19 mars 2021

Se souvenir, commémorer, remercier...

À quoi ça sert? Rien ne change.

La commémoration annuelle du massacre à la Polytechnique nous a-t-elle obtenu un meilleur contrôle des armes à feu?

Les horreurs survenues en CHSLD durant la pandémie vont-elles susciter une véritable amélioration des conditions de vie dans ce milieu? Quand?

Image : André-Philippe Côté / Le Soleil, 13 mars 2021

Le drame de Joyce Echaquan va-t-il contribuer à réduire le racisme dans le réseau de la santé, notamment à Joliette? Deux infirmières du CHSLD de Joliette ont été congédiées pour des propos jugés irrespectueux sinon racistes envers une patiente autochtone.

   Mise à jour (ICI Radio-Canada / Espaces autochtones) : Stéphane Cormier, du Syndicat interprofessionnel de la santé de Lanaudière, déplore le fait que le licenciement des deux infirmières ait eu lieu sans qu’une réelle enquête sur les faits qui leur sont reprochés ait été réalisée. (...) Les deux infirmières sont atterrées, a martelé pour sa part Stéphane Cormier, en entrevue à Espaces autochtones. «Elles ne nient pas ce que Mme Ottawa a ressenti, car ça lui appartient. Mais elles précisent que leurs gestes n'avaient rien de raciste, qu'il s'agissait de tentatives de rentrer en contact avec elle, comme elles l'avaient appris dans la récente formation qu'elles venaient de suivre qui recommande de s'intéresser à la culture de leurs patients autochtones

Ah oui? Facile à dire après coup... Un affreux manque de discernement? Leurs propos portaient à équivoque et risquaient même de tourner le couteau dans la plaie au lieu de réconforter. Pourquoi Jocelyne Ottawa leur aurait-elle chanté une chanson en atikamekw, histoire de faire connaissance? J’imagine mal une infirmière demandant à une patiente blanche de Joliette de chanter alors qu’elle a une blessure au pied à faire soigner.

«Contre la stupidité, les dieux eux-mêmes luttent en vain.» ~ Friedrich Schiller 

Le réseau de la santé est tellement en manque de personnel qu’il ne vérifie peut-être pas les antécédents des futurs employés... Par contre, si le personnel n’est pas raciste, la clientèle peut l’être :

   Le CISSS des Laurentides a tenté à 10 reprises, l’automne dernier, de recruter des préposées aux bénéficiaires obligatoirement «de couleur de peau blanche» pour travailler à l’hôpital de Saint-Eustache. «Une offre d’emploi qui prescrit une origine ethnique, un sexe ou une orientation sexuelle, ou quoi que ce soit du genre, ça n’a aucun bon sens, on s’entend tous là-dessus», a lancé la ministre de la Sécurité publique en mêlée de presse. Selon les courriels obtenus par La Presse, le service des ressources humaines de l’organisation a expliqué que cette exigence était motivée par la présence d’un «patient difficile» en médecine générale «qui [voulait] malheureusement seulement une femme de couleur de peau blanche».

Les souvenirs

Henri Bataille *

Les souvenirs, ce sont des chambres sans serrures,

Des chambres vides où l'on n'ose plus entrer,

Parce que de vieux parents jadis y moururent.

On vit dans la maison où sont ces chambres closes.

On sait qu'elles sont là comme à leur habitude,

Et c'est la chambre bleue, et c'est la chambre rose...

La maison se remplit ainsi de solitude,

Et l'on y continue à vivre en souriant...

J'accueille quand il veut le souvenir qui passe,

Je lui dis : «Mets-toi là...Je reviendrai te voir...»

Je sais toute ma vie qu'il est bien à sa place,

Mais j'oublie quelquefois de revenir le voir,

Ils sont ainsi beaucoup dans la vieille demeure.

Ils se sont résignés à ce qu'on les oublie,

Et si je ne viens pas ce soir ni tout à l'heure,

Ne demandez pas à mon coeur plus qu'à la vie...

Je sais qu'ils dorment là, derrière les cloisons,

Je n'ai plus besoin d'aller les reconnaître;

De la route je vois leurs petites fenêtres,

Et ce sera jusqu'à ce que nous en mourions.

Pourtant je sens parfois, aux ombres quotidiennes,

Je ne sais quelle angoisse froide, quel frisson,

Et ne comprenant pas d'où ces douleurs proviennent,

Je passe...

            Or, chaque fois, c'est un deuil qui se fait

Un trouble est en secret venu nous avertir

Qu'un souvenir est mort ou qu'il s'en est allé...

On ne distingue pas très bien quel souvenir,

Parce qu'on est si vieux, on ne se souvient guère...

Pourtant, je sens en moi se fermer des paupières.  

* Henri Bataille (1872 - 1922) est un dramaturge et poète français. Il a écrit 25 pièces de théâtre, dont certaines ont connu leur heure de gloire. Son oeuvre poétique est malheureusement passée au second plan.

Cueilli sur : http://textesatoutvent.blogspot.com/

8 mars 2021

Mauvaise journée pour la royauté britannique

L’entrevue de Meghan et Harry avec Oprah Winfrey devrait aider les Britanniques à ouvrir les yeux, non? Ont-ils oublié le scandale Andrew / Epstein? Les membres des familles royales ne sont ni mieux ni pire que le commun des mortels; la couche de vernis dont ils se couvrent n’y change rien. Toujours imprégnés de la pure mentalité colonialiste (la conviction d’être supérieurs), des membres de la famille (autres que les grands-parents) s’inquiétaient de la couleur de peau du futur bébé.

Voilà ce que pensait mon bien-aimé Mark Twain de la monarchie :

«Nous tenons ces vérités pour évidentes : tous les monarques sont des usurpateurs et des descendants d'usurpateurs; pour la raison qu'aucun trône n'a jamais été établi dans ce monde par la volonté librement exercée du seul corps possédant le droit légitime de l'établir – la masse numérique de la nation. Le monarque est une sorte de propriétaire-esclavagiste qui n'obtient pas sa propriété par l’achat, la négociation ou la ruse – non, il en hérite d'un ancêtre qui l'a volée.

   La monarchie a la parole, et celle-ci lui a permis de convaincre l'homme qu'elle différait du serpent à sonnette, que quelque part elle avait quelque chose de précieux, quelque chose qu’il valait la peine de préserver, quelque chose de bon et de grand, quelque chose lui donnant droit de se protéger contre le bâton du premier venu qui l’attraperait si elle sortait de son trou.

   Je souhaiterais vivre cinquante ans de plus; je crois que je verrais les trônes de l'Europe vendus aux enchères comme de la vieille ferraille. Je crois que je verrais réellement la fin de ce qui est sûrement la plus grotesque de toutes les escroqueries jamais inventées par l'homme : la monarchie. Il y a imposture et imposture; il y a fraude et fraude, mais la plus flagrante de toutes est celle des couronnés.» ~ Mark Twain, 1835-1910  

Même si Twain avait vécu 50 ans de plus il n’aurait pas eu le plaisir de voir disparaître les monarchies. Et de nos jours, là où il n’y a pas de rois, il y a souvent des dictateurs.

La vie à la cour est réglée au quart de tour – de vrais maniaques. Et si un royal individu refuse de se conformer, mine de rien, on tentera de le pousser vers la porte; la persécution psychologique est très efficace.

Si les membres de la famille royale britannique jouissent d’une grande visibilité médiatique et de titres honorifiques, ils sont tous soumis à l’autorité de la reine. Soutenus par les impôts des contribuables anglais et l’immense fortune  de la famille, ils n’ont pas besoin de travailler. Le Crown Estate est l’institution qui gère les propriétés de la famille. Celle-ci possède un grand nombre de bâtiments partout au pays, des milliers d’hectares de terres, de forêts, et même de fonds marins. Cette société génère des revenus annuels pouvant atteindre plusieurs centaines de millions de livres versés en totalité au ministère des Finances. Durant l’année qui suit, le gouvernement verse un pourcentage de ce montant dans le compte bancaire de la famille. À cela s’ajoute, depuis 2011, le Sovereign Grant, soit la bourse souveraine, un montant versé à la famille pour son bon fonctionnement.

   Si la famille génère de l’argent, elle en dépense aussi. Une grande partie de la bourse est utilisée pour payer les employés de la Couronne ainsi que l’entretien de divers biens. Par contre, les déplacements et voyages des membres de la famille sont remboursés par l’État (les contribuables), que ce soit dans le cadre d’un voyage diplomatique ou d’une simple visite royale. Mieux encore : lorsque la famille visite un pays membre du Commonwealth (dont elle est souveraine), ses dépenses sont endossées par le pays en question. La visite de 11 jours de Charles et Camilla en 2009 a coûté 2 millions et demi de dollars aux contribuables canadiens! On aurait pu nourrir plusieurs familles sous le seuil de la pauvreté, ici-même, au Canada; mais Stephen Harper idolâtre la monarchie britannique, comme la majorité des membres du parti conservateur.   

   Les membres de la famille royale justifient leur existence en s’occupant. Ils doivent répondre à quelque 100 000 lettres et à 2000 engagements divers, rencontrer 70 000 invités, accueillir des chefs d’État, ouvrir des sessions du Parlement, remettre des titres d’honneur à des citoyens britanniques et se consacrer à des œuvres caritatives. Ils sont pratiquement toujours en party. Le principal travail des monarques est de parader.

   Les protocoles auxquels ils doivent se plier sont hallucinants. C’est d’un ridicule à se rouler par terre. Dans ce monde superficiel, l’important est de s’élever et de rester au-dessus de la masse en suivant des codes complexes de démarcation allant de l’habillement à la posture, à l’étiquette (façon de converser, de manger, de traiter les domestiques) jusqu’à la manière de gérer les écarts d’une moralité souvent trahie [les fréquentations du prince Andrew avec le pédophile Jeffrey Epstein en sont un exemple criant]. Les aristocrates imitent les comportements de la royauté à échelle réduite : ils héritent de la fortune familiale, ne travaillent pas, profitent du travail de leurs métayers sous-payés ou simplement nourris/logés, et récoltent les revenus de l’exploitation. Bingo!

Je me demande pourquoi les gens se plaignent du 600 $ à 800 $ par mois que reçoivent les assistés sociaux; on les accuse de ne rien faire pour justifier leur paye.

Au petit déjeuner, à l’abri des regards, la reine a réagi aux propos de Meghan et Harry.