31 décembre 2014

Inutile de disjoncter...

En général, avec un minimum d’entraînement, tolérance et compréhension suffisent pour composer avec les déceptions et les irritants. Ce n’est pas la fin du monde si vos neveux renversent leur jus de tomate sur votre sofa blanc...

«Ne t’en fais pas chérie, tu n’a pas brûlé la bière!» (Anne Taintor Inc.)

Il y a toujours moyen de s’entendre...

Elle avait décidé de partir avec le «vilain» cette année. (Anne Taintor Inc.)
Un mari craint toujours que son épouse le quitte. C'est ça la suprême force des femmes : vous faire redouter ce que vous souhaitez le plus au monde. ~ San-Antonio

En cas d'intolérance chronique :
Comptez jusqu’à dix

Quand j’étais enfant, mon père comptait toujours jusqu’à dix à voix haute chaque fois qu’il était fâché contre mes sœurs ou moi. C’était une méthode qu’il employait, à l’instar de nombreux parents, pour se calmer avant de prendre uns décision (ou de nous flanquer une fessée). 
   J’ai perfectionné cette stratégie en y incorporant le recours à la respiration. Voici ce que je vous propose : quand vous sentez la moutarde vous monter au nez, prenez une longue inspiration et comptez «un» mentalement. Puis détendez votre corps dans l’expiration. Recommencez avec «deux», et ainsi de suite jusqu’à dix au moins (si vous êtes vraiment en colère, allez jusqu’à vingt-cinq). 
   Cela revient à vous vider l’esprit grâce à une version abrégée d’un exercice de méditation. La combinaison du décompte et de la respiration est si relaxante qu’il vous sera presque impossible de rester en colère quand vous aurez fini. La montée d’oxygène dans vos poumons et le temps écoulé entre votre poussée d’adrénaline et la fin de l’exercice vous permettent de prendre le recul nécessaire. Vos «montagnes» se réduisent en «taupinières». L’exercice est aussi efficace contre le stress ou la panique. Recourez-y chaque fois que vous avez l’impression de «perdre les pédales». 
   Et d’ailleurs, c’est un moyen merveilleux d’occuper une minute – que vous soyez en colère ou non. J’en ai fait une pratique quotidienne, pour le seul plaisir de la détente.

~ Richard Carlson (Ne vous noyez pas dans un verre d’eau

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Si nous mesurions la contraction de nos muscles, nous serions assez navrés de constater à quel point nous sommes perpétuellement tendus à cause des contrariétés que nous ne savons plus accepter – un vrai Far West mental...!  

Raideur de la nuque

La colonne vertébrale est semblable à un creuset dans lequel montent et descendent des ondes commandées par le cerveau. Si les pensées qui les dirigent et les ordonnent sont harmonieuses, tout va bien. Mais si l’agitation mentale survient, les pensées se mettent à bouillir et, comme l’eau à 90° monte vers le couvercle, les ondes vibratoires s’agitent et montent dans le haut de la colonne vertébrale, fermée par la première cervicale (la Porte de Fer en acupuncture). 
   Quand une foule compacte s’amasse dans la rue et devient dense, la police fait circuler, la disperse et le calme revient. 
   Ces ondes densifiées, peuvent être dispersées et redevenir fluides. Le cerveau de l’homme a ce pouvoir comme on peut dénouer un bloc de ficelles embrouillées devenues boule; il faut temps, patience et volonté. Celui qui souffre de la nuque doit reconnaître qu’il a créé des fantasmes, des idées fausses, que son agitation mentale a cru en un absolu qui n’existe pas; la soif d’une délivrance n’est pas tarie par un désir mais par une action de la volonté. En reprenant une à une les idées qui l’ont amené à cette raideur en effaçant mentalement leur existence, en calmant l’agitation des pensées, lentement la souplesse reviendra... mais cette action est difficile car elle est contraire aux pensées de celui qui a raidi sa nuque.

Colère

Si les pensées s’irritent contre quelqu’un ou quelque chose, elles s’aggolmèrent, grossissent, s’obscurcissent, perdant toute mesure; elles d’amplifient comme une foule se rassemble et mobilise ses énergies. Enfin, elles se manifestent par une colère qui éclate bruyamment ou qui est retenue : alors la rage s’inhibe, c’est-à-dire tourne en rond à l’intérieur de soi sans se manifester au dehors. 
    L’énergie monte au foie et le «noue». Il est aussi mauvais de retenir une colère que de la laisser éclater. Le bon sens demande de ne pas en faire naître : il faut la tuer dans l’œuf quand elle est encore à l’état de germe en «évaporant» la raison qui la provoque. 
   Ceci n’est possible que si les pensées sont soigneusement contrôlées. Pensez au cavalier : il sait que son cheval a peur des feuilles mortes de l’automne quand elles voltigent; dès que cette saison-là arrive, il reste attentif au moindre sursaut de sa monture, lui flattant l’encolure si c’est nécessaire et ne la laissant pas s’énerver.
   Ce sont toujours les mêmes choses ou les mêmes personnes qui provoquent en vous un bouillonnement intérieur. Surveillez vos pensées, rassurez-les. «Ayez du chagrin conseille la médecine chinoise et non la colère qui vous met «hors de vous».

~ Marguerite De Surany (Pour une médecine de l’âme

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Pensée du jour :

«Il est plus facile de sortir de ses gonds que d’y entrer.»
~ Marcel Achard

BONNE FIN D’ANNÉE :-)

29 décembre 2014

Itinérance 1

On parle davantage d’itinérance pendant les Fêtes – entre autres parce qu’en hiver, il est plus difficile de fermer les yeux sur ce visage de plus en plus omniprésent de la pauvreté.

Serge Lareault, après 20 ans de service à la direction du magazine L'Itinéraire (qu'il a lui-même fondé), est maintenant président de l'International Network of Street Papers (INSP) un réseau international de journaux de rue.

Quelques propos notés (non textuels) à l’émission Les Fêtes et rien d’autre (ICI R.-C.) :
- Il y a un vingt ans, à Montréal, on évaluait le nombre d’itinérants à environ 15 000 et  maintenant à environ de 30 000. Et, c’est la même chose dans toutes les grandes villes du monde. C’est difficile à évaluer bien sûr, et en plus, le problème a gagné du terrain à la grandeur du Québec.
- À l’époque, il était plus facile d’aider les itinérants à réintégrer la société. Mais aujourd’hui, en raison de l’accessibilité à des drogues plus fortes qui provoquent des psychoses et des dommages irréversibles au cerveau, la maladie mentale devient un grand obstacle à la réintégration sociale. Il faut ajouter à cela le manque de ressources, la situation économique et l’austérité.
- Il y a vingt ans les sans-abri avaient entre 30 et 40 ans. Aujourd’hui 50% des jeunes décrocheurs qui n’ont pas terminé leur secondaire 5 se retrouvent dans la rue. 
- Et puis, s’ajoutent maintenant les personnes vieillissantes, c’est-à-dire dans la soixantaine. Ces gens-là ont travaillé toute leur vie au salaire minimum – travail précaire, petits boulots – et contribué à la société. Mais, il est impossible d’avoir un fonds de retraire et d’accumuler des économies au salaire minimum. Quand ils perdent leur emploi à cet âge-là, ils n’ont plus rien devant eux. Ils se retrouvent donc en perte totale de repères et incapables de se payer un logement. Dépression, désespoir, maladie mentale et itinérance s’ensuivent. Il y a un manque flagrant de logements sociaux pour les personnes âgées. Le gouvernement a promis 500 nouveaux logements sociaux à l’échelle du Québec – 25 000 personnes sont en attente de logement social, à Montréal seulement...

Photographe : Mikaël. En cherchant une photo d’itinérant, je suis tombée sur un reportage au sujet d'un formidable projet de sensibilisation aux «Humains de la rue». Plusieurs photos incluent un résumé biographique, comme celle-ci. Une qualité de photographie impeccable.  
Site officiel – à visiter! http://humansofthestreet.tumblr.com/ (défilez vers le bas en page d'ouverture pour les photos et commentaires)

Un portrait des itinérants montréalais par Humans of the street
Par Sandrine Vincent (Nightlife.ca, septembre 2014)

Humans of the street est un tout nouveau projet lancé par Portrait de Montréal. Captant des portraits intimes d'itinérants montréalais. Mikaël, photographe du projet, nous plonge au coeur de cette initiative, et lève les voiles sur le quotidien des gens que l'on croise chaque jour, sans les voir.

D'où vient le projet Humans of the street?
«Humans of the Street a pour mission de changer le regard que l'on porte sur les itinérants, en permettant aux Montréalais de découvrir leurs histoires», nous explique Mikaël. Nous avons depuis le début partagé des portraits d'itinérants sur Portraits de Montréal, et nous avons vite réalisé que ces portraits obtenaient généralement plus de succès que les autres. Les gens étaient toujours surpris de découvrir les histoires, souvent touchantes, des gens que beaucoup ne prennent même pas le temps de regarder dans la rue. Beaucoup de gens nous disaient également reconnaître tel ou tel itinérant, et que, suite à la découverte de leur histoire, ils prendraient le temps de les saluer la prochaine fois qu'ils les croiseraient.»

«Nous sentions donc que nous avions le potentiel de changer le comportement des gens face à l'itinérance, et avons décidé d'aller un peu plus loin. Nous avons regroupé tous les portraits d'itinérants sur une même plateforme - Humans of the street -, et avons commencé à réaliser des portraits plus en profondeur. Nous voulions également donner aux gens les moyens d'aider ces itinérants, en leur listant exactement les choses qu'ils pouvaient faire pour leur rendre la vie plus facile : comment ils boivent leur café, ce qu'ils aiment manger, les vêtements dont ils ont besoin, etc.»

Quelle a été la réaction initiale des participants du projet lorsque vous les avez approchés avec la caméra?
«Très bonne. C'est avec David et Diamond que le projet a vraiment commencé. David a été très réceptif à l'idée, et était très reconnaissant du fait qu'on veuille faire une différence dans la vie des itinérants. Il était également très heureux de pouvoir contribuer à faire évoluer le regard des gens sur les itinérants. 
   Depuis que nous l'avons rencontré, nous sommes restés en contact quasi quotidien avec David, nous sommes en voie de lui trouver un appartement. Nous allons réaliser une vidéo avec lui, et organiser une levée de fonds participative pour l'aider à sortir de la rue.»

Moment/rencontre mémorable?
«Chaque rencontre avec un itinérant est mémorable, mais à date la plus forte rencontre est celle avec David et Diamond. David a un véritable coeur d'or, c'est un homme extraordinaire, d'une force de caractère incroyable. Nous l'avons même invité à passer une nuit chez nous, comme la température est fortement tombée ces derniers jours.»

Quelle(s) leçon(s) faut-il en tirer?
«Nous aimerions surtout dire aux gens de ne pas ignorer les itinérants. Ne pas avoir de change à leur donner c'est correct, mais faire comme si on ne les voyait ou ne les entendait même pas, ce n'est pas une manière de traiter un être humain. Prenez le temps ne serait-ce qu'une fois de payer un café ou un burger à un itinérant, et de discuter avec lui quelques minutes : vous ressortirez plus grand et plus riche de cette expérience.»

http://www.nightlife.ca/2014/09/15/un-portrait-des-itinerants-montrealais-par-humans-street

Itinérance 2

Tout comme en matière de solitude ou de sexualité, l’itinérance (ou le nomadisme) peut être délibérément choisie à cause de tendances psychologiques personnelles ou imposée par divers facteurs psychosociaux, socioéconomiques, etc.

Il reste que vu de l’extérieur, l’alcool et la drogue semblent aller main dans la main avec l’itinérance. Et dans bien des cas, je suppose qu’il est difficile de savoir ce qui vient en premier (la poule ou l’œuf?). Dans le milieu des affaires, par exemple, on trouve pas mal d’alcooliques et de drogués «fonctionnels» qui ne finiront probablement pas itinérants. Il y a aussi la catégorie des rebelles notoires tels que Jack Kerouac. L’alcool a fini par le tuer. Quand même dommage. Mais, c’est un phénomène courant chez de nombreux créateurs, artistes, écrivains, etc. Dans cette veine :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2014/12/prenez-un-taxi.html

C’est comme si les humains cherchaient à fuir la réalité physique de toutes les manières possibles, de par une sorte de répulsion innée, inconsciente, et incurable. Enfin, c’est mon impression...


Je suis en train de relire On The Road, en français cette fois. Avec les années de recul, ma perception a un peu changé... Superficiellement on peut n’y voir que nomadisme, sexe et drogues, mais cette narration poétique est tellement plus que ça. Et puis, elle est intemporelle car si les décors ont changé, le mal de vivre et la quête de liberté sous-jacents au récit sont toujours actuels.

Les Clochards célestes fait suite à Sur la route, et réfère à ce qui fut appelé la «Renaissance poétique» de San Francisco. «Dans ce nouveau roman, Jack Kerouac se sépare du mouvement «bohème» de la Beat Generation et conduit ses lecteurs vers une conception «de la compassion consciente et continue» et vers une trêve paisible dans la compréhension du paradoxe de l’existence.» 

Les clochards célestes (The Dharma Bums; Viking Press, 1958)
KEROUAC Sur la route et autres romans; Éditions QUARTO GALLIMARD, 2003

Extraits

Sans bourse délier, je quittai Los Angeles sur un coup de midi, caché dans un train de marchandises, par une belle journée de la fin septembre 1955. Étendu sur une plate-forme roulante, mon sac sous la nuque, les genoux croisés haut, je me laissai absorber par la contemplation des nuages tandis que le convoi roulait vers le Nord. L’omnibus qui m’emportait me permettrait d’arriver avant la nuit à Santa Barbara où je me proposais de dormir sur la plage. Le lendemain matin, un autre omnibus m’emmènerait jusqu’à San Luis Obispo, ou bien le rapide de marchandises me déposerait à San Francisco à sept heures du soir. Quelque part du côté de Camarillo, où Charlie Parker était allé se reposer après être devenu dingue et où il avait retrouvé la raison, un vieux clochard rabougri grimpa sur la plate-forme juste au moment où notre convoi se rangeait sur une voie de garage pour laisser passer un autre train. Le petit homme parut surpris de me voir mais il alla s’installer dans un coin, à l’autre bout du wagon. Là, il s’étendit de tout son long, en me regardant sans rien dire, la tête posée sur son misérable balluchon. La locomotive siffla plusieurs fois de toute sa vapeur après le passage du grand train de marchandises, lancé vers l’Est en ouragan, sur la voie principale, et nous repartîmes. L’air devenait frais et la mer nous envoyait déjà des souffles de brume par-dessus les chaudes vallées de la côte. Le petit vieux et moi tentions inutilement de nous blottir contre l’acier froid de notre véhicule; il fallut nous lever et marcher de long en large pour nous réchauffer. Chacun dans notre coin, nous sautions sur place en battant des bras, mais très vite, le train se rangea de nouveau sur une autre voie de garage, à proximité d’une petite gare et je jugeai qu’un litron de rouge me serait indispensable pour gagner Santa Barbara. «Pouvez-vous garder mon sac pendant que je vais acheter une bouteille de vin?»
-- Pour sûr.»
Je sautai par-dessus le rebord du wagon et traversai au pas de course la Route 101. Dans une boutique, j’achetai le vin, un peu de pain et des sucreries. Je regagnai à toutes jambes mon train de marchandises qui baignait maintenant dans une grande flaque de soleil chaud où nous passâmes encore un quart d’heure avant de repartir. Mais le soir tombait déjà et le temps commencerait bientôt à fraîchir. Le petit vieux était assis en tailleur dans un coin, devant le maigre contenu d’une boîte de sardines qui composait tout le menu de son dîner. Il faisait vraiment pitié. Je me rapprochai donc pour lui demander : «Vous ne voulez pas un peu de vin? Ça vous réchauffera. Peut-être bien que vous mangerez aussi un peu de pain et de fromage avec vos sardines?»
-- Pour sûr.» On aurait dit qu’il tirait chaque son des profondeurs de son corps. Il avait une petite voix grêle qui semblait sortir d’une boîte à musique, comme celle d’un homme mal assuré ou qui n’ose pas élever le ton. J’avais acheté le fromage trois jours plus tôt, à Mexico, avant d’entreprendre le long voyage de trois mille kilomètres, jusqu’à la frontière américains, dans des autocars peu dispendieux, qui allaient me ramener à El Paso par Zacatecas, Durango et Chihuahua. Il mangea le pain et le fromage, en buvant du vin, avec plaisir et gratitude. J’étais content. Je me rappelais le passage du Sutra du Diamant où il est dit : «Fais la charité sans aucune arrière-pensée charitable, car la charité n’est qu’un mot.» J’étais pratiquant, à cette époque-là, et remplissais mes devoirs religieux avec une rigueur proche de la perfection. Depuis lors, je suis devenu un peu hypocrite quant à la dévotion, un peu désabusé et cynique. Je me sens vieilli et indifférent... mais en ce temps-là je croyais vraiment à l’existence la charité, de la bonté, de l’humilité, de la ferveur, du détachement qui procure la paix, de la sagesse, de l’extase, et je me croyais un vieux bhikkhu des anciens temps sous ma défroque moderne, errant de par le monde (généralement à l’intérieur du vaste triangle délimité par New York, San Francisco et Mexico), afin de tourner la roue de la Véritable Signification, ou du Dharma, pour accumuler les mérites qui feraient de moi un futur Bouddha (Instrument du Réveil) et un futur héros du paradis. Je ne connaissais pas encore Japhy Ryder que j’allais rencontrer la semaine suivante et ignorais tout des «clochards célestes» alors que j’en étais un moi-même, dans toute l’acception du terme, et me considérais comme un pèlerin errant. Le petit vieux du train renforça toutes mes croyances lorsque la boisson l’eut rendu loquace et qu’il fit jaillir de je ne sais où un bout de papier où l’on pouvait lire une prière de sainte Thérèse : elle y annonçait qu’après sa mort, elle reviendrait ici-bas, sous la forme d’une pluie de roses éternelles, arrosant du haut du ciel toutes les créatures vivantes.
Je demandai au petit vieux : «Où avez-vous eu ça?
-- Oh! je l’ai découpé dans un magazine de la salle d’attente, à Los Angeles, il y a bien deux ans. Je l’emporte toujours avec moi.
-- Et vous le lisez en brûlant le dur, comme ça, dans les fourgons?
-- Presque tous les jours.» Il n’en dit pas beaucoup plus long et ne commenta pas davantage la prière de saint Thérèse. Il se montra très discret sur sa religion et sur sa vie privée. C’était l’un de ces vieux clochards rabougris et tranquilles qui n’attirent pas beaucoup l’attention – pas plus dans les bas-fonds que dans les beaux quartiers. Si un flic leur dit de circuler, ils obtempèrent et disparaissent, et si les gardiens de nuit font une ronde dans les entrepôts, d’une grande gare au moment où un train de marchandises s’ébranle, il y a des chances pour qu’ils ne voient guère l’un de ces petits vieux cachés parmi les buissons et sautant d’un bond dans l’ombre d’un wagon. Quand je lui dis que je pensais me glisser dans le rapide, la nuit suivante, il demanda : «Vous voulez dire le Fantôme de minuit?
-- C’est comme ça que vous appelez le Zipper?
-- Sûr que vous avez travaillé dans ce train?
-- Oui, j’étais serre-freins sur le réseau de la Sud-Pacifique.
-- Eh bien, nous autres, clochards, on l’appelle le Fantôme de minuit, parce qu’on peut sauter dedans à Los Angeles et se retrouver le lendemain matin à San Francisco sans que personne ne vous ait aperçu tant ce machin va vite.
-- Cent vingt-cinq à l’heure dans les lignes droites, vieux père.
-- Sûr; et même qu’il fait drôlement froid, la nuit, à cette allure-là, quand on remonte le long de la côte vers Gavioty avant de contourner le Surf.
-- Et après le Surf, il redescend par la montagne jusqu’à Margarita. Bien des fois j’ai fait le trajet sur ce train-là.
-- Ça fait combien de temps que vous n’êtes pas rentré chez vous?
-- Trop longtemps pour que je me rappelle. C’est de l’Ohio que je viens.»
Mais le train repartait et le vent redevint froid. Il y avait de nouveau de la brume. Pendant une heure et demie environ notre seul souci fut de maîtriser nos frissons et le tremblement bruant de nos mâchoires. Je me recueillis dans mon coin pour méditer sur la chaleur, la grande chaleur divine, ce qui m’aidait à lutter contre le froid. Puis je me remis debout pour battre des bras et trépigner tout mon soûl en chantant à tue-tête. Il resta étendu, à ruminer ses pensées avec une moue amère et désabusée. Je claquais des dents et mes lèvres étaient bleues. Dans le noir, nous aperçûmes avec soulagement se dessiner les contours des montagnes de Santa Barbara; peu après, le train s’arrêta. Nous pûmes enfin nous réchauffer dans la nuit chaude et étoilée qui enveloppait maintenant la voie.
Je souhaitai bonne chance au petit vieux de sainte Thérèse et nous sautâmes à bas du wagon devant le passage à niveau. Je m’en allai vers la plage, où je pensais dormir sous mes couvertures, dans un endroit écarté, au pied de la falaise; les flics ne m’y découvriraient pas pour m’en déloger.
(...)

Le petit vieux de saint Thérèse fut le premier vrai représentant des « clochards célestes » que je rencontrai. Le second, Japhy Ryder, fut le plus important d’entre eux. Ce fut même lui qui imagina de donner ce nom aux membres de la corporation. Japhy Ryder était un garçon de l’est de l’Oregon, élevé dans une cabane perdue au fond des bois, avec son père, sa mère et sa sœur; il avait toujours vécu en forestier, la hache sur l’épaule, en terrien profondément intéressé par les animaux et les traditions indiennes, de sorte qu’en se retrouvant, par un curieux concours de circonstances, sur les bancs de l’université, il était tout prêt à se spécialiser dans l’anthropologie et la mythologie indiennes. Finalement, il apprit le chinois et le japonais, devint un orientaliste érudit et découvrit l’existence des plus grands clochards célestes – les Fous du Zen de la Chine et du Japon. Comme c’était en même temps un vrai garçon du Nord-Ouest, plein d’idéal, il se passionna pour les mouvements ouvriers anarchisants du début du siècle – comme les syndicats IWW («Industrial Workers of the World») – et apprit à jouer de la guitare. Cela lui permit entre autres, de chanter en s’accompagnant lui-même les vieux hymnes ouvriers qu’il ajouta à son répertoire de chansons indiennes. (...) La première fois que je le vis (...) Japhy était en train de descendre cette longue rue où passe le curieux funiculaire de San Francisco. Son petit sac à dos était bourré de livres, de brosses à dents, et de je ne sais quoi d’autre encore, le tout constituant son «couche-en-ville»;  ce qui ne l’empêchait pas de traîner en outre un grand paquetage avec sac de couchage, poncho et batterie de cuisine. Il portait une barbiche qui, avec ses yeux verts un peu en amende, lui conférait un air vaguement oriental, mais il ne faisait pas penser à un bohémien malgré tout (en fait, il était beaucoup moins un bohémien qu’une sorte d’amateur d’art). Il était maigre, tanné par le soleil, vigoureux et ouvert, plein de faconde joviale, saluant à grands cris les clochards qu’il croisait et répondant aux questions qu’on lui posait avec une vivacité telle qu’on ne savait si c’était instinct ou raison, mais toujours avec brio et esprit.
«Où as-tu pêché Ray Smith? lui cria-t-on tandis que nous entrions à The Place, le bar favori des amateurs de jazz de la Plage.
-- Oh! je rencontre toujours mes Bodhisattvas dans la rue », glapit-il, et il commanda de la bière.
Ce fut une nuit mémorable, une nuit historique à plus d’un titre. Lui et quelques autres poètes (il écrivait aussi des vers et traduisait des poèmes chinois et japonais en anglais) devaient lire des textes à la Galerie Six, en ville. Ils s’étaient donné rendez-vous au bar pour se mettre en forme. Mais tandis que tous prenaient place ou déambulaient ça et là, je vis qu’il était le seul à ne pas avoir l’air d’un poète – encore qu’il le fût indiscutablement. Les autres étaient des zazous intellectuels, binoclards (...). Mais Japhy portait des vêtements de travailleur manuel, achetés d’occasion dans une coopérative et qui lui permettaient d’escalader sans souci un sommet, de marcher le long des routes et de s’asseoir par terre, la nuit devant le feu de camp, au cours de ses randonnées le long de la côte. (...)
... Mais je ne pourrais répéter, même en m’appliquant, les traits d’esprit de Japhy, ses commentaires et ses gloses qui me tinrent sur des charbons ardents toute la soirée et finalement troublèrent mes pensées de cristal au point de modifier mes projets d’avenir.
Quoiqu’il en soit, je suivis la meute hurlante des poètes jusqu’à la Galerie Six où devait avoir lieu la lecture, ce soir-là qui marqua, entre autres choses importantes, le première manifestation de la renaissance poétique de San Francisco. Tout le monde était présent. Ce fut une nuit de folie.

... Japhy habitait sa propre bicoque : beaucoup plus petite que la nôtre (quatre mètres sur quatre), elle ne contenait rien qui ne fût révélateur des idées du propriétaire sur les vertus d’une simplicité monastique. Pas de chaises du tout, même pas de rocking-chair. Seulement quelques nattes. (...) Il avait un tas de caisses à oranges, pleines de beaux livres d’érudits, certains écrits dans des langues orientales (notamment tous les sutras et leurs commentaires, les œuvres complètes de D. T. Suzuki et une belle édition en quatre volumes de haïkus japonais). (...) Lorsque j’allais le voir, dans la soirée, il était installé à cette table [des caisses à oranges transformées en table], une paisible tasse de thé fumant à côté de lui, studieusement penché sur les idéogrammes du poète chinois Han Shan. (...) Je n’avais jamais contemplé de spectacle plus paisible.

***
Bref, nous ne savons jamais à qui nous avons affaire, tant dans le contexte social «normal» que dans celui de l’itinérance. Vous croyez rencontrer un paumé? C’est peut-être un génie!

26 décembre 2014

Intimité musicale

«La vie même va et vient, tel un métier à tisser. De puissants sentiments d’insatisfaction ou d’échec, le désir implicite de nous échapper, le sentiment que tout est fini ne sont peut-être que les échos d’un courant beaucoup plus profond qui entre et sort de notre vie. 
   L’intimité de l’âme nous demande d’imaginer que nos relations familiales, amicales ou amoureuses revêtent des proportions cosmiques. Cette perspective grandiose n’enlève rien aux valeurs et émotions personnelles. Au contraire, elle les enracine pour les rendre plus robustes. Si une relation était un moyen de défense contre le mystère de la vie qui gît au plus profond de chacun de nous, contre le destin et la fatalité, elle n’aurait guère de chances. Si nos engagements et nos espoirs, notre colère et notre exaspération étaient les moyens de dominer l’âme toujours mouvante d’un autre être ou d’un groupe, ils n’auraient rien de sacré et ne seraient plus que des moyens narcissiques de défense. 
   Le paradoxe final exige de nous, si nous souhaitons allumer les feux de l’intimité, que nous honorions l’âme de l’autre. (...) Nos relations intimes s’étendent au monde qui nous entoure et le protègent afin que nos désirs d’union, étroitement liés aux fils de l’âme qui se tendent bien au-delà des mortels, empêchent l’univers de se désintégrer.»

~ Thomas Moore (Les âmes sœurs; Le Jour, éditeur)

Sublimissime moment d’intimité entre des âmes de même fréquence. Accord parfait.



NO ONE BUT YOU

Where is your love?
Who are you (...?) love?
Your babies aren't born  
Their mother won't return
The torch you're trying to carry burns
   for no one but you
Play us a song 
Show us that we belong
Our lovers nod their heads  
They'll never tell our kids
They wish they'd had the life you've lived
  for no one but you
’Cause when it's time to go  
You'll have so many things to show
To no one but you

The Goat Rodeo Sessions 2011
Yo-Yo Ma, Stuart Duncan, Edgar Meyer, Chris Thile
Aoife O'Donovan (vocalist)

COMMENTAIRE

Dans son message de Noël, M. Harper invitait les Canadiens à «songer avec gratitude et confiance aux militaires courageux qui servent en uniforme au péril de leur vie». 

Curieusement, c'est ce qui m'a fait penser à cette chanson, notamment :
The torch you're trying to carry burns for... no one but you ...
when it's time to go, you'll have so many things to show to... no one but you.

Le flambeau que tu essaies de porter ne brûle... pour personne d’autre que toi ...
quand viendra le temps de partir, tu auras tant de choses à montrer... à personne d’autre que toi.

23 décembre 2014

De la lumière à profusion!

Après avoir abondamment exposé certains aspects «négatifs» des Fêtes (mercantilisme, sentiment d’obligation, etc.), je me tourne vers la lumière (comme les plantes dans mes fenêtres), surtout qu’on en manque dans notre hémisphère nord.

Le Winter light Festival du parc Nabana no Sato (île Nagashima, Japon) semble assez fabuleux. Entre novembre et mars, le festival de fleurs de la saison estivale se transforme en festival de lumières – 7 millions d’ampoules LED encastrées dans des imitations de bulbes de fleurs! Une grande partie du jardin est alimenté en électricité par des panneaux solaires. En tout cas, les photos sont fantastiques.

Photo : Hiroshi Kano. En 2013, le Mont Fuji était à l’honneur puisqu’il fut inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Photo : Akira

Photo : André Sato

Plus de photos :
http://www.incrediblesnaps.com/amazing-winter-light-festival-in-japan

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Dans le domaine de l’architecture lumineuse, les forêts de lumière (Forest of Light) de Bruce Munro me font penser aux forêts enchantées dont je rêvais en lisant des contes de fées.

Design : Bruce Munro, Longwood Gardens, Pennsylvanie

Design : Bruce Munro – une deuxième vie (lumineuse) pour nos bouteilles?

Il ne me reste qu’à vous souhaiter beaucoup de lumière, de joie et d’amour durant cette période de festivité.

(Light painting) N’oubliez pas d’allumer votre cœur... mais sans vous mettre de pression supplémentaire si le courant baisse à cause du verglas :-)  

Et, pourquoi ne pas relire les préceptes de Ryôkan avant d’aller à un party.
Ou offrir une photocopie en cadeau à chaque invité – si vous en avez l’audace :-) 

Ne pas trop parler.
Ne pas parler vite.
Ne pas parler fort.
Ne pas donner son avis quand il n’est pas sollicité.
Ne pas couper la parole…
Ne pas dire le contraire de ce que l’on pense.
Ne pas prendre la parole avant que l’autre ait terminé sa phrase.
Adapter les propos à la situation.
Ne pas parler de raison à quelqu’un qui est ivre.
Ne pas parler de raison quand soi-même, on est ivre.
Ne pas parler de raison à un homme en colère.
Ne parler de raison quand on est soi-même en colère.
Ne pas insister sur les détails.
Ne pas parler en exigeant.
Ne pas dévoiler ce qu’un autre veut cacher.
Ne pas faire de demi-plaisanteries.
Ne pas taquiner à la légère.
Ne pas surestimer quelqu’un.
Ne pas répondre à quelqu’un sans bien comprendre ce qu’il veut dire.
Ne pas aborder des sujets de querelles.
Ne pas parler de sujets politiques.
Ne pas tromper un enfant.
Ne pas faire de leçons savantes à un enfant.
Ne pas parler longtemps sans raison.
Ne pas prendre plaisir à utiliser un mot dont on n’a pas complètement compris le sens.
Ne pas parler avec mystère.
Ne pas tenir des propos inutiles.
Ne pas dire de mal d’autrui.
S’abstenir de propos pas vraiment utiles.
Il est difficile d’écouter avec attention la réponse d’autrui.
Il est difficile d’exprimer quelque chose dans sa totalité.
Il faut savoir extraire les aspects nécessaires et faire un résumé.
Ne pas revenir sans cesse sur quelque chose que l’on a irrémédiablement perdu.
Ne pas parler de ses exploits.
Ne pas se glorifier de ses succès.
Ne pas développer des choses sans importance en sachant qu’elles sont sans importance.
Ne pas dire à quelqu’un quelque chose qu’il lui est insupportable d’entendre.
Ne pas lui dire des choses qu’il n’aime pas entendre.
Ne pas dire quelque chose sans tenir compte de l’état émotionnel de l’autre.
Ne pas parler à haute voix auprès de quelqu’un qui dort.
Ne pas faire semblant de tout savoir.
Ne pas forcer quelqu’un à écouter son propre avis.
Ne parler pas de sujets religieux impunément.
Ne pas abuser de paroles pour demander un service à quelqu’un mais dire juste ce qui est nécessaire.
Ne pas tenir tête.
Ne pas user de flatteries.
Ne pas faire de reproches avant d’avoir fait le tour de la question.
Ne pas faire facilement des promesses car l’on risque de manquer à sa parole.
Ne pas tenir de propos licencieux.
Ne pas aborder un nouveau sujet alors que l’on n’a pas fini de traiter le premier.
Ne pas dire à l’un ce que l’on veut dire à l’autre.
Parler sous le couvert de la gentillesse peut se transformer en rancune.
Ne pas médire dans le dos de quelqu’un mais lui dire en face, ce que l’on pense.
Ne pas parler de quelqu’un d’un sujet qu’il ne connait pas.
Sous le couvert du savoir, dire des choses que l’on ne sait pas.
Dire tous les mots qui expriment le regret est regrettable.
Ne pas revenir sur des paroles déjà dites.
Ne pas se confondre en amabilités.
Ne pas dire à quelqu’un ce qui n’est pas convenable pour lui.

~ Daigu Ryôkan (1758-1831)

(Ces conseils donnés par Ryôkan à ses contemporains ont traversé le temps au Japon, on trouve encore parfois ces préceptes affichés dans les demeures.

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Source :
Contes Zen
Ryôkan Le moine au cœur d’enfant
Traduction du japonais et composition par Claire S. Fontaine
Le Courrier du livre; 2001

22 décembre 2014

La sagesse semble fuir à mesure que j’avance...


Je lisais ce qui suit en me disant que j’avais encore pas mal de croutes à manger en matière de sagesse. Aïe.

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Signes certains qu'un homme fait du progrès dans l'étude de la sagesse : il ne blâme personne, il ne loue personne, il ne se plaint de personne, il n'accuse personne, il ne parle point de lui comme s'il était quelque chose ou qu'il sût quelque chose. 
   Quand il trouve quelque obstacle ou quelque empêchement à ce qu'il veut, il ne s'en prend qu’à lui-même. Si quelqu'un le loue, il se moque en secret de ce louangeur, et, si on le reprend, il ne cherche pas à se justifier; mais, comme les convalescents, il se tâte et s'observe, de peur de troubler et de déranger quelque chose dans ce commencement de guérison, avant que sa santé soit entièrement fortifiée. 
   Il a supprimé en lui tout désir, et il a transporté toutes ses aversions sur les seules choses qui sont contre la nature de ce qui dépend de nous. Il n'a pour toutes choses que des mouvements peu empressés et soumis. Si on le traite de simple et d'ignorant, il ne s'en met pas en peine. En un mot, il est toujours en garde contre lui-même comme contre un homme qui lui tend continuellement des pièges et qui est son plus dangereux ennemi. (Manuel)

-- Je compose de beaux dialogues, je fais de bons livres.
-- Eh! mon ami, montre-moi plutôt que tu domptes tes passions, que tu règles tes désirs, et que tu suis la vérité dans tes opinions. Assure-moi que tu ne crains ni la prison, ni l'exil, ni la douleur, ni la pauvreté, ni la mort. Sans cela, quelques beaux livres que tu fasses, sois bien persuadé que tu n'es encore qu'un ignorant. (Entretiens)

~ Épictète

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La véritable indulgence consiste à comprendre et à pardonner les fautes qu'on ne serait pas capable de commettre. 
~ Victor Hugo (Philosophie prose)

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Si Dieu existe, alors qu'il arrête de faire la grève.
~ Agust

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Le Dieu des chrétiens est un père qui fait grand cas de ses pommes, et fort peu de ses enfants.
~ Denis Diderot

20 décembre 2014

Son plus beau cadeau

Le pauvre homme devait être tellement heureux! Oh que ça me touche.

Retrouvailles

Un homme de la Californie qui croyait avoir tout perdu lors d’une importante tempête la semaine dernière, a finalement retrouvé son chien quelques heures plus tard. Après avoir été emporté par les vagues, l’animal a dû nager dans le noir pour retrouver son maître.

Steve Alioto vivait avec son chien, sur un bateau ancré en bordure d’une baie, à Sausalito. Lors de la tempête, l’homme n’était pas chez lui. C’est donc à son retour, qu’il a réalisé, horrifié, que son bateau avait été emporté par les vagues, avec son plus fidèle compagnon, Daisy.

Par chance, la chienne n’a pas été blessée lorsque la tempête a frappé. Elle a toutefois dû nager 2,4 kilomètres dans la noirceur totale afin de rejoindre la rive. Elle s’est par la suite rendue à l’église, où elle et son maître se rendent régulièrement pour la soupe populaire. C’est à cet endroit que les deux amis se sont retrouvés!

(Via : Météo Média, 19.12.14)

En complément


Les chiens réagissent au langage humain
de la même manière que nous

Il semble que les chiens comprennent beaucoup plus que ce qu’on croyait jusqu’à maintenant. Selon une nouvelle étude, les chiens ne réagissent pas uniquement à ce que nous disons, mais ils sont également très attentifs à notre manière de les exprimer. Le plus curieux c'est que l'humain traite le processus du langage de façon tout à fait similaire.

En mode d'écoute, le cerveau humain ne réagit pas uniquement aux mots entendus. Différents stimuli auditifs et visuels, tels que le ton (l'émotion dans la voix) et certaines informations identitaires – sexe, âge, etc. – entrent en ligne de compte. Le cerveau humain est capable de percevoir ces stimuli, et de distinguer et traiter séparément les divers composants du langage humain.

Des chercheurs en psychologie de l'Université de Sussex ont constaté que le cerveau du chien a la même capacité de traiter les différents composants du langage et donc de réagir à la fois aux signaux verbaux et non verbaux de l’information.

«Bien que notre recherche ne nous permet pas encore de savoir comment les chiens comprennent l'information, nous pouvons affirmer qu'ils réagissent à la fois aux mots et aux informations connexes, et que ces composants semblent être traités dans les différentes zones de leur cerveau», dit la co-auteure de l'étude Victoria Ratcliffe de l’Université de Sussex.

On avait précédemment établi que les animaux (tout comme les humains) utilisaient indistinctement l’hémisphère gauche ou droit pour écouter les sons produits par leur espèce. Cette fois, la recherche visait à déterminer si les animaux – les animaux domestiques en particulier – réagissaient de la même façon aux composants du langage humain.

Pour ce faire, on a placé les chiens entre deux haut-parleurs diffusant simultanément la voix humaine et un autre son. Les chercheurs notaient leurs mouvements de tête. Ce faisant, on a constaté que les chiens avaient tendance à réagir aux commandes verbales avec leur hémisphère gauche, alors qu’ils traitaient le ton de voix et les signaux non verbaux avec leur hémisphère droit. Le plus intéressant dans tout cela, c'est que le cerveau humain réagit au discours exactement de la même manière.

Les auteurs de l'étude suggèrent que les chiens ont développé leurs aptitudes d'écoute à la suite de la domestication. Pour confirmer cette hypothèse, il sera nécessaire de poursuivre les recherches avec d'autres espèces d'animaux domestiques tels que les chevaux, ainsi qu'avec des canidés non-domestiqués tels que les loups.

Donc, sachez que votre chien ne peut peut-être pas comprendre et réagir à tout ce que vous lui dites (les mots), mais soyez assuré qu’il vous écoute et qu’il est très attentif à ce que vous transmettez parallèlement.

~ Anna Lemind  http://themindunleashed.org/

19 décembre 2014

Le droit de choisir

La véritable indépendance consiste à dépendre de qui on veut.
~ San-Antonio (Les pensées de San-Antonio)

J’ai publié plusieurs messages au sujet des engagements «festifs» parce que je rencontre des gens qui se sentent plus coincés et frustrés que joyeux. Je leur demande «pourquoi y vas-tu, si t’as pas envie?» La réponse est toujours la même : «j’ai pas le choix.»

Par ailleurs, la crainte de manquer un party, un événement, etc., peut aussi faire en sorte qu’on accepte n’importe quelle invitation, même en sachant que ce sera désagréable. Cette peur-là est habituellement couplée à la peur d’être seul.

Célébrer n’est pas un job ou une obligation, et percevoir les fêtes ainsi est totalement antinomique. J’aime fêter, mais pas avec un mélimélo de gens qui ne matchent pas (1). Le but étant que ce soit agréable et joyeux, je célèbre avec des personnes enjouées, spontanées, qui ont le sens de l’humour et aiment s’amuser, mais qui se comportent en adultes responsables.


Alors j’insiste, en me disant que si quelqu’un a besoin d’un coup de pouce libérateur, il le trouvera peut-être ici. On a le droit de choisir, de se choisir, et même de choisir ceux qu’on aime (2).

Les cadeaux


Plusieurs semblent toujours croire que «plus» c’est mieux. Sinon les centres d’achat et les boutiques ne seraient pas aussi bondés. Plus de cadeaux, plus de réceptions, plus d’activités. La pression mercantile atteint son maximum en cette période. La suggestion psychologique est simple : prouvez votre amour en offrant des cadeaux plus gros, plus performants, plus dispendieux, etc. Les vendeurs poussent fort car la compétition est féroce. Certains éprouvent de la culpabilité s’ils sont incapables de donner autant qu’avant (restriction oblige), et ont malheureusement l’impression de ne pas être à la hauteur.

Les objets peuvent être des symboles d’affection, certes, mais le don de soi parle plus fort. Il est rare qu’une personne ne soit pas touchée par un présent qu’on a choisi intuitivement car cela reflète notre intérêt pour sa personnalité et ses goûts (le prix n’a aucune importance). La sélection intuitive marche aussi pour les cadeaux «obligés» (parenté, collègues, etc.); c’est un défi plutôt ludique.

La nostalgie


Le temps des Fêtes peut éveiller nostalgie, tristesse et regrets. D’ailleurs l’industrie  joue beaucoup avec les émotions et donne souvent dans la pub à l’eau de rose – images, vidéos, chansons «ah, ces bons vieux Noëls d’antan». On va même jusqu’à «humaniser» les objets. Ces concepts font partie du conditionnement saisonnier. On n’y voit que du feu (des petites lumières et des sapins), et l’on se concentre sur les bons souvenirs – ce qui n’est pas mauvais en soi. Mais il peut aussi être difficile d’oublier la famille dysfonctionnelle, avec ses mauvais buveurs, ses conflits et ses jeux de pouvoir entre frères/sœurs/conjoints, et la compétition entre les rejetons. Certains s’évertuent pourtant à reproduire des réveillons traditionnels qui ne signifient plus rien pour eux. D’autres espèrent créer les Fêtes de rêve qu’ils n’ont pas vécues dans leur enfance.

Conclusion

Essayons d’être conscients de la pression médiatique. Si nous n’avons pas envie de célébrer à l’ancienne et/ou en famille, disons-le gentiment (3). Osons faire les choses différemment. Comme pour les cadeaux, suivons notre intuition. Choisissons de célébrer avec des personnes que nous apprécions et aimons profondément – privilégions la qualité plutôt que la quantité. Ne craignons pas de laisser tomber les choses qui ne nous servent plus, non pas avec un sentiment d’échec ou de défaite, mais avec un sentiment de reconnaissance pour ce qu’elles nous ont appris. Tout change, rien n’est permanent, ne retournons pas en arrière, célébrons au présent.

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(1) Trouvez ce qui vous attire tant chez les personnes qui ne vous conviennent pas et fuyez-les comme la peste. Il est enrichissant de cultiver votre capacité d’aimer inconditionnellement, mais ne laissez jamais votre amour inconditionnel se changer en masochisme ou en mépris de soi inconditionnel.
~ Howard M. Halpern, psychologue

(2) Dire non à ... c’est dire oui à ...
Lorsque nous changeons, notre environnement change aussi. Conséquemment, les relations avec les partenaires, membres de la famille et amis peuvent être soumises à dure épreuve. Mais, si elles n’y survivent pas, une ouverture à d’autres relations plus harmonieuses et bénéfiques peut aussi se produire.
Suite : http://artdanstout.blogspot.fr/2013/08/dire-non-cest-dire-oui.html

(3) S’affirmer avec respect :
«Quand on s’affirme, on communique franchement; on exprime ses sentiments, ses besoins et ses idées et on fait valoir ses droits, mais sans violer les droits d’autrui. On est alors authentique, cohérent, ouvert et direct.»
~ Linda Adams

Et... on assume les conséquences.

17 décembre 2014

Bye-bye Facebook

Qui s'en souvient? "Est-ce pour moi?"

Complément au message précédent.

Dire bye-bye à Facebook pourrait vous rendre plus heureux  
Dr Judith Tutin, psychologue

Les gens fulminent contre le contenu émotionnel manipulateur de Facebook. La psychologue que je suis ne s’en inquiète pas outre mesure. Un internaute se demandait si les recherches sur Facebook avaient déjà tué quelqu’un. J’en doute sérieusement! 
   Néanmoins, cette controverse, jointe à mes clients et amis qui menacent régulièrement de supprimer leurs comptes Facebook, m'a amenée à regrouper leurs raisons de vouloir devenir membres du Club Liberté-Facebook (Facebook-Free Club).

Vous ne serez plus un cobaye
   Si vous êtes furieux contre le contenu émotionnel manipulateur de FB, vous aimeriez peut-être réfléchir à ce que le psychologue Michael Ross disait : «C'est comme si vous aimiez vous dévêtir devant votre fenêtre ouverte tout en étant scandalisé si quelqu'un vous regarde.» 
   Quoiqu'il en soit, non seulement fermer votre compte FB résoudrait le problème des potentiels voyeurs intrapsychiques indésirables, mais peut-être que vous auriez aussi la satisfaction de donner un peu de payback à FB en quittant : «Tiens-toi, Facebook!»

Adieu comparaisons négatives
   Les recherches sont mitigées à ce sujet, mais pensez au besoin humain inné de se définir par la comparaison. Comment vous sentez-vous quand vous voyez ce que d'autres personnes publient sur leurs enfants? Que ce soit parce que vos enfants ne réussissent en ce moment (ou que vous n’en avez pas) ou parce que vos enfants ne vous parlent pas – si cela vous rend mal à l’aise, à quoi bon regarder? 
   Voir les vacances luxueuses, les réunions de famille heureuses et les nouveaux jobs fantastiques de vos «amis» peut être troublant si vous êtes dans une situation  adverse dans ces domaines. C'est comme si quelqu'un frottait vos blessures avec du gros sel.

Vous éliminerez la dépression post-rupture
   Lire les messages FB de votre ex, ou ceux de vos amis au sujet de votre ex, est une très mauvaise idée, mais difficile à éviter. Vous n'avez peut-être pas la volonté de vous en abstenir, ou quelque chose d’affligeant peut venir d'une connaissance (vous ne saviez même pas qu’elle connaissait votre ex), ou du nouveau béguin de votre ex. Avez-vous vraiment besoin de vous démoraliser de façon aussi gratuite?

Vous sauverez beaucoup de temps
   Avez-vous remarqué que les 20 premières minutes de votre journée, ou les 20 dernières, ou plusieurs 20 minutes entre les deux sont aspirées dans le trou FB? Pour le savoir prenez note du temps que vous consacrez à vos diverses activités à chaque jour. Puis regardez combien de temps vous avez gaspillé de façon irréfléchie en surfant sur FB. Vous avez sûrement mieux à faire...

Vous éliminerez quelques mélodrames de votre vie
   Mes clients veulent quitter FB principalement parce qu'ils ne peuvent plus supporter les mélodrames – non seulement de les lire, mais souvent d’être involontairement aspirés. Vous pouvez pécher par action : vous publiez des commentaires que vous jugez inoffensifs mais ils sont totalement mal interprétés. Vous pouvez même pécher par omission : le fait de ne pas commenter est sur-interprété (tout le monde sait que rien n’est plus important que de lire et de commenter les messages FB). Il s’agit d’une situation où vous êtes perdant d’un côté comme de l’autre.

Vous ne serez pas obligé de lire d'ennuyeux messages intimistes
   Peut-être que je suis seule à penser ainsi, mais il y a certaines choses que je préfèrerais ignorer. Par exemple : la composition du copieux déjeuner d’un «ami» aujourd’hui, le libertarisme enragé de mon coach de gym, ou le fait qu’un ancien ami de collège est en train de virer fou parce qu’il a peur de contracter le virus Ébola. J’apprends toutes ces choses et beaucoup d’autres grâce à mon feed FB. Je préfèrerais le déni – comme ça je pourrais imaginer le menu d’un déjeuner sur une plage de Maui mais seulement si je le désire, je pourrais prétendre que mon entraîneur partage mes valeurs personnelles, ou me rappeler de mon vieil ami comme la personne raisonnable qu'il était. Le problème, c'est que vous ne pouvez pas empêcher les avertissements FB de sonner constamment.

Pour terminer en toute intégrité, je dois admettre que je ne supprimerai mon compte dans l’instant; cependant, je connais beaucoup de gens qui ont de merveilleuses histoires à raconter au sujet de leur vie sans Facebook.

(Source : Care2)

15 décembre 2014

13 décembre 2014

Promesses d’@mour

Ouah, le feu de la passion virtuelle a pogné dans l'e-mail! 

Coup de cœur de @Twittakine
Je triche... un tweet proustien (plus de 140 caractères!) hyper réaliste et drôle : 

e-love vows

If you will be my cyber-sweetie
I will be your constant tweetie.
You, my faithful Facebook friend,
Ours, a virtual love without end.

We will chat and have a quickie,
(no need to fear a leak from Wiki)
no exchange of body fluids
no ecstatic dancing Druids

Its safe and wholly antiseptic
Nothing carnal, just electric.

~ Sam Keen
An inquiring philosopher http://samkeen.com/

Outre ses savoureux poèmes, ce philosophe publie les résultats de quelques-unes  de ses investigations philosophiques.

Au sujet de la mort :
Build Your Ship of Death: For the Longest Journey Over Endless Seas
… Nowhere do we see this paradigm of illness so clearly as in the mythology that surrounds our most highly – cathected disease – cancer. Cancer: the enemy, the dark, insidious, irrational thing strikes its victims without warning or rationale. It is a metaphor for the evil that attacks the innocent. The deaths that we most focus on are those in which we feel ourselves to be victims of something. Increasingly, we are a society where there is a rush to victimization, where illness, and especially catastrophic terminal illness, is thought of as something that happens to a person – a cancer victim, a victim of a stroke, etc. 
   Ivan Illich has argued in Medical Nemesis that modern medicine has disempowered us to deal with our own suffering and dying. As experts take over the management of our bodies in every crisis from borning to dying, and redefine moral conducts such as addiction or greed as diseases, we are reduced to being passive consumers of professional body tenders. Increasingly our medical system infantilizes patients. How obediently we tolerate the authoritarian atmosphere of doctors’ offices and hospitals! We wait patiently and submit to procedures we do not understand because the experts assure us they are necessary. … 

Au sujet de la dette de carbone :
Whose Carbon Debt?
… We demand the right to consume at any cost to the environment. We hate the pushers but love the drug. …

Au sujet de la violence :
Appeal of Violence
  Can a peaceful world generate the common commitment communal enthusiasm and ecstasy of war?
  How do we domesticate and transform our secret love of violence, our destructive and sadistic impulses, our need for power?
  Can loyalty to the earth household and commonwealth of all sentient beings ever replace patriotism?
  What sacrifices would we have to make to create a more peaceful world?
  How do we deal with those who commit crimes against humanity?

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Dans la veine des amours virtuels -- un(e) internaute averti(e) en vaut 2 :
L’amour arobase – Les amours virtuels et impossibles ont toujours existé. Mais à l’heure des médias sociaux Internet, on peut supposer qu’ils atteignent maintenant des proportions astronomiques. ...
Suite : http://situationplanetaire.blogspot.ca/2011/10/lamour-arobase.html

10 décembre 2014

Carottes, pommes et bisous

Photo : "Pomme et bisou" de François Simard, Mont-Tremblant QC, 6 déc. 2014
http://www.meteomedia.com/photos/vues/animaux

La déforestation et la destruction des habitats fauniques ont poussés les cerfs à déserter leurs milieux naturels. Il est donc de plus en plus facile d’entrer en contact avec eux, autour et dans les villes. Nous les avons apprivoisés en leur donnant des carottes et des pommes. Or, en l’absence de prédateurs naturels comme les loups qu’on a quasiment exterminés, il y a surpopulation de cerfs. Mais, j’ai confiance que les chasseurs, qui se disent des écologistes dédiés à régulation de la faune, vont se faire un plaisir de procéder à une purge. Les hommes, en voulant tout contrôler provoquent des déséquilibres dont les conséquences sont désastreuses, tant pour la nature, les animaux que les humains.

Il existe encore quelques lieux sauvages où les cerfs n’ont pas subi les pressions de l’urbanisation et de la déforestation. Cependant, les seuls humains qu’ils rencontrent sont généralement des chasseurs. De sorte qu’ils sont plus méfiants quand ils flairent des humains. Voilà pourquoi le chercheur Joe Hutto a mis du temps au début pour se faire accepter du troupeau de cerfs dont il est question dans le documentaire Touching the Wild. Un splendide documentaire, émouvant, inspirant, d’une grande sensibilité, mais très sobre, on ressent que ça vient du coeur.

Documentaire complet (53 min) à cette adresse (si l’anglais est un obstacle, vous comprendrez sûrement avec votre coeur et vos tripes) :
http://www.pbs.org/wnet/nature/touching-the-wild-touching-the-wild/8679/


Touching the Wild
 Une production de Nature PBS

Résumé :
Le film documentaire Touching The Wild a été tourné près du ranch de Joe Hutto à Wind River Mountains, Wyoming. Cette zone sert d'aire d'hivernage à un grand troupeau de cerfs mulets. Son implication avec eux a commencé par une rencontre avec un jeune mâle qui semblait s’intéresser à lui et qui, d'une certaine façon, avait compris qu'il n'était pas menaçant : «Il s’est retourné et m’a salué d’un hochement de tête, et je l'ai regardé en hochant la tête, puis, il a recommencé. Le cerf était prêt à me voir comme un individu, et il avait clairement compris que je reconnaissais sa propre individualité. Je ne voyais pas quelque chose, je voyais quelqu'un.» 

Comme l’explique Hutto, il a d’abord dû aller à la rencontre du troupeau à tous les jours pendant deux ans avant d’obtenir un début de confiance de la part des cerfs. Mais, après avoir gagné la pleine acceptation de leur leader, une femelle qu’il a surnommée Raggedy Anne, il a pu se déplacer parmi les individus de la horde, sans qu’ils lui prêtent attention. Finalement, il est devenu partie intégrante de la famille. Mais dès qu’il repérait un autre humain, leurs profonds instincts remontaient et ils fuyaient, puisque les cerfs mulets ont été légalement chassés depuis des générations.


Il y a de nombreux segments poignants dans ce documentaire, entre autres le moment où Rag Tag, la fille de Raggedy Anne, devient le premier cerf à le toiletter, quelque chose qui se fait habituellement entre chevreuils. Plus tard, elle lui présente ses jumeaux nouveau-nés; il s’occupera de l’une d’eux plus tard après la mort de Rag Tag. Hutto réfléchit sur le fait que la famille de Raggedy Anne soit toujours restée à ses côtés quand elle se mourait, et sur la façon dont Boar, un gros mâle, a réagi lorsqu'il a découvert la carcasse de son frère jumeau, victime d'un loup ou d’un lion de montagne. Hutto lui-même fut touché par ces décès. Il conclut que le chagrin et la douleur sont des expériences que tous les êtres vivants ont en commun. L’intensité de ses propres émotions concernant le sort de ses amis l’ont amené à se demander s'il ne devait pas mettre fin à sa recherche sur le terrain.

Il a suivi la vie de ce troupeau de cerfs pendant sept ans.


Citations :
«J’ai une formation scientifique, mais toute ma vie, j’ai voulu entrer en réelle communication avec les animaux sauvages, pour voir la vie et la nature à travers leurs yeux. Mon but était d’écrire un bouquin sur les cerfs de cette région, mais plus important encore était de faire prendre conscience qu’ils font face à de nombreuses difficultés de survie, et que si nous n’y prenons pas garde, ils pourraient fort bien disparaître.»

«Pouvais-je même spéculer sur l'étendue possible de leur expérience sans tomber dans l’inévitable prédisposition humaine à refuser de donner un sens à leur vie complexe et à nier la possibilité qu’ils éprouvent des émotions? Une fois de plus, il est devenu tout à fait évident que, en tant qu’humains, nous n'avons aucun accès privilégié à la réalité.


«L’éthologie, dans sa forme la plus pure et la plus honnête, est essentiellement un exercice qui nous révèle l'ampleur de notre ignorance au sujet de choses vivantes – que la tentative d'appliquer une méthodologie empirique à tout ce qui est abstrait, subjectif, qualitatif et indéniablement mystique est vaine.»

~ Joe Hutto

Photos : ©THIRTEEN Productions LLC, site Nature PBS

En complément :


L'animal est une personne
Franz-Olivier Giesbert
Fayard 2014

«Si j’ai écrit ce livre, c’est pour tirer les leçons d’une vie passée avec les animaux depuis la petite enfance, à la ferme, puis en ville. Au fil des pages, je vous parlerai de plusieurs de mes amis auxquels, si grands soient mes hommages, je ne pourrai jamais rendre les bonheurs qu’ils m’ont donnés, avec leur candeur et leur humour : un jeune bouc, un vieux perroquet, des chats, des araignées, des bovins ou des chiens.

Pourquoi traitons-nous avec tant d’égards les animaux de compagnie, substituts de l’homme, et si mal les bêtes à manger, machines à fabriquer de la viande? Alors que nous consommons chaque année des milliards d’animaux issus de la terre et de la mer, il est temps que nous descendions de notre piédestal pour les retrouver, les écouter, les comprendre.

J’ai voulu aussi lancer un appel pour que cesse le scandale des abattages rituels, halal ou casher, qui imposent à nos sœurs et frères les bêtes des mises à mort dans d’inutiles souffrances.»


Feral
Searching for Enchantment on the Frontiers of Rewilding
George Monbiot

How many of us sometimes feel that we are scratching at the walls of this life, seeking to find our way into a wider space beyond? That our mild, polite existence sometimes seems to crush the breath out of us?

Feral is the lyrical and gripping story of George Monbiot’s efforts to re-engage with nature and discover a new way of living. He shows how, by restoring and rewilding our damaged ecosystems on land and at sea, we can bring wonder back into our lives.

Making use of some remarkable scientific discoveries, Feral lays out a new, positive environmentalism, in which nature is allowed to find its own way.

Feral is a work of hope and of revelation; a wild and bewitching adventure that argues for a mass restoration of the natural world – and a powerful call for us to reclaim our own place in it.

“George Monbiot’s book, Feral, is a Book of Revelations for our times.”
~ Farley Mowat  

Visit http://sustainableman.org/ to explore the world of sustainability.
For more from George Monbiot, visit http://www.monbiot.com/

Harfang des neiges – photo : Marie-Claude Valois, Eastman QC, 6 déc. 2014
http://www.meteomedia.com/photos/vues/animaux