la fin, m'a donné des instructions très précises. Il était au lit, je le regardais dans les yeux, et il me décrivait la boîte en pin dans laquelle il voulait être enterré à Montréal et la cérémonie privée qui aurait lieu à Los Angeles avec des amis et la famille. Et il m'a dit que si on voulait organiser un événement public, il fallait que ça se fasse à Montréal. Lui-même a toujours cherché des excuses pour ne pas assister à ce genre d'événement au cours duquel on lui rendait hommage, et je pense qu'il a trouvé la meilleure excuse cette fois. » ~ Adam Cohen
   Les recettes de la soirée seront versées au Conseil des arts du Canada, au Conseil des arts et des lettres du Québec et au Conseil des arts de Montréal. «Ce sont les conseils des arts qui ont aidé mon père à ses débuts», explique Adam.
   Ce spectacle unique s'ajoute à d'autres hommages qui auront lieu la même semaine : l'expo Leonard Cohen – Une brèche en toute chose/A Crack in Everything du Musée d'art contemporain, du 9 novembre au 1er avril, et la projection silencieuse de l'artiste américaine Jenny Holzer qui illuminera le Silo no 5, dans le Vieux-Port, avec des extraits de poèmes, chansons et autres écrits de Leonard Cohen, en français et en anglais, du 7 au 11 novembre.

Tower of Song : écoutez le spectacle hommage à Leonard Cohen sur ICI Musique

Elvis Costello, Lana Del Ray, Philip Glass, Feist, Sting, Patrick Watson, Damien Rice, Cœur de pirate, Ron Sexmith, k.d. lang, Courtney Love… La liste des artistes invités au spectacle Tower of Song : hommage à Leonard Cohen est à l’image du grand poète montréalais : extraordinaire et monumentale. L’événement, dont Montréal se souviendra longtemps, sera présenté au Centre Bell le 6 novembre, puis diffusé à la radio d’ICI Musique le 7 novembre à 20 h (HE).


Sur ICI Radio-Canada Première Plus :

Leonard Cohen, le poète légendaire

Leonard Cohen a marqué des générations d'admirateurs et d'artistes par ses mots, ses mélodies et sa voix. Voici une liste d'écoute incluant quelques morceaux d'archives choisis pour raconter sa vie et son oeuvre, incluant une rare entrevue de lui en français ainsi que des témoignages de son fils et de ses pairs. L'auteur-compositeur-interprète montréalais s'est éteint le 7 novembre 2016.

Photo from Adam Cohen Facebook Page. Originally posted January 11, 2014 at DrHGuy.com, a predecessor of Cohencentric

“We are very large beings wheeling through existence, who aren’t even shaped the way we appear. You catch the lint of another’s being on your wheel. And she does the same, and you get tangled up inextricably. The tangle is like a cocoon, out of which another being emerges. My feeling is that until you have children, until you really get stuck, it’s like dating for the junior prom. I believe that in a certain way, having children is the only activity that connects you to mankind and makes a serious assault on the ego.”
~ Leonard Cohen

Le site le mieux documenté sur Leonard Cohen (à ma connaissance) :

Phil et Leonard, bière et V8 : «À la tienne!»  Photo via http://cohencentric.com

En novembre 2016, les voisins du quartier où résidait Leonard durant ses séjours à Montréal, et les gens qui fréquentaient le café du coin et le Parc du Portugal (aussi appelé Leonard’s Park), ont tous dit à quel point il était simple, chaleureux, amical et respectueux. Aucun «complexe de vedette». Aucun garde du corps dans sa vie ordinaire ni de forteresse autour de ses maisons – rarissime chez les gens aussi célèbres que lui. La grandeur d’un individu est directement proportionnelle à sa simplicité et à son humilité.

Plusieurs personnes se rappelaient de sa relation d’amitié avec Philip Tétrault, un homme atteint de schizophrénie paranoïde. Le documentaire This Beggar’s Description, réalisé pas son frère Pierre, raconte les hauts et les bas de la vie de Phil. Produit par l’Office National du Film du Canada, il a remporté en 2006 le prix C.B.C. Newsworld Award for Best Documentary in the Independent Film and Video Festival.

Vous aimerez peut-être voir ou revoir ce sympathique extrait du documentaire intitulé Picnic in the Park with Leonard Cohen, où les deux amis causent tout bonnement.  L’affection mutuelle et l’humour sont au rendez-vous. Très touchant d’entendre Leonard lire un des poèmes de Phil (aussi flutiste et peintre).

4 novembre 2017

L’art de la «neutralité pédagogique»

Certains états ont mieux réussi que d’autres à séparer la religion de l’état. Cependant, on note une résurgence d’association entre pouvoirs politiques/corporatifs et pouvoir religieux. Les religions offrent aux classes dirigeantes un contrefort au socialisme; le cabinet Trump en est une parfaite démonstration.

En ce moment, je lis avec délectation le manuscrit du roman Le premier homme d’Albert Camus, Éditions Gallimard (1). Il s’agit de l’œuvre à laquelle il travaillait au moment de sa mort. Le manuscrit a été trouvé dans sa sacoche, le 4 janvier 1960; 144 pages tracées au fil de la plume, parfois sans points ni virgules, d’une écriture rapide, difficile à déchiffrer, jamais retravaillée (note de l’éditeur, 1994). 
   Camus étant ce qu’il est, son écriture est «parfaite» même avant retouche – toujours vivante, colorée, poignante. Il était vraiment doué pour éveiller nos sens, on est dans le film... il atteint son but : «ressusciter les personnages dans leur chair et dans leur durée». 

Les éditeurs ont annexé deux lettres à l’ouvrage : une que Camus envoya à son instituteur, Louis Germain, au lendemain du prix Nobel, et la dernière lettre que Louis Germain lui adressa.

J’aimerais attirer l’attention sur les passages que j’ai marqués en gras dans la lettre du professeur. Un exemple de neutralité pédagogique à suivre.

Le «cher petit» de l’instituteur Louis Germain. (Via "The Hindu") 

19 novembre 1957

   Cher Monsieur Germain,

   J’ai laissé s’éteindre un peu le bruit qui m’a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler de tout mon cœur. On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n’ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j’ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. Je ne me fais pas un monde de cette sorte d’honneur. Mais celui-là est du moins une occasion pour vous dire ce que vous avez été, et êtes toujours pour moi, et pour vous assurer que vos efforts, votre travail et le cœur généreux que vous y mettiez sont toujours vivants chez un de vos petits écoliers qui, malgré l’âge, n’a pas cessé d’être votre reconnaissant élève. Je vous embrasse de toutes mes forces.

   Albert Camus

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Alger, ce 30 avril 1959

   Mon cher petit,

   Adressé de ta main, j’ai bien reçu le livre Camus qu’a bien voulu me dédicacer son auteur Monsieur J.-Cl. Brisville.
   Je ne sais t’exprimer la joie que tu m’as faite par ton geste gracieux ni la manière de te remercier. Si c’était possible, je serrerais bien fort le grand garçon que tu es devenu et qui restera toujours pour moi «mon petit Camus».
   Je n’ai pas encore lu cet ouvrage, sinon les premières pages. Qui est Camus? J’ai l’impression que ceux qui essayent de percer ta personnalité n’y arrivent pas tout à fait. Tu as toujours montré une pudeur instinctive à déceler ta nature, tes sentiments. Tu y arrives d’autant mieux que tu es simple, direct. Et bon par-dessus le marché! Ces impressions, tu me les a données en classe. Le pédagogue qui veut faire consciencieusement son métier ne néglige aucune occasion de connaître ses élèves, ses enfants, et il s’en présente sans cesse. Une réponse, un geste, une attitude sont amplement révélateurs. Je crois donc bien connaître le gentil bonhomme que tu étais, et l’enfant, bien souvent, contient en germe l’homme qu’il deviendra. Ton plaisir d’être en classe éclatait de toutes parts. Ton visage manifestait l’optimisme. Et à t’étudier, je n’ai jamais soupçonné la vraie situation de ta famille. Je n’en ai eu qu’un aperçu au moment où ta maman est venue me voir au sujet de ton inscription sur la liste des candidats aux Bourses. D’ailleurs, cela se passait au moment où tu allais me quitter. Mais jusque-là tu me paraissais dans la même situation que tes camarades. Tu avais toujours ce qu’il te fallait. Comme ton frère, tu étais gentiment habillé. Je crois que je ne puis faire un plus bel éloge de ta maman.
   Pour en revenir au livre de monsieur Brisville, il porte une abondante iconographie. Et j’ai eu l’émotion très grande de connaître, par son image, ton pauvre Papa que j’ai toujours considéré comme « mon camarade ». Monsieur Brisville a bien voulu me citer : je vais l’en remercier.
    J’ai lu la liste sans cesse grandissante des ouvrages qui te sont consacrés ou qui parlent de toi. Et c’est une satisfaction très grande pour moi de constater que ta célébrité (c’est l’exacte vérité) ne t’avait pas tourné la tête. Tu es resté Camus : bravo.
   J’ai suivi avec intérêt les péripéties multiples de la pièce que tu as adaptée et aussi montée : Les Possédés. Je t’aime trop pour ne pas te souhaiter la plus grande réussite : celle que tu mérites. Malraux veut, aussi, te donner un théâtre. Je sais que c’est une passion chez toi. Mais... vas-tu arriver à mener à bien et de front toutes ces activités? Je crains pour toi que tu n’abuses de tes forces. Et, permets à ton vieil ami de le remarquer, tu as une gentille épouse et deux enfants qui ont besoin de leur mari et papa. À ce sujet, je vais te raconter ce que nous disait parfois notre directeur d’École normale. Il était très, très dur pour nous, ce qui nous empêchait de voir, de sentir, qu’il nous aimait réellement. «La nature tient un grand livre où elle inscrit minutieusement tous les excès que vous commettez.» J’avoue que ce sage avis m’a souventes fois retenu au moment où j’allais l’oublier. Alors dis, essaye de garder blanche la page qui t’est réservée sur le Grand Livre de la nature.
   Andrée me rappelle que nous t’avons vu et entendu à une émission littéraire de la télévision, émission concernant Les Possédés. C’était émouvant de te voir répondre aux questions posées. Et, malgré moi, je faisais la malicieuse remarque que tu ne doutais pas que, finalement, je te verrai et t’entendrai. Cela a compensé un peu ton absence d’Alger. Nous ne t’avons pas vu depuis pas mal de temps...
   Avant de terminer, je veux te dire le mal que j’éprouve en tant qu’instituteur laïc, devant les projets menaçants ourdis contre notre école. Je crois, durant toute ma carrière, avoir respecté ce qu’il y a de plus sacré dans l’enfant : le droit de chercher la vérité. Je vous ai tous aimés et crois avoir fait tout mon possible pour ne pas manifester mes idées et peser sur votre jeune intelligence. Lorsqu’il est question de Dieu (c’est dans le programme), je disais que certains y croyaient, d’autres non. Et que dans la plénitude de ses droits, chacun faisait ce qu’il voulait. De même, pour le chapitre des religions, je me bornais à indiquer celles qui existaient, auxquelles appartenaient ceux à qui cela plaisait. Pour être vrai, j’ajoutais qu’il y avait des personnes ne pratiquant aucune religion. Je sais bien que cela ne plaît pas à ceux qui voudraient faire des instituteurs des commis voyageurs en religion et, pour être précis, en religion catholique. À l’École normale d’Alger (installée alors au parc de Galland), mon père, comme ses camarades, était obligé d’aller à la messe et de communier chaque dimanche. Un jour, excédé par cette contrainte, il a mis l’hostie «consacrée» dans un livre de messe qu’il a fermé! Le directeur de l’École a été informé de ce fait et n’a pas hésité à exclure mon père de l’école. Voilà ce que veulent les partisans de «l’École libre» (libre... de penser comme eux). Avec la composition de la Chambre des députés actuelle, je crains que le mauvais coup n’aboutisse. Le Canard enchaîné a signalé que, dans un département, une centaine de classes de l’École laïque fonctionnent sous le crucifix accroché au mur. Je vois là un abominable attentat contre la conscience des enfants. Que sera-ce peut-être, dans quelque temps? Ces pensées m’attristent profondément.
   Mon cher petit, j’arrive au bout de ma 4e page : c’est abuser de ton temps et te prie de m’excuser. Ici, tout va bien. Christian, mon beau-fils, va commencer son 27e mois de service demain!
   Sache que, même lorsque je ne t’écris pas, je pense souvent à vous tous.
   Madame Germain et moi vous embrassons tous quatre bien fort. Affectueusement à vous.
                                                  
   Germain Louis

(1) Résumé de l’éditeur

Le premier homme
Collection Cahiers Albert Camus (n° 7), Gallimard
Parution : 13-04-1994

«En somme, je vais parler de ceux que j'aimais», écrit Albert Camus dans une note pour Le premier homme. Le projet de ce roman auquel il travaillait au moment de sa mort était ambitieux. Il avait dit un jour que les écrivains «gardent l'espoir de retrouver les secrets d'un art universel qui, à force d'humilité et de maîtrise, ressusciterait enfin les personnages dans leur chair et dans leur durée».

Albert Camus et Michel Gallimard, tous deux décédés lors du fâcheux accident.

Il avait jeté les bases de ce qui serait le récit de l'enfance de son «premier homme». Cette rédaction initiale a un caractère autobiographique qui aurait sûrement disparu dans la version définitive du roman. Mais c'est justement ce côté autobiographique qui est précieux aujourd'hui.

Après avoir lu ces pages, on voit apparaître les racines de ce qui fera la personnalité de Camus, sa sensibilité, la genèse de sa pensée, les raisons de son engagement. Pourquoi, toute sa vie, il aura voulu parler au nom de ceux à qui la parole est refusée.

2 novembre 2017

Beauté et utilité environnementale

Tandis que les projets gaziers/pétroliers se multiplient, de jeunes chercheurs essaient de trouver des solutions à la pollution galopante.

Car, tel qu’on l’apprenait récemment, à l'échelle planétaire, la pollution tue plus que la malaria, le virus du sida et la tuberculose réunis (rapport 2017 de la Commission du Lancet sur la pollution et la santé). La pollution de l’air, de l’eau et des milieux de travail entraîne 9 millions de décès prématurés par année.
   Le fait de brûler des combustibles est responsable de 85% de la pollution sous forme de poussière en suspension dans l’air et de presque toute la pollution causée par les oxydes de soufre et d’azote. «Le charbon est le combustible fossile le plus sale du monde et sa combustion est une cause importante à la fois de pollution et de changements climatiques

Des saules pour recycler les eaux usées

Un texte de Chantal Srivastava, aux Années lumière
Le dimanche 22 octobre 2017

Prise de vue aérienne par drone d’un champ de saules à Saint-Roch-de-l’Achigan. Au centre de l’image, les zones irriguées par des eaux usées se démarquent du reste de la plantation par la coloration plus foncée du feuillage des saules. Photo : Simon Amiot IRBV/Université de Montréal/Polytechnique de Montréal

Exit les usines de traitement des eaux usées. Désormais, les StaRRE – pour Stations de récupération des ressources de l'eau – volent la vedette. Car quoi qu'on en pense, les eaux usées sont remplies de ressources.

Depuis 2016, à Saint-Roch-de-l’Achigan, dans Lanaudière, les eaux usées irriguent une plantation de saules à croissance rapide dans le cadre du projet PhytovalP, une initiative de l’Institut de recherche en biologie végétale (IRBV) de l’Université de Montréal et de Polytechnique Montréal.

L’azote et le phosphore qui contaminent les eaux usées sont utilisés comme nutriments.

Xavier Lachapelle-Trouillard montre les feuilles d’un saule irrigué avec des eaux usées. Photo : Radio-Canada/Chantal Srivastava

Dans le cadre de sa maîtrise, Xavier Lachapelle-Trouillard a constaté que la méthode est efficace pour les trois principaux contaminants organiques : l’azote, le phosphore et la matière organique.

«On voit vraiment une application économique viable pour les petites municipalités au Québec.» ~ Xavier Lachapelle-Trouillard

Faire d’une pierre deux coups

Selon Xavier Lachapelle-Trouillard, le tiers des municipalités québécoises ont tout intérêt à utiliser cette méthode de traitement des eaux usées qui convient tout à fait aux besoins des villes de 300 à 800 habitants. Au Québec, cette catégorie compte 242 municipalités.

Dans le projet en démonstration à Saint-Roch-de-l’Achigan, les eaux usées sont acheminées vers la plantation de saules à croissance rapide. L’azote, le phosphore et les matières organiques stimulent la croissance des saules. Une portion de l’eau est évacuée dans l’atmosphère par évapotranspiration. Le reste percole dans le sol. Le choix du saule se justifie par le fait que c’est une espèce qui pousse très vite sous nos latitudes et qu'elle n'est pas envahissante.

Il faut certes construire des canalisations pour acheminer les eaux usées et un bassin de rétention pour stocker les eaux usées durant l’hiver. Mais une fois l’été venu, les résultats sont au rendez-vous. Car en décontaminant ainsi les eaux usées, on fait d’une pierre deux coups.

«Cette année on va probablement produire le double de biomasse dans les zones irriguées par les eaux usées.» ~ Xavier Lachapelle-Trouillard

Les troncs des arbres qui ont été irrigués avec les eaux usées sont plus massifs. Les arbres ont davantage de tiges. Ces avantages ne sont pas négligeables, car une fois récoltés, ces saules ont une valeur économique.

On les utilise entre autres pour fabriquer des murs antibruit qu’on installe à proximité des autoroutes.