6 octobre 2013

Poètes et écrivains d’ici – 4

Crédit photo : Lionel de Segonzac, château de sable  

Le retour de l’enfant prodigue
Jean-Aubert Loranger (1896-1942) 

[Extraits]

III
Les heures s’égrènent sans cesse
De l’immobilité  du temps,
Et dans le sablier, la chute,
Sans fin, recommence toujours
De mes espoirs pulvérisés.

Alourdie des douleurs humaines,
L’heure s’écroule avec le sable
Et s’entasse dans un passé
Qu’il faudra de nouveau revivre.

L’avenir n’est rien qu’un retour
Perpétuel sur soi-même,
La vie qu’on reprend à l’inverse,
Un passé toujours ressassé
Comme un sablier qu’on retourne.

Au fond de tous les cœurs s’entasse,
Alourdi des douleurs humaines,
Un passé qu’il faudra revivre.

IV
Merveilleux prélude ébloui
Dans ces beaux matins sûrs d’eux-mêmes,
Quand persiste encore dans l’âme
L’illusion des joies accessibles.

Tout le meilleur de l’avenir
Se livrait sans défense,
Et l’aube qu’assiégeait l’orage
Était trop dure pour croire à l’ombre.

Les chemins enseignaient l’espoir,
Et je ne voulais rien savoir
Que cet environnement cher
De mes rêves tronquant l’espace.

Mes pas marquaient, dans la poussière,
Une implacable décision
Dont personne n’aurait pu dire
Qu’ils ignoraient tout de la vie.

Qui donc aurait pu dire alors
Qu’une si glorieuse démarche
Apprenait la vie sur la pente
Douloureuse d’un Golgotha?

Et qu’en un retour repenti,
Ce pèlerin de la conquête
Ne serait plus qu’un vagabond
Cherchant ses traces dans le vent.

VI
Comme tout cela est court,
Quand je le vois par la fin.

Je ne me souviens pas
D’avoir été vagabond,
Et je n’en crois pas la route,
Et le vœu que je lui fis.

Comment puis-je recenser,
Sans plus rien que ma mémoire,
Des passés qui s’interceptent :
Un passé rapetissé
Dans ma mémoire lasse.

Je suis stable, maintenant,
Circonscrit dans un exergue
Qu’est ce grand mur tout autour
De la maison du retour.

Que m’importe l’horizon,
Et qu’il recule toujours
Devant celui qui s’y voue.

Maintenant que je demeure,
La distance la plus grande
C’est ce que mon œil mesure.

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