18 mai 2014

Dimanche littéraire

Découvert récemment à la biblio :
Matin de guerre
Marcel Saucier 
Préface et lecture (CD) : Richard Desjardins
Édition Les 400 coups 2005

[Livre – CD - C'est l'Abitibi dans toute sa beauté et sa désolation qui est au centre de ce reportage intimiste, poétique et visuel. Textes et photos portent le témoignage de l'infinie beauté et de la cruauté de la vie dans cette Abitibi malmenée.]


(…) Nous nous employions à questionner passionnément toute forme d’autorité et Marcel Saucier était au front, imposant et rigolo. Je me souviens d’un débat entre lui et le prof prêtre :
       «Mais si Dieu est partout, il est donc aussi en enfer?
       -- Oui mais l’enfer n’est pas un lieu physique.
       -- O.K. Alors le ciel non plus d’abord?»

~ Richard Desjardins (Préface; p. 13) 

Extrait de l’épilogue :

L’instant

L’Instant, ou la plus qu’improbable réalité ou la seule chose qui existe.

Je vous écris pour vous dire que la magie existe et que c’est d’elle que nous vivons.

Mettons, il y a cent ans, une semaine, trois heures et demie, personne, ni une intelligence divine ou une machine, n’aurait pu prévoir que vous liriez ceci, assis là, avec un petit mal de tête, etc.

Si nous croyons à la relation cause-effet les choses du passé s’entrechoquent, s’amalgament, se maganent, s’unissent. Ou se réfléchissent sur un mur? sur rien? sur un futur immédiat? et se focalisent sur un point infiniment précis, sur cet Instant.

Une infinité ou presque de possibilités. Tout ce chaos aboutit à cette chose précieuse, à cet Instant.

Nous vivons le plus qu’improbable, mais le mathématiquement possible. Le possible devient trop grand pour exister. Me suivez-vous? les choses aboutissent à cet Instant. Mais pourquoi celui-ci?

On voudrait croire à la dureté du temps
On s’accroche à ce qui devient juste
Hélas! Le temps est mou
Et nous le savons tous.

(p. 92)

---
Onripu

Regarde, ils vont devenir sérieux,
On va bientôt parler d’argent.
(p. 28)

---
Rire
Beaucoup rire
Marcher longtemps  
Et mourir enfin
(p. 86)

---
Souvenirs de voyages

(…)
Leonard, le plus rapide, avait déjà gravé sur le bouclier canadien :
“I long for love and light, but must it come so cruel, must it be so very bright!” (1)

Comme une chose qui monte, je prenais de la vitesse et je savais l’apprécier.

Comme une chose qui tombe de haut, j’appréciais mon altitude
et je prenais de la vitesse.

Je me posai dans une slam (2).

Je me souviens encore d’un grand cadre avec au-dessus une enseigne
lumineuse «L’espoir» et à droite un petit écriteau «Pour les désespérés seulement».

Ah bon, c’est ce que je me disais.
Je n’avais pas vingt ans et je croyais encore à ma chance.

(p. 58)

--
(1) Leonard Cohen, «Joan of Arc», Songs of Love and Hate, 1971
(2) Slam : Vaste dépôt de résidus miniers, la slam est de la boue acide desséchée. Il en existe des grises, des brunes, des rouges et des blanches.


Mini détour chez Cohen :  
Livre du constant désir
Leonard Cohen
Traduction : Michel Garneau
Éditions de l’Hexagone 2007

---
La question de Layton

Toujours après que je lui ai dit
ce que j’ai l’intention de faire ensuite,
Layton s’enquiert solennellement :
Leonard, es-tu certain
de prendre la mauvaise décision?
(p. 95)

---
Ma vie en habits

Après un certain temps
Tu ne sais plus
Si c’est une femme
Qui te manque
Ou si tu as besoin
D’une cigarette
Et plus tard
Si c’est la nuit
Ou si c’est le jour
Puis soudainement
Tu sais
Le temps
Tu t’habilles
Tu rentres à la maison
Tu t’allumes
Tu te maries
(p.10)

---
La télécommande

Je pense souvent à toi
quand je suis couché tout seul
dans ma chambre la bouche
ouverte et la télécommande égarée
quelque part dans le lit
(p.105)


J’ai enfin mis la main sur «HUGO Choses vues» à la biblio. Je ne résisterai pas à la tentation d’acheter 1428 pages de pur bonheur, oh que non…

Description des éditeurs 
Choses vues, entendues, notées sur le vif en forme de brèves, de caricatures ou de longs portraits, de récits bouleversants, d’enquêtes, de grands moments qui appartiennent désormais à l’histoire nationale, mais aussi de mots d’esprit, d’expressions glanées dans la rue  - voici le siècle de Hugo. Cet extraordinaire recueil, constitué après la mort de Victor Hugo et sur sa recommandation, est fait de pièces et de morceaux recousus à partir de ses Carnets, de son Journal, de ses livres de comptes, de ce qu’il appelait lui-même «Pierres précieuses tombées de la tribune» – autant de lapsus qui plongent l’Assemblée dans le fou rire –, de Feuilles volantes, de Souvenirs personnels, de «Faits contemporains» que les éditeurs successifs se sont employés à classer, ici dans l’ordre chronologique. Dans ce livre, le XIXe siècle court de 1830 à 1885, sous l’œil acéré et sans complaisance du chroniqueur. (…) Des pages où le pétillement de l’esprit se mêle sans cesse aux plus terribles tragédies.

QUARTO GALLIMARD (Édition 2002)

En feuilletant au hasard :

11 janvier 1849.

(...)
C’est l’élection du successeur de M. de Chateaubriand.
Je suis allé à l’Académie de bonne heure.
(…)

J’ai jeté un jour dans l’urne ce quatrain :

       Je ne voterai pas du tout,
       Car l’envie a rempli d’embûches
       Pour le génie et pour le goût
       Ces urnes d’où sortent des cruches.

Aucun commentaire:

Publier un commentaire