31 juillet 2014

Une question de valeurs

Être mâle est une question de naissance.
Être homme est une question d’âge.
Être gentleman est une question de choix.

Et ce n’est pas la cravate qui fait le gentleman…

En voyant ce cliché, je me suis demandé ce qui faisait en sorte qu’on se comporte en gentlemen ou gentlewomen. Spontanément, j'ai pensé à « respect », « empathie », « politesse »… Puis, est arrivé « estime ». Ah! une petite lumière s’est allumée.

L’estime

L'estime est un jugement qui manifeste une haute appréciation. Comme l'admiration, elle porte toujours sur une dimension éthique ou un comportement qu'on juge méritoire. On n'estime pas quelqu'un pour sa beauté ou pour son talent. On peut l'estimer par contre pour l'effort et l'application qu'il met à faire fructifier son talent.

Et comme toute évaluation, l'estime repose sur nos propres valeurs.

L'estime ne s'applique pas seulement aux personnes. On peut estimer un cheval pour son courage, un chien pour son dévouement... mais, contrairement à l'admiration, elle peut s'appliquer aussi à soi-même.

L'estime de l'autre

Je puis estimer quelqu'un pour un geste particulier, mais en général l'estime est une appréciation globale. Elle indique que, généralement, cette personne se conduit d'une façon qui respecte mes valeurs fondamentales. Pour estimer quelqu'un, il est donc nécessaire de bien le connaître.

Dans l'estime il n'y a pas l'écart vertical qu'on observe dans l'admiration. En fait, on se considère comme un égal de celui qu'on estime, c'est à dire sur le même niveau que lui quant à la dimension considérée.

L'estime de soi

L'estime de soi est aussi une évaluation globale faite en fonction de nos valeurs. Nous n'en sommes pas souvent conscients, mais nous jugeons continuellement les gestes que nous posons. C'est par l'accumulation de ces jugements que nous trouvons les matériaux dont est constituée notre estime personnelle.

L'estime de soi se construit donc à la longue, à force de poser des gestes qui sont en conformité avec notre système de valeurs. Elle se détériore de la même façon, c'est-à-dire en posant des gestes qui ne sont pas conformes à celui-ci.

À quoi sert l'estime?

L'estime de l'autre

Les relations affectives qui sont solides et nourrissantes reposent sur l'estime mutuelle. On peut estimer quelqu'un sans éprouver de l'affection ou de l'amour pour lui, mais l'amour, lui, n'est pas possible sans estime réelle.

L'estime de soi

L'estime de soi est un des piliers centraux du psychisme parce qu'elle découle d'une multitude de choix qui concrétisent nos valeurs. C'est la "tendance actualisante" qui nous oriente en nous invitant continuellement à tenir compte de nos besoins et de nos aspirations.

Le psychisme grandit et mûrit tout au long de la vie. Il évolue en partie grâce au fait que nous assumons, dans l'action, nos besoins et nos choix. Notre conduite est régie par des dimensions éthiques autant que par des besoins et des désirs. Lorsque nos choix sont fidèles à ce qui nous importe réellement (incluant nos valeurs), ils contribuent à rehausser notre estime personnelle.

L'estime de soi n'est donc jamais stable et définitive. Même dans le cas où elle est bien établie, elle demeure vulnérable devant les gestes non conformes à nos valeurs. Elle est continuellement tributaire de la fidélité à soi-même.

Source : http://www.redpsy.com/infopsy/

30 juillet 2014

Lettres – 3

La lettre implique la distance, l’absence, la projection dans l’imaginaire
… Combien de lettres soigneusement cachetées sont-elles restées dans des secrétaires, entre des piles de draps, dans les sacs à main, avant d’être découvertes deux ou trois générations plus tard délicatement enrubannées mais à jamais illisibles tant l’humidité les a rongées?

Écrit-on à un(e) autre? Pas si sûr…
La lettre peut être le geste d’abandon de soi-même, l’apprentissage de la construction de son identité, la réassurance de soi. Journal intime et correspondance possèdent des frontières poreuses : évasion hors de la prison mentale, physique où les autres vous encagent, méditation sur ses possibilités intellectuelles, rêveries existentielles. (…)

Pas touche à mes lettres
.... On écrit pour être lu[e] mais pas seulement. On le fait aussi pour tromper sa solitude, se réassurer, s’inventer des vies. Quelquefois même on réécrit ses lettres pour enjoliver sa vie et tenter de laisser une image de soi plus conforme aux mœurs en vigueur (…).

~ Laure Adler (Préface, p.9)
Les plus belles lettres de femmes
Laure Adler & Stefan Bollmann
Flammarion; 2012 (Adaptation de l’ouvrage en langue allemande publiée en 2008 : Briefe liebe ich, für Briefe lebe ich

Dans Lettres d’amitié :

Indira Gandhi & Dorothy Norman
Des amitiés profondes (p. 89)

En 1949, lors d’un voyage officiel de son père le Pandit Nehru aux États-Unis, Indira Gandhi fait la connaissance de la photographe américaine Dorothy Norman. Quoique tout semble les séparer, une amitié naît immédiatement entre les deux femmes, portée notamment par leurs préoccupations communes. Elle se poursuit des années durant par voie postale. Dans ses lettres, Indira Gandhi laisse voir une personnalité beaucoup plus complexe et sensible que la femme d’État dictatoriale que l’on connut par les médias.

The Residency
Bangalore, 12 juin 1951

Si quelqu’un me demande à la fin de la semaine ce que j’ai fait, je ne serai pas vraiment en mesure de répondre, mis à part que les tâches de tous les instants paraissent toujours capitales et urgentes. Globalement, c’est une vie frustrante (…) Néanmoins il faut encore que je fasse quelque chose d’autre. Écrire? Mais sur quoi écrirais-je donc? J’ai des idées précises sur tout, mais elles sont toutes jetées en vrac. 
    Peut-être l’écriture y mettrait-elle un certain ordre et libérerait-elle la voie à des pensées futures et au travail. La seule chose que je pourrais faire ou vers laquelle je me sente attirée (mais n’est-ce pas une seule et même chose?) est une sorte de recherche littéraire ou historique. 
   Ce qui m’étonne c’est l’art et la manière dont je peux t’écrire en parlant de moi, je n’ai pas encore jamais pu faire ça avec personne,

Love,
Indira


Woods Hole, Mass.
1er août 1951

Tu dis qu’il te faut faire quelque chose, pour exploiter ta veine créatrice et productive. Mais tu ne pourras pas y arriver si tu continues de réprimer les autres côtés. Et comme tu as tout sous un contrôle si parfait : c’est ce que j’associe à toi quand je pense à toi. Je suis soulagée de savoir que tu te sens libre quand tu parles avec moi, voilà au moins quelque chose qui va sans retenue. Et tout un chacun a le désir de pouvoir être toujours ouvert et honnête. Seule la sincérité et le sentiment de pouvoir être sincère vis-à-vis de quelqu’un d’autre apporte une véritable satisfaction. J’ai souvent pensé combien tu devais être aimée, et comme tu devais épuiser ta pleine capacité d’amour. Pour être sincère et franche sur les sujets les plus extrêmement sensibles. Il y a en toi une telle artiste – dans ta quête des formes, des lignes et des couleurs, dans la façon dont tu t’habilles et te sers des fleurs – dans tout. Et aussi dans l’art et la manière dont tu vois les choses (…) je suis heureuse que tu existes.

Love,
Dorothy

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Superbe témoignage de confiance et d’appréciation mutuelle.

Aujourd’hui sur Internet, la correspondance des usagers est engrangée et «scrutée», entre autres, pour se garer d’éventuelles conspirations… Le service postal est-il plus sécuritaire en matière de confidentialité? Hum, j’en doute. L’espionnage de la correspondance a toujours existé.
   Élisabeth Charlotte d’Orléans, princesse palatine du Rhin à la cour de Louis XIV écrivait : «Ce que l’on se doit de taire dans la vie, on peut en parler dans les lettres.» Cependant, elle utilisait parfois sa langue maternelle pour détromper les services de censure du roi : «Là-dessus, il y aurait beaucoup à dire, mais on ne peut pas le confier à la plume; car toutes les lettres sont lues et scellées à nouveau.» (La princesse palatine à ses proches en Allemagne, p. 65-67)

Rien ne change sauf les outils techniques…

29 juillet 2014

Le rien à l’origine de tout


Contre la stupidité, les dieux eux-mêmes luttent en vain. ~ Friedrich Schiller

J’ignore si vous éprouvez un sentiment d’impuissance devant tous ces marchands de guerres. Moi oui, parfois. Si l’homme ne perturbait pas tout pour arranger les choses à son goût, le monde se porterait sans doute mieux.
       Tantôt, je regardais un écureuil en train de grignoter et je me disais : il ne sait pas que des bombes explosent partout, qu’elles tuent des enfants et tout le vivant, et polluent l’air de la planète; il s’occupe de ses affaires et vit sa vie d’écureuil pour le temps qu’elle durera. Il ne fantasme pas sur des probabilités qui ne se réaliseront jamais. J’en conclue que je devrais l’imiter.

Conduis-toi sur la terre comme un voyageur et comme un étranger que les affaires du monde ne regardent aucunement. ~ G. De Groote

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Le naturel

D’instant en instant, tout sort de rien. Ceci est la vraie vie.

L’idée de naturel fait l’objet d’un grand malentendu. La plupart des gens qui viennent nous voir croient à une certaine liberté, ou naturel, mais leur compréhension est ce que nous appelons jinen ken gedo : le naturel hérétique – c’est juste une sorte de «laisser-aller», de négligé. Voilà le naturel pour la plupart des gens. Mais ce n’est pas le naturel au sens où nous l’entendons. C’est assez difficile à expliquer, mais le naturel est, je pense, une certaine sensation d’indépendance par rapport à tout, ou une certaine activité fondée sur le rien. Quelque chose qui vient du rien est naturel, comme une plante qui sort de la terre. La graine n’a pas idée qu’elle est une plante particulière, mais elle a sa propre forme et elle est parfaitement en harmonie avec le sol, avec ce qui l’entoure. Au fur et à mesure de sa croissance, elle exprime sa nature. Rien n’existe sans forme ni couleur. Tout possède une certaine forme, une certaine couleur, et celles-ci sont en parfaite harmonie avec les autres êtres. Et tout va bien. C’est ce que nous entendons par «le naturel». 
       Pour une plante ou une pierre, être naturel ne pose pas de problème. Mais pour nous cela pose problème, et un gros problème. Être naturel nous demande un certain travail. Quand ce que vous faites vient simplement du rien, vous éprouvez une sensation toute neuve. Par exemple, quand vous avez faim, prendre de la nourriture est naturel. Vous vous sentez naturel. Mais quand vous attendez trop de ce repas, prendre de la nourriture n’est pas naturel. Vous n’éprouvez pas de sensation neuve. Vous ne savez pas l’apprécier. 
       On boit de l’eau quand on a soif. On fait un petit somme parce qu’on a sommeil. Vous n’avez pas à vous forcer à boire de l’eau quand vous n’avez pas soif. En fait, la question n’est pas de s’imposer ou non quelque chose. (…) 
       Si cela vient du rien, tout ce que vous faites est naturel, et c’est la vraie activité. Tout vient de rien, d’instant en instant. 
       Sans le rien, il n’y a pas de naturel – pas de véritable être. Le véritable être vient du rien, d’instant en instant. Le rien est toujours là, et tout surgit de lui. Mais, d’habitude, vous oubliez complètement le rien et vous vous comportez comme si vous possédiez quelque chose. Ce que vous faites est fondé sur une idée possessive, sur une idée concrète, et ce n’est pas naturel. Lorsque vous écoutez une conférence, par exemple, vous ne devriez avoir aucune idée personnelle. Vous ne devriez pas avoir votre propre idée quand vous écoutez quelqu’un. Oubliez ce que vous avez dans la tête et écoutez simplement ce qui est dit. Ne rien avoir dans votre esprit, c’est le naturel. Vous comprendrez alors ce qui est dit. Lorsque vous agissez, vous devriez être entièrement engagé dans votre action. Vous devriez vous y consacrer entièrement. Alors, vous n’avez rien. Ainsi, si la vraie vacuité n’est pas dans votre activité, celle-ci n’est pas naturelle. (…) 
       Quoi que vous fassiez, cette attitude est nécessaire. Nyu nan shin signifie «esprit doux, souple», esprit égal, naturel. Quand vous avez cet état d’esprit, vous avez la joie de la vie. Quand vous le perdez, vous perdez tout. Vous n’avez rien. Même si vous pensez avoir quelque chose, vous n’avez rien. Mais quand tout ce que vous faites vient du rien, alors vous avez tout. C’est ce que nous entendons par le naturel.

Shunryu Suzuki
Esprit zen, esprit neuf
Éditions du Seuil; Points, Sagesses, 1977

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Je me sens toujours heureux, vous savez pourquoi? Parce que je n’attends rien de personne. Les attentes font toujours mal. ~ W. Shakespeare

L’homme heureux est celui qui, acceptant d’être malheureux, ne l’est plus. 
~ J. Lemaître
 
La clef du bonheur :
trouvez des ami(e)s qui ont la même déficience mentale que vous…

28 juillet 2014

Créativité et labeur selon Cohen


Panier

Tu devrais t’en aller
de place en place
recouvrer les poèmes
écrits pour toi,
et que tu peux signer de ton nom.
Ne discute de ces choses
avec personne.
Recouvre. Recouvre.
Quand le panier sera plein
quelqu’un paraîtra
à qui tu pourras le présenter.
Elle va étendre sa grande jupe
et elle va s’asseoir
sur une pierre noire
et ton panier va rebondir
comme un fétu dans le soleil
sur l’immense paysage
de son giron.

~ Leonard Cohen

Traduction : Michel Garneau
Livre du constant désir
Éditions de l’Hexagone, 2007; p. 59 

Dans une interview accordée en 1992, Leonard Cohen révélait sa façon de concevoir l’inspiration et le travail qui en découle : «il ne faut pas abandonner avant de savoir ce que vous abandonnez». 

Un formidable témoignage sur sa vocation, son processus créatif et ses motivations profondes qui ont toujours prévalu sur la reconnaissance et le mercantilisme. Ce qui ne l’a pas empêché de réussir et d'obtenir une fabuleuse quantité de prix!  

2011 Prince of Asturias Award
http://leonardcohenhallsoffame.blogspot.ca/

La chanson 

«Il y aura toujours quelqu'un pour donner un sens à une chanson. Les gens se courtisent, les gens trouvent leurs conjoints, les gens font des bébés, les gens lavent leur vaisselle, les gens passent à travers leur journée avec des chansons que nous pouvons juger insignifiantes. Mais pour d'autres, elles ont une signification. Il y aura toujours quelqu'un pour affirmer l'importance d’une chanson qui l’a incité à prendre une femme dans ses bras ou l’a aidé à passer la nuit. Voilà ce qui ennoblie la chanson. Les chansons n’ennoblissent pas l’activité humaine. L’activité humaine ennoblie la chanson.»

Inspiration et dur labeur 

«J'écris tout le temps. Et quand les chansons commencent à se combiner, je ne fais rien d’autre qu’écrire. J'aimerais bien être de ceux qui écrivent des chansons rapidement. Mais ce n’est pas pour moi. Donc, ça me prend beaucoup de temps pour découvrir ce que sera cette chanson. Alors, je travaille presque tout le temps. [...]
       Pour trouver une chanson que je peux chanter, je dois y mettre toute mon attention, dépasser mon ennui intérieur et mon indifférence vis-à-vis de mes propres opinions, et traverser ces obstacles; la chanson doit me parler, avoir une certaine importance. Découvrir cette chanson qui peut m’intéresser nécessite de nombreuses versions et beaucoup de déblayage...
       Ma façon de penser est bureaucratique et pareille à un embouteillage. Mon état d'esprit ordinaire ressemble à la salle d’attente d’une urgence. … Alors, pour pénétrer cette broussaille et le débat inutile qui occupe presque toute mon attention, je dois trouver quelque chose qui parle vraiment de mes intérêts profonds. Autrement, je me perds dans un sens ou un autre. Alors, trouver cette chanson qui a du sens, exige beaucoup de versions, beaucoup de travail et beaucoup de sueur.
       Mais pourquoi mon travail ne devrait-il pas être ardu? Presque tout le monde travaille dur. On se laisse distraire par cette notion qu'il existe une chose comme l’inspiration qui vient rapidement et facilement. Et certaines personnes sont dotées de cette aptitude. Pas moi. Je dois donc travailler aussi dur que n’importe quel ouvrier pour fournir ma charge utile.»

«Liberté et restriction sont des termes luxueux pour celui qui est enfermé dans le donjon de la tour à chansons. Ces sont simplement des ... idées. Je n’éprouve pas de sentiments de restriction ou de liberté. J'ai simplement le sens du travail. J'ai le sens du travail ardu.»

Travailler dur peut-il être agréable?

«Il y a un certain réconfort. Le mental physique est musclulaire. Cela vous donne une certaine allure quand vous marchez dans le sombre paysage de vos pensées. Vous avez un certain type de tonalité dans votre activité. Mais la plupart du temps, ça n'aide pas. Ce qui compte c’est le travail ardu. Je pense que le chômage est le plus grand malheur de l'homme. Même les personnes qui ont un emploi sont en chômage. En fait, la plupart des gens qui ont un emploi sont en chômage. Je peux dire avec plaisir et gratitude que je suis un employé à plein temps. Peut-être que tout travail ardu signifie plein-emploi.»

D’où viennent les bonnes idées?

«Si je savais d’où viennent les bonnes chansons, j'irais là plus souvent. C'est un état mystérieux. C'est un peu comme la vie d'une religieuse catholique. Vous êtes marié à un mystère.»

Le processus créatif

«Avant d’abandonner, nous devons avoir investi tout ce que nous avions pour que l'image complète se révèle d’elle-même et justifie l'abandon, ce qui s'applique également à tout, du travail à l'amour.
       Avant de rejeter un verset, je dois l'écrire ... Je ne peux pas jeter un verset avant qu'il ne soit écrit parce que c'est l'écriture du verset qui produit un quelconque délice ou un intérêt, ou des facettes qui vont accrocher la lumière. La taille d’une pierre précieuse est incomplète tant qu’on ne la voit pas briller.»

Après un demi-siècle : le travail, un impératif existentiel

«Il y a d’abord l’impératif économique. Je n'ai jamais gagné assez d'argent pour me dire : ‘Oh, je pense que maintenant je vais vivre sur un yacht et faire de la plongée sous-marine’. Je n'ai jamais eu les fonds nécessaires pour prendre des décisions radicales par rapport à ce que pourrais faire dans la vie.
       Ensuite, j'ai été formé à ce qui deviendrait plus tard Montreal School of Poetry. Avant les prix, avant les subventions, avant même que les filles s’intéressent à ce que je faisais. Nous nous rencontrions, un groupe vaguement définissable de personnes. Il n'y avait pas de récompenses, comme je l'ai dit, aucune récompense autre que le travail lui-même. Nous lisions nos poèmes. Nous étions passionnément impliqués dans la poésie et notre vie tournait autour de cette occupation.
       Nous avions comme modèles des poètes qui avaient travaillé toute leur vie. Nous ne pensions pas à envahir le marché, ou qu’il fallait faire un hit et le sortir. Ce genre de sensibilité n’a pris racine dans mon esprit que récemment... J'ai donc toujours eu le sentiment d'être là-dedans pour y rester; si vous êtes en santé, et si vous êtes assez chanceux pour avoir la longévité qui vous permettra de continuer. Je n'ai jamais eu l’impression qu’il y aurait une fin. Qu'il y aurait une retraite ou qu'il y aurait un jackpot.»

Ces citations sont tirées d’une compilation d’entretiens avec des chanteurs-compositeurs publiée par Paul Zollo : Songwriters on Songwriting.

Article complet : http://www.brainpickings.org/

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Citation du jour :

Rares sont ceux qui vivent leur vie si intégralement que la mort ne représente aucune menace. La plupart des gens combattent la mort comme ils ont combattu la vie.
~ S. Levine

26 juillet 2014

Compagnons indéfectibles


Votre chien : il est votre ami, votre partenaire, votre défenseur. Vous êtes sa vie, son amour, son leader. Il sera à vos côtés, fiable et honnête, jusqu’à son dernier battement de cœur. Vous lui devez d’être à la hauteur d’une telle dévotion.
(Auteur inconnu)


Il n’y a pas de meilleur psychiatre qu’un chiot qui vous lèche le visage.
~ Ben Williams


Nos histoires sont plus truffées d’exemples de fidélité de la part des chiens que des amis.
~ Alexander Pope


Aucun homme ne peut être condamné parce qu’il possède un chien. Tant qu’il a un chien, il a un ami; et plus il est pauvre, plus ce sera le meilleur ami qu’il pourra avoir.
~ Will Rogers

Doux souvenirs

Tableau : Louis Aston Knight, fils du peintre américain Daniel Ridgway Knight.

Bien souvent je revois…
Théodore de Banville (1823-1891)

Bien souvent je revois sous mes paupières closes,
La nuit, mon vieux Moulins bâti de briques roses,
Les cours tout embaumés par la fleur du tilleul,
Ce vieux pont de granit bâti par mon aïeul,
Nos fontaines, les champs, les bois, les chères tombes,
Le ciel de mon enfance où volent des colombes,
Les larges tapis d’herbe où l’on m’a promené
Tout petit, la maison riante où je suis né
Et les chemins touffus, creusés comme des gorges,
Qui mènent si gaiement vers ma belle Font-Georges,
À qui mes souvenirs les plus doux sont liés.
Et son sorbier, son haut salon de peupliers,
Sa source au flot si froid par la mousse embellie
Où je m’en allais boire avec ma soeur Zélie,
Je les revois; je vois les bons vieux vignerons
Et les abeilles d’or qui volaient sur nos fronts,
Le verger plein d’oiseaux, de chansons, de murmures,
Les pêchers de la vigne avec leurs pêches mûres,
Et j’entends près de nous monter sur le coteau
Les joyeux aboiements de mon chien Calisto!

23 juillet 2014

Quelques minutes de pure beauté

Cliché tiré d'un timelapse fabuleux (perdu le lien et le nom de l'auteur, zut)
Note 01.08.14 - j'ai retrouvé, c'est à voir :
http://vimeo.com/94966580
YIKÁÍSDÁHÁ - Navajo for Milky Way or "That Which Awaits the Dawn"
By Gavin Heffernan (
SunchaserPictures.com) and Harun Mehmedinović (Bloodhoney.com)
NPR: "Look Up in the Sky and Live Big"
npr.org/blogs/13.7/2014/05/20/313952882/look-up-in-the-sky-and-live-big
For Stills and Behind the Scenes shots of YIKÁÍSDÁHÁ visit FLICKR page here:
flickr.com/photos/50014474@N05/sets/72157644225383707/

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Le malheur des hommes est de se demander quoi tirer de l’existence, au lieu de donner quelque chose à la vie. ~ L. Pauwels

Music washes away from the soul the dust of everyday life. ~ Red Auerbach

Music is the vernacular of the soul. It's communication. It's hours and hours being put into a work of art... If done well, it lasts in our hearts forever. That's art. Speaking with your heart to the hearts of others. ~ Dan Romano

On se demande souvent si la vie a un sens… et puis, on rencontre des êtres qui donnent un sens à leur vie. (Auteur inconnu)  

Schubert - Arpeggione - Anne Gastinel (violoncelle) et Claire Désert (piano)

22 juillet 2014

Les grognons

(Photo via Essentiellement Natur’Elle)

S’il est vrai que la mauvaise humeur n’est pas un trait de caractère inné, il est facile de la cultiver. Il suffit de rester à l’affût des mauvaises nouvelles – locales et internationales. Si nous les évitons, elles viennent à nous par toutes sortes d’intermédiaires. La mauvaise humeur est-elle contagieuse? Dans une certaine mesure… parfois on se sent complètement groggy après certaines rencontres. Peut-être aussi y a-t-il des gens qui aiment la mauvaise humeur, comme d’autres aiment la discorde, la violence, etc. Sais pas.

Les fées et les dragons
Marie-Noëlle Agniau

(Extrait, p. 91-93)

Je ne sais pas vous mais moi, la mauvaise humeur, ça m’agace. Pas un jour sans qu’on rencontre quelqu’un de mauvaise humeur : à la maison, au travail, en voiture, à la radio, à la télévision, dans les journaux, et même en vacances! Vous me direz alors, question de tempérament, de caractère. Il y a ceux qui sont toujours de bonne humeur et ceux qui sont toujours de mauvaise humeur. Sorte de fatalité inscrite dans le sujet. Mais par qui? Dieu, la nature, le hasard ou la nécessité, un mauvais génie, un gène peut-être bien? Non, tout cela n’est pas sérieux. Quelle que soit l’hypothèse retenue, chacune fait de la mauvaise humeur une substance imperméable au changement, au passage, comme si elle était toujours déjà là parce que reçue d’en haut ou d’en bas, comme toujours subie. Ma mauvaise humeur : il faudra faire avec. C’est comme ça et pas autrement etc. Elle serait une des manières de vivre son rapport aux autres et au monde. Manière inévitable. Humeur irrésistible.
       Devant elle, nous n’avons qu’à céder. L’humeur est donc un puissant courant. À tel point que pendant longtemps, l’équilibre des «humeurs» définissait la bonne ou la mauvaise santé du corps. Qu’est devenue l’humeur une fois que la science moderne a découvert l’anatomie? Elle a été reléguée dans un corps qui produit des restes, des résidus, dans un corps qui compense, bref, dans des manifestations sensibles d’une machine très sophistiquée. Et la mauvaise humeur, elle-même un reste, un résidu physiologique? L’ultime produit du corps? Seul ce présupposé permet d’expliquer la dimension passive de la mauvaise humeur. Elle serait la dernière passion du corps. (…)
       C’est donc cela : interroger la mauvaise humeur, c’est comme interroger un certain rapport entre le corps et l’esprit. … Le sujet décide ou non de son rapport au monde, à autrui et à lui-même. Ces trois rapport son un seul. Ainsi la mauvaise humeur change de camp. Elle n’est pas subie. Au contraire, elle est voulue, voulue par un sujet qui se dispose à envisager sur ce mode sa manière d’exister. … Enfin, c’est une hypothèse. Son gain est éthique : elle redonne à l’homme, à la personne humaine, un pouvoir et une volonté d’agir sur son existence au sein du monde. La mauvaise humeur coïncide avec cet esprit de lourdeur qui terrorise l’ambiance, sape toute possibilité d’humour, c’est-à-dire de recul. Oui, c’est cela : le pire dans la mauvaise humeur, c’est son manque d’humour. Elle ne sait pas rire d’elle-même ni de ses emportements disproportionnés. … Il y a de la tyrannie en elle. Ou du petit juge. … Elle désenchante le monde, plutôt dragon, crocodile que fée. Attitude générale qui n’est pas loin de constituer, en effet, une forme d’impolitesse. (…) La vie humaine nous invite à fuir cette mauvaise pente de l’humeur pour lui préférer, si nous voulons être heureux et nous savons combien cela est difficile, le ressort actif de ce qui sait en nous enchanter le quotidien. Gai savoir, en somme. Ou principe d’un fidèle compagnonnage.
       Chemin faisant, on comprend mieux l’idée d’un art de vivre : faite d’une éthique de la bonne humeur et de la dette à l’ami.

MÉDITATIONS DU TEMPS PRÉSENTS
La philosophie à l’épreuve du quotidien
L’Harmattan, coll. Ouverture philosophique, 2008

Marie-Noëlle Agniau est écrivaine, poète et philosophe. Autres titres : Les Moustiques dorment aussi; Faire usage du sablier; Il pleut sur les verrières; Mon amour est lampe d’ogre; Délogée du monde, L’arbre à paroles; La philosophie à l’épreuve du quotidien, 2005; Le tumulte et la faim; journal d’une lectrice remise au monde, 2011; Dans un corps zéro contour, 2012

21 juillet 2014

Bruit, téléphone, nourriture

(Mondialisation, artiste inconnu)

Que dirait aujourd'hui R. de Gourmont de nos systèmes de communication si intrusifs et omniprésents et de la faim dans le monde? Aille-oille!

Textes des Petits crayons
Auteur : Rémy de Gourmont (1858-1915)

Source : http://www.remydegourmont.org/index2.php

Le bruit

Dans l'état de civilisation, tous les organes des sens sont plus ou moins protégés contre les contacts brutaux du monde extérieur, tous, un seul excepté, – l'oreille.

On n'a pas le droit de vous toucher sans votre permission, et fussiez-vous la femme de Sganarelle, on vous empêcherait d'être battue.

On pense à vos yeux. C'est à leur intention que les personnes délicates protègent les paysages et veillent, sans y réussir bien souvent, que les monuments s'élèvent selon d'agréables lignes. Mais l'intention y est.

On a soin des papilles de votre bouche et l'on veille à ce que leur inconscience ne subisse pas de trop frauduleux contacts.

Votre nez est l'objet de constantes sollicitudes, que la chaleur contrarie souvent, mais les rues sont à peu près nettoyées à votre intention, et purgées de leurs odeurs. Seule, l'oreille a été oubliée.

Contre elle, on dirait que tout est permis. Contre elle on a mis en liberté tous les bruits, qui comme autant de furieux dogues, montent à l'assaut de sa tranquillité. Les pianos, les autos, les gramophones et les cris humains emplissent les rues et les maisons, où le point d'orgue est donné par des tuyauteries qui ont pour but d'amener l'eau, mais surtout de faire de la musique. Il n'y a plus de silence. Les hommes, qui le détestent, ont fini par le tuer. Pour inexplicable que soit cette haine, elle est. Même quand il est seul, l'homme fait du bruit. Il chante. C'est une hantise. Mais peut-être que s'il demeurait silencieux, il s'entendrait penser et qu'il aurait honte. Si parfois on a un instant de répit, le soir, ce n'est qu'un instant. Bientôt monte une voix en dents de scie avec laquelle vient alterner un délicieux solo de phonographe qui imite la foire de Neuilly. Sacrum silentium, disait le vieux moine de jadis, ô silence sacré, où es-tu? Et dire que si tout le monde était comme moi, on entendrait voler les mouches!

Le téléphone

La plupart des Français pensent obscurément du téléphone ce que M. Degas en a dit tout haut. Ils se résignent mal à répondre, comme des domestiques, à une sonnerie. Aussi n'est-ce guère chez nous qu'un instrument d'affaires. Encore connaît-on beaucoup de commerçants qui, mettant en balance les commodités et les ennuis du téléphone, s'en privent, même à leur détriment. Cela fait certainement pitié aux Américains, mais le Français, qui goûte le plaisir de gagner de l'argent, goûte aussi d'autres plaisirs, parmi lesquels celui d'avoir la paix chez soi et de n'y être pas dérangé par le premier venu. Cela explique que la France occupe le dernier rang parmi les peuples qui téléphonent.

L'Angleterre n'est pas beaucoup plus empressée. Sans doute, il y a d'autres causes, comme la mauvaise organisation de ce service, mais il y a une cause psychologique qui me paraît être celle que j'ai indiquée. Parler à distance est merveilleux, mais c'est une de ces merveilles dont on se passe fort bien et de celles qui n'ont pas beaucoup amélioré le bonheur des hommes. Il a même de sérieux inconvénients. S'il habitue les gens à prendre des décisions rapides, il les habitue aussi aux décisions inconsidérées ainsi qu'au bavardage oiseux. Le téléphone, qui fait gagner du temps, en fait peut-être perdre plus encore, sans qu'on s'en aperçoive, en même temps qu'il incite à une activité un peu fébrile. Que de choses se disent par le fil auxquelles on ne pense plus dix minutes plus tard et qu'on n'aurait jamais écrites! Certes, il est des gens, pas beaucoup, peut-être pas deux, avec lesquels j'aimerais bien parler quelques minutes tous les matins, mais de quel prix faudrait-il payer ce plaisir! Que d'autres voix indifférentes ne faudrait-il pas écouter! Je n'ai nullement l'âme téléphonique.

La nourriture

Il faut avoir senti la faim, ne fût-ce que par ordonnance, pour comprendre l'importance de la nourriture dans l'humanité et ce qu'elle peut comporter de tragique. Comme on voit alors que de toutes les questions, une seule importe vraiment, la question physiologique. On ne s'en rend pas bien compte dans le courant de la vie organisée, mais il suffit d'un accident qui la détraque un peu pour que nous nous sentions aussitôt des êtres primitifs, que passionne une seule chose, la nourriture. Elle prend vraiment une importance eucharistique. Le pain, auquel nous ne pouvons toucher, nous semble vraiment renfermer la vie. Il contient toute la nature. Nous lui sourions comme à une bénédiction, et il semble que par lui, nous pourrions communier avec le monde fini et avec le monde infini. Et c'est la vérité même, le pain étant pris pour symbole. L'homme qui a faim acquiert plus de choses en mangeant qu'il n'en pourrait acquérir en lisant tous les livres qui ne contiennent jamais que les divagations des hommes rassasiés. Préoccupation vulgaire, disent les marchands de spiritualité, dans lesquels se tasse un bon repas. Préoccupation très haute, doit répondre le philosophe, parce que sans celle-là, toutes les autres seraient vaines. Il ne semble pourtant pas que les États, qui s'occupent tant de l'esprit et auxquels cela réussit généralement si mal, aient regardé avec beaucoup de soin cette question de la nourriture matérielle. C'est au delà qu'ils portent leur souci, sans se rendre bien compte que c'est pourtant l'étape nécessaire. Or, la plupart des gens ne mangent pas, ou mangent si mal et si peu qu'ils ne peuvent former un terrain solide sur lequel pousse la plante spirituelle. Celui qui ne mange pas n'a pas d'âme saine. Elle végète, elle est desséchée, elle se fane. Les malheureux l'arrosent avec de l'alcool.

Pensée du jour :
L’amour est pour celui qui a mangé et non pour celui qui a faim. ~ Euripide

19 juillet 2014

Sans pudeur


Il est très difficile de soutenir le regard fixe d'un tout-petit – c'est comme si Dieu était en face de vous et vous dévisageait sans pudeur, en prenant tout son temps, un peu étonné de vous voir là. ~ Christian Bobin (Tout le monde est occupé, 1999)

Je trouve que c’est pareil avec les animaux : ils nous scrutent et lisent nos sentiments et nos intentions. Tout comme les enfants en bas-âge avant qu’on leur enseigne la politesse : «on ne dévisage pas les gens comme ça!»


"Dogs are better than human beings because they know but do not tell."
[Les chiens sont meilleurs que les humains parce qu’ils savent mais se taisent.]

~ Emily Dickinson

"I've seen a look in dogs' eyes, a quickly vanishing look of amazed contempt, and I am convinced that basically dogs think humans are nuts."
[J’ai vu un regard dans les yeux des chiens, un regard fugitif de mépris stupéfait, et je suis convaincu qu’au fond les chiens pensent que nous sommes des cinglés.]

~ John Steinbeck

17 juillet 2014

Archivage


 
La schizophrénie

L’âne de Buridan mourut faute d’avoir pu choisir entre le seau d’eau et la botte de foin. Faut-il avancer ou reculer? Aller par ici ou par là? Dire oui ou non? Dans un tel état, quelle que soit la décision finale, nous nous demanderons toujours s’il n’aurait pas mieux valu opter pour l’inverse.
      La seule façon de mettre fin à ce dilemme est de choisir ni l’un ni l’autre et d’abandonner les deux simultanément. Vous n’en sortirez jamais en dressant la liste des arguments pour ou contre et certainement pas en réfléchissant au problème. Trouvez d’abord votre cœur puis écoutez ce qu’il vous dictera.

L’homme est intérieurement divisé. La schizophrénie est son état ordinaire, du moins actuellement. Ce n’était peut-être pas le cas dans le monde primitif, mais des siècles de conditionnements, de civilisations, de cultures et de religions moralisantes ont désintégré l’homme et l’ont rendu multipsychique, conflictuel, incohérent, une déchirure contre-nature. Mais cachée au fond de l’être, l’unité survit, l’âme étant une, centrée. Les conditionnements morcellent et détruisent tout au plus la périphérie. Son essence n’étant pas altérée, l’homme parvient à survivre, mais sa vie est devenue un enfer.
       Tous les efforts du zen tendent à éliminer cette schizophrénie, à mettre fin à cette personnalité fragmentée, à libérer l’homme de son puzzle cérébral, à l’intégrer, l’unifier, le cristalliser.
       Tel que vous êtes pour le moment, on ne peut pas dire que vous existez. Vous n’avez pas de centre. Vous êtes une foule, une place publique. Dès que vous dites « oui », le « non » accourt. Dans de telles circonstances, le bonheur est exclu. La souffrance est la conséquence de votre désintégration intérieure.

La seule raison d’être de la souffrance est de secouer votre sommeil et d’éveiller votre intelligence consciente.
       Parler ou se taire, bouger ou rester immobile, l’essence est à l’aise. L’essence, le cœur conscient, est à l’aise. Voilà le mot-clé. Faites ce que vous voulez, mais dans l’intime profondeur de votre être, restez calme, détendu, centré.

Tarot Zen
Éditions du Gange

15 juillet 2014

Test de sollicitude

J'ai fait ce film avec l’intention de célébrer la sollicitude des gens, après avoir regardé une vidéo tournée dans un pays européen où tout le monde offrait sa veste à Johannes parce qu’il faisait froid. Je ne m'attendais pas à filmer un tel manque d'empathie. (L'ado quêtait de l'argent "juste assez" pour offrir un repas à sa soeur.)
       Nous avons filmé toute la journée et récolté seulement 2,10 $; et l’argent leur a été entièrement retourné. Le problème, c’est que les gens évitaient tous de regarder et fermaient les yeux pour continuer de vaquer à leurs affaires. Était-ce trop demander que de s’arrêter deux minutes pour lui demander ce qui n'allait pas? Où était sa soeur? Rien. Un des nôtres, et nous ne faisons rien. Et c'était vraiment brise-coeur.
       Nous avons tout ce dont nous avons besoin, nous le prenons pour acquis, et nous avons la possibilité d’aider. Si nous n'aidons même pas les nôtres, aiderons-nous les enfants d'autres pays qui sont en train de mourir et n'ont aucun secours? Où est l'amour? L'ado demande après la journée de tournage : «Qu'est-il arrivé à notre monde?»
       Et puis, par hasard, en quittant les lieux, un sans-abri pleure. La police lui a enlevé son chien parce qu'il n'a pas pu payer l'enregistrement. Le vidéaste s'en est occupé. (FousyTUBE)

À l’origine de toute action, il y a une pensée.
~ R. W. Emerson



Donnez au monde ce que vous avez de mieux

Les gens sont illogiques, déraisonnables et centrés sur eux;
Aimez-les quand même.

Si vous faites le bien, les gens vont accuseront d’être égoïstes et d’avoir des arrière-pensées;
Faites le bien quand même.

Si vous réussissez, vous gagnerez de faux amis et de vrais ennemis;
Réussissez quand même.

Le bien que vous faites aujourd'hui sera oublié demain;
Faites le bien quand même.

L'honnêteté et la franchise vous rendent vulnérable;
Soyez honnête et franc quand même.

Donnez au monde ce que vous avez de mieux à offrir et vous risquez un sacré coup dans les dents;
Donnez au monde le meilleur de vous-même de toute façon.

~ Ken Keyes
 

14 juillet 2014

Owl my hand

Photo : Petit-duc à face blanche (Northern white-faced owl)
Via : http://oiseaux-birds.com/page-liste-esp-ordre-famille.html
Liste et description des oiseaux par espèces, et superbe galerie de photos. À visiter si vous cherchez un oiseau en particulier, vous le trouverez.  

Avez-vous déjà vu des serres d’oiseaux de proie? Sans gant, l’illustrateur (Satsuma) aurait normalement la main ensanglantée. Alors, peut-être que les pointes ont été taillées/limées comme on fait aux chats d’intérieur – à 0,52 min on voit mieux les serres. Sinon l’oiseau a été drôlement bien entrainé. En tout cas, c’est amusant de le voir s’ajuster au mouvement de la main et garder son équilibre. Je trouve que ces oiseaux-là ont des faces vraiment craquantes… j'adore.  

(Vidéo via Colossal)

13 juillet 2014

Les p’tits bonheurs

Hum… titillant ce proverbe : «les gens heureux ne sont jamais méchants».

Les gens doivent être plutôt malheureux car la méchanceté est omniprésente, notamment dans les réseaux sociaux. Mais pourquoi est-on si malheureux, entre autres dans les pays riches, quand on peut avoir presque tout ce qu’on désire?

 Toutes les illustrations : lastlemon.com*

Mais qu’est-ce qui cloche?

«Même si la psychiatrie et la médecine sont encore des spécialisations séparées, on ne peut définir ou traiter une maladie en considérant qu’elle est seulement physique ou seulement mentale. Chaque maladie fait partie d’un syndrome plus étendu qui inclut les dimensions physique, sociale, environnementale, psychologique et spirituelle de l’individu; ainsi la réduction du stress dans un domaine contribue à améliorer la santé globale.  
       Dans son tableau d’évaluation des événements stressants (échelle de 100 points), Thomas H. Holmes évalue la mort d’un conjoint à 100, le divorce à 73, le mariage à 50, la réconciliation avec un conjoint et la retraire à 45. Les événements positifs autant que les événements négatifs contribuent au stress total. Ses recherches montraient que le degré de corrélation entre le stress et la maladie était élevé uniquement dans les cas où les gens n’avaient pas conscience du rapport possible entre les changements et leur état de santé. Comprendre le lien et le reconnaître en conscience inversaient la corrélation. Holmes publia une liste de mesures préventives pour neutraliser l’impact négatif des changements, par exemple : apprendre à percevoir les événements générateurs de changement, à comprendre leur impact et à réfléchir à des moyens de mieux s’adapter.» (James Fadiman, Oser vivre libre)

Les gros bonheurs comme les gros malheurs se chevauchent tout au long de la vie. Certains changements de vie dépendent de nous, d’autres non. Mais certaines personnes ont l’impression de ne pas vivre si elles n’éprouvent pas de grosses émotions. Donc, elles s’agitent, en provoquent, et vivent dans un état permanent d’émotivité irrationnelle, voire d’incontinence affective.
       «L’esprit a sur le corps des effets continus et complexes. À regarder un film d’horreur, notre organisme réagit aussi violemment que s’il était attaqué, tandis que visionner des images érotiques fait réagir notre sexualité. L’impact du corps sur l’esprit est tout aussi puissant. La conversation la plus captivante perd son intérêt dès que nous souffrons de migraine. Lorsque nous sommes préoccupés par une douleur physique, notre bien-être psychologique se détériore.» (James Fadiman)

Conclusion : Les grosses émotions ne sont pas synonymes de bonheur. Qui plus est, les prétendus grands bonheurs ne durent pas plus longtemps que les petits. Et, si, par bonheur, nous devions être heureux avec plus de constance, ce serait sans doute en additionnant les minuscules joies quotidiennes. Si d’instant en instant l’on trouve une petite raison d’être heureux, impossible d’être méchant, en effet. Et, en plus, si nous tâchons d’éviter de nous prendre trop au sérieux, de nous apitoyer sur notre sort, et si  nous réduisons notre appétit insatiable des choses matérielles, nous devrions nous en tirer à bon compte.


* Je crois que Lisa Swerling et Ralph Lazar, créateurs du site Last Lemon, ont très bien compris l’astuce.
       Amusez-vous, souriez, riez, et si le cœur vous en dit contribuez à «Happiness is» – un jour vous verrez peut-être votre suggestion illustrée :  
http://www.pinterest.com/lastlemon/the-happy-page/

Ils doivent faire un malheur sur le Net – au sens de remporter un énorme succès, bien sûr! Un parcours inspirant :
http://lastlemon.com/company/company/

Citaquote du jour :

J’ai connu le bonheur, mais ce n’est pas ce qui m’a rendu heureux.
~ Jules Renard


La nature a fait aux hommes des plaisirs simples, aisés, tranquilles, et leur imagination en a fait qui sont embarrassants, incertains, difficiles à acquérir.
~ Bernard Le Bovier de Fontanelle


Trop de gens dépensent de l’argent qu’ils n’ont pas encore gagné, pour acheter des choses qu’ils ne désirent pas afin d’impressionner des gens qu’ils n’aiment pas.
~ Will Rogers


11 juillet 2014

Sans titre...


Photo : Lessy Sebastian (via Lilypad Koi Pond pinterest)

Fréquent sur Internet : souvent ce qu’on trouve est plus important que ce qu’on cherchait.

De la connaissance de soi

Un homme dit :
Parle-nous de la Connaissance de soi.

Il répondit :
Vos coeurs connaissent en silence les secrets des jours et des nuits.
Mais vos oreilles se languissent d'entendre la voix de la connaissance en vos coeurs.
Vous voudriez savoir avec des mots ce que vous avez toujours su en pensée.
Vous voudriez toucher du doigt le corps nu de vos rêves.

Et il est bon qu'il en soit ainsi.
La source secrète de votre âme doit jaillir et couler en chuchotant vers la mer,
Et le trésor de vos abysses infinis se révéler à vos yeux.
Mais qu'il n'y ait point de balance pour peser votre trésor inconnu,
Et ne sondez pas les profondeurs de votre connaissance avec tige ou jauge,
Car le soi est une mer sans limites ni mesures.

Ne dites pas : «J'ai trouvé la vérité», mais plutôt : «J'ai trouvé une vérité».
Ne dites pas : «J'ai trouvé le chemin de l'âme». Dites plutôt : «J'ai rencontré l'âme marchant sur mon chemin».
Car l'âme marche sur tous les chemins.
L'âme ne marche pas sur une ligne de crête, pas plus qu'elle ne croît tel un roseau.
L'âme se déploie, comme un lotus aux pétales innombrables.

~ Khalil Gibran (Le Prophète)

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Citation du jour 

Les gens heureux ne sont jamais méchants.
(Proverbe hollandais)  

9 juillet 2014

Opinions

Un point de vue est aussi une façon de ne pas voir.
~ Gian-Francesco Poggio (dit Le Pogge)

On ne peut jamais être neutre. Le silence est une opinion.
~ Henry Moret

Le mot juste a beau être efficace, aucun mot n’aura jamais l’efficacité d’un silence bien placé.
~ Mark Twain

Je sens que je progresse quand je commence à ne rien comprendre à rien.
~ Charles Ferdinand Ramuz

André Sauvé : les opinions
 

8 juillet 2014

Je vole du temps…


La façon la plus délicieuse de prolonger ses journées, est de voler quelques heures à la nuit.
~ Thomas Moore

Le soir montre ce qu’a été le jour.
(Proverbe latin) 

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Fata temporum

À l’écheveau des jours, il attache la nuit,
En ourlant le matin d’un galon de lumière,
Puis coule lentement le long des cimetières
Vers un soir dont il éteint la flamme, à son huis.

Aiguisé à ses griffes, son silence enfouit
Tous les secrets chassés, à grands coups d’étrivières,
De la bouche des rois aux lèvres des meunières,
Dont il ronge la peau aux margelles des puits.

Son or sonne le glas et se fond au néant
Des gouffres d’univers où se gonfle le feu
Des étoiles à naître et de leurs parements,

Et si son règne dure depuis l’éternité,
C’est qu’il nourrit sa chair de la soif de nos yeux,
Car le Temps est un ogre au visage de fée.

~ Francis Étienne Sicard, 2010

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... et il se fait tard.

6 juillet 2014

À tort et à raison

Michel Serreault et Jacques Villeret; Les Enfants du marais (1999)

Qui a tort, qui a raison?

On ne sait jamais qui a raison ou qui a tort.
C'est difficile de juger.
Moi, j'ai longtemps donné raison à tout le monde.
Jusqu'au jour où je me suis aperçu que la plupart des gens à qui je donnais raison avaient tort!
Donc, j'avais raison!
Par conséquent, j'avais tort!
Tort de donner raison à des gens qui avaient le tort de croire qu'ils avaient raison.
C'est-à-dire que moi qui n'avais pas tort, je n'avais aucune raison de ne pas donner tort à des gens qui prétendaient avoir raison, alors qu'ils avaient tort!
J'ai raison, non?
Puisqu'ils avaient tort!
Et sans raison, encore!
Là, j'insiste, parce que ... moi aussi, il arrive que j'aie tort.
Mais quand j'ai tort, j'ai mes raisons, que je ne donne pas.
Ce serait reconnaître mes torts!
J'ai raison, non?
Remarquez... il m'arrive aussi de donner raison à des gens qui ont raison aussi.
Mais, là encore, c'est un tort.
C'est comme si je donnais tort à des gens qui ont tort.
Il n'y a pas de raison!
En résumé, je crois qu'on a toujours tort d'essayer d'avoir raison devant des gens qui ont toutes les bonnes raisons de croire qu'ils n'ont pas tort!

~ Raymond Devos

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Citaquote du jour :

Grattez le juge, vous trouverez le bourreau.
~ Victor Hugo

Juger c’est, de toute évidence, ne pas comprendre, puisque si l’on comprenait, on ne pourrait pas juger.
~ André Malraux

5 juillet 2014

Romantique à mes heures…

Frédéric Chopin

La musique supplée à l'impuissance du langage humain.
~ H. Berlioz

Amusez-vous à écouter les différences. Il faut parfois fermer les yeux pour mieux «entendre». Bien sûr il faut tenir compte de la qualité de l'enregistrement qui varie énormément sur le Net...  

Chopin, Concerto pour piano No 1

Lang Lang :


Daniil Trifonov :

4 juillet 2014

Post-it émancipateur

Le mariage? Non merci.
Je ne peux pas m’accoupler en captivité.

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J’aime qu’on me prenne, j’aime qu’on me tienne, mais je n’aime pas qu’on m’enferme.
~ M. Righiti

Les chaînes d’acier ou de soie sont toujours des chaînes.
~ Friedrich von Schiller

Les hommes passent la moitié de leur vie à se forger des chaînes, l’autre partie à se plaindre d’avoir à les porter.
~ V. de Mirabeau

Le mariage est comme la mort; peu de gens y arrivent préparés.
~ Niccolo Tommaseo

Il n’y a rien de mal à fuir, quand on sait qu’on ne peut rien faire de bien en restant.
~ Doris Lessing

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Les tâches qui incombent aux hommes et celles qui reviennent aux femmes ne sont pas équivalentes du point de vue des désagréments qu’elles causent, de la satisfaction qu’elles procurent et enfin des contraintes et des responsabilités qu’elles impliquent. Si on considère que, même dans les couples modernes où les deux travaillent, les activités domestiques occupent les femmes seize heures par semaine contre six heures pour les hommes, et que ceux-ci, quand ils participent aux tâches ménagères, choisissent en priorité les activités les moins contraignantes (comme la vaisselle ou les courses, ou encore passer l’aspirateur), on comprend qu’un grand nombre de femmes se sentent flouées. Il faut dire à la décharge des hommes que les femmes elles-mêmes ont souvent du mal à se libérer des stéréotypes féminins de la parfaite maîtresse de maison et que, très souvent, elles préfèrent assurer elles-mêmes les corvées domestiques plutôt que d’entendre leur mari bougonner ou s’en charger à contrecœur.
       L’indépendance financière est une condition importante de l’autonomie des femmes, mais ce n’est pas suffisant. Car même quand elles travaillent et gagnent leur vie, elles continuent à se définir par leur rôle domestique; et elles se culpabilisent si le couple ou les enfants vont mal. Les femmes dont les compagnons refusent de partager les tâches quotidiennes doivent souvent renoncer à des responsabilités professionnelles; et on continue à trouver normal que ce soit la femme qui s’efface pour suivre son compagnon. Quand il y a des enfants, à niveau de responsabilité égal, ce sont souvent les femmes qui mettent leur travail en sourdine pour s’en occuper; par exemple, quand un enfant est malade, c’est la mère qui est appelée à son travail et doit prendre un «congé enfant malade».
       Quand elles divorcent, certaines femmes expliquent que leur nouvelle situation ne leur a apporté que très peu de contraintes supplémentaires par rapport à ce qu’elles vivaient en couple.
       À défaut de pouvoir construire leur propre projet, nombre de femmes s’investissent à fond dans le projet du conjoint, mais elles prennent ainsi le risque, après des années de mariage et de renoncement à leur carrière professionnelle, de se retrouver un jour laissées sur le bas-côté.
       Les femmes de la génération du baby boom se sont ainsi laissé piéger dans des relations où elles ont pris l’habitude de donner trop. Certes, elles ont revendiqué leur autonomie, l’égalité des sexes, mais elles sont souvent  restées attachées aux rôles traditionnels dans le couple. Certaines sont tellement actives et réparatrices qu’elles tendent à porter tout leur entourage. Dans un registre d’amour altruiste, elles tentent de réparer les hommes, de les sauver de leurs dépendances ou de leur violence. Les hommes ne s’y trompent pas et leur demandent beaucoup.
       Les femmes ont été «conditionnées» à être là pour les autres, à tenir compte du désir de l’autre avant tout, et beaucoup ont ainsi perdu conscience de leur désir propre. (…)
       Nous ne sommes toujours pas sortis d’une vision traditionnaliste du monde, où la femme s’occupe du privé et de l’interpersonnel, et les hommes de la vie publique et des sciences. Et on continue à opposer la réussite sociale et professionnelle des femmes à leur réussite amoureuse, ce qui implique que, pour réussir un couple, il leur faudrait mettre leur travail en sourdine. Si une femme affiche une trop forte personnalité, on plaindra son mari, considérant qu’il est «écrasé». Alors que si c’est l’homme qui a une forte personnalité, on considérera comme normal que sa femme reste dans l’ombre. Celles qui réussissent trop bien sur le plan professionnel inquiètent les hommes; soit ils les fuient, soit ils les agressent.
(p. 35-38)

Quand une femme est libre et indépendante, puisque jusqu’à présent ce comportement était réservé aux hommes, elle s’entend parfois dire qu’elle a un comportement masculin, voire machiste. Mais ce type d’attitude tend à devenir moins fréquent : les femmes célibataires suscitent moins qu’auparavant raillerie ou compassion et subissent moins douloureusement la pression sociale.
       Car même si socialement ce n’est pas toujours facile pour elles, les femmes s’accommodent mieux de la solitude que les hommes. Beaucoup ont une vie sociale riche, des activités intellectuelles et culturelles.
(p. 52)

~ Marie-France Hirigoyen
(Chapitre L’indépendance des femmes)
Les nouvelles solitudes
Le paradoxe de la communication moderne
Hachette-livre (Marabout) 2007

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