J’ai aimé suivre X COMPANY notamment pour l’excellence des comédiens et le côté vintage. La documentation d’appoint sur le site est formidable : méthodes d’espionnage, instruments de camouflage, communication codée, gadgets, photos, vidéos de l’époque, etc., que vous trouverez dans Dispatches et Debriefing.
Qualité d’image impeccable, personnages attachants (ce sont des tueurs, mais on les aime bien puisqu’ils sont du «bon côté»), et conclusions de suspense sans complaisance – bons et méchants sont capturés et/ou meurent. Comme dans la vraie vie. Néanmoins je fermais les yeux durant les scènes de violence, un peu trop longues et «réalistes» à mon goût. Mais, existe-t-il des guerres de résistance à des envahisseurs dépourvues de violence? Peu probable puisque depuis Caïn et Abel on n’a pas fait grand-chose pour établir une quelconque paix durable... Le problème est qu’on croit que la guerre c’est «normal», qu’on n’y peut rien, que c’est ça la vie (3).
Toutes les photos proviennent des Archives de CBC
Les créateurs de la série, Mark Ellis et Stephanie Morgenstern, se sont inspirés des histoires d'un camp d’entraînement situé sur les rives du lac Ontario (Canada). Le Camp X (1) a réellement existé et fut l'un des plus importants centres de formation d’agents secrets – plus de 500 agents des pays alliés y furent formés.
Synopsis
Cette série dramatique est centrée sur l’expérience émotionnelle des personnages. L’action se déroule dans l’univers dangereux et stressant de l’espionnage et des opérations secrètes de la seconde guerre mondiale. Nous suivons cinq jeunes agents hautement qualifiés (d’origine canadienne, américaine et britannique) ayant été formés dans une école d’espionnage ultrasecrète.
Les agents sont parachutés en territoire ennemi où ils s’exposent évidemment à de possibles tortures et exécutions. Planifiées par les cerveaux de X COMPANY, les missions périlleuses se succèdent, dans des hôtels élégants ou des recoins de campagne. Sabotage, bombes, maniement des armes, entraînement de guérilleros, opérations de sauvetage, campagnes frauduleuses, assassinats : nous partageons intimement les montées d'adrénaline et au cauchemar des mains sales tandis que les nobles idéaux entrent en collision avec les réalités émotionnelles d'une guerre où aucune règle ne s'applique.
Au cœur de l’histoire se trouve l'invraisemblable parcours vers l'héroïsme d’Alfred Graves, un jeune homme vulnérable atteint de synesthésie – un problème neurologique qui occasionne des croisements de perceptions sensorielles mais qui lui donne une mémoire pratiquement infinie. Longtemps accablé par son état, il ressort qu’Alfred est une arme secrète très utile sur le terrain. Il combat aux côtés d’Aurora Luft, une jeune femme énergique, à moitié juive-allemande et canadienne-française, qui s’est juré de détruire le fascisme par tous les moyens possibles. La perte de son amant et compagnon d'armes assombrit son lien grandissant avec Alfred tandis qu’ils s’entraident pour trouver le courage de faire face à l'amour et à la mort sur le champ de bataille.
Distribution : Évelyne Brochu, Dustin Milligan, Connor Price, Lara Jean Chorostecki, Hugh Dillon, Jack Laskey, Warren Brown.
La série a été tournée en Hongrie (2) et la seconde le sera également en juillet prochain. Si vous avez accès à la zone vidéo (sinon ça vaut la peine de visiter le site en anglais) : http://www.cbc.ca/xcompany/episodes/
X COMPANY c’est aussi une incursion dans les technologies d’espionnage émergeantes, les débuts de la propagande à grande échelle et les premiers combats contre la terreur, exécutés par des gens qui foncent pour changer le monde et protéger les pays et les gens qu'ils aiment.
Au huitième épisode, le centre des opérations reçoit un message de la plus haute priorité :
De multiples sources à Paris, France, ont observé un rassemblement massif de citoyens Juifs coordonné par la police française et supervisé par les occupants nazis. En deux jours, des milliers de Juifs ont été expulsés de force de leurs foyers et sont actuellement détenus au Vélodrome d'Hiver situé au coin du boulevard de Grenelle et de la rue Nélaton dans le 15ème arrondissement. Le nombre exact des prisonniers est inconnu pour le moment, mais les estimations dépassent 10 000. (...) Les premiers rapports crédibles confirment que les hommes, les femmes, les personnes âgées et les enfants sont tous tenus en captivité. Plusieurs ont été avisés qu'ils seraient autorisés à regagner leurs foyers dans quelques jours. Toutefois, le centre des opérations de Londres croit maintenant que c’est inexact. De nouvelles informations suggèrent que les prisonniers seront déplacés vers les camps d’internement de l’Europe de l'Est. Plus d'informations seront nécessaires pour déterminer les intentions de la Gestapo et des forces SS.
L’équipe part alors en mission pour sauver un évadé d’Auschwitz dont les dessins pourraient servir à convaincre les leaders alliés d’aider les Juifs. En même temps, deux agents essaient désespérément de sauver une poignée de citoyens sur le point de se faire embarquer par les gendarmes.
On utilisait des poèmes pour faire de la propagande ou livrer au public des messages secrets – annonçant par exemple de potentielles opérations de sauvetage. Vous en trouverez un exemple dans le Debriefing du huitième épisode.
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(1) Le vrai Camp X : 10 faits à propos de l’École d’espionnage canadienne
Camp X fut la première école internationale d'espionnage en Amérique du Nord au début de la Deuxième Guerre mondiale. Le but était de former une élite d’agents secrets. Tenue au plus grand secret, elle était installée sur une ferme entre Whitby et Oshawa, Ontario. Peu de gens connaissaient son existence à l’époque, et c’est encore le cas aujourd’hui. Les complots palpitants et dangereux de X COMPANY sont peut-être de la fiction, mais ils sont basés sur des faits réels :
http://www.cbc.ca/xcompany/dispatches/the-real-camp-x-10-facts-about-canadas-elite-spy-school
(2) À l’heure du décor digital au cinéma, plus besoin de filmer à l’autre bout du monde. Le temps où il fallait fabriquer des décors et déplacer comédiens et techniciens dans des contextes particuliers est-il révolu? Plus de remises d’Oscar pour les meilleurs maquillages? Quoiqu’il en soit peut-être que vous ne verrez plus les films et les pubs du même oeil. Quand même fascinant. Boardwalk Empire, Saison deux :
http://player.vimeo.com/video/34678075?title=0
https://vimeo.com/brainstormdigital
(3) Je suis généralement d’accord avec les arguments de John Gray, car lorsqu’on étudie l’histoire, il est difficile de s’illusionner sur les humains. Mais je garde toujours un petit fond d’espoir – j’appartiens à la catégorie «apôtres de l’humanisme» comme il appelle ceux qui le prêche et qui, selon lui, s’illusionnent aussi. Il perçoit l’humanité comme «une espèce rapace déterminée à détruire toutes les autres formes de vie; les humains ne peuvent pas détruire la terre, mais ils sont capables d’anéantir totalement l’environnement qui les soutient».
Extraits d’un article sur son ouvrage The Silence of Animals (2013) :
«Les Napolitains affamés en 1944 chassaient et consommaient des chats errants, ou se nourrissaient de poissons tropicaux trouvés dans l'aquarium de la ville; les prisonniers soviétiques internés par les Nazis bouffaient les cadavres des autres détenus tels des meutes de chiens voraces. Voilà ce qui arrive quand les faux-semblants de civilisation et d'humanisme dégringolent – ils ne sont guère plus qu’une prétention qui procure un support moralisateur à la religion. Dans le jardin d’Éden, Dieu a flatté l’homme en lui accordant la suprématie sur les autres animaux; la vérité est que notre capacité de rationalisation nous a effectivement permis de nous comporter comme des bêtes.
La barbarie est une maladie de la civilisation. Toutes nos institutions – les familles et les Églises, les forces policières – sont impliquées dans la mesquinerie humaine. Il est absurde de croire à l'évolution de notre espèce ou à l'amélioration progressive de la société : au Congo Belge ou dans la Russie stalinienne ou en Iraq, en Iran et en Syrie, des idéologues qui s'extasient sur la régénération du monde entier comptent sur les massacres à grande échelle pour établir leur version personnelle du ciel sur terre.» (John Gray)
Les fictions et les mythes que nous élaborons afin de nous sentir à l'aise dans cet univers hostile ou indifférent sont au mieux des ‘nuages de poussière’ facilement dissipés par les explosions d’invectives de Gray, commente l’auteur de la critique, Peter Conrad. Et il conclut : j’ai bien peur que Gray finisse comme le Gulliver toqué de Swift qui, dégoûté de ses semblables, alla vivre avec ses chevaux dans son écurie.
Source :
http://www.theguardian.com/books/2013/mar/03/silence-animals-john-gray-review
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