Neige avaleuse de sons
J’aime ton silence blanc
~ Boudabla, haïku 15.12.13
«L'œuvre de Jean Paul Lemieux, si particulière et personnelle qu'elle soit, n'en demeure pas moins la meilleure introduction, la plus précise, la plus exacte, la plus rêveuse et la plus poétique à notre pays, immense et désert, habité, de-ci, de-là par des créatures éprouvant la vie et la mort, dans l'étonnement des premiers jours du monde. Le cœur mis à nu, sans faute, dans son évidence irréfutable.» (Anne Hébert)
http://agora.qc.ca/Dossiers/Jean_Paul_Lemieux
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Blanche Beauregard Lamontagne (1889-1958)
Poétesse régionaliste
Extraits de Ma Gaspésie
Chanson
On dit que ce pays est rude,
Que trop grande est sa solitude,
Et trop sauvages ses forêts;
Que trop ingrats sont ses guérets;
On dit que son flot en furie
Pendant de trop longs jours charrie
Le froid, le givre et le glaçon...
- Qu’importe, je veux le mettre en chanson!...
On dit que son pêcheur, robuste,
Est trop somnolent, qu’il est fruste,
Qu’il est bavard et langoureux,
Et pas assez ambitieux;
On dit qu’un rêve vain l’obsède,
Et que même au sommeil il cède,
Parfois, en tenant l’hameçon...
- Qu’importe, je veux le mettre en chanson!
On aime tout en ceux qu’on aime,
Et le plus grand défaut lui-même
Devient presque de la beauté
Quand il se nomme hérédité!...
Ne chante-t-on pas dans sa race
La laideur ainsi que la grâce,
Le merveilleux, le sans-façon?...
- Tout a sa place dans une chanson!...
Je veux que par ma fantaisie,
Tout entière ma Gaspésie,
Avec ses pêcheurs nonchalants,
Ses neiges, ses flots ruisselants,
Son âme dolente et joyeuse,
Ses varechs, sa côte venteuse,
Et ses relents de vieux poisson,
Vole sur les ailes de ma chanson!...
L’Avenir
Un jour, chères forêts, - tel est votre avenir -
Vous verrez arriver chez vous les émissaires
Des profanations que l’on dit nécessaires,
Hélas! et ce sera votre heure de mourir...
- «L’argent, le capital qu’il faut faire fleurir,
Voilà notre oeuvre... Adieu les antres, les clairières,
Adieu l’arbre pensif, adieu forêts, bruyères,
Où l’aigle aime à voler et le cerf à courir!
Pour que l’on vive il faut que la montagne meure,
Que rien de primitif ici-bas ne demeure!...»
Ces hommes, ô forêts, voilà ce qu’ils diront...
Puis, alors, sans pitié, sourds à votre prière,
Ils jetteront sur vous leur hache meurtrière,
- Et je souffre déjà du mal qu’ils vous feront!...
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