http://semaineitalienne.ca/fr/evenements-principaux/
découverte en lisant Foglia (lui-même italo-québécois) :
http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/pierre-foglia/201308/03/01-4676729-vous-autres.php
Autrefois
Travailleurs italiens posant les rails du tramway sur la rue
Ontario à Montréal. [Archives
photographiques de la Société des transports de la communauté urbaine de
Montréal] Tout un folklore autour de la communauté italienne montréalaise – c’est-à-dire beaucoup de clichés sociaux, tout de même basés sur des réalités visibles. Donc, quand j’étais jeune, nous pensions que tous les Italiens ne mangeaient que pizzas, pâtes, tomates et ail, et qu’ils fabriquaient du vin-maison. On les voyait cultiver des potagers dans leur cours arrière, cueillir des pissenlits le long de l’autoroute ou sur les terrains vagues. On les imaginait presque tous propriétaires de trattorias et de cafés ou importateurs de produits italiens. Et bien sûr, peut-être le plus tenace des préjugés : tous les Italiens étaient membres de la mafia, esprit de famille évident à l’appui. Ah oui, j’oubliais «Il Papa». Et j’en passe…
Photo : Pedro Ruiz
Notre perception a évolué depuis 50 ans, heureusement. À l’époque, peu de gens creusaient pour connaître l’histoire et la culture de ces immigrants. Comme les voyages outremer étaient réservés aux classes aisées, on peut dire que d’une certaine manière les immigrants nous faisaient voyager. Au collège, nous apprenions l’histoire des empereurs romains, bien sûr, mais pas grand-chose des arts et de la littérature contemporaine. Pourtant, c’est d’une richesse… Si une fois plus âgée j’ai visité l’Italie d’un bout à l’autre et me suis intéressée à ses designers, architectes et peintres, j’ai malheureusement négligé ses écrivains.
L’autre jour j’étais en visite, et je ne me doutais pas que j’allais en découvrir un très réputé. Rien que j’aime plus que fureter dans la bibliothèque d’un hôte. Un titre m’attire, je feuillette et remets sur le rayon. Cette fois, séduite par quelques passages, j’ai emprunté Novecento : pianiste et Soie d’Alessandro Baricco. Quelle belle écriture; j’ai bien envie de lire son dernier roman Emmaüs.
En lisant Soie, je me disais «bon sang, ce serait un sujet de film fantastique; comment se fait-il que personne n’y a songé?» Puis, j’ai eu un flash : je revoyais une pub. Vérifié sur Internet : le cinéaste québécois François Girard (Le Violon rouge) a réalisé un film inspiré du roman, en 2007. J’ai lu quelques critiques : trop carte postale et narratif. Comme je ne l’ai pas vu il m’est difficile d’en juger, mais je comprends qu’il ait peut-être voulu coller le plus possible à un texte si parfait…
Une phrase toute simple, et voilà qu’apparait un décor entier.
Une phrase toute simple et voilà que la psychologie d’un personnage est révélée.
Les mots justes suscitent des images justes…
[Comme le dit Dany Laferrière, «Quand vous cherchez depuis un moment à décrire la pluie qui tombe, essayez : il pleut».]
Noté dans Soie (Éd. Albin Michel; 1997) :
«C’était au reste un de ces hommes qui aiment assister à leur propre vie, considérant comme déplacée toute ambition de la vivre.
On aura remarqué que ceux-là contemplent leur destin à la façon dont la plupart des autres contemplent une journée de pluie.»
«Aux portes de Lavilledieu, il serra contre lui Hélène et lui dit simplement
– Tu ne dois avoir peur de rien.
C’était une femme grande, aux gestes lents, elle portait de longs cheveux noirs qu’elle ne rassemblait jamais sur sa tête. Elle avait une voix superbe.»
«Hara Kei écoutait, sans que l’ombre d’une expression décomposât les traits de son visage. Ses yeux étaient fixés sur les lèvres d’Hervé Joncour comme si elles étaient les dernières lignes d’une lettre d’adieu.»
«Le soir, il restait longtemps assis, sous le porche de sa maison, près de sa femme Hélène. Elle lisait un livre à voix haute, et il était heureux car il se disait qu’il n’y avait pas de voix plus belle que la sienne.»
«Ils restèrent des heures, assis l’un près de l’autre, à parler et à se taire.»
«Pendant tout le temps qu’il laissa au destin, les ombres et le silence furent tout ce qui filtra de cette scène singulière. Alors il tourna le dos et se remit à marcher, d’un pas rapide, vers chez lui. La tête penchée, il regardait ses pas, s’aidant ainsi à ne pas penser.»
«Hervé Joncour resta immobile, regardant l’énorme brasier éteint. Il avait derrière lui une route longue de huit kilomètres. Et devant lui, rien. Brusquement, il vit ce qu’il croyait invisible.
La fin du monde.»
«Parfois, les jours de vent, Hervé Joncour descendait jusqu’au lac et passait des heures à le regarder, parce qu’il lui semblait voir, dessiné sur l’eau, le spectacle léger, et inexplicable, qu’avait été sa vie.»
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…Et puis «les sept feuillets» d’idéogrammes japonais – que je ne transcrirai pas ici.
Magnifique.
La finale est plutôt renversante (mind boggling) – voire, invraisemblable. Mais en y repensant… dans la vie, tout est possible, même ça. Quoiqu’il en soit, le grand avantage du roman, c’est qu’on écrire tout ce qu’on veut sans se préoccuper des impossibles.
Bon, tout ça pour dire que je continue d’être «victime» de coïncidences absolument fascinantes. Et vive la Semaine italienne!
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