31 juillet 2013

La meilleure place : la nôtre

«Peu importe le lit, du moment que je suis confortable… et à ma place.»
(Photographe inconnu)

La place de l’autre
Jean-Louis Fournier

Pourquoi vous avez dit «Je me mets à votre place»?
       De grâce, restez à votre place. D’abord, je ne veux pas qu’on se mette à ma place, surtout si c’est une place assise. Si vous vous mettez à ma place, je n’aurai plus de place, où je vais me mettre? À ma place, il n’y a pas de place pour deux. Vous n’allez quand même pas vous mettre sur mes genoux? Vous avez dit ça par sympathie. J’ai eu des malheurs, vous vous voulez compatir, partager mon chagrin.
       Devant le malheur, on n’est jamais à la même place. Comme au théâtre, il y a ceux qui sont au premier rang, aux places les plus chères, et ceux qui sont derrière.
       On ne peut être malheureux à la place de quelqu’un.
       Imaginez un homme qui s’enlise. Si vous vous mettez à sa place, vous vous enlisez avec lui. Vous voulez le sortir de là? Restez à votre place, sur la terre ferme, et tendez-lui la main.
       De grâce, restez à votre place. Après une plaisanterie sur les aveugles, il y a toujours un bien-voyant mais non comprenant qui s’indigne : «Je me mets à la place des aveugles et ça ne me fait pas rire.»
       Mais les aveugles ont ri.

Extrait de :
Ça m’agace!
Éditions Anne Carrière

30 juillet 2013

Étranges clichés morphogénétiques

Le photographe québécois Ulric Collette mène une étude morphogénétique en fusionnant les moitiés de visages d'individus ayant un lien génétique. 

Fascinant à examiner. 

Très rares sont les gens dont les deux côtés du visage sont presque symétriques. Alors dépendant des moitiés que l’on combine, les similitudes pourraient varier notablement.

Cousins : Justine, 29 ans et Ulric, 29 ans.
Au premier abord, ils n’ont pas l’air de partager tellement de similitudes. Mais si l’on n’observe attentivement, on en trouve notamment au niveau de la mâchoire.

Frères : Mathieu, 25 ans et Ulric, 29 ans.
Combinaison stupéfiante.

Frères : Christophe, 30 ans et Ulric, 29 ans.
La symétrie est plus accentuée qu’avec Mathieu.

Jumeaux : Alex et Sandrine, 20 ans.
Bien que le visage d’Alex soit moins charnu on peut noter de nombreux traits communs.

Sœurs : Anne-Sophie, 19 ans et Pascale, 16 ans.
Étant donné qu’elles ont la même coiffure et plusieurs traits similaires on jurerait qu’il s’agit d’un cliché sans mixage. 

Jumelles : Laurence et Christine, 25 ans.
Même si leur coiffure et leur maquillage les différencient, la forme du visage, les lèvres et le nez s’emboîtent quasi symétriquement.

Sœur et frère : Karine, 29 ans et Dany, 25 ans.
Taillons les chevaux de Karine et rasons la barbe de Dany : comme un seul visage…

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Famille nucléaire  
Fille 1 / père : Amélie, 33 ans et Daniel, 60 ans.

Père / fille 2 : Daniel, 60 ans et Isabelle, 32 ans.

Mère / fille1 : Julie, 61 ans et Amélie, 33 ans.

Mère / fille 2 : Julie, 61 ans et Isabelle, 32 ans.
On dirait une pub «avant/après».

Sœurs : Isabelle, 32 ans et Amélie, 33 ans.
Grande symétrie.

Similitude frappante chez les membres de cette famille : le nez.

Les filles ressemblent-elles plus à leur mère qu’à leur père?

Je serais curieuse de voir un combiné père / mère, même s'ils n'ont pas de lien génétique.  

Site : http://genetic.ulriccollette.com/

29 juillet 2013

Quand le tatouage prend de l’âge

Certains tatouages sont des œuvres d’art graphiques.
Mais au fur et à mesure que la peau vieillit, le chef-d’œuvre peut se transformer en horreur. Pour voir les effets du vieillissement (source de l'article) :
http://www.psychologytoday.com/blog/iage/201305/aging-tattoos

Ça me fait penser au Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde.
Tout est beau en surface, mais allons voir ce qui se passe au sous-sol…

Que se passe-t-il quand les tatouages vieillissent?
Mario D. Garrett, Ph.D. in iAge

Autrefois, les tatouages étaient réservés aux marins, aux condamnés, aux cyclistes et aux groupes autochtones. La mode s’est répandue à toutes les couches de la société, et malgré le récent boom de tatouage, il y a eu un déclin dramatique des infections associées aux tatouages. Cependant, il existe d'autres préoccupations associées au tatouage, dont le moindre est le vieillissement.

Le vieillissement change la forme, la composition et l’élasticité de la peau et conséquemment les tatouages reflètent ces changements puisqu’ils sont incrustés dans la peau. Ian Eames (University College London) a étudié ce changement à l’aide d’un modèle mathématique illustrant «l’évolution» cutanée des tatouages avec l'âge.

Physique, chimie et biologie

Les encres des tatouages sont fixées dans une solution d'alcool éthylique, d’eau purifiée, d’hamamélis, de listerine, de glycol propylène ou de glycérine (généralement obtenu à partir de graisses animales). Les encres peuvent être composées de particules diverses. Bien qu'il y ait des couleurs non métalliques (par ex. le noir obtenu par la carbonisation d’os d'animaux), la plupart des couleurs sont obtenues à partir de métaux – des métaux lourds tels que mercure, plomb, cadmium, nickel, zinc, antimoine, béryllium, chrome, cobalt, nickel, arsenic et fer.

En Californie, après 1986 – quand la Proposition 65 fut adoptée – la plupart des salons de tatouage ont dû aviser leurs clients que les encres contenaient des métaux lourds pouvant causer le cancer, des malformations congénitales et autres problèmes reproductifs. Or certaines couleurs ne peuvent être obtenues qu’en utilisant de l'encre métallique. En perforant la couche supérieure de la peau (parfois à raison de 3000 piqûres par minute), les métaux se répandent sous la peau avec l’agent fixatif.

Pour se protéger, le système immunitaire réagit à ce traumatisme en envoyant des globules blancs dans la région, causant ainsi des rougeurs visibles. Les globules blancs attaquent la zone et absorbent certains métaux lourds en vu de les expulser hors du corps. Le reste des métaux lourds est enfermé dans des cellules protectrices, et scellé dans la peau.

Avec le temps, les cellules protectrices se divisent ou meurent et sont expulsées du corps, emportant avec elles les métaux lourds qui y étaient enfermés. L’élimination des tatouages au laser accélère ce processus en tuant les cellules et en augmentant l'exposition à la toxicité des métaux lourds nouvellement libérés. Comme un vieux chiffon qui se décolore, le tatouage perd ses détails – couleurs et définition (certaines couleurs sont plus sujettes à la décoloration que d'autres). Les détails complexes du tatouage sont donc les premiers à disparaître. Par ailleurs, les particules d'encre des vieux tatouages s’incrustent plus profondément dans la peau au fil du temps, rendant le tatouage plus flou, et par ailleurs plus difficile à éliminer au laser. Les tatouages métalliques faussent également la résonance magnétique.

Une étude menée en 2008 indiquait que  20 % des individus tatoués regrettaient leur choix, et beaucoup d'entre eux avait cherché une façon de les éliminer. Mais le vieillissement des tatouages n'est pas tant un problème de physique, de chimie ou de biologie, qu’un problème de tournure d'esprit. Ce que vous trouvez cool à 18-25 ans ne sera peut-être pas tellement cool une fois que vous aurez des petits-enfants. Se faire tatouer c’est vouloir laisser un témoignage permanent d'une époque révolue.

COMMENTAIRE

Les gens se font tatouer pour des motifs religieux, pour se distinguer ou témoigner d’un engagement amoureux, etc. Je me demande si après une rupture amoureuse, on peut supporter la vue de ce symbole permanent

J’ai lu quelque part que le tatouage serait une forme atténuée d’automutilation ou d’auto-flagellation, des pratiques répandues à diverses époques, notamment dans plusieurs religions, sectes et tribus. Ces expériences seraient incrustées dans la «mémoire» génétique collective et certains individus y succomberaient plus facilement que d’autres.

En tout cas, j'ignore comment on fait pour supporter volontairement le supplice qu’exige le tatouage complet du corps...

28 juillet 2013

Message clair et net!



3,8 litres par jour, pas plus!

En Amérique du Nord, nous sommes champions en gaspillage d'or bleu...

Directed by Olivier Agostini (Film), Summer 2008
Produced on the topic of water conservation.

Awards:
* Second Place, 2009 Cannes Film Festival Young Director Award (Non-european film school category)
* Consideration by the 2009 Academy of Television Arts & Sciences College Television Blue Ribbon Panel
* 2009 Silver Telly Award, Commercial Category
* 2009 Gold ADDY Award

For more information:
http://www.designmattersatartcenter.org/

27 juillet 2013

Ce coeur qui bat...

(GIF http://headlikeanorange.tumblr.com/ - Photo : Neil Fifer)  

Comme il facile de perdre son pH cardiaque équilibré (constante d’équilibre) en matière d’amour, de compassion et de bienveillance! Une couple de contrariétés, et pouf! on bascule.

Comme le suggère Sara, se concentrer sur les qualités du coeur quelques minutes avant de démarrer la journée peut en effet nous aider à ne pas perdre notre équilibre au moindre désagrément. 

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[Traduction/adaptation maison]

Commencez votre journée avec «cœur»
Par Sara (HeartMath Institute)

Dans la plupart des cultures autour du monde, les gens commencent leur journée en pensant à ce qu'ils vont le faire. Ils vérifient leur agenda d’activités. Ils se concentrent sur les innombrables tâches à accomplir durant les prochaines 12 / 16 heures.

Cette «préparation» matinale peut être très précieuse. Mais avant de plonger dans l'ordre du jour, je vous invite à vous concentrer sur quelque chose de différent. Posez-vous la question suivante : «combien d’amour, de bienveillance et de compassion
suis-je prêt à offrir aujourd’hui?»

J'ai débuté mes journées avec cette question durant plusieurs mois. Nous savons tous, bien sûr, que chaque jour apporte son lot d’événements – certains anticipés et d’autres non. Mais maintenant, je tiens compte de ce que je peux apporter aux autres, à moi-même et au monde.

Il s'agissait d'une nouvelle approche pour moi, et j’ai découvert que cela ajoutait souplesse et bienveillance dans mon quotidien. J’ai l’impression de contribuer à la vie, à celle des autres et de contrôler mon temps.

Se brancher sur le cœur peut changer notre perception de la vie; et très certainement faire de nous des amplificateurs de bienveillance et de compassion plus fiables.

S’engager

Nous avons tous vécu des moments difficiles ou dérangeants où il fallait nous calmer et respirer à fond pour éviter de dire ou de faire des choses regrettables. Nous voulions maîtriser nos réactions, et nous arrivions à nous imaginer dans les bottines de l’autre. Nous avons probablement même tendu la main et contribué à améliorer le sort des autres.

Mais, nous devons aussi admettre qu'il y a des moments où nous avons échoué. Nous avons oublié de respirer et de faire preuve d'empathie. Nous pouvons avoir réagi en proie à la colère ou à la peur, ou avoir figé au point de ne rien faire face aux émotions négatives, aux souffrances ou aux malheurs d’autrui.

Les personnes branchées sur leur cœur sont toujours mieux préparées pour faire face à n’importe quelle situation. En plus de commencer leur journée avec la question «combien d’amour, de bienveillance et de compassion suis-je prêt à offrir aujourd’hui?», ils réservent un autre moment à chaque jour pour se connecter à fond dans leur cœur. Ils vont à l’intérieur, ajustent leur cohérence cardiaque et accèdent à l'intelligence intuitive du coeur. Indépendamment de ce qui se passe, ils s'engagent à rester connectés aux qualités du cœur pendant toutes leurs activités et leurs rencontres.

Cultiver les qualités de cœur

Le cœur possède de nombreuses qualités, et elles ont toutes le pouvoir de transformer.
Parmi les plus puissantes :
Amour
Gratitude
Bienveillance (care)  
Compassion

Ma propre expérience et celle de beaucoup d'autres ont confirmé les bénéfices de cultiver les qualités du coeur. Mais, plutôt que se fier uniquement à des preuves anecdotiques – néanmoins convaincantes – HeartMath a passé plus de deux décennies à mener des recherches scientifiques pour en confirmer les avantages.

Les recherches ont démontré sans équivoque que la santé mentale, émotionnelle et physique s’améliore notablement chez les gens qui s'engagent sincèrement à cultiver les qualités du cœur – ce que HeartMath appelle «adopter un mode de vie centré sur le cœur» (practicing heart-based living).

Les résultats de recherches ont abondamment été publiés dans des livres et des revues professionnelles dans le monde entier.
Pour en savoir plus : http://www.heartmath.org/

Vous aimerez peut-être :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2013/02/laissez-votre-cur-parler-votre-cerveau.html
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2013/05/intelligence-intuitive-du-cur.html

26 juillet 2013

Êtes-vous un «aimant» à moustiques?

 
Vous pouvez blâmer votre sang
Par Megan (The Mother Nature Network)

Vous avez peut-être noté que les moustiques vous trouvent irrésistible. N’ayez crainte, il ne s’agit pas de paranoïa. Les moustiques sont attirés par toutes sortes de particularités physiques. Entre autres, les pieds malodorants (un bar privilégié), la sueur, ainsi que le dioxyde de carbone que les gens dont le métabolisme est élevé relâchent. Ouais, cela signifie que les enfants et les personnes minces ont plus de chance de se faire piquer.

Mais, il y a aussi un fait peu connu. Selon  une étude japonaise, les moustiques sont deux fois plus attirés par les gens du groupe sanguin O que ceux du groupe A. Avant de nous piquer, les moustiques sont capables de détecter notre groupe sanguin via les sécrétions de la peau; ce qui leur permet de trouver facilement leur groupe favori.

Il existe quand même diverses façons de repousser les moustiques naturellement, notamment par le choix des vêtements. Les moustiques sont très attirés par les couleurs foncées (noir, bleu marine) et beaucoup moins par les tons clairs (blanc, beige, kaki, pastels). Peut-être que les moustiques ont évolué de manière à se tenir loin des couleurs claires puisqu’il est plus facile de les voir et de les écraser. Les moustiques sont aussi plus actifs à l'aube et au crépuscule. Vous pouvez soit rester à l’intérieur pendant ces périodes, soit vous tenir dans un abri gréé de moustiquaires – c’est ma façon préférée de battre les moustiques.

Laisser les araignées tranquilles (et leurs toiles intactes) est un autre excellent moyen de réduire la présence des moustiques dans votre entourage; les arachnides se nourrissent de moustiques et ces derniers se laissent facilement coincer dans les toiles. Et puis, une seule chauve-souris peut manger des centaines de moustiques en une soirée. Donc, pensez à installer un abri à chauve-souris pour les encourager à vivre près de chez vous; elles se nourriront de tous ces embêtants moustiques piqueurs.

Il existe également de très bons parfums naturels qui repoussent les moustiques : les huiles essentielles. J'utilise une combinaison de lavande, de melaleuca (tea tree) et une touche de citronnelle; ce parfum garde les menaces bourdonnantes à distance. Occasionnellement, un moustique passe à travers de la brume parfumée et me pique, mais après tout, c'est l'été. Une piqûre ici et là me rappelle que nous vivons dans un monde habité par de nombreuses autres créatures – dont certaines veulent nous manger.

COMMENTAIRE

Vu que c’est le temps des voyages et des excursions en forêt - une suggestion pour vous protéger contre la collecte de sang annuelle organisée par la Croix-Rouge des Maringouins

Rappelez-vous que, si les insecticides chimiques du commerce éliminent les désagréments, ils sont cependant cent fois plus nocifs pour la santé que les piqûres de moustiques.

Il y a deux ans, un ami partait en voyage en des pays où les moustiques sont rois. Il se demandait bien comment s’en protéger efficacement (surtout pas avec un clone de DDT), et en particulier contre cette horrible punaise de lit qui se propage proportionnellement à la mondialisation – à la manière d'une «plaie d’Égypte», ma foi.

Je lui ai donc envoyé ce commentaire trouvé sur un forum de voyageurs : «Pour éviter de me faire piquer par les moustiques dans les pays à risques, je vaporisais tous mes vêtements et bagages d’un mélange d’huiles essentielles : Thuya (Melaleuca / Tee-Tree) et Citronnelle. Un jour où j’avais dormi dans une auberge de jeunesse, tous les visiteurs, sauf moi, se sont réveillés couverts de piqûres de punaises de lit. J’en ai conclu que l’odeur dégagée par mes vêtements imprégnés du mélange repoussait également les punaises de lit

Voici mon anti-moustiques «coureur des bois» (efficace). 
Conseil : vaporisez les vêtements, casquettes, bagages, tente et sacs de couchage, etc.; mais n’appliquez pas directement sur le visage.

Utilisez des huiles essentielles 100% pures 

2 ml de teinture-mère d’argousier (l’alcool à friction 70% fait très bien l’affaire)
10 gouttes de Tee Tree (Thuya occidentalis / Melaleuca alternifolia)
10 gouttes Thym  
10 gouttes Citronnelle – ou d’Eucalyptus citronné
10 gouttes Lavande  
5 gouttes Clou de girofle
5 gouttes Lemongrass (Verveine-des-Indes)
5 gouttes Sauge
750 ml d’eau (600 ml pour un concentré plus puissant)

Mélangez le tout dans une fiole à vaporiser (de préférence en verre opaque – bleu ou brun). Agitez bien avant chaque usage.

Autre :
Les Soins Corporels l’Herbier fabrique un spray non toxique : «Arômas-Spas – Lavandine» (à base d’huile essentielle de lavande). On peut le vaporiser dans les cheveux, et il semble être efficace pour protéger les enfants contre les poux dans les écoles.
http://www.lessoinscorporelslherbier.com/index_fr/

25 juillet 2013

À saveur estivale

Les recettes suivantes proviennent de :
Littérature & cuisine
Quelques recettes et anecdotes culinaires d’écrivains
Éditions Québec français


Soupe à la tomate
Jean Giono

Le dimanche matin, les ménagères des petits villages font de la soupe à la tomate. Des tomates coupées en deux et nettoyées des graines – appropriées, comme elles disent –, de l’eau, une burette d’huile, une friture d’oignons fins. Tout ça dans la marmite de terre bout sur le feu. Quand arrive 11 heures, toutes les marmites se mettent à bouillir et le village tout entier sent la soupe à la tomate. Le berger est arrivé au matin et, tout lourd de fatigue et de poussière, il se repose sous les platanes. Cette odeur de soupe à la tomate est pour lui l’odeur du dimanche, du beau dimanche où l’on a le jour libre, une maison, une table propre, une chemise fraîche, lavée, bleue du bleu à pierre et lavandée à la planche de l’armoire; du beau dimanche où l’on n’est plus berger, ce marin de terre, ce coureur d’escale, cet errant... Tout ça en rêve, car le berger est seul sous les platanes et le village est à d’autres.

Photo : Gato Azul  

Mange ta soupe...
Jean Cocteau

Mange ta soupe. Tiens-toi droit. Mange lentement. Ne mange pas si vite. Bois en mangeant. Coupe ta viande en petits morceaux. Tu ne fais que tordre et avaler. Ne joue pas avec ton couteau. Ce n’est pas comme ça qu’on tient sa fourchette. On ne chante pas à table. Vide ton assiette. Ne te balance pas sur ta chaise. Finis ton pain. Pousse ton pain. Mâche. Ne parle pas la bouche pleine. Ne mets pas tes coudes sur la table. Ramasse ta serviette. Ne fais pas de bruit en mangeant. Tu sortiras de table quand on aura fini. Essuie ta bouche avant de m’embrasser.

Cette petite liste réveille une foule de souvenirs, ceux de l’enfance… C’est très longtemps après qu’on arrive à comprendre qu’un dîner peut être un véritable chef-d’oeuvre.

Photo : Studio Rauzier-Rivière

Écossage des petits pois
Philippe Delerm

C’est facile, d’écosser les petits pois.
Une pression du pouce sur la fente de la gousse et elle s’ouvre, docile, offerte. Quelques-unes, moins mûres, sont plus réticentes – une incision de l’ongle de l’index permet alors de déchirer le vert, et de sentir la mouillure et la chair dense, juste sous la peau faussement parcheminée. Après on fait glisser les boules d’un seul doigt.


Tartine à l’huile d’olive
Jean Giono

Quand j’étais tout petit, je jouais, puis j’avais faim. Ma mère taillait alors une plate tartine de pain. Elle la saupoudrait de sel, elle l’arrosait d’huile d’olive par un large 8 de la burette penchée; elle me disait : «Mange.» Ce sel, il me suffisait de humer le vent odysséen; il était là, avec l’odeur de la mer; ce pain, cette huile, les voilà tout autour de ces champs de blé vert dessous les oliviers. Ainsi s’est aiguisée de longue habitude l’ardente faim de mon coeur.


Vin d’oranges
Colette

[…] Il date d’une année où les oranges, du côté d’Hyères, furent belles et mûries au rouge. Dans quatre litres de vin de Cavalaire, sec, jaune, je versai un litre d’Armagnac fort honnête, et mes amis de se récrier : «Quel massacre! une eau-de-vie de si bon goût! La sacrifier à un ratafia imbuvable!...»

Au milieu des cris, je coupai, je noyai quatre oranges coupées en lames, un citron qui pendait, le moment d’avant, au bout de sa branche, un bâton de vanille argenté comme un vieillard, six cents grammes de sucre de canne. Un bocal ventru, bouché de liège et de linge, se chargea de la macération, qui dura cinquante jours; je n’eus plus qu’à filtrer et mettre en bouteilles.

Si c’est bon? Rentrez seulement chez vous, Parisiennes, à la fin d’un dur après-midi d’hiver ou de faux printemps, cinglé de pluie, de grêle, fouetté de soleil pointu, frissonnez des épaules, mouchez-vous, tâtez votre front, mirez votre langue, enfin geignez : «Je ne sais pas ce que j’ai...» Je le sais, moi. Vous avez besoin d’un petit verre de vin d’oranges.

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Photo : Crudessence – restaurant/traiteur (biologique, végétalien, vivant, sans gluten)  
Le livre de recettes «Crudessence, plus de 180 recettes crues, croquantes et craquantes» est fantastique (David Côté et Mathieu Gallant, Les Éditions de l’Homme) http://www.crudessence.com/. J’ai essayé plusieurs recettes : franchement délicieux.

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Divine lavande!

Confiture framboise-lavande-chocolat
(Mesures nord-américaines)

8 ½  tasses de framboises
3 tasses de sucre (ou moins ... au goût)
2 c. à soupe de jus de citron frais
1 ½ tasse de pépites de chocolat noir
1 c. à soupe de bourgeons de lavande (comestible) 

6 pots à conserves de 8 oz 

1. Combinez les framboises, le sucre et le jus de citron dans un poêlon à fond épais. Laissez mijoter à feu moyen 5 minutes en brassant lentement. Écumez si nécessaire. Retirez du feu.

2. Hors feu, incorporez le chocolat et la lavande aux framboises jusqu’à ce que le chocolat soit fondu. Transférez la mixture dans un grand bol, couvrez de papier parchemin et réfrigérez 12 heures pour que les saveurs se mélangent.

3. Réchauffez la mixture à feu moyen une dizaine de minutes, et écumez si nécessaire. Retirez du feu et transférez dans les jarres préalablement stérilisées.

Laissez reposer 6 mois dans un endroit sec et frais. Se conserve un mois au réfrigérateur une fois ouvert.

24 juillet 2013

Notes de lecture

 Photo : Mallory Morrison; Water series

Douglas Kennedy 
Un perspicace observateur du comportement humain…
Pas d'édulcorant, le vrai goût des choses.    

Quitter le monde; 2009

«Puisque mon budget était depuis le début très serré, je suis devenue experte de la vie à petit prix. (…) Là se trouve l’avantage de ne pas avoir beaucoup d’argent : on apprend à mener une vie intéressante sans nourrir des besoins incessants. C’est seulement quand on commence à gagner beaucoup que l’on se retrouve convaincu de la nécessité de se procurer des choses auxquelles on ne pensait même pas auparavant, et une fois qu’on les a obtenues, on se met à convoiter ce que l’on n’a pas encore; une insatisfaction permanente s’ensuit, tandis que l’on se découvre prisonnier du désir d’acquérir toujours plus, de sacrifier à cette pulsion consumériste que l’on sait, dans les moments de lucidité, uniquement destinée à colmater les fissures de son existence. Et ensuite, on essaie de se raconter que cette avalanche de biens matériels finira par étouffer le doute et la mélancolie à l’œuvre dans toute vie humaine. (…) L’argent : la drogue la plus trompeuse qui soit, car elle nous donne l’illusion de pouvoir contrôler notre destin. Un vrai mensonge.»

«Lorsqu’on a peur de perdre quelqu’un on préfère toujours écouter ses paroles rassurantes même si on n’y croit pas au fond de soi. Nous disons tous que nous détestons les mensonges, mais en réalité nous préférons être bernés, plutôt que d’écouter des vérités désagréables.»

«Quand on ne confesse rien, on ne livre aux autres que des suppositions, jamais de preuves.»

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Piège nuptial; 1994 

«Mais si la vie nous apprend quelque chose, c’est que l’on ne peut jamais dissiper les chimères d’autrui; malgré toutes les preuves empiriques que l’on peut apporter, il ou elle se raccrochera à ses faux espoirs avec une obstination exaspérante, mais qui est – et l’on s’en aperçoit souvent – la seule défense face à une réalité qu’il n’est pas possible d’affronter sans risquer de s’écrouler. Une fois que quelqu’un s’est engagé dans le mensonge et l’auto-intoxication, rien de ce que l’on dit ou «prouve» n’a de valeur, parce que le mensonge devient la vérité; et une vérité qu’il ne faut surtout pas contester.»

«Est-ce que la vie doit se résumer si souvent à une succession d’occasions ratées?» 

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Combien? – nouvelle traduction française 2012  
(Chasing Mammon : Travels in the Pursuit of Money; 1992)

(Extrait préface 2011)

«Au cours des trente dernières années, soit l’époque initiée par les révolutions reaganienne et thatchérienne, des métropoles hier encore bon marché se sont transformées en enclaves réservées à la population la plus aisée. L’espace urbain dans lequel j’ai grandi, Manhattan, accueillait jadis une vraie classe moyenne – mes parents en faisaient partie – et, jusqu’au milieu des années qo80, était encore le genre de quartier où une jeune enseignante, un journaliste de la radio publique, un acteur débutant, une romancière en herbe ou un peintre inconnu était en mesure de trouver de quoi se loger sans se ruiner, de mener une existence modeste mais de se sentir un élément à part entière de la vie trépidante de la cité.
(…)
Et c’est alors qu’un certain Rudolph Giuliani, un individu affligé de l’autoritarisme d’un supérieur jésuite et des obsessions hygiéniques d’un banquier suisse bloqué au stade anal, a été élu maire. Sous sa direction, New York a perdu sa dégaine débraillée et plutôt louche, l’immobilier a flambé, Manhattan a été dépouillé des derniers vestiges de sa petite bourgeoisie et de son demi-monde bohème. Les bouquinistes et les cinémas indépendants ont fermé un à un, tandis que les magasins Gap poussaient comme des champignons. Oui, les rues étaient sûres désormais, oui, la prospérité était de retour. Et ceux qui avaient de l’argent – les golden boys de Wall Street, les avocats de haut vol, les manipulateurs de fonds d’investissements – se sont mis à accumuler des fortunes comme on n’en avait plus vu depuis l’ère des chevaliers de l’industrie, à l’aube du XXe siècle. Aujourd’hui encore, après plusieurs réajustements de la scène financière, la ploutocratie de Manhattan jouit d’une aisance matérielle inimaginable pour nous, simples mortels. Exemple : il y a quelques jours, une propriété des Hamptons – là où les super-riches New-Yorkais vont se dorer la pilule, l’été – s’est vendue cent millions de dollars. Rien que pour ça… Voilà, nous vivons une ère où il existe bel et bien des gens capables de dépenser cent millions uniquement pour avoir un toit sur la tête quelques semaines par an… 
(…)
L’argent est un vernis … un vernis qui dissimule tout ce qu’il y a de trouble et de sombre en nous, tout ce que nous refusons de voir.  
(…)
… j’étais parvenu au constat que le rapport à l’argent est un excellent révélateur de la psychologie collective d’un pays, de ses pathologies – car toute psyché nationale a son côté pathologique – et de ses valeurs fondatrices.
       Combien? est né de toutes ces interrogations, et notamment d’une question centrale : pourquoi, et de quelle manière, l’argent nous définit-il? Lorsqu’on considère à quelle rapidité le monde de la haute finance s’est mué en cette hydre monstrueuse que nous subissons aujourd’hui, qu’il s’agisse de la folie d’un Bernard Madoff, de la débâcle bancaire qui a failli mettre à genoux l’économie américaine ou du gouffre sans cesse béant entre les très riches et le reste de l’humanité, ce que je décrivais dans ce livre me semble encore plus pertinent à l’heure actuelle.»

http://www.douglas-kennedy.com/site/accueil_site_douglas_kennedy_&1.html

23 juillet 2013

Naissance «royale»

Bizarre d’être accueilli dans le monde à coups de canons :
62 à la Tour de Londres 
     20 pour l’enfant
     21 pour la reine
     21 pour la ville
Et 41 coups à Hyde Park.
Pour un joyeux total de 103.

Pauvre bébé… c'est pas drôle.  
Photo : AFP/ Carl Court

Pauvres oiseaux, que de vacarme, de boucane! Pas de gazouillis pour le bébé - je viens de remarquer qu'il y a des oiseaux sur la douillette...!

Et que d’argent investi pour des gens qui ne sont ni mieux ni pire que le commun des mortels. De simples humains. Point. Sérieux, j’ai peine à croire que des pays endettés par-dessus la tête, sur le bord de la faillite, entretiennent pareille cohorte aux dépens des contribuables (britanniques, australiens, canadiens, etc.). On qualifie les assistés sociaux de fainéants parce qu'ils vivent au crochet de l'État et donc des contribuables. Well...
 
En 2013, y a des rituels et des symboles monarchiques dépassés, éventés et stupides qu’il vaudrait mieux enterrer – au même titre que la hache de guerre. De toute façon, la Grande Bretagne a perdu sa majesté depuis longtemps, sa gloire est chose du passé… Un renouveau s’impose - comme pour toutes les nations.  
 
Bref, une carte postale pour le bébé Sans Nom 
Welcome to the craziest planet of the universe! You'd better learn to chuckle right now :  
 
Et tant qu'à faire, Sir Paul pour le beau p’tit couple : Only Love Remains.
(Une chanson en passant qu’on a très peu entendue comparativement à d’autres.)
 


Only Love Remains (lyrics) 
 
And if you take your love away from me
I'm only going to want it back
I'll probably pretend, I didn't see
But knowing me I'll want you back again and again

Till the word has lost its meaning
And love is all that stays, only love remains

If you should ever feel that something's wrong
I'm going to want to put it right
To bring a happy ending to our song
I'll carry on believing in a love

If your love was to trickle through my fingers
What would it leave me with
Only love remains
(Only love, love remains)
Only love
(Remains)

Old enough and strong enough to stretch across the world
Taking the sand inside an oyster, changing it into a pearl
Making another magic transformation
Find the right boy for the right girl

When all our friends have gone away and we're alone
There's nothing left to show about
Together we'll explore the great unknown
I'd say we won't be going out tonight

Let tonight be the one that we remember
When love is all that stays
Only love remains
When love is all that stays
(Only love, love remains)
Only love remains

Only love remains
(Only love)

22 juillet 2013

Les animaux d’élevage contraints à «vivre»


Logique du garde-manger
Henry S. Salt
The Humanities of Diet  

Manchester, The Vegetarian Society, 1914

On dit souvent, pour excuser le massacre des animaux, que pour eux il vaut mieux vivre et être charcutés que ne pas vivre du tout. Or, bien évidemment, si un pareil raisonnement justifie la pratique de manducation de chair, il doit également justifier tout élevage d’animaux à des fins lucratives ou récréatives, quand leur vie est plutôt heureuse. Cet argument est souvent utilisé par les adeptes de la chasse sportive, au motif que le renard aurait disparu depuis longtemps dans ce pays s’ils – ses vrais amis – ne l’avaient pas «préservé» à des fins sportives. Les vivisecteurs, qui élèvent des cochons d’Inde pour l’expérimentation animale, ont aussi usé de cet argument, et ils y ont tout aussi droit que les mangeurs de chair; car comment, sont-ils en mesure de demander, quelques heures de souffrance peuvent-elles être mises en balance avec l’énorme bénéfice qu’est la vie? En fait, si jamais nous admettons qu’il est avantageux pour un animal d’être porté au monde, il n’est guère de traitement qui ne puisse être justifié par les supposés termes d’un tel contrat.

L’argument doit aussi s’appliquer au genre humain. De fait, les éleveurs d’esclaves l’ont invoqué; et il constitue, du point de vue logique, une aussi bonne excuse pour la possession d’esclaves que pour la manducation de chair. Il justifierait à peu près n’importe quel traitement auquel les parents exposeraient leurs enfants, ces derniers ayant envers eux, pour s’être vus octroyer cette grande faveur qu’est la vie, une dette de gratitude qu’aucun service ultérieur ne saurait rembourser. Nous ne pourrions guère nier le même mérite aux cannibales, dussent-ils élever leurs victimes humaines pour les besoins de la table, comme on le rapporte des premiers Péruviens.

Il est consigné, dans un registre aussi digne de foi que le Hansard [1] (7 mars 1883), que lorsque Sir Herbert Maxwell fit valoir devant le parlement qu’un «pigeon bizet» préférerait servir au tir aux pigeons plutôt que ne pas exister du tout, Mr. W.E. Forster a fait remarqué de manière satirique que ce qu’il nous fallait considérer n’était pas un pigeon bizet avant qu’il n’existe, mais pendant qu’il existe. En bref, ici gît la clef de tout le problème. Le fallace tient à la conclusion d’une pensée qui tente de comparer l’existence avec la non-existence. Une personne qui existe déjà peut estimer préférer vivre plutôt que ne pas vivre, mais elle doit d’abord prendre appui sur la terra firma de l’existence pour argumenter à partir d’elle; dès lors qu’elle entreprend d’argumenter comme du point de vue des abysses du non existant, elle n’émet que non-sens, en prédiquant du bon ou du mauvais, du bonheur ou du malheur, à propos de ce dont nous ne pouvons rien prédiquer.

Quand nous parlons donc de «porter un être», comme nous le disons vaguement, «au monde», nous ne pouvons pas prétendre à la gratitude de cet être pour notre acte, ou conclure un marché avec lui – et un marché très mesquin – sur cette base; nos devoirs envers lui ne peuvent pas non plus être éludés par pareille chicane (quibble), dans laquelle notre souhait est, de toute évidence, père de nos pensées. Il n’est pas non plus nécessaire d’entrer dans la question de l’existence anténatale, car, s’il y avait une telle existence, nous n’aurions aucune raison de supposer qu’elle est moins heureuse que la présente existence; et ainsi l’argument s’effondre de même manière. Il est absurde de comparer une préexistence supposée, ou une non-existence, à la vie réelle d’un individu telle que nous la connaissons ici. Tout raisonnement fondé sur une pareille comparaison doit nécessairement être faux, et mener à des conclusions grotesques.

Prenons le cas, tel quel, du Philosophe et du Porc. N’est-ce pas là ajouter une insulte au préjudice, qu’il faille non seulement que cet animal tant massacré soit mangé par le Philosophe, mais qu’il doive aussi être le sujet d’une béatification bien loin d’être désintéressée. «Béni soit le Porc, car le Philosophe est friand de lard [2]». Nous pouvons imaginer comment le Philosophe, lorsqu’il passe devant une boucherie, endroit qui, à en juger à son étalage, est un très saint et haut lieu d’humanité, puisque sans elle il «n’y aurait point de porc», doit s’arrêter avec une fatuité des plus sereines pour se féliciter des pâles carcasses qui y sont étalées, avec en guise de moquerie une orange d’ornementation dans la gueule. «J’ai été le bienfaiteur de ce Porc», doit-il se dire, «dans la mesure où j’ai mangé une portion de son prédécesseur; et je serai maintenant le bienfaiteur de quelqu’autre Porc à naître, en mangeant une portion de celui-ci».

Voilà donc la bénignité du Philosophe envers le Porc; quelle pourrait être la réponse du second au premier? «Vénéré moraliste», pourrait-il plaider, «il serait inconvenant de ma part, moi qui suis aujourd’hui un porc, et qui ne sera demain que jambon et saucisses, de disputer avec un maître d’éthique, cependant il apparaît à mon intellect porcin qu’ayant d’abord déterminé de me tuer et de me dévorer, tu t’es par après démené pour trouver une justification morale. Car note, je te prie, qu’à mon entrée en ce monde, on n'a aucunement considéré ma préférence, pas plus que je n’ai acquis ma vie à la condition de finir en boucherie. Si tu es donc résolu à attaquer le porc, ainsi soit-il, pour le porc que je suis : mais bien que tu n’aies point épargné ma vie, épargne moi au moins ta sophistique. Ça n’est pas pour lui, mais pour toi, que, durant sa vie, le Porc est crassement nourri et logé, et qu’il fini charcuté de manière barbare».

Par quelque bout qu’on prenne ce sophisme, on n’en voit partout le creux. Car même en mettant de coté le vice philosophique qui le corrompt, il reste que, en pratique, bien plus de vies humaines peuvent être entretenues par des culture de grains et de fruits que par l’élevage; de sorte que si une plus grande surface de l’Angleterre était affectée au «cheptel vif», nous devrions en fait réduire la vie humaine pour faire place à plus de bœufs et de moutons; c’est-à-dire, que nous devrions augmenter l’existence inférieure aux dépends de l’existence supérieure. Il importe aussi de noter que la vie des animaux condamnés à l’abattage est de bien moindre qualité que si les mêmes animaux étaient entièrement sauvages, ou domestiqués à quelque but rationnel par une association amicale avec l’homme; le fait même qu’un animal soit sur le point d’être mangé semble l’extirper de la catégorie des êtres intelligents, et être cause que nous le considérons comme une simple viande «animée». «Garder (To keep) un homme, un esclave, ou un domestique», écrit Edward Carpenter, «pour votre seul avantage, garder un animal, que vous pouvez manger, est un mensonge». Vous ne pouvez pas regarder cet animal dans les yeux (in the face). L’existence des bœufs, par exemple, peut difficilement être appelée vie; ils constituent un «cheptel vif [3]», mais ils ne vivent pas. Et les «bêtes engraissées» qu’on exhibe tous les ans au salon de l’Agriculture, à la saison de la paix et de la bonne volonté? Ces misérables victimes de l’humaine gloutonnerie doivent-elles se montrer reconnaissantes pour cette bénédiction qu’est la vie? Les oies gavées et les volailles de Strasbourg doivent-elles être reconnaissantes? Et le veau et l’agneau doivent-ils se féliciter du court laps de temps qu’on leur permet dans le contrat du Ghoul [4], ou devons-nous exclure les mangeurs de veaux et d’agneaux de la liste des bienfaiteurs des animaux?

Acceptons de bon cœur tout ce qui peut être dit du «caractère joyeux de la vie». Mais quelle morale doit-on tirer de ce fait? Certainement pas que nous sommes justifiés à outrager et détruire la vie, à être aux petits soins pour nos appétits égoïstes, parce que, à dire vrai, nous devrions alors en produire plus! [Il faut bien] plutôt [en conclure] à notre devoir de respecter la beauté et le caractère sacré de la vie dans les autres comme en nous-mêmes, et de nous efforcer de tout notre possible à garantir son développement naturel le plus complet. Cette logique du garde-manger est la négation même d’une vraie révérence pour la vie; car elle implique que le véritable ami des animaux est celui dont le garde-manger est le plus rempli :
Prie le mieux, celui qui mange le plus
Toutes choses tant grandes que petites.

C’est la philosophie du loup, du requin, du cannibale. S’il y avait quelque vérité en cet argument, [il suffirait de] laisser ceux qui y croient avoir le courage de leurs convictions, et de les laisser faire face à sa conclusion inévitable. C’est que l’Ogre a été jusqu’à ici un personnage fort incompris, mais aujourd’hui, au moins, la Philosophie et la Science rendent justice à sa bienfaisance. Son organisation a été défaillante, peut-être, mais son esprit est entièrement louable. Il est par excellence le philozooiste, le philanthrope, le saint [5].

En voilà assez de cette chicane! Le végétarisme sauverait les animaux réels (actual), qui ont été porté au monde réel, de la souffrance très réelle (very real), inséparable du transport et des abattoirs; et si la seule inhumanité qu’il implique est de perpétuer des races non existantes en n’arrangeant pas leur naissance, il peut supporter l’accusation d’équanimité. S’il y avait une quelconque méchanceté, ou un quelconque manque de bonté, à ne pas élever d’animaux, l’énormité de nos péchés d’omission serait plus que ne pourrait en endurer l’humaine conscience, car le nombre des êtres non nés est sans borne, et parvenir au trône après s’être frayé un chemin jalonné de massacres, pour ensuite «refermer les portes de la miséricorde sur le genre humain», ne serait rien comparé au fait de refermer impitoyablement les portes de la vie sur ces pauvres et négligés êtres non existants!

Il est intéressant de noter que ce fallace – l’hypothèse que c’est bonté que de porter un être au monde – est aussi vieux qu’est lointaine l’époque de Lucrèce. L’auteur du magnifique poème philosophique De rerum natura (V, 176-180) en traite, sous un autre rapport, dans un passage qui peut être ainsi rendu :

Quelle perte eût été la nôtre, n’eussions-nous vu le jour?
Laissons les hommes vivants, à une vie plus longue, aspirer, 
Tandis qu’une affection tendre, lie leur cœur à la terre :
Mais qui n’a jamais goûté le désir de la vie,
Être non né, impersonnel, ne peut ressentir le manque [6].

Nous voyons donc qu’un vulgaire sophisme contemporain était clairement exposé il y a presque deux milles ans. Il est tout à fait possible que les imbéciles puissent le répéter depuis deux millénaires. 

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[1] Recueil anglais des débats parlementaires. (Ndt)
[2] «De tous les arguments pour le végétarisme, aucun n’est aussi faible que celui de l’humanité [en faveur des bêtes]. Le porc a un intérêt plus fort que n’importe qui à la demande du lard. Si le monde entier devenait Juif, il n’y aurait plus de porcs». Leslie Stephen, Social Rights and Duties.
«On a fort bien dit que, si le monde entier était Juif, les porcs n’existeraient plus du tout; et si le monde entier était végétarien, y aurait-il encore un seul mouton ou bovin soigné et protégé contre la faim?», D. G. Ritchie, Natural Rights.
[3] Cheptel vient du latin capitale, l’avoir. (Ndt)
[4] Ghoulish contract. Le ghoul est, dans la tradition anglaise, un esprit malin supposé ouvrir les tombes et se nourrir de cadavres humains. (Ndt)
[5] « Si le mobile (motive) qui pouvait produire le plus grand nombre de têtes de bétail le plus heureux possible était de manger du steak (beef), alors cette pratique devrait, dans cette mesure, être louée. Et bien qu'en vérité [notre] mobile n'ait pas été le bétail en lui-même, il est concevable que, si les convictions végétariennes devaient s'étendre bien plus encore, l'amour du bétail fusionnerait (s'il n'est pas incompatible psychologiquement) avec l'amour du bifteck dans les esprits des opposants au végétarisme. Avec une perspective plus profonde, des mobiles nouveaux et supérieurs peuvent remplacer ou suppléer à d'anciens, et perpétuer sinon anoblir d'anciennes pratiques ». Dr. Staton Coit.
[6] Les mêmes vers traduits directement du latin par Kani-turpin (Lucrèce, De la nature des choses, tr. Kani-Turpin, L.V, 176-180, GF, 1998, p.325) :
Et quel mal serait-ce pour nous de n'être point créés?
Croirais-je que la vie gisait dans le deuil et la nuit
avant que ne pointe l'aube de la création?
Sans doute, une fois né, chacun veut-il en vie,
demeurer tant que l'attrait du plaisir le retient.
Mais qui n'a point goûté à l'amour de la vie
et ne compta jamais au nombre des vivants,
en quoi souffrirait-il de n'être point créé? (Ndt)

Traduction : Enrique Utria
Source : http://bibliodroitsanimaux.voila.net/index.html
Site recommandé : http://www.henrysalt.co.uk/

La civilisation «porc/bacon» émergeante

De nombreuses études scientifiques ont démontré que le cochon était doté d’intelligence qu’on dit même supérieure à celle du chien ou d’autres animaux domestiqués. De nos jours, beaucoup de gens adoptent des porcelets (races naines) comme animaux de compagnie.

L’industrie porcine fonctionne de la même manière que l’industrie pétrolière.
Il y a des surplus? Allons, mettons-en dans TOUT!

«La culture Porc/Bacon s'est développée au cours des vingt dernières années. Manger du porc est devenu une farce culturelle – pas drôle du tout. Il y a littéralement des clubs, des conventions et des sectes ‘porc-bacon’! Les gens se regroupent en raison de leur amour du ‘porc’, comme s'ils ne pouvaient pas vivre sans en manger à chaque ‘repas’.
Ainsi, trouvons-nous :
de la crème glacée au bacon;
de la vodka infusée au bacon;
du bacon enrobé de chocolat;
des hot-dogs fourrés au fromage enrobés de bacon;
du pouding au pain recouvert de sauce au bacon;
des œufs durs à la mayonnaise enrobés de bacon (surnommé ‘snack crise-cardiaque’);
du sel au bacon;
des beignes, cupcakes et biscuits au bacon;
des menthes au bacon;
de la ‘baconnaise’ (‘pour ceux qui veulent des problèmes cardiovasculaires sans faire de lard’ de dire Jon Stewart);
un «Baconnator» chez Wendy – six tranches de bacon par-dessus un cheeseburger d’une demie-livre (25 millions vendus durant les deux derniers mois);
et la bizarre «explosion de bacon» – une brique de viande pour le barbecue : 2 livres de bacon enveloppant 2 livres de saucisses.»

~ Alisa Rutherford-Fortunati
(Rédactrice à http://gentleworld.org/ et Care2)

Certains «chefs» cuisiniers suggèrent d'utiliser le gras de bacon (récupéré) en remplacement du beurre – par exemple sur le pop-corn! 

Génocidaire / suicidaire…
Et les adeptes devraient se munir d’appareils de pontage - portables et auto-gérés.

«Comment fais-tu pour ne pas manger de bacon? Ça sent tellement bon!» demandent les mangeurs de bacon aux végétariens. En fait, l’odeur de chair animale en train de griller nous donne mal au cœur. Le cochon empalé pour le méchoui ou le cochonnet étalé sur une table de pique-nique avec une pomme dans la gueule nous répugne.

Les orgies de bacon me rappellent le clip ‘Heart Attack Grill’  
http://www.blinkx.com/watch-video/the-heart-attack-grill/P0fIR68RvR03lH2e7EIzng

C’est plutôt triste, et je me dis qu’il faut être désespéré pour se livrer à de pareils excès.
Mais, l'histoire nous apprend que dans toutes les civilisations décadentes les gens mouraient à la fois de gloutonnerie et de faim.

Being Fat in America
John Robbins
2011

We can, as a society, be astoundingly cruel to people who are obese. They might be creative, caring and hopeful people, but we don’t see that. Far too often, we see only their weight.
       What does it say about us that we act as though you can take the measure of a person by the size bathing suit they wear?
       Maybe this partially explains why obese people are flocking to a restaurant outside Phoenix, Arizona, whose name, and I am not making this up, is the Heart Attack Grill. The restaurant, which seats 100, is often packed. It offers what owner Jon Basso calls, “an environment of acceptance to overweight customers who are typically demonized by society.”
       But at this restaurant, it’s a little more than acceptance. The Heart Attack Grill literally celebrates obesity. Customers who are over 350 pounds eat for free. A scale is strategically placed at the center of the restaurant, so other diners can watch the weigh-ins. When customers exceed 350 pounds, says the restaurant’s owner, “Everybody applauds and cheers for them. A big smile comes over their face, and for once they are finally accepted. They are not picked on here.”
       It’s all made to seem sexy, too. Waitresses, all of them young and slender, are dressed as scantily clad nurses, wearing high heels, thigh-high stockings, and skimpy outfits revealing lots of cleavage.
       It sounds like fun. Except when it isn’t.
       A few weeks ago, the 575-pound spokesman for the Heart Attack Grill, a 29-year-old man named Blair River, died. It wasn’t a heart attack, it was pneumonia. He had been the public face of the restaurant and the star of its advertising. He was also the single father for a five-year-old girl.  

More: http://www.johnrobbins.info/being-fat-in-america/  
http://www.johnrobbins.info/

Si le sujet vous intéresse, voyez les libellés «Végétarisme» et «Zoofriendly» (Situation planétaire)
http://situationplanetaire.blogspot.ca/search/label/V%C3%A9g%C3%A9tarisme 
http://situationplanetaire.blogspot.ca/search/label/Zoofriendly