25 décembre 2018

Mon plus beau cadeau de Noël 2018

Une amie m’a envoyée cette vidéo – elle sait que j’aime les chevaux. J’ai pleuré parce que c’est très touchant, et j’ai pleuré encore plus en voyant les deux parties du documentaire – en français. 


L’histoire de Peyo et de son maître Hassen est fascinante, édifiante et instructive 

Voyez-vous, ce cheval n’a jamais étudié la Bible, le Nouveau Testament ou le Coran. Il n’a reçu aucune «instruction religieuse» ni de training en soins de santé. Pourtant il est capable de transmettre empathie, compassion, joie et réconfort aux personnes malades et souffrantes, de cœur à cœur et de regard à regard. Ce qui tend à prouver que ce n’est pas la religion qui rend les êtres meilleurs, mais une qualité interne, ou de l'âme si vous préférez – tant chez les humains que chez les animaux. Le pape François devrait canoniser les animaux thérapeutes (1) au même titre que le Frère André ou autres. 

Je vous invite à regarder ce documentaire – sortez vos mouchoirs. Dans la seconde partie, le vétérinaire de Peyo dit «Oui, il est possible d’entraîner un cheval à monter dans un ascenseur, à marcher sur des carreaux de céramiques, à faire ses besoins à des heures précises, etc., mais je crois que Peyo est exceptionnel, il a comme un genre de don avec les patients.» D’ailleurs tout le personnel médical en témoigne. Le caméraman a filmé un moment où une des pattes arrière du cheval est pliée avec seulement la pointe du sabot appuyée au sol – ce qui signifie qu’il est détendu et content, tout comme lorsque ses lèvres sont tombantes d’ailleurs. La connexion entre le patient sur le point de mourir et Peyo est particulièrement émouvante.

1. Peyo, cheval de Cœur : Avec une larme au coin de l'oeil, découvrez : «Peyo, cheval de cœur», la première partie d'un docu très émouvant pour Equideo. Merci aux patients de l'hôpital les Vergers à Dijon ainsi qu'à ce formidable cheval Peyo qui nous confirme que le cheval est bien le meilleur ami de l'homme.... à voir et à partager autour de vous, parce qu'un jour ce sera nous .... (Equideo, 6 mars 2018)

2. Il y a presqu'un an, Equideo réalisait et diffusait «le cheval à l'hôpital, Peyo cheval de cœur», un documentaire vu par plus de 25 000 000 de personnes. Depuis, Hassen et Peyo ont fait la une de presque tous les médias Européen. C'est avec encore plus d'émotion, et de larmes dans les yeux que nous vous proposons aujourd'hui, la 2ème partie tournée au sein de l'unité de soins palliatifs "séléné" du centre Hospitalier de Calais. Peyo, cheval de coeur, la suite, à voir et à partager autour de vous. (Equideo, 24 novembre 2018)

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(1) L’équithérapie a  pris du gallon depuis les années 2000. Les expériences menées auprès d’enfants ayant des problèmes d’apprentissage ou de communication ont fait leur preuve et ont connu de plus en plus de popularité. Comme je le disais dans un autre billet, selon ma propre expérience, il est très facile d’établir une connexion de cœur à cœur avec les chevaux (parfois plus facile qu’avec les humains!), à moins qu’ils n’aient été brutalisés et soient par conséquent craintifs, avec raison...

Selon plusieurs chercheurs : «Le pouvoir thérapeutique de la zoothérapie découlerait de la relation humain-animal qui contribue à augmenter l'estime de soi et à combler une part de nos besoins psychologiques et émotionnels, comme ceux de se sentir aimé ‘inconditionnellement’, de se sentir utile, d'avoir un lien avec la nature. À cause de la sympathie spontanée qu'éprouvent bon nombre de personnes envers les animaux, on considère que leur présence est un important facteur de réduction du stress, un soutien moral pour surmonter un moment difficile (comme un deuil), ainsi qu'un moyen de sortir de l'isolement et de communiquer ses émotions. Il semble que le seul fait d'être en contact avec un animal se répercute à la fois sur la santé physique et mentale.»
   Dans le cadre d'une thérapie en rééducation fonctionnelle, un jeune homme quadriplégique, en entrant en interaction avec des chiens a retrouvé l'usage de la voix et de son bras droit. Des personnes anxieuses ou très peu autonomes peuvent, par exemple, améliorer leurs capacités de socialisation. En développant un lien de confiance avec l'animal, elles peuvent progressivement transposer ce sentiment de sécurité dans leur relation avec leur thérapeute, puis avec leurs proches.
   La zoothérapie se pratique dans une variété de contextes, entre autres dans les hôpitaux, les établissements de santé, les centres pour aînés, les institutions spécialisées pour enfants handicapés et déficients, et aussi dans les écoles, les centres de détention et de délinquants, ainsi qu'en pratique privée.

Dans cette veine : libellés Zoofriendly et Végétarisme sur Situation planéteire.

22 décembre 2018

Joyeux Noël... païen!

Certains célèbrent la naissance de Jésus, d’autres le solstice d’hiver et d’autres encore le Père Nôwel. Les choix ne manquent pas.

Personnel non syndiqué du business de Nôwel en thérapie de groupe

Bonne nouvelle pour les missionnaires chrétiens

Un «ministère de transport aérien à but non lucratif» – exclusivement chrétien – s’apprête à mettre un cargo à la disposition de chrétiens en mission à travers le monde. Avec Judah 1, les gens peuvent s’attendre à des prix compétitifs; aucune perte de bagages ni frais excédentaires. https://www.judah1.com/


Jésus sera-t-il copilote? Les instructions en sécurité seront-elles présentées par des agents de bord en train de prier les yeux fermés et les mains jointes?
   Il semble que la compagnie aérienne a omis de fournir ses déclarations de revenus depuis 2015... Selon la dernière déclaration elle serait insolvable. Hé, bienvenue à bord!  

Article intégral en anglais :

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Une réplique de l’Arche de Noé

Un charpentier hollandais a construit une réplique grandeur nature de l'Arche de Noé. Johan Huibers a un but aux proportions bibliques : il veut emmener sa recréation massive de l'Arche de Noé en Israël. «Cela peut sembler effrayant, mais je crois à tout ce qui est écrit dans ce livre [la Bible], du début à la fin», dit Huibers, qui est chrétien. 


«C'est une copie du vaisseau de Dieu. C'est logique de l'emmener sur la terre de Dieu.» L'arche est destinée à «montrer aux gens que Dieu existe». Huibers a expliqué à JTA : «Je voulais que les enfants viennent ici pour sentir la texture du bois, voir les clous et voir que ce qui est écrit dans le livre est vrai».

Article intégral en anglais :

Je suppose que les plans de Noé ont été récemment découverts lors de fouilles archéologiques. De l’aveu du constructeur, l’opération sera difficile puisqu’il n’y a pas de moteur, mais peut-être que Dieu va souffler dessus de toutes ses forces, un miracle. Je me demande si le charpentier entend faire monter des couples d’animaux à bord... 

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Mise en garde : le langage et les images de cette parodie pourraient ne pas convenir aux gens qui croient dur comme fer aux fantaisies bibliques, je préfère vous en avertir.

Irrévérencieux et très drôle... (en québécois et franglais)

La bible expliquée (vite vite) aux païens


La vie de milliards de gens dans l'histoire a été touchée par ce récit. Mais comme il est beaucoup trop long et ennuyeux à lire, les Brutes ont concocté un résumé.


Dans la même veine (en pas drôle) :

Sauvez une dinde et un porcelet, mangez des Pères Noël!
 


19 décembre 2018

Pas de cadeaux

Pas de cadeaux pour elle 



3 Gars Su'l Sofa est un groupe de folk rock canadien, originaire de Jonquière, au Québec. Il est basé à Montréal. Le groupe est un trio composé de
- Guillaume Meloche-Charlebois: basse, voix, percussions, mélodica, harmonica
- Guillaume Monette: guitare, voix, lapsteel, glockenspiel, clavier, dobro, programmation
- Nicola Morel: guitare, voix, flûte à bec, mélodica, glockenspiel, grelot, claviers, percussions

La Tribu 

Dommage que le trio ait cessé de produire des albums - très drôles leurs clips... 
En tout cas, ça fait changement des jingles crèches/boules de Nôwel. Pu capabe!  


 
Collage : Anne Taintor 

12 décembre 2018

Avez-vous dit «révolution»?!

À la suite des manifestations des Gilets Jaunes, beaucoup d’observateurs et de journalistes ont évoqué la Révolution française, y trouvant des similitudes si jamais le mouvement en venait à déraper. J’y ai pensé aussi. On ne souhaite surtout pas ça.


J’ai relu des passages de mon vieil exemplaire Quatrevingt-treize de Victor Hugo (Éditions Classiques Français, Booking International Paris, avril 1993).

Dans une note datée de 1854 Hugo précisait l’objectif de son roman :
«Moi, si je faisais l'histoire de la Révolution (et je la ferai), je dirais tous les crimes des révolutionnaires, seulement je dirais quels sont les vrais coupables, ce sont les crimes de la monarchie.»

«Dans la Vendée de 1793, trois personnages s'affrontent : l'aristocrate Lantenac, fidèle à son passé, son petit-neveu Gauvain, tourné vers l'avenir généreux de la République, et le conventionnel Cimourdain, plus durement soucieux des exigences présentes de la Révolution et de la Terreur. Dans cette épopée où le romancier mêle la fiction de l'intrigue et la réalité de l'Histoire – Danton, Robespierre et Marat sont au centre du livre –, chacun des trois héros se trouve ainsi guidé par une certaine idée du devoir et de l'honneur. Et chacun sera conduit à une forme d'héroïsme qui n'écarte pas la mort. L'écrivain se refuse donc à trancher, et Quatrevingt-treize n'est pas un roman à thèse : «Je ne veux ni du crime rouge ni du crime blanc.» Ce qui s'affirme dans ce livre qui paraît en 1874 et sera le dernier roman de Hugo (1802-1885), c'est une vision de l'Histoire qui garde trace, mais ne s'interdit pas l'espérance.» (Édition de Bernard Leuilliot)

«C'est bien en Vendée, terre de religion, de tradition et de violence, que se déroule le magnifique roman Quatrevingt-treize. Républicain convaincu, Victor Hugo ne condamne jamais les aspirations qui sont à l'origine de la Révolution, mais met en scène les contradictions d'un système qui, à force de vouloir défendre par l'acier et le feu ses nobles idéaux, a fini par les étouffer dans le sang. Cette contradiction est illustrée par la relation tendre et conflictuelle entre Gauvain et Cimourdain : l'un pense la Révolution avec son coeur, l'autre avec sa tête. C'est, hélas, cette deuxième vision qui prévaudra finalement et c'est sous le couperet de la guillotine que Hugo fera périr la dernière étincelle de pureté de la première République.» (Arakasi, Babelio)

J’ai choisi la remarquable conclusion du roman. Entre autres pour sa description de la monstrueuse guillotine (1), mais surtout pour le passage (que j’ai marqué en gras) concernant la nature qu’il qualifie d’impitoyable dans sa détermination à créer de la beauté tandis que nous ne cessons de créer de la laideur : «L’homme brise et broie, l’homme stérilise, l’homme tue; l’été reste l’été, le lys reste lys, l’astre reste l’astre. ... En présence de la création fleurie, embaumée, aimante et charmante, le ciel splendide inondait d’aurore la Tourgue et la guillotine, et semblait dire aux hommes : Regardez ce que je fais et ce que vous faites.»


Livre septième Féodalité et Révolution – VI

Cependant le soleil se lève

Le jour ne tarda pas à poindre à l’horizon.
En même temps que le jour, une chose étrange, immobile, surprenante, et que les oiseaux du ciel ne connaissaient pas, apparut sur le plateau de la Tourgue au-dessus de la forêt de Fougères.
   Cela avait été mis là dans la nuit. C’était dressé, plutôt que bâti. De loin sur l’horizon c’était une silhouette faite de lignes droites et dures ayant l’aspect d’une lettre hébraïque ou d’un de ces hiéroglyphes d’Égypte qui faisaient partie de l’alphabet de l’antique énigme.
   Au premier abord, l’idée que cette chose éveillait était l’idée de l’inutile. Elle était parmi les bruyères en fleur. On se demandait à quoi cela pouvait servir. Puis on sentait venir un frisson. C’était une sorte de tréteau ayant pour pieds quatre poteaux. À un bout du tréteau, deux hautes solives, debout et droites, reliées à leur sommet par une traverse, élevaient et tenaient suspendu un triangle qui semblait noir sur l’azur du matin. À l’autre bout du tréteau, il y avait une échelle. Entre les deux solives, en bas, au-dessous du triangle, on distinguait une sorte de panneau composé de deux sections mobiles qui, en s’ajustant l’une à l’autres, offraient au regard un trou rond à peu près de la dimension du cou d’hun homme. La section supérieure du panneau glissait dans une rainure, de façon à pouvoir se hausser ou s’abaisser. Pour l’instant, les deux croissants qui en se rejoignant formait le collier étaient écartés. On apercevait au pied des deux piliers portant le triangle une planche pouvant tourner sur une charnière et ayant l’aspect d’une bascule. À côté de cette planche il y avait un panier long, et entre les deux piliers, en avant, et à l’extrémité du tréteau, un panier carré. C’était peint en rouge. Tout était en bois, excepté le triangle qui était de fer. On sentait que cela avait été construit par des hommes, tant c’était laid, mesquin et petit; et cela aurait mérité d’être apporté là par des génies, tant c’était formidable.
   Cette bâtisse difforme, c’était la guillotine.
   En face, à quelques pas, dans le ravin, il y avait un autre monstre, la Tourgue. Un monstre de pierre faisant pendant au monstre de bois. Et, disons-le, quand l’homme a touché au bois et à la pierre, le bois et la pierre ne sont plus ni bois ni pierre, et prennent quelque chose de l’homme. Un édifice est un dogme, une machine est une idée.
   La Tourgue était cette résultante fatale du passé qui s’appelait la Bastille à Paris, la Tour de Londres en Angleterre, le Spielberg en Allemagne, l’Escurial en Espagne, le Kremlin à Moscou, le château Saint-Ange à Rome.
   Dans la Tourgue étaient condensés quinze cents ans, le Moyen Âge, le vasselage, la glèbe, la féodalité; dans la guillotine une année, 93; et ces douze mois faisaient contrepoids à ces quinze siècles.
   La Tourgue, c’était la monarchie; la guillotine, c’était la révolution.
   Confrontation tragique.
   D’un côté, la dette; de l’autre, l’échéance. D’un côté, l’inextricable complication gothique, le serf, le seigneur, l’esclave, le maître, la roture, la noblesse, le code multiple ramifié en coutumes, le juge et le prêtre coalisés, les ligatures innombrables, le fisc, les gabelles, la mainmorte, les capitations, les exceptions, les prérogatives, les préjugés, les fanatismes, le privilège royal de banqueroute, le sceptre, le trône, le bon plaisir, le droit divin; de l’autre, cette chose simple, un couperet.
   D’un côté, le nœud; de l’autre, la hache.
   La Tourgue avait été longtemps seule au désert. Elle était là avec ses mâchicoulis d’où avaient ruisselé l’huile bouillante, la poix enflammée et le plomb fondu, avec ses oubliettes pavées d’ossements, avec sa chambre aux écartèlements, avec la tragédie énorme dont elle était remplie; elle avait dominé de sa figure funeste cette forêt, elle avait eu dans cette ombre quinze siècles de tranquillité farouche, elle avait été dans ce pays l’unique puissance, l’unique respect et l’unique effroi; elle avait régné; elle avait été, sans partage, la barbarie; et tout à coup elle voyait se dresser devant elle et contre elle, quelque chose, – plus que quelque chose, – quelqu’un d’aussi horrible qu’elle, la guillotine.
   La pierre semble quelquefois avoir des yeux étranges. Une statue observe, une tour guette, une façade d’édifice contemple. La Tourgue avait l’air d’examiner la guillotine.
   Elle avait l’air de s’interroger.
   Qu’était-ce que cela?
   Il semblait que cela était sorti de terre.
   Et cela était sorti en effet.
   Dans la terre fatale avait germé l’arbre sinistre. De cette terre, arrosée de tant de sueurs, de tant de larmes, de tant de sang, de cette terre ou avaient été creusées tant de fosses, tant de tombes, tant de cavernes, tant d’embûches, de cette terre où avaient pourri toutes les espèces de morts faits par toutes les espèces de tyrannies, de cette terre superposée à tant d’abîmes, et où avaient été enfouis tant de forfaits, semences affreuses,  de cette terre profonde, était sortie, au jour marqué, cette inconnue, et 93 avait dit au vieux monde :
   – Me voilà.
Et la guillotine avait droit de dire au donjon :
   – Je suis ta fille.
   Et en même temps le donjon, car ces choses fatales vivent d’une vie obscure, se sentait tué par elle.
   La Tourgue, devant la redoutable apparition, avait on ne sait quoi d’effaré. On eût dit qu’elle avait peur. La monstrueuse masse de granit était majestueuse et infâme, cette planche avec son triangle était pire. La toute-puissance déchue avait l’horreur de la toute-puissante nouvelle. L’histoire criminelle considérait l’histoire justicière. La violence d’autrefois se comparait à la violence d’à présent; l’antique forteresse, l’antique prison, l’antique seigneurie, où avaient hurlé les patients démembrés, la construction de guerre et de meurtre, hors de service et hors de combat, violée, démantelée, découronnée, tas de pierres valant un tas de cendres, hideuse, magnifique et morte, toute pleine du vertige des siècles effrayants, regardait passer la terrible heure vivante. Hier frémissait devant Aujourd’hui, la vieille férocité constatait et subissait la nouvelle épouvante, ce qui n’était plus que le néant ouvrait des yeux d’ombre devant ce qui était la terreur, et le fantôme  regardait le spectre.
   La nature est impitoyable; elle ne consent pas à retirer ses fleurs, ses musiques, ses parfums et ses rayons devant l’abomination humaine; elle accable l’homme de la beauté divine avec la laideur sociale; elle ne lui fait grâce ni d’une aile de papillon ni d’un chant d’oiseau; il faut qu’en plein meurtre, en pleine vengeance, en pleine barbarie, il subisse le regard des choses sacrés; il ne peut se soustraire à l’immense reproche de la douceur universelle et à l’implacable sérénité de l’azur. Il faut que la difformité des lois humaines se montre toute nue au milieu de l’éblouissement éternel. L’homme brise et broie, l’homme stérilise, l’homme tue; l’été reste l’été, le lys reste lys, l’astre reste l’astre.
   Ce matin-là, jamais le ciel frais du jour levant n’avait été plus charmant. Un vent tiède remuait les bruyères, les vapeurs rampaient mollement dans les branchages, la forêt de Fougères, toute pénétrée de l’haleine qui sort des sources, fumait dans l’aube comme une vaste cassolette pleine d’encens; le bleu du firmament, la blancheur des nuées, la claire transparence des eaux, la verdure, cette gamme harmonieuse qui va de l’aigue-marine à l’émeraude , les groupes d’arbres fraternels, les nappes d’herbes, les plaines profondes, tout avait cette pureté qui est l’éternel conseil de la nature à l’homme. Au milieu de tout cela s’étalait l’affreuse impudeur humaine; au milieu de tout cela apparaissaient la forteresse et l’échafaud, la guerre et le supplice, les deux figures de l’âge sanguinaire et de la minute sanglante; la chouette de la nuit du passé et la chauve-souris du crépuscule de l’avenir. En présence de la création fleurie, embaumée, aimante et charmante, le ciel splendide inondait d’aurore la Tourgue et la guillotine, et semblait dire aux hommes : Regardez ce que je fais et ce que vous faites.
   Tels sont les formidables usages que le soleil fait de sa lumière.
   Ce spectacle avait des spectateurs.
   Les quatre mille hommes de la petite armée expéditionnaire étaient rangés en ordre de combat sur le plateau. Ils entouraient la guillotine de trois côtés, de façon à tracer autour d’elle, en plan géométral, la figure d’un E; la batterie placée au centre de la plus grande ligne faisant le cran de l’E. La machine rouge était comme enfermée dans ces trois fronts de bataille, sorte de muraille de soldats repliés des deux côtés jusqu’aux bords de l’escarpement du plateau; le quatrième côté, le côté ouvert, était le ravin même, et regardait la Tourgue.
   Cela faisait une place en carré long, au milieu de laquelle était l’échafaud. À mesure que le jour montait, l’ombre portée de la guillotine décroissait sur l’herbe. Les artilleurs étaient à leurs pièces, mèches allumées. Une douce fumée bleue s’élevait du ravin; c’était l’incendie du pont qui achevait d’expirer.
   Cette fumée estompait sans la voiler la Tourgue dont la haute plate-forme dominait tout l’horizon. Entre cette plate-forme et la guillotine il n’y avait que l’intervalle du ravin. De l’une à l’autre on pouvait se parler.
   Sur cette plate-forme avaient été transportées la table du tribunal et la chaise ombragée de drapeaux tricolores. Le jour se levait derrière la Tourgue et faisait saillir en noir la masse de la forteresse, et, à son sommet, sur la chaise du tribunal et sous le faisceau de drapeaux, la figure d’un homme assis, immobile et les bras croisés.
   Cet homme était Cimourdain. Il avait, comme la veille, son costume de délégué civil, sur la tête le chapeau à panache tricolore, le sabre au côté et les pistolets à la ceinture.
   Il se taisait. Tous se taisaient. Les soldats avaient le fusil au pied et baissaient les yeux. Ils se touchaient du coude, mais ne se parlaient pas. Ils songeaient confusément à cette guerre, à tant de combats, aux fusillades des haies si vaillamment affrontées, aux nuées de paysans furieux chassés par leur souffle, aux citadelles prises, aux batailles gagnées, aux victoires, et il leur semblait maintenant que toute cette gloire leur tournait en honte. Une sombre attente serrait toutes les poitrines. On voyait sur l’estrade de la guillotine le bourreau qui allait et venait. La clarté grandissante du matin emplissait majestueusement le ciel.
   Soudain on entendit ce bruit voilé que font les tambours couverts de crêpe. Ce roulement funèbre approcha; les rangs s’ouvrirent, et un cortège entré dans le carré, et se dirigea vers l’échafaud.
   D’abord, les tambours noirs, puis une compagnie de grenadiers, l’arme basse, puis un peloton de gendarmes, le sabre nu, puis le condamné, – Gauvain.
   Gauvain marchait librement. Il n’avait de cordes ni aux pieds ni aux mains. Il était en petit uniforme; il avait son épée.
   Derrière lui venait un autre peloton de gendarmes. Gauvain avait encore sur le visage cette joie pensive qui l’avait illuminé au moment où il avait dit à Cimourdain : Je pense à l’avenir. Rien n’était ineffable et sublime comme ce sourire continué.
   En arrivant sur le lieu triste, son premier regard fut pour le haut de la tour. Il dédaigna la guillotine.
   Il savait que Cimourdain se ferait un devoir d’assister à l’exécution. Il le chercha des yeux sur la plate-forme. Il l’y trouva.
   Cimourdain était blême et froid. Ceux qui étaient près de lui n’entendaient pas son souffle.
   Quand il aperçut Gauvain, il n’eut pas un tressaillement.
   Gauvain cependant s’avançait vers l’échafaud.
   Tout en marchant, il regardait Cimourdain et Cimourdain le regardait. Il semblait que Cimourdain s’appuyât sur ce regard.
   Gauvain arriva au pied de l’échafaud. Il y monta. L’officier qui commandait les grenadiers l’y suivit. Il défit son épée et la remit à l’officier, il ôta sa cravate et le remit au bourreau.
   Il ressemblait à une vision. Jamais il n’avait apparu plus beau. Sa chevelure brune flottait au vent; on ne coupait pas les cheveux alors. Son cou blanc faisait songer à une femme, et son œil héroïque et souverain songer à un archange. Il était sur l’échafaud, rêveur. Ce lieu-là aussi est un sommet.. Gauvain y était debout, superbe et tranquille. Le soleil, l’enveloppant, le mettait comme dans une gloire.
   Il fallait pourtant lier le patient. Le bourreau vint, une corde à la main.
   En ce moment-là, quand ils virent leur jeune capitaine si décidément engagé sous le couteau, les soldats n’y tinrent plus; le cœur de ces gens de guerre éclata. On entendit cette phrase énorme, le sanglot d’une armée. Une clameur s’éleva : Grâce! Grâce! Quelques-uns tombèrent à genoux; d’autres jetaient leurs fusils et levaient les bras vers la plate-forme où était Cimourdain. Un grenadier cria en montrant la guillotine :
   – Reçoit-on des remplaçants pour ça? Me voici. – Tous répétaient frénétiquement : Grâce! grâce! et des lions qui auraient entendu cela eussent été émus ou effrayés, car les larmes des soldats sont terribles.
   Le bourreau s’arrêta, ne sachant plus que faire.
   Alors une voix brève et basse, et que tous pourtant entendirent, tant elle était sinistre, cria du haut de la tour :
   – Force à la loi!
   On reconnut l’accent inexorable. Cimourdain avait parlé. L’armée frissonna.
   Le bourreau n’hésita plus. Il s’approcha tenant sa corde.
   – Attendez, dit Gauvain.
   Il se tourna vers Cimourdain, lui fit, de sa main droite encore libre, un geste d’adieu, pui se laissa lier.
   Quand il fut lié, il dit au bourreau :
   – Pardon. Un moment encore.
   Et il cria :
   – Vive la République!
   On le coucha sur la bascule. Cette tête charmante et fière s’emboîta dans l’infâme collier. Le bourreau lui releva doucement les cheveux, puis pressa le ressort; le triangle se détacha et glissa lentement d’abord, puis rapidement; on entendit un coup hideux...
   Au même instant on en entendit un autre. Au coup de hache répondit un coup de pistolet. Cimourdain venait de saisir un des pistolets qu’il avait à sa ceinture et, au moment où la tête de Gauvain roulait dans le panier, Cimourdain se traversait le cœur d’une balle. Un flot de sang lui sortit de la bouche, il tomba mort.
   Et ces deux âmes, sœurs tragiques, s’envolèrent ensemble, l’ombre de l’une mêlée à la lumière de l’autre.

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«L'homme fut créé tel un animal sanguinaire et je crois qu'il aura toujours soif de sang, et qu’il s’organisera pour en avoir. Je pense qu'il est de loin le pire animal qui existe; et le seul qui soit indomptable.» (Lettre à William Dean Howells, 1899)
   L’homme est le seul animal qui donne dans l’atrocité des atrocités : la Guerre. Il est le seul qui rassemble ses frères pour aller calmement exterminer ses semblables de sang froid. Il est le seul animal qui, pour un salaire minable, marche et tue des étrangers de sa propre espèce qui ne lui ont fait aucun mal et avec lesquels il n'est pas en conflit. Et pendant les intervalles entre les guerres, il lave ses mains souillées de sang en travaillant pour la ‘Confrérie universelle de l’homme’.» (My Father Mark Twain)
~ Mark Twain (1835-1910)

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(1) La Révolution fut un «holocauste démocratique» qui a fait 1 400 000 morts; ce grand nombre est dû aussi à la guerre étrangère, superposée à la guerre civile avec ses têtes guillotinées, ses pendus et ses éventrés.
   Héritage d’une longue tradition, les exécutions doivent être publiques comme l’indique le code pénal de 1791. Le 25 avril 1792 c’est l’euphorie, une vraie fête en place de Grève, la première exécution pénale [par guillotine] doit avoir lieu. Toutes les couches de la population y participent. La chronique de Paris relate cet événement majeur pour le peuple : «Hier, à trois heures de l’après-midi, on a mis en usage, pour la première fois, la machine destinée à couper la tête des criminels […] La nouveauté du spectacle avait considérablement grossi la foule de ceux qu’une pitié barbare conduit à ces tristes spectacles». Si le geste semble «barbare» il est pourtant très loin de la torture. La foule est perplexe et assez déçue, car elle est habituée à un spectacle de longue agonie. Je vous passe l’histoire des deux tribunaux révolutionnaires qui font de la guillotine l’objet central de la France avec une succession de décapitations politiques.
   La guillotine est le grand outil de la Terreur. Du premier condamné le 25 avril jusqu’en août 1792, la guillotine restera sur place de la Grève, actuellement place de l’Hôtel de Ville. Le 21 août elle sera transportée place du Carrousel, face au palais des Tuileries alors siège du gouvernement, c’est le début des exécutions politiques. Le 27 août elle retourne place de la Grève, et bien sûr le 21 janvier 1793, elle arrivera exceptionnellement place de la Révolution pour l’exécution de Louis XVI. La place de la Révolution verra tomber la tête de Marie-Antoinette, Danton, Charlotte Corday etc. Elle fera tomber aussi les Robespierristes en juillet 1794. Même si la guillotine passe par la place de la Bastille, elle finira place du Trône Renversé, aujourd’hui nommée Place de la Nation.

Exécution de Louis XVI 

Lors de l’exposition universelle de 1889 des touristes viennent en cars organisés afin d’être spectateurs des exécutions du jour. La presse se fait de plus en plus nombreuse et présente. Entre la fin du XIXème siècle et le début du XXème, près de 600 personnes sont exécutées, la foule devient trop présente par rapport au service d’ordre. Même si en Angleterre et aux Pays Bas, les exécutions ne sont plus publiques depuis 1860 et 68, en France, le projet de loi est rejeté en 1898.
   Il faudra attendre le 24 juin 1939 pour que les condamnés à mort soient guillotinés dans l’enceinte des prisons, loin à l’abri du regard du peuple.

5 décembre 2018

Les «démons blancs»

Avec des gouvernements, tant fédéral que provincial, dont le Quotient Environnemental est à zéro, nous avons raison d’avoir peur, non pas de l'avenir mais de répéter le passé. 
   Élire la Coalition avenir Québec, c'était voter contre l'avenir! En s'accrochant aux valeurs d'hier, c'est quatre années d’enfer en perspective, notamment pour le fleuve Saint-Laurent et ses rives. Sur un ton paternaliste, François Legault a tout bonnement déclaré que le troisième lien (entre Québec et Lévis) était un projet bénéfique pour l’environnement. «Actuellement, les gens attendent à l’entrée des ponts, c’est sûrement pas bon pour l’environnement. On n’a pas besoin de faire beaucoup d’études. ... Il y a nécessité, on a besoin d’un troisième lien actuellement.» Par ailleurs, il ne rate pas une occasion de voguer sur son «audacieux» Projet Saint-Laurent : créer des zones d’innovations le long du fleuve – un port, un pôle ferroviaire, un campus de recherche et des entreprises innovantes, regroupés dans un bel environnement, et enfin, lancer de nouveaux projets de barrages hydro-électriques pour que le Québec devienne une véritable «superpuissance énergétique».

Encore une fois, on ne pourra pas compter sur les têtes à CAQ pour réduire nos émissions de GES, ni sauver les bélugas de l’extinction. On navigue en plein roman fleuve noir
Tous les élus auraient besoin d'un crash course en "awareness" environnementale. 

Sources des infos ci-après
– Archives de Radio-Canada
– Pêches et Océans Canada

Petite histoire du démon blanc

Qui peut croire que le béluga ait déjà été indésirable? Aussi inconcevable que cela puisse paraître, du XVIIe au début du XXe siècle, la baleine blanche fit l’objet d’une chasse systématique. Le béluga fut même surnommé à une époque le «démon blanc». On cherchait à l’éliminer parce qu’on disait qu’il mangeait beaucoup trop de morues et de saumons.
   En 1920, le gouvernement encouragea les pêcheurs à emporter des carabines sur leur bateau et à tirer sur tous les bélugas qu’ils voyaient. Une prime de 15 $ était remise à chaque personne qui rapportait une queue de béluga au ministère de l’Agriculture, de la Colonisation et des Pêcheries. Un bombardement aérien fut aussi organisé.

[De 1880 à 1950, les pêcheurs ont capturé jusqu'à 15 000 bélugas dans le Saint-Laurent. Dans les années 1970, moins de 350 bélugas nageaient dans les eaux du fleuve.
   Les bélugas du Canada doivent subir la modification d'habitat que leur imposent les barrages sur les rivières. L'activité humaine (comme l'observation de baleines), le réchauffement planétaire, et la pollution peut aussi nuire à la baleine blanche. Les niveaux de contaminants, tels que les BPC ou le DDT, sont parfois 30 fois plus élevés chez le béluga du Saint-Laurent que dans celui de l'Arctique. (Ndlr : Ce n'est pas parce que le DDT a été interdit, qu'il a disparu pour autant; le poison a fait lentement son chemin dans toute la chaîne. Même problème avec le glyphosate dans le Roundup de Bayer/Monsanto dont on commence à répertorier les graves conséquences. Je me demande quelle sorte de claque dans face il nous faudra pour nous réveiller... Aucun gouvernement ne l'a interdit.) 
   La faible population du béluga du Saint-Laurent le rend plus vulnérable aux éventuels déversements de pétrole et aux infections virales.
   À partir de 1988, un plan interministériel voit le jour pour aider le béluga à survivre dans les eaux du Saint-Laurent. Le gouvernement du Québec signe des accords avec les industries afin de réduire la contamination du fleuve, et des usines de traitement d'eaux usées sont installées le long des berges. En 2004, leur nombre se situait entre 300 et 705. (Archives de Radio-Canada)]

Photo: Darryl Dyck / La Presse canadienne

De nos jours, ce ne sont plus les chasseurs qui menacent le béluga, mais bien les changements climatiques et la pollution. Ces baleines blanches meurent ou sont gravement malades à cause des parasites, des infections causées par les bactéries, des virus et du cancer. 27 % des bélugas de l’estuaire du Saint-Laurent meurent d’un cancer. Il s’agit du taux de mortalité le plus élevé autant chez les animaux que chez les humains.

[Le béluga de l’estuaire du Saint-Laurent est présent dans l’estuaire du Saint-Laurent, la rivière Saguenay et le golfe du Saint-Laurent. L'estimation de la population la plus récente indique qu'il y a environ 900 individus et que la population a diminué d'environ 1% par année depuis le début des années 2000. Cette population de béluga est actuellement inscrite sur la liste des espèces en voie de disparition de la LEP.
   Les nombreuses menaces induites par les activités humaines nuisent au rétablissement du béluga de l’estuaire du Saint-Laurent. Ces menaces incluent : la contamination chimique élevée du béluga, de ses proies et de son habitat; le bruit et les perturbations associés aux projets d’aménagement marin, à la circulation maritime et aux activités d’observation des baleines; la réduction de l’abondance, de la qualité et de la disponibilité des proies; et les autres dégradations de l’habitat – p. ex. découlant de la construction de quais, de marinas et de barrages hydroélectriques, de l’expansion de l’industrie touristique, des opérations de dragage, de l’introduction d’espèces exotiques. (Pêches et Océans Canada, mise à jour le 15 mars 2018)]
Source : Mesures de rétablissement pour trois populations de baleines en péril 

Mortalité en 2018
Les données provisoires compilées par le Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins indiquent que douze carcasses de bélugas ont été retrouvées jusqu’à présent (11 octobre 2018). De ce nombre, on compte cinq femelles adultes et cinq nouveau-nés

De quoi est mort ce nouveau-né? Comme on le voit dans la liste des menaces, les causes peuvent être multiples. Il n’y a plus de refuge contre la maudite pollution envahissante infiltrée partout.

Le béluga
Le béluga mâle pèse 1 500 kg, la femelle 1 350 kg et le veau de 35 à 85 kg. La femelle peut donner naissance à un petit une fois aux trois ans, vers la fin du printemps ou au début de l’été. La durée de vie moyenne du béluga est 10 ans, mais sa longévité maximale est de 25 à 30 ans.
   Il a un air naïf, il est doux et il semble toujours souriant. Le béluga est un mammifère cétacé très attachant. Il vit entre autres dans la région de Tadoussac, où l’eau douce du Saguenay et l’eau salée du Saint-Laurent se mélangent. Aussi appelé baleine blanche, le béluga a transformé le village de Tadoussac en un important centre d’observation de petites et grandes baleines.
   Le béluga nage plus lentement que le dauphin. Sa vitesse de croisière ne dépasse pas 22 kilomètres à l’heure. Il ne jaillit pas de l’eau, ne nage pas en bondissant et montre rarement sa queue quand il plonge. Le béluga peut passer de 15 à 30 minutes sous l’eau en une seule plongée. C’est pourquoi il peut aisément nager sous la glace. Il nage bien dans les bas-fonds, mais peut aussi faire des cabrioles dans moins de deux mètres d’eau.

L’origine du mot «béluga»
Le nom «béluga» vient du mot russe belukha qui veut dire «blanc». Le béluga a plusieurs surnoms : on l’appelle baleine blanche, marsouin, et même démon blanc à une certaine époque. Son nom scientifique est Delphinapterus leucas, ce qui signifie «dauphin blanc sans aileron».

Le langage du béluga
On dit que le béluga est capable d’émettre un répertoire impressionnant de sons. Voici ce qu’il peut nous faire entendre si on le visite sur le fleuve : des aboiements, des caquètements, des cliquetis, des gargouillements, des grognements, des gémissements, des reniflements, des couinements, des trilles, des sifflements, etc.

L’Institut national d’écotoxicologie du Saint-Laurent
Pierre Béland a fondé en 1987 l’Institut national d’écotoxicologie du Saint-Laurent, un organisme privé voué à la recherche sur les effets des produits chimiques toxiques dans les écosystèmes aquatiques (marins et dulcicoles).

Les recherches en biotechnologie marine
Les avancées des sciences de la mer ont permis de développer la biotechnologie marine, une nouvelle approche alliant moyens technologiques et connaissance des écosystèmes marins. Face aux conséquences désastreuses de l’industrialisation et de la surexploitation des ressources, la science fouille maintenant les processus naturels et tente de les reproduire, afin de pallier l’essoufflement de la nature.

La trop forte demande de produits de la mer
L’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) prévoit que, d’ici 25 ans, la demande en produits aquatiques excédera de 55 millions de tonnes annuellement la capacité de production des pêches traditionnelles. C’est pourquoi plusieurs se tournent maintenant vers l’aquaculture.

L’aquaculture
L’aquaculture existe depuis plusieurs siècles en Asie comme en Europe, mais sa pratique a fait un bond avec le développement des technologies. Elle produit maintenant entre 25 et 30 % des protéines aquatiques que consomment les humains.
   Si l’élevage est une solution de remplacement intéressante face à l’épuisement des stocks naturels, il ne faudrait pas occulter ses conséquences, d’autant plus que les activités de pêche traditionnelle ne diminuent pas pour autant.
   Si l’on pense à la salmoniculture en mer, elle implique de fortes concentrations de populations dans un territoire restreint, ce qui fait pression sur l’écosystème. Des risques de maladies existent, tout comme la possibilité de croisements entre les espèces sauvages et d’élevage, modifiant ainsi les particularités nécessaires à la survie des premiers. (...)
   Ainsi, des programmes d’aquaculture sont mis sur pied, produisant certaines variétés de poissons très en demande, tels le saumon, la moule, la crevette et le pétoncle. D’autres chercheurs travaillent à inventer de nouvelles espèces pour remplacer celles qui sont épuisées, ou à trouver des débouchés pour des produits sous-exploités comme l’oursin ou le maquereau.
   L’idée est prometteuse mais, comme toute intervention, elle peut créer des déséquilibres et devenir, elle aussi, une source de pollution.

Les «démons noirs» 

Photo : La Presse canadienne / Jeff McIntosh 

La première ministre de l'Alberta, Rachel Notley, se débat comme un diable dans l'eau bénite pour écouler son pétrole. Le but du rationnement est de faire baisser les réserves de pétrole que la province peine à exporter par manque de pipelines. Le politologue Frédéric Boily, de l'Université de l'Alberta, croit que la première ministre veut absolument démontrer qu'elle agit pour aider l'industrie pétrolière, notamment pour des raisons électoralistes. «Elle utilise toute une panoplie d'options à sa disposition, que ce soit en achetant des trains pour exporter du pétrole ou en limitant la production. Rachel Notley veut arriver devant l'électorat et dire qu'elle a tout fait en son pouvoir pour faire avancer les choses rapidement.» (ICI Alberta, 03/12/2018) 

Le plus grand oléoduc d'Amérique du Nord
La société canadienne TransCanada voulait construire à la hauteur de Cacouna au nord-est de Québec, un terminal pétrolier connecté à l'oléoduc Énergie Est. La ligne était destinée à transporter chaque jour 1,1 million de barils  des champs de pétrole de l'Alberta aux côtes du New Brunswick. Un voyage de 4600 km, qui aurait fait de l'oléoduc le plus grand d'Amérique du Nord. Des travaux de forage avaient déjà été engagés par TransCanada, dans le cadre des études de faisabilité, avant d'être suspendus sur une décision de justice.
   Greenpeace et d'autres organisations écologiques continuent de s'opposer à la construction de l'oléoduc Énergie Est alléguant «les menaces pour l'environnement, les communautés, l'eau potable et l'aggravation de la crise climatique». TransCanada a repoussé la finalisation de l'oléoduc Énergie Est à 2020, soit deux ans et quelques millions de dollars de plus que prévu initialement. Pour la société pétrolière donc, ce n'est que partie remise.

Le combat continue 
Le nouveau premier ministre conservateur du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, qui a probablement subi une «lobbytomie», tente de faire revivre Énergie Est.

TransCanada a abandonné le projet de 15,7 milliards, il y a plus d'un an, mais le premier ministre, Blaine Higgs ainsi que certains autres premiers ministres et politiciens fédéraux tentent de relancer le projet d'oléoduc comme moyen d'acheminer davantage de brut de l'Ouest vers les raffineries de l'Est du Canada et de l'exporter vers les marchés étrangers.
   M. Higgs a fait valoir que l'Ontario – avec le nouveau gouvernement de Doug Ford – ne s'oppose pas au transport du pétrole sur son territoire, et qu'Énergie Est obtient des appuis au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. Le premier ministre du Nouveau-Brunswick a affirmé avoir discuté d'Énergie Est il y a deux semaines avec le premier ministre Justin Trudeau. Il a soutenu que M. Trudeau avait indiqué qu'il serait prêt à discuter de nouveau de la question si M. Higgs réussissait à convaincre le Québec.
   M. Higgs a dit croire que, si une société de portefeuille était créée, s'enregistrait auprès de l'Office national de l'énergie et démarrait le processus, TransCanada pourrait être disposée à s'impliquer de nouveau.
   Le chef du Parti conservateur fédéral, Andrew Scheer, a également été un grand partisan d'Énergie Est et a déclaré qu'un gouvernement conservateur fédéral chercherait à relancer le projet. (Kevin Bissett; La Presse canadienne, Fredericton)  

25 novembre 2018

Simplicité et humanité

Nanao Sakaki, qui traduisait les haïkus d'Issa, a dit de lui : «il n’était pas doué de génie, mais il gardait honnêtement son expérience au fond de son cœur, il avait gardé sa simplicité et son humanité». C'est ainsi qu'Issa a écrit ses haïkus; c'est ainsi qu'il a créé son style. Rien d'extravagant. Il a digéré qui il était : un être humain avec des expériences humaines. Souvent en classe, je lis ces mots deux fois. Ne les oubliez pas, ils vous aideront. Ne vous inquiétez pas du style. Soyez qui vous êtes, respirez pleinement, soyez vivant. 
[...]
Si j’ai digéré tout ce que je sais et ce que je suis, alors quand j'écris une phrase, elle atteint directement votre cœur et votre esprit, et il n'y a pas de mots grinçants qui ne conviennent pas, pas de mots qui ont peur.
[...]
Un écrivain peut faire cela avec équanimité et clarté parce que ses os, son cœur et ses muscles l'ont mangé et qu'il est prêt à affronter sa peur. En définitive, un écrivain doit être prêt à s'asseoir au fond de la fosse, à s'engager à y rester et à laisser tous les animaux sauvages s'approcher, même à les appeler, à les affronter, à les noter et à ne pas s'enfuir.

~ Natalie Goldberg (Wild Mind, Living the writer’s life)

Le haïku est la forme d’écriture la plus dépouillée. Pourtant, elle éveille instantanément une image, un sentiment, une émotion, en dépit de l’économie de mots. Ce genre poétique peut à la fois «pacifier» et «illuminer».

Issa (Kobayashi Yataro) 1763-1828

Sortant du sommeil
après de longs bâillements
les amours du chat


Ce monde imparfait
Mais pourtant recouvert de
Cerisiers en fleurs  

Les hommes encore
même les épouvantails
ne sont pas droits

Le croissant de lune –
comme courbé par le froid
tellement intense

Lorsque l'on vieillit
même la longueur des jours
est source de larmes

ISSA HAÏKU
Traduction : Joan Titus-Carmel
ISBN : 2864321998
Éditeur : Verdier (01/10/1992)

À chaque fois que je lis les textes de l’écrivaine (française) Mireille Bergès, je ressens qu’elle «a gardé honnêtement son expérience au fond de son coeur, qu’elle a digéré qui elle est : un être humain avec des expériences humaines». Vision, humour, joie, nostalgie, tristesse, espoir, toute une panoplie d’émotions et de sentiments étalés sans autocensure. Visitez sa page, vous aimerez j’en suis certaine.

À propos
Scribouilleuse de petits textes que je partage ici pour me faire connaître. Certains ont déjà été publiés, d'autres non. Tous sont protégés.

Le 8 novembre 2018

De ces nuits où tout nous remonte à la gueule. Les erreurs. Les déceptions. Les trahisons. Les échecs. Les choses moches. Uniquement les choses moches. Alors on lit. On fume. On dévalise le frigo. On se remplit. Pour les chasser. Ne pas leur laisser de place. Une heure. Deux heures…

Les garces se faufilent. En douce. Au détour d’une lampe éteinte. On a beau enfouir la tête sous l’oreiller, se lover sous la couette, se recroqueviller. Elles sont là, ces idées tordues. Rallumer la lampe. Se lever. Marcher. Ouvrir la fenêtre. Écouter les bruits de la nuit… Frissonner et se coucher à nouveau. Et voilà que les sales souvenirs repartent à l’assaut. Quatre heures. Cinq heures…

De ces nuits où plus rien ne vaut la peine. Ni les amis. Ni les plus proches ni les plus chers. Pas même la vie. Six heures…

La nuit meurt à petit feu. Une lueur s’infiltre dans la fente du volet. Les oiseaux ne s’y trompent pas et rivalisent de trilles et vocalises. Se lever une fois encore. Faire couler le café. Ouvrir grand la fenêtre et humer l’air du jour. Et soudain, là, devant nous, le soleil jaillit et colorie l’herbe, les arbres, les toits… Un éblouissement de matin nouveau.
Alors les chagrins de la nuit sont effacés. Ce sera une belle journée.

M.B. Essen'ciel

Illustration : Aleutie (insomnie)  

Bonheur
Le 22 novembre 2018

Il y aurait le mauve, celui de l'encre de mes premiers mots
et l'odeur de la craie hanterait ma mémoire.
Je tournerais émue les pages fragiles
d'un livre au papier jauni.
L'argent de l'olivier scintillerait,
Là, j'ai grandi, là, on m'a aimée.
Le vert bouteille du chêne apparaîtrait, parfois,
Selon les caprices du vent qui soulèvent la jupe de la tonnelle.
Par-dessus nos têtes, le ciel, bleu saphir parlerait de l'Orient.
Changeante, câline ou cruelle,
Outremer ou turquoise,
La Méditerranée bercerait nos sommeils,
Elle nous embarquerait pour d'audacieux périples.
Il y aurait des géraniums devant la fenêtre,
Des pétunias et des bouquets de capucines,
Fuchsia, framboise, incarnat,
Lilas, parme, rose thé,
Des couleurs qui chantent la gaieté.

Il y aurait plus loin, tout au long du chemin,
Des genêts bouton d'or
Au parfum de miel entêtant.
Une bougainvillée téméraire grimperait à l'assaut de la grille,
Abri précaire mais rassurant,
Orangé flamboyant
Sur le gris de l'ennui.
Il y aurait des tomates,
Des fraises,
Quelques poivrons,
Les étals du marché
Quand l'été se fait lourd.

Il y aurait un chat bien sûr,
Yeux mi-clos,
Vautré en plein soleil
Et je m'apaiserais à caresser son dos.
Il y aurait les pins
Plus loin sur la colline,
Émeraudes penchées,
Bruissantes de cigales.
Il y aurait le noir corbeau de ses cheveux,
Le bleu pâle de tes yeux,
Et puis sa peau couleur brugnon que le soleil avive,
Le rose de tes joues répondrait aux lauriers
Qui bordent la restanque.
Oh ! vous, mes aimés!

Il y aurait tout cela
Et bien plus encore,
L'odeur du pain perdu,
Celle du lavandin,
Un ami,
Un amour,
Un sourire...
Des couleurs plein les mirettes
Pour le feu d'artifice
Et puis des coquelicots dans un champ de blé,
Pour la simplicité,
Pour le bonheur discret,
Pour dire que j'existe
Et que ...
J’aime la vie!

M.B. Rêves-Poussières