12 juillet 2013

Dustin Hoffman : un moment de vérité



Ce clip fera certainement le tour de la planète – et pour cause. Un vieux débat (non résolu) remis sur la table d’une manière touchante par un de nos acteurs américains préférés, Dustin Hoffman. 

Dans cet extrait d’interview (sortie du placard de l’American Film Institute) Mary Sue demande à Hoffman : «Comment te sentirais-tu si tu étais né femme?» (Non pas ‘comment te sentirais-tu [déguisé] en femme’, de préciser l’acteur.) 

Hoffman raconte comment son rôle dans Tootsie (un homme se déguise en femme pour obtenir un job) lui a ouvert les yeux sur la façon dont la société impose aux femmes des critères de beauté subjectifs. Ce film a certes un côté satirique vis-à-vis des comportements sexistes, mais Hoffman affirme que, pour lui, ce film n’était pas une comédie.

Avant d’accepter le rôle, Hoffman avait demandé qu’on procède à plusieurs essais de maquillage. Lorsqu’il vit le dernier test à l’écran, il se déclara satisfait d’avoir l’air d’une femme, et non pas d’un travesti. Par contre, son apparence le rebutait :  
«J’étais choqué de ne pas être plus séduisante. Alors, je leur ai dit, ‘D’accord, j’ai l’air d’une femme, mais maintenant, rendez-moi belle.’ Je pensais que je devais être belle pour jouer un rôle de femme; en tout cas le plus possible.» Le maquilleur lui avait malheureusement répondu : «Désolé, mais c’est le mieux qu’on peut faire avec toi.»

Sa vive déception l’amena à réévaluer la façon dont il avait jusque-là apprécié les femmes en fonction de leur beauté physique :
«C’est à ce moment-là que j’ai eu comme une révélation. J’ai pleuré, et une fois à la maison, j’ai dit à ma femme ‘Je dois faire ce film’. Elle m’a demandé ‘Pourquoi?’ Et j’ai répondu ‘Parce que je pense que je suis une femme intéressante quand je me regarde sur l’écran. Et je sais que si je me rencontrais dans un party, je ne parlerais jamais à ce personnage. Parce que, physiquement, elle ne répond pas aux critères qu’on nous a dits indispensables pour aborder les femmes.’ Et elle m‘a demandé : ‘Que veux-tu dire?’, et j’ai répondu : ‘Il y a trop de femmes intéressantes que je n’ai pas connues dans cette vie parce que j’ai subi un lavage de cerveau.’»

En effet, le cinéma, la télé, les magazines et Internet nous dictent, encore aujourd’hui, ce qu'il faut trouver beau ou laid, acceptable ou inacceptable. Cette manipulation médiatique axée sur les apparences est un piège sordide qui ravage des vies et mène facilement à la discrimination, voire au racisme.

Un clip à faire circuler, car il pourrait en aider plusieurs à prendre conscience du poids écrasant des standards de beauté que notre société impose, et du tribut que les gens dits «ordinaires» payent en vertu de ces normes complètement superficielles et irréalistes. Et comme Dustin, chacun peut se demander combien de personnes il/elle a pu rejeter au cours de sa vie à cause de ces normes…

Complément : une interview autobiographique avec Dustin Hoffman (Inside The Actors Studio) - un acteur qui ne craint pas d'exposer sa vulnérabilité, et c'est peut-être ce qui en fait un si grand comédien...  
http://www.youtube.com/watch?v=brYf9HanYME&NR=1&feature=endscreen

Pensée du jour :
 
«Ignorant la nature de nos perceptions, nous traitons les autres comme s’ils étaient des personnages sortis d’un feuilleton de télévision. Par exemple, vous rencontrez une fille qui vous plaît, et vous vous dites : ‘Mmm, en voilà une qui est tout à fait dans le style Canal Plus – par exemple – et comme en général j’aime bien les programmes de cette chaîne-là, je sais d’avance que ce qu’ils font me plaira. Alors, il y a de fortes chances pour que je m’entende bien avec une fille qui a le style Canal Plus.’ Fort de cette constatation, vous vous lancez et, pendant un certain temps, tout va très bien (…). Mais qu’advient-il de l’idylle, au bout d’un certain temps? Il semblerait que le programme ait changé tout seul : ce n’est plus Canal Plus que vous avez sur votre écran devant vous, mais la 63e chaîne – des images chargées d’agressivité et de colère – avec de temps en temps un petit retour sur le Canal 49 qui distille du rêve et des fantasmes à longueur de temps. (…) Le plus étonnant, c’est que lorsque toutes les chaînes commencent à se mélanger, personne ne pense à se demander : ‘Mais qui a donc branché ces chaînes-là? Qui est à l’origine de toute cette débauche d’images et d’activité?’ N’est-ce pas bizarre que nous ne nous interrogions jamais là-dessus?»
~ Charlotte Joko Beck (Soyez zen)

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