31 août 2014

Êtes-vous chemin ou lieu?

Photo : Véronique Brosseau, Couleurs nature

Tout serait plus simple si on ne t'avait pas inculqué cette histoire d'arriver quelque part, si seulement on t'avait appris, plutôt, à être heureux, en restant immobile. Toutes ces histoires à propos de ton propre chemin. Trouver ton chemin. Suivre son chemin. Alors que si ça se trouve on est fait pour vivre sur une place, ou dans un jardin public, là sans bouger, à faire que la vie passe, si ça se trouve on est un carrefour, le monde a besoin qu'on reste là sans bouger, ce serait une catastrophe si on s'en allait, à un moment donné, suivre notre route. Mais quelle route? les autres sont des routes, moi je suis une place, je ne mène à aucun endroit, je suis un endroit. (City)

Ne rien faire est une chose. Ne rien pouvoir faire en est une autre. (Océan Mer)

~ Alessandro Baricco

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Quand on y songe, il n’y a que deux mois par année où l’on est épargné des «fêtes mercantiles» : août et novembre. Quelque dix fêtes du genre. Il faut ajouter à cela les anniversaires des membres de la famille et ceux des amis. Mine de rien, beaucoup de temps, d’énergie, de va-et-vient et de frais. Mais ça fait rouler l’économie – objets, bouffe, alcool, etc. Si quelqu’un est partyphile, aucun problème. Sinon…

Il y a des gens qui voyagent toute leur vie tandis que d’autres s’installent quelque part et y restent jusqu’à leur mort. L’un n’est pas mieux que l’autre, c’est encore une question de goût personnel.

Pour se sentir relativement bien dans sa peau, peut-être faut-il se connaître un peu mieux et accepter d’être partyphile ou non, nomade ou sédentaire, une autoroute ou un endroit, et vivre en accord avec cette particularité.

Vincent Van Gogh, Banc de parc.
(Oeuvre et biographie du peintre sur https://www.artsy.net/artist/vincent-van-gogh )

Il est bon d'aimer autant que l'on peut, car c'est là que gît la vraie force, et celui qui aime beaucoup accomplit de grandes choses et en est capable, et ce qui se fait par amour est bienfait... ~ Vincent Van Gogh

Quand le cœur n’y est pas, les sens exigent un renouvellement perpétuel des plaisirs.
~ Maurice Toesca

29 août 2014

Sauvés par l’amitié

Photo : Arben Celi, Write & Ride http://write-andride.blogspot.ca/

Le loup et l’âne

Jean de La Fontaine aurait sûrement tiré une fable de cette histoire. Elle a déjà circulé, mais elle touche toujours. Une leçon pour nous.

En mai 2007, dans les montagnes du nord de l'Albanie, près de la ville de Patok, un loup fut capturé et mis en cage. Pour le nourrir, les braconniers décidèrent de lui offrir de la «nourriture vivante» : un vieil âne exploité depuis de nombreuses années par ses propriétaires, et conséquemment jugé inutile. Personne ne soupçonnait ce qui allait se passer : les deux prisonniers se comportèrent de manière inattendue.

Quand l'âne pénétra dans la cage, les deux animaux se regardèrent intensément. Le loup ne sauta pas sur l’âne. Ils devinrent amis, cohabitant en paix dans la cage. Dans un monde dominé par la cupidité des hommes, les mots proie et prédateur perdaient tout à coup leur sens. Une merveilleuse amitié (solidarité) peut se développer entre deux âmes victimes d’une même cruauté. Et ce n’est possible que par les émotions; des émotions que nous croyons inexistantes chez les animaux.

Photo : Reuters

12,000 personnes ont écrit au gouvernement albanien via une pétition d’Occupy for Animals demandant qu’on épargne la vie de l’âne et qu’on relâche le loup dans la nature. La couverture médiatique et la pression du public firent en sorte que le gouvernement intervint. Dans l’article original on mentionnait que l'âne vivait désormais heureux dans un pré et que le loup le visitait parfois : http://www.gut-aiderbichl.at/aktetier/aktetier_1038.pdf

Loi de la jungle : tu ne tues pas quand tu n’as pas faim.

Eh bien nous, avec notre frénétique appétit de destruction et de consommation, nous tuons sans avoir faim! Gaspillage alimentaire. Extinction d’espèces. Notamment les éléphants pour leurs défenses en ivoire, même si cette pratique est bannie internationalement depuis très longtemps.

Occupy for Animals:
https://www.facebook.com/pages/Occupy-for-Animals/152547194813334

27 août 2014

Le bonheur négatif

Je déteste la prédation, la compétition pour la survie et les meurtres pour nous manger les uns et les autres (enfin, chez les cannibales et carnivores de la chaîne alimentaire). Rien à faire, ça ne passe pas. Je continue de penser que les créateurs/concepteurs de cette planète sont des malades, de vrais psychopathes. Je comprends que la mort fait partie de la vie, qu'il faut laisser la place aux autres, etc., mais ce serait franchement plus agréable si l'on ne s'entretuait pas les uns les autres par dessus le marché.

Mélissa Verreault dans son dernier roman L’angoisse du poisson rouge (La peuplade) s’est inspirée du vécu des grands-parents de son conjoint durant la Deuxième guerre mondiale : «Il y avait beaucoup de vécu dans ce corps-là [le grand-père]. Quand je l'ai rencontré, je me suis dit : il faut que je raconte son histoire un jour. Il s'est toujours livré avec une très grande pudeur sur la guerre. Il ne parlait pas du cannibalisme, mais on sait que de nombreux prisonniers italiens ont été réduits à manger leurs voisins de cellule morts pour survivre. Il a même failli se faire manger lui-même.» (Émission Plus on est de fous, plus on lit, Radio Canada)

«Je suis petit, mais je suis un grand gagnant»
De temps en temps c’est réconfortant de voir un plus petit éviter les griffes d’un rapace (c’est-à-dire défier la loi du plus fort; et ça vaut pour les humains…). 



Regard sur Le monde comme volonté et comme représentation d’Arthur Schopenhauer :  

Vivre comme si...

Si le pire est certain, une vie contemplative est, malgré tout, possible sur le plan de la philosophie pratique. C’est ce que montre Schopenhauer dans son œuvre tragique qui débouche finalement sur une sagesse pratique. En cela, le penseur de Francfort s’inscrit dans la grande tradition des philosophes antiques pour qui la philosophie est essentiellement une pratique de vie et non pas uniquement la création de concepts.

Schopenhauer est un philosophe existentiel qui propose des échappatoires à la douleur de l’existence. Après avoir longuement diagnostiqué le mal dans son œuvre monumentale, Le monde comme volonté et comme représentation, le philosophe nous prescrit des remèdes qu’il s’est lui-même administré au cours de sa vie. Sa formule tient en quelques mots : si le monde est mauvais à être, il peut-être beau à voir.

Schopenhauer construit son modèle de sagesse philosophique autour de trois thèmes clés : le bonheur négatif, la morale de la pitié et la contemplation esthétique.

Le bonheur négatif

Rüdiger Safranski résumait ainsi la pensée de Schopenhauer : «Tu n’as aucune chance, mais saisis-la!». Telle est la leçon de Schopenhauer. Sa philosophie est à double fond : elle s’engage dans le pragmatisme de la vie et de l’affirmation de soi individuelle […] Être spectateur et non acteur, voilà ce qui permettait à Schopenhauer d’être le philosophe de l’irrationnel le plus rationnel.»

Le pragmatisme de Schopenhauer tient du fait qu’il sait que le réel est tragique et consent à en faire une sagesse de vie. Il nous invite à regarder le monde tel qu’il est avec son cortège de malheur et nous propose de vivre comme si la vie valait la peine d’être vécue. Si l’on doit participer à la comédie, ou à la tragédie de la vie, faisons au moins en sorte d’être à la fois acteur et spectateur.

Le philosophe invite à ne pas se livrer à la quête du bonheur; celui-ci étant défini négativement par l’absence de souffrance. Le vrai bonheur consiste à travailler à la destruction de la douleur et non à la recherche du plaisir. Dans L’art d’être heureux, Schopenhauer écrit que «tout bonheur et tout plaisir sont de genre négatif, […] la vie n’est pas là pour qu’on en jouisse, mais pour être conquise, traversée, c’est pourquoi tâche de t’en sortir» et cite Aristote «Le sage n’aspire pas au plaisir mais à l’absence de souffrance».

La morale de la pitié

La pitié schopenhauerienne, «fondement de la morale», est une morale de désengagement qui affranchi de la tyrannie du vouloir et «elle ne consiste pas en une certaine manière de se conduire dans le monde, mais plutôt dans une manière de le quitter. [1]» Il ne s’agit pas de l’exposer d’un ensemble de règles qui portent à faire le bien mais plutôt une vision intellectuelle de l’identité de tous les êtres à l’intérieur d’une même volonté. C’est le sentiment que dans la nature les phénomènes que nous sommes partageons la même essence avec tout ce qui existe : les animaux, les végétaux et les minéraux. Le vouloir, l’essence même de ce qui nous constitue, est le même chez tout ce qui existe. Cette conception va à l’encontre de toutes les opinions classiques qui tendent à faire de l’homme l’aboutissement le plus parfait de l’évolution et la supériorité de celui-ci sur les autres espèce. Il n’y a pas de différence de nature entre l’homme et les autres composants de la nature.

«La pitié libère une compassion à l’égard des hommes qui subissent comme moi la tyrannie de la volonté mais aussi à l’égard des animaux.» Sur ce dernier point la pensée de Schopenhauer n’a pas pris une seule ride, son constat de la cruauté de ses contemporains du 19ème siècle à l’égard des animaux reste d’actualité. «La pitié prend les bêtes sous sa protection, tandis que dans les autres systèmes de morale européenne, on a envers elles si peu de responsabilité et d’égards. La prétendue absence de droits des bêtes, le préjugé de notre conduite envers eux n’a pas d’importance morale, qu’il n’y a pas de devoirs comme on dit envers les bêtes, c’est là justement une grossièreté révoltante, une barbarie de l’Occident. […] celui qui est cruel envers les bêtes ne peut être un homme bon. [2]»

L’art et la contemplation esthétique

Avec la contemplation esthétique, l’homme cesse de s’ennuyer au spectacle d’un monde qui l’ennuyait tant qu’il y jouait un rôle réel. En cessant d’être vécu, le monde a cessé d’être ennuyeux. Il faut pratiquer un certain nombre d’activités qui cessent d’être déterminées par les intérêts de la Volonté. Il faut entendre par là la pratique des arts, la musique, la littérature, l’écriture, la méditation, les ballades ou encore le sublime qui est «la disparition de l’individu devant l’omnipotence de la nature et devant la dimension écrasante du temps». La contemplation esthétique compte parmi les plus belles pages de l’œuvre de Schopenhauer. «Un seul et libre regard jeté sur la nature suffit […] pour rafraîchir, égayer et réconforter d’un seul coup celui que tourmentent les passions, les besoins et les soucis ; l’orage des passions, la tyrannie du désir et de la crainte, en un mot toutes les misères du vouloir lui accordent une trêve immédiate et merveilleuse. [3]»

Mais cette contemplation esthétique ne doit pas être confondue avec le simple loisir. «Le loisir est l’intellect momentanément inoccupé : il n’a provisoirement rien à faire pour la volonté et s’ennuie. La contemplation est l’intellect momentanément occupé à des tâches n’intéressant pas la volonté : il a provisoirement beaucoup à penser pour lui et ne s’ennuie pas. Ce qui signifie que la contemplation dispose d’un surcroît intellectuel qu’elle peut investir dans des travaux étrangers à la volonté, ce dont est incapable le simple loisir. [4]»

Schopenhauer assigne à l’art le rang philosophique le plus élevé qu’aucune autre philosophie ne lui avait assigné avant lui. «Si la philosophie est restée si longtemps effort vain, écrit-il, c’est qu’on l’a cherchée sur le chemin des sciences au lieu de la chercher sur le chemin de l’art». Le monde, théâtre de souffrance et de misère, est beau à voir mais mauvais à être. Mais il ne suffira pas uniquement de s’abimer dans les arts pour stopper le cycle permanent du vouloir-vivre. L’étape ultime du salut est la négation du vouloir-vivre, le repos et la fin de toute souffrance.

On a souvent interprété la négation du vouloir-vivre de Schopenhauer comme une négation de la vie en oubliant que le philosophe se pose en «spectateur qui regarde à travers la clôture du spectacle sans y être invité». Celui qui saura transformer le monde n’aura nullement besoin de disparaître dans la négation, «on peut rester ici, si, dans l’art, la possibilité s’offre de voir le monde comme si on l’avait déjà quitté. Vivre comme si et nier comme si. Schopenhauer, cet homme si peu ascétique, si peu saint, se tient dans cet équilibre. [5]»

Notes :
 [1] Didier Raymond, Schopenhauer, Seuil, 1979
 [2] Arthur Schopenhauer, Douleurs du monde, Rivages, 1990
 [3] Arthur Schopenhauer, le monde comme volonté et comme représentation, PUF, 1966
 [4] Didier Raymond, Schopenhauer, Seuil, 1979
 [5] Rüdiger Safranski, Schopenhauer et les années folles de la philosophie, PUF, 1990

Source :
http://www.schopenhauer.fr/index.html 

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http://situationplanetaire.blogspot.ca/2014/08/par-chemins-autochtones.html

25 août 2014

Des centaines de désirs

Photo : Archives de la Ville de Montréal / CC BY-NC-SA 2.0 (1964)

[Extraits]  

Il commença de s’ennuyer au lac Vert. Il avait renoncé à son effort insensé, et l’appétit lui revint; le sommeil aussi, un véritable sommeil où il cessa d’arranger les mots et les phrases. Il fallait être raisonnable, ne plus se torturer sans profit. Ses joues parurent se remplir un tant soit peu. Devant le petit carré de glace, quand il se rasait, il crut constater qu’il avait engraissé de quelques livres. Moins on réfléchissait, et mieux c’était pour les nerfs. «Regardez les Esquimaux, les peuplades de Polynésie…» disait encore Alexandre, mais sans plus d’envie de leur ressembler. S’il arrivait comme eux à ne plus se soucier de rien, sans doute atteindrait-il une santé parfaite. Mais alors à quoi bon guérir pour tourner autour d’insignifiantes occupations : rentrer du bois, faire chauffer les aliments et, jour après jour, accomplir la même ennuyeuse corvée d’eau. Quand les fruits mûrs tombés sur le sol exhalaient une odeur sucrée et chaude, il ne s’inquiétait plus des malheureux, dans les villes, qui eussent fait leur joie de cette abondance. Il glissait vers l’indifférence, retenant tout juste assez de lucidité pour se croire plus estimable dans son état intérieur. La santé lui parut avoir un caractère humiliant. 
       Et le bonheur même, le bonheur tel qu’il l’avait vu chez Edmondine, il commença de le dédaigner. De quoi était fait ce bonheur, au fond, sinon de suffisance? Les Le Gardeur étaient heureux parce qu’ils n’avaient besoin de personne au monde. «Parce que je ne manque ni de vivres, ni de feu, parce que je ne suis pas malade, je considère Dieu comme mon bienfaiteur.» Au fond, de quoi l’homme heureux rendait-il grâce sinon de l’inégalité sur terre?
(…)
       Mais bientôt il erra entre les arbres sans plus les voir, lassé; toujours des troncs lisses, des branchages muets. La paix avait-elle donc ce caractère monotone et accablant! 
       Un soir, il se trouva au bord d’une anse protégée. Cet endroit était devenu pour lui un lieu d’évasion d’où il plongeait d’un cœur avide vers le passé. Alexandre, ce soir, y retrouva la ville. Au lieu des berges noires, il aperçut le foisonnement de lumières par quoi les villes se révèlent dans l’ampleur de la nuit. La nostalgie des vies entassées là, des vies solidaires, le surprit, plus fort qu’aucun ennui qu’il eût éprouvé dans son existence : comme un ennui d’éternité. 
       Il pensa aux vitrines de magasins craquant de vivres, à une abondance telle que le pauvre Le Gardeur ne pouvait la concevoir. Il rêva aussi de journaux, de magazines en grosses piles sur le trottoir, apportant les nouvelles du monde. Là était la vie, l’échange perpétuel, émouvant, fraternel. 

       Ses souvenirs continuèrent à embellir. 

       … La vie des hommes semblait être de sortir de leur campagne afin de faire assez d’argent dans les villes pour pouvoir venir refaire leur santé à la campagne.

[Note : Revenu en ville après sa période de convalescence, Alexandre Chenevert se remit à envier les Polynésiens. C’est bien nous ça, on veut ce qu’on n’a pas et quand on l’obtient, on n’en veut plus.]

       Gagner sa vie, pensa-t-il, c’est-à-dire donner son temps, son énergie, la majeure partie de son existence au seul souci d’obtenir le pain, les meubles! Il apercevait le sort de la plupart des hommes qui est de rester enchaîné à l’insignifiance de la vie : vendre des chaussures pendant trente ans, être percepteur d’impôts…
       Il considéra aussi les servitudes que doivent imposer aux hommes leurs affections terrestres; le besoin de pourvoir à une femme, à des enfants. Que n’ignorait-il en effet de la vie d’un homme ordinaire! Alors au lieu d’un sentiment de liberté supérieure acquise par le choix de sa vocation, l’aumônier éprouva une impression d’indignité. 
       À moins de souffrir autant, sinon plus que tous, de quel droit pouvait-il servir d’interprète entre Dieu et l’humain! 
       Le pauvre abbé ploya les épaules. Lui qui jusqu’ici avait plutôt rendu grâce de sa bonne santé, de son indépendance de liens trop humains, aujourd’hui il eut la tentation d’en faire grief à Dieu. (…) 
       Il s’en fut à la chapelle. À genoux, à voix basse, il demanda instamment la mort d’Alexandre. (…) 
       Tant il était naïf, malgré tout, l’aumônier revint auprès de M. Chenevert, voir si sa prière n’avait pas été exaucée. 
       Alexandre vivait encore, mais tout juste pour demander sa mort. … Il avait changé de désirs presque à chaque saison de sa vie; des centaines de désirs s’étaient contrariés, bousculés dans son cœur; et, maintenant qu’il s’en croyait délivré, sans force pour en accueillir aucun, il n’était plus lui-même qu’un intolérable désir : 
       -- Ma mort… suppliait-il… avec une humilité qui perçait l’âme… s’il vous plaît… aujourd’hui…

(Chap. XVI et XXII)

~ Gabrielle Roy (1909-1983)

Alexandre Chenevert
Boréal Compact

22 août 2014

La mer, grand réservoir de vie

Photo : pps, photographe non identifié

Que deviendraient nos poumons sans la mer, et nos pauvres cervelles, et nos nerfs, transformés en fils électriques à courant continu? La campagne n'a plus assez de maisons pour les surmenés qui ont besoin de repos, et c'est tout le monde. Elle ne remet pas à neuf en trois semaines. Il lui faut une saison, un printemps, un été. Elle travaille lentement, comme les boeufs, et nous n'avons pas le loisir d'attendre. La mer, qui est le grand réservoir de vie, s'est chargée de nous. Elle nous sale et nous conserve...


~ René Bazin (1853-1932) Croquis de France et d'Orient 

Photo : Tiago Ribeiro de Carvalho; Satyagraha House (où Gandhi a vécu)

Énigme

Andrée Chedib

La vie
Secrète
L’insondable énigme

Le temps
Réduit
Cette aventure du souffle
À l’aune d’un sablier

En nos corps dissemblables
En nos visages divers
Quelle symphonie traduisons-nous
Quel récit, quel livre ouvert
De notre chair si concrète
D’où tirons-nous lumière?

Chacun côtoie
Le fleuve des présences
Personne n’escorte
La mer.

Source : Carnets de Poésie de Guess Who

20 août 2014

Le drame extérieur miroir d’un drame intérieur


       Les objets sont des symboles. 
       Vous pensez habituellement à eux comme à des réalités. Vous pensez que pensées, images et rêves peuvent parfois être les symboles d’autres choses, mais la vérité est que les objets physiques extérieurs sont eux-mêmes des symboles. Ce sont des symboles extérieurs qui sont mis en avant par l’expérience intérieure.
       Il y a donc des symboles physiques de masse sur lesquels vous vous mettez tous d’accord, aussi bien que des symboles privés personnels.
       La nature et la structure d’ensemble de la vie physique telle que vous la connaissez constituent des affirmations réalisées par des groupes d’entités qui choisissent de travailler sur le symbolisme physique. Ainsi le corps est un symbole de ce que vous êtes, ou de ce que vous pensez être – ce qui peut constituer deux choses bien distinctes.
       N’importe quelle indisposition physique est symbolique d’une réalité interne ou d’une affirmation. Votre vie entière est une affirmation en termes physiques, écrite sur le temps tel que vous le comprenez.
       Une fois que vous comprenez la nature symbolique de la réalité physique, vous ne vous laissez plus piéger par elle. Vous avez formé les symboles, vous pouvez donc les changer. Vous devez apprendre, évidemment, ce que les différents symboles signifient dans votre propre vie et la manière de les traduire. Pour ce faire, vous devez, avant tout, vous rappeler fréquemment que la condition physique est symbolique. Vous devez chercher en vous-mêmes la réalité interne représentée par le symbole. Ce processus doit être engagé sans tenir compte de la nature du problème ou de celle de votre défi.
       Votre environnement physique intime est donc une affirmation de votre situation intérieure. Celle-ci est fluide parce que vous êtes toujours en devenir. Livrés à vous-mêmes, vous traduisez automatiquement les événements intérieurs spontanés, libres de leur mouvement, en réalité physique. Vous modifiez donc votre environnement et changez les symboles.
       Si, à l’inverse, vous vous imaginez que votre environnement ou que votre condition physique est la réalité, alors vous serez piégés et vous vous épuiserez en efforts pour combattre un dragon de papier. L’environnement est toujours modifié de l’intérieur. Il y a une rétroaction entre les conditions internes et externes, mais la mobilité, la nécessité et la méthode pour changer l’environnement physique viendront toujours de l’intérieur.
       …L’individu devrait prendre conscience de la liberté dont il dispose pour agir de manière déterminée à l’intérieur de la structure de la vie physique. Nombre d’entre vous sont tellement extravertis, habitués à accepter le monde physique comme critère de la réalité, qu’il ne leur est jamais arrivé de sonder leurs possibilités intimes. La structure totale de votre existence est un flux constant qui projette sur le monde des symboles physiques que vous prenez par erreur pour la réalité.
       Le drame intérieur est donc celui qui devrait vous intéresser. Votre vie est écrite par vous. Vous en êtes l’auteur. Il n’y a donc pas de raison pour que, voyant ce drame, vous vous laissiez piéger pour que, voyant ce drame, vous vous laissiez piéger par lui. Le pouvoir de changer votre condition vous appartient. Vous devez simplement l’exercer. … Les objets en tant que symboles aident à construire le véritable cadre de votre existence. Ils peuvent être manipulés en tout liberté.

L’univers objectif est le résultat final de l’action intérieure. Vous pouvez évidemment manipuler le monde objectif de l’intérieur, car ce sont les buts et la définition de la véritable manipulation… Les pensées et les images formées dans votre réalité deviennent ainsi des faits physiques. Ils sont propulsés chimiquement. Une pensée est de l’énergie. Elle commence à se produire au moment où elle est conçue. … Les substances chimiques sont libérées à travers la peau et le réseau des pores en une invisible mais précise formation pseudo-physique. L’intensité d’une pensée ou d’une image détermine largement l’immédiateté de sa matérialisation physique. Il n’y a pas d’objet autour de vous que vous n’ayez créé. Il n’y a rien concernant votre propre image physique que vous n’ayez fait. La pensée ou image initiale existe dans les limites mentales. Elle n’est pas encore physique. Puis elle est jetée dans la matérialisation physique par les enzymes mentales. C’est le processus général. Toutes ces images ou pensées ne sont, néanmoins, pas complètement matérialisées. L’intensité peut être trop faible. La réaction chimique envoie certaines charges électriques, quelques-unes à l’intérieur des couches de la peau. Des radiations contenant des instructions et de l’information hautement codifiées passent alors à travers la peau vers le monde extérieur. Le milieu physique est donc, autant que votre corps, une part de vous. Le contrôle que vous exercez sur lui est tout à fait réel car vous le créez. Les objets sont composés de la même pseudo-matière que celle qui irradie de votre image physique vers l’extérieur, seul le niveau d’intensité diffère. Quand une image est suffisamment élaborée, vous la percevez en tant qu’objet. Lorsque l’intensité est basse, elle ne vous est pas apparente.
       À l’intérieur du corps, chaque nerf, chaque fibre a un but qui n’est pas perçu et qui sert à relier le moi intérieur à la réalité physique, ce qui permet au premier de créer la seconde. D’un certain point de vue, le corps et les objets physiques rayonnent dans toutes les directions à partir du noyau intérieur de l’entité.

~ Jane Roberts (L’enseignement de Seth et Le livre de Seth)

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Voilà le drame : nous créons notre réalité aussi inconsciemment que nous respirons.
Il est évident que la plupart des humains ne sont pas prêts à assumer la responsabilité de leurs propres créations.  
   Cette manière de concevoir la réalité est considérée comme de la "pensée magique" par les scientifiques purs et durs. On dirait qu'ils n'arrivent pas à se figurer que c'est la pensée qui est l'origine de n'importe quelle création. Voici un exemple tout ce qu'il y a de plus matérialiste. Si je veux créer une chaise, il faut d'abord que je l'imagine, que je conçoive un modèle en pensée, puis que j'essaie de le construire. De la même manière, si je passe mon temps à ruminer à comment tuer du monde, eh bien, je vais concevoir des armes pour ce faire. Si je passe mon temps à réfléchir à comment je peux aider les gens, eh bien, je vais trouver des moyens concrets pour ce faire. C'est pas plus compliqué, et ça n'a rien de magique, c'est simplement logique. (Dans cette veine : blogue Air Karma

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We come closer to a clearer experience of our being than ever before because we sense the essence of personality that forever escapes definitions and labels, yet reveals itself to love’s experience. ... At times, it seems to me, our inner selves plead with us to forsake our rigid concepts of ourselves in order to experience that greater unlimited aura of vitality that forms our very lives – as in this ballad:

Soulsong
By Jane Roberts
(If We Live Again; Poetry

I said, “Brother, take your name off
and dance this night with me.”
He said, “I’ll take my clothes off,
shirt and socks and pants
but my name belongs to me.
There’s a soul in a box someplace
that’s marked with my name
and if I take my name off
I’ll never be the same.
The lord will never find me
and I’ll never claim my soul
which waits all packed
in a great gift box
in some secret closet of the world,
of the world.”

I said, “Lover, take your name off
and dance this night with me.”
He said, “I’ll take my love off,
I’ll step out of my hate.
But my name is stamped
on that magic box
with my soul folded up
all neatly inside
and if I take my name off,
I’ll never be the same.
The lord will never find me
and my soul will go unclaimed.
My soul will go unclaimed.”

I said, “Take off your name my friend
and dance this night with me
for your soul is bigger than the world
and it goes by many names.
No god put it in a box
hidden on a shelf
and if you take your name off,
you’ll dance with your soul, yourself.
Oh lord, if you take your name off
you’ll dance with me yourself.

18 août 2014

Sept milliards de solitudes

Dans un spoutnik
Daniel Bélanger (poète, auteur-compositeur québécois) 
Illustrations / animation : Sébastien Théraulaz



Étendant la main pour tirer vers nous la quantité de temps qui nous est allouée, nous sommes capables de la laisser ensuite filer en arrière sans rien faire. Répétant simplement les mêmes tâches, les mêmes gestes quotidiens - parfois avec une grande habilité. À cette idée, je sentis en moi un vide incommensurable.

~ Haruki Murakami (Les amants du Spoutnik)
 
La lumière bleue des téléviseurs allumés dans les maisons tombaient sur la neige, parfois un son filtrait, de chaque fenêtre un fragment de différents programmes. Je m’imaginais la solitude ainsi : les gens ne regardaient qu’exceptionnellement la même télévision. Le soir, les générations s’enterraient dans des mondes séparés, balancés sur Terre du haut de tel ou tel satellite. Au moins autrefois, on avait eu des émissions communes dont on pouvait parler. De quoi parle-t-on maintenant?
 
~ Henning Mankell (Les chaussures italiennes)  

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Avec l’allongement de la vie, l’augmentation des divorces et des séparations, les choix de vie de plus en plus fréquents de se réaliser individuellement, tout le monde est, a été, ou sera seul. Dans une même vie, nous connaîtrons des périodes de rencontres centrées essentiellement sur la sexualité, des périodes en couple cohabitant, alternant avec des périodes de solitude, puis des liens amoureux à distance, et sans doute encore de la solitude.

Il existe incontestablement un isolement produit par la société moderne. Prôné comme suprême, l’individualisme entraîne une insécurité dans tous les domaines. La dégradation des conditions de travail et l’appauvrissement de la vie sociale amènent à se méfier de soi et des autres, à hésiter avant de s’engager. Notre société centre les personnes sur les bonheurs matériels, sur l’importance des choix, l’abondance de l’information et l’obligation du bonheur qui ne réussissent pas à combler les individus qui se montrent déçus, frustrés et désenchantés.

On aurait pu penser qu’Internet et les sites de rencontres viendraient pallier la déficience de liens. Mais, là aussi, l’individu se retrouve un parmi une foule de «mêmes», dont il peine à se différencier. Les rencontres permises par ces sites sont souvent frustrantes, car les candidats se méfient, hésitent à s’engager et éprouvent parfois le sentiment d’être devenus consommables et jetables.

Pourtant, si la solitude est certes parfois douloureuse et sans espoir, elle peut aussi apporter des moments riches où nous pouvons puiser énergie et inspiration. Il est évidemment important d’apprendre à vivre en commun, mais il est aussi indispensable d’apprendre à vivre seul, que chacun puisse trouver dans la solitude un espace de repos et de régénération : accepter une solitude relative, c’est aussi se donner les moyens de sortir de la futilité et de la superficialité d’un monde narcissique.

~ Marie-France Hirigoyen 
Les nouvelles solitudes
La Découverte, 2007

17 août 2014

Dernier dans la veine


Le Mojito est un cocktail cubain apparu au XVIe siècle. Un mélange d'aguardiente, de menthe, de sucre et de citron vert concocté par le pirate anglais Richard Drake; cette boisson s'appelait «drague». Cool, non?  

En lien avec le topo qui suit : pas fou de se créer une liste...  
«… puis repas au restaurant hier soir avec ma grande et j'ai bu un Mojito. Mon premier Mojito. J'ai aimé et je peux enlever ça de ma liste de choses à faire avant de mourir :-)»
~ Martine Roux, http://quinquabelle2008.blogspot.ca/

«Allez, vous avez encore une vingtaine d’années de jolis péchés à faire; n’y manquez pas; ensuite vous vous repentirez.» ~ Denis Diderot

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Je ne veux pas minimiser, mais la mort de Robin Williams a soulevé beaucoup de remous et de commentaires inutiles, et réveillé les vieux tabous qui entourent la mort, notamment le suicide. Ah, vivre, laisser vivre, et laisser mourir aussi…

Ne perdez pas un instant
Leo Babauta

Dernièrement, j'ai été frappé de constater à quel point nos vies sont limitées, et du peu de temps dont nous disposons pour en faire quelque chose.

Si vous n’aviez qu’un mois à vivre : que feriez-vous?

Vous pourriez passer votre temps avec les gens que vous aimez, en profiter pour vous imprégner de leur présence et de chaque mot qu'ils disent. Vous pourriez sortir et vivre des expériences qui sortent de l’ordinaire, explorer le monde. Vous pourriez apprendre autant que vous le pouvez, en lisant et en étudiant la vie elle-même. Vous pourriez créer quelque chose. Vous pourriez participer à rendre le monde meilleur. Vous pourriez laisser votre marque par une réalisation artistique quelconque, ou contribuer à améliorer la vie des gens.

L’un de ces choix (ou une combinaison) serait une façon valable de passer ce mois.

À mon avis, il serait inadmissible de regarder la TV merdique (sauf quelques très bonnes émissions durant le mois), de constamment se divertir, lire les nouvelles et les médias sociaux, d’être méchant ou égoïste, de magasiner tout le temps, de se sentir démotivé et ne rien faire de ce temps, de s’inquiéter et de regretter.

Vous pourriez me dire que ces dernières activités sont valables, et c'est correct – car il vous appartient de déterminer de ce qui est valable ou non pour votre dernier mois de vie.

Choisissez. Décidez ce que vous ferez de ces précieuses journées puisque vous n'en avez pas beaucoup devant vous.

Chaque moment est limité, éphémère, précieux. N’en perdons pas un de plus.
Vivons chaque instant en aimant la vie.

«Je veux faire avec vous ce que le printemps fait avec les cerisiers.» ~ Pablo Neruda

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Citations du jour :

Pourquoi courir vers le futur?
T’y rendras-tu?
Tu ne le sais pas.  
Vis ICI, maintenant.
C’est tout ce que tu as.

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Ainsi celui de tous les maux qui nous donne le plus d'horreur, la mort, n'est rien pour nous, puisque, tant que nous existons nous-mêmes, la mort n'est pas, et que, quand la mort existe, nous ne sommes plus. Donc, la mort n'existe ni pour les vivants ni pour les morts, puisqu'elle n'a rien à faire avec les premiers, et que les seconds ne sont plus.

Rappelle-toi que l'avenir n'est ni à nous ni pourtant tout à fait hors de nos prises, de telle sorte que nous ne devons ni compter sur lui comme s'il devait sûrement arriver, ni nous interdire toute espérance, comme s'il était sûr qu'il dût ne pas être.

~ Épicure, 341-270 av. J.-C. (Lettre à Ménécée)

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Le temps ressemble à un hôte du grand monde, qui serre froidement la main à l’ami qui s’en va et qui, les bras étendus, embrasse le nouveau venu. ~ William Shakespeare

16 août 2014

La mort dans l’air

Ne dites pas mourir. Dites : naître! ~ Victor Hugo

Jean-Michel Folon (1934-2005)

Une réflexion de Buscaglia sur la mort; toujours d’actualité puisque la mort fait partie de la Vie.

Le rôle de la mort

Peut-être ce qui, dans la vie, contribue le plus à nous permettre de vivre pleinement notre vie d’homme, n’est rien d’autre qu’une honnête prise de conscience et aussi l’acceptation de la mort.
       La mort n’a pas de secret. Si nous voulons l’examiner, elle nous rend constamment conscients d’elle-même. Elle est partout, même dès les premiers signes de vie. (…)

… La mort nous dit que nous devons vivre la vie maintenant, dans le moment présent, que demain est une illusion et que demain n’arrivera jamais. La mort nous dit que ce n’est pas le nombre de jours, des heures ou des années qui importe, mais plutôt la qualité de vie du temps qui passe. (…)

La mort nous enseigne aussi la relativité de toutes choses. Tout change, tout meurt. Ceci est aussi vrai de la nature que de la vie humaine. (…) Être attaché aux choses ou aux gens, qui tous s’évanouissent un jour n’apportent que désespoir, car en fin de compte on ne reste qu’avec une poignée de poussière dans la main comme fragile souvenir. Une vie libre d’attachement se vit dans le moment présent et n’exige pas de ce moment qu’il dure éternellement. L’intérêt de la vie n’est pas dans l’avenir mais dans le présent. Attendre pour réaliser, c’est se complaire à attendre, rien de plus. La vie s’explique par le fait que la mort apporte avec elle le changement, que la seule réalité c’est de vivre à la fois le passé et l’avenir dans le présent; il faut accepter de vivre dans la joie du moment et de s’en détacher quand le temps est venu; il faut vivre pleinement de toutes ses forces avant que la vie ne nous quitte mais nous ne devons pas en attendre aucune permanence. … Les bouddhistes parlent de trois types d’état d’attachement : attaché, détaché, et sans attache. (…)

La mort nous enseigne qu’à long terme, rien ne nous appartient vraiment. Même si nous désirons nous lier et posséder des choses tangibles, en réalité, cela ne se peut pas. Les choses se briseront malgré nous entre nos mains. Les gens partiront quand leur heure sera venue, peu importe la dimension de notre protestation. … La connaissance de la mort peut procurer un profond sentiment de liberté, tant vis-à-vis notre attachement à notre moi qu’à l’attachement aux autres et aux choses. Moins nous sommes attachés, moins nous avons à nous inquiéter de la mort.
       Les derniers mots que ma mère m’a dits avant de mourir ont été très perspicaces. Alors que je pleurnichais près de son lit, elle m’a pris avec affection par la main et elle a dit : «À quoi te cramponnes-tu?» J’ai laissé tomber et ceci a été le plus important pour maman et pour moi.
       Nous culpabilisons même les mourants parce qu’ils nous quittent.

La mort est trop souvent ficelée et bâillonnée … maintenue dans un sombre et effrayant mystère lequel est souvent totalement dévastateur, comme si la mort était l’un de ces envahisseurs qui doivent être éliminés à tout prix. (…)
       Quand nous comprendrons la mort comme étant un autre aspect du cycle de la vie, nous donnerons plus de valeur et nous apprécierons davantage chaque événement de la vie, en sachant que celui-ci ne se reproduira plus jamais. Et chacun de ces moments sera la source de ce que nous aurons à connaître de mieux au cours de notre existence.
       La mort nous enseigne le maximum sur la vie. Seulement les ignorants et les peureux ont peur d’elle. Le sage accepte la mort comme une amie intime et comme son professeur le plus bienveillant. Pour être pleinement active et pleinement accomplie en tant que personne humaine, nous devons faire de notre mort une amie tout au long de notre vie.

~ Leo Buscaglia

Extraits de :
La personnalité
Vivre, c’est se créer un voyage passionnant vers l’épanouissement et l’harmonie
Le jour éditeur, 1978 (p. 108-113)

Buscaglia enseignait à University of Southern California.

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Citaquote du jour

La mort n’est qu’une manière différente et certainement beaucoup plus évoluée de vivre. ~ Claude Durix

L’enseignement de l’art de mourir est le même que celui de l’art de vivre. Plus nous nous débarrassons du désir de posséder, sous toutes ses formes, moins forte est la peur de mourir, puisqu’il n’y a rien à perdre. ~ Erich Fromm

En complément

Folon

- If you feel something, let people know what you feel.
- Love is like a mirror. When you love another you become his mirror and he becomes yours.
- Real love always creates, it never destroys.
- Live now. When you are eating, eat. When you are loving, love. When you are talking, talk. When you are looking at a flower, look. Catch the beauty of the moment!
- One does not ‘fall in’ or ‘out’ of love. One grows in love.
- Love is open arms. If you close your arms about love you will find that you are left holding only yourself.

~ Leo Buscaglia (LOVE; A Fawcett Crest Book, Ballantine Books; 1972)

14 août 2014

Guitare inusitée…

«J'ai presque honte de dire que la belle musique produit chez moi des effets littéraires, et que j'imagine, en l'écoutant, des histoires auxquelles, sûrement, ni Beethoven ni les autres n'avaient jamais songé. Je suppose même qu'il en est ainsi pour tout le monde, et que les notes ne sont que des ailes pour aller plus vite vers les régions de la pensée où l'habitude nous porte, que les amoureux pensent de suite à leurs amours, les gens heureux à leur nid, les âmes saintes au paradis, les poètes au monde des légendes, et que toutes les âmes s'envolent ensemble, mais vers des rêves qui diffèrent.» ~ René Bazin (1853-1932)

Je préfère les instruments de musique acoustiques, notamment la guitare. Mais comme on est loin, ici, du rave party électro, eh bien ma foi, c'est plutôt agréable et amusant...

Son MIDI modélisé en 3D par Animusic – pour animated music...
http://www.animusic.com/company/history.php

Animusic

13 août 2014

Dieu merci, ce n’est pas moi…

Je ne sais pas si vous êtes déjà allé à des récitals de poésie où les poèmes étaient lus par leurs auteurs. Oh là là! 60 minutes de lecture recto tono et on est un peu chloroformé. Mais bon, tous les poètes ne sont pas des comédiens… ça se comprend. 

À Poésie, sandwichs et autres soirs qui penchent, les poèmes sont lus par des comédiens. Toute la gamme des émotions, des plus tristes aux plus joyeuses, le tout servi avec danse et musique. En bonus : sandwichs, punch/vodka et partage avec les comédiens. Voilà qui peut réconcilier à la lecture de poésie; c’est animé, vivant. Édition 2014 : 12, 13 et 14 septembre à la Cinquième Salle de la Place des Arts.

Le spectacle poétique est organisé par Loui Mauffette (Photo : Yves Renaud) 

Suit un poème de l’édition 2012.
Loui Mauffette, Kathleen Fortin et Maxime Dénommée l’ont lu à Médium large.
Si vous avez accès à l’Audio fil :
http://ici.radio-canada.ca/emissions/medium_large/2014-2015/

J’ai osé transcrire d'après l'audio pour celles et ceux qui n'ont pas accès (c'est trop bon).  

DIEU MERCI, CE N’EST PAS MOI
Par Evelyne de la Chenelière*

Laissez-moi vous parler d’un cœur
qui souffre d’avoir perdu Dieu
errant sans fin dans la nuit, sans espoir
Ici, à la lisière, il n’y a pas d’étoiles,  
ici, nous sommes raides, immaculés

Sans croire en Dieu parfois nous pensons 
Dieu merci, ce n’est pas moi  

Dieu merci, ce n’est pas moi
Ce n’est pas moi qui ai perdu mon enfant
dans une crevasse, une avalanche, une tuerie, une rivière
Ce n’est pas moi le corps tordu dans la voiture accidentée
Dieu merci, ah… ce n’est pas moi

Nous pensons Dieu merci, ce n’est pas moi
le sans-abri, le sans-papiers, le sans-emploi,
le sang contaminé, les dents qui tombent,
les os qui brisent à la moindre chute
ce n’est pas moi la droguée, le vieux, la folle!

Ce n’est pas moi en République centrafricaine, en Ukraine, à Gaza,  
Dieu merci, ce n’est pas moi
Ce n’est pas moi qui ai des mouches plein les yeux,
qui ai les membres arrachés, des sœurs kamikazes,
des frères pendus par les pieds, des enfants-soldats
Ce n’est pas moi!

Nous pensons Dieu merci, ce n’est pas moi
qui ai reçu une balle perdue comme une giclée de rage
Dieu merci, ce n’est pas moi qu’on voile,
qu’on excise, qu’on viole, qu’on vend
Dieu merci, ce n’est pas moi!

Ce n’est pas moi non plus
la starlette sur laquelle on éjacule et qui vieillira pourtant
Le désir des autres n’est pas un bain de jouvence
et les plus belles tomberont avec leur chair molle
Dieu merci, ce ne sera pas moi!

Ce n’est pas moi, je ne peux rien
Je ne peux rien pour les miséreux, les pauvres,
les damnés, les malades
Adressez-vous aux puissants du monde
je ne peux pas vous sauver la vie
ce n’est pas moi qui vous sauverai la vie
Pour commencer, cessez de crier, taisez-vous donc!
Ah… Dieu merci, ce n’est pas moi

Ce n’est pas moi qui appellerai, éperdu,  
la clémence, l’absolution
À l’heure de ma mort on ne dira pas de moi 
«Dieu merci, il est mort»
«Dieu merci, enfin, elle est morte»
On ne souillera pas ma dépouille
on ne profanera pas ma tombe

Sans croire, nous disons
Dieu merci, ce n’est pas moi
qui brûlerai dans les flammes éternelles
de ton enfer
Dieu merci, ce n’est pas moi…

D’ailleurs nous pensons
Dieu merci, je ne mourrai pas

Après, nous replions le journal
nous fermons la télévision
nous fermons tous nos sens brûlés
et les livres d’histoire

Nous tordons nos mains
dans une prière difforme
et nous pensons
Dieu merci, ce n’est pas moi

* Evelyne de la Chenelière, comédienne et dramaturge : le film Monsieur Lazhar (écrit et réalisé par Philippe Falardeau) est une adaptation de sa pièce Bashir Lazhar.

12 août 2014

Vivre avec l’incertitude

«S’il n’y a ni hauts ni bas dans ta vie, ça veut dire que tu es mort.»

Beaucoup de personnalités connues décédées ces derniers jours.

Dont l’acteur, Robin Williams que j’aimais beaucoup… comme tout l’monde! Hier j’ai regardé ‘Awakenings’ (L’Éveil); encore plus troublant à voir sous l’angle de ses propres troubles psychologiques. Et puis, je vais sûrement revoir ‘What Dreams May Come’ (Au-delà de nos rêves); ce film tourne autour de la mort, du suicide et de la vie après la mort.

Le producteur de Just For Laugh, Andy Nulman, qui connaissait Robin Williams disait en entrevue : «Beaucoup d’humoristes ont des problèmes psychologiques. Mais, ils ne sont pas les seuls : 1% de la population, ici au Québec, souffre de dépression ou d’une maladie mentale. Et, il n’y a pas de différence entre Robin Williams et le clochard au coin de la rue. C’est le même problème.»

Alors, pourquoi souffrons-nous tant de dépression?

Les faits de la vie : l’impermanence

Selon le Bouddha, trois caractéristiques marquent les vies de tous les êtres : l’impermanence, le non-moi et la souffrance ou insatisfaction. Reconnaître que ces caractéristiques sont aussi réelles que vraies dans sa propre expérience aide à se détendre avec les choses telles qu’elles sont. La première marque s’appelle l’impermanence : rien n’est statique ni fixe, tout change et tout est fugace. Pas besoin d’être mystique ni un physicien pour comprendre ça. Pourtant, au niveau de l’expérience personnelle, on résiste à ce fait de base. Ça signifie que la vie ne pourra pas toujours se dérouler comme on l’entend, qu’il y aura des pertes et des gains. Et ça ne fait pas notre affaire.
       On sait que rien ne dure, que tout s’use. Même si on accepte intellectuellement cette vérité, sur le plan émotionnel on éprouve une profonde aversion pour l’impermanence. On veut de la permanence : on s’attend à la permanence. On est naturellement porté à rechercher la sécurité, on croit pouvoir la trouver. Au quotidien, l’impermanence est vécue comme une frustration. On utilise son activité quotidienne comme un bouclier pour se prémunir contre l’ambiguïté fondamentale de sa situation, on dépense une énergie inouïe pour s’efforcer d’échapper à l’impermanence et à la mort. On n’aime pas que son corps change de forme. On n’aime pas vieillir. On a peur des rides et de la chair qui s’affaisse. On emploie des produits de santé comme si on croyait vraiment que sa peau, ses cheveux et ses dents pourraient par miracle échapper à la vérité de l’impermanence.
       Les enseignements bouddhistes aspirent à libérer le pratiquant de cette manière limitée d’entrer en relation avec l’impermanence. Ils l’encouragent à se détendre petit à petit et de tout son cœur dans l’évidence et ordinaire vérité du changement. Reconnaître cette vérité ne veut pas dire qu’on regarde du côté sombre de la vie. C’est qu’on commence à comprendre qu’on n’est pas seul à ne pas pouvoir tout maintenir en équilibre. On n’arrive plus à croire qu’il existe des êtres capables d’éviter l’incertitude.

~ Pema Chödrön

Bien-être et incertitude
Cent huit enseignements
Pocket Spiritualité

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Voilà peut-être ce qu’avait compris l’abbé Raymond Gravel, décédé le 11 août lui aussi…  

Extraits transcrits d’une entrevue à l’émission Second Regard (ICI Radio Canada) 

«Si ma mission est terminée, elle est terminée, et c’est correct comme ça. J’ai pas peur de mourir, j’ai peur de souffrir.
       J’ai pas une foi magique… J’ai aucune certitude, sauf que je fais le pari qu’il y a quelque chose après la mort. C’est pas une question de certitude, on n’en a aucune certitude. On vit dans l’espérance. Les gens ne savent pas c’est quoi l’espérance. L’espérance c’est encore bien plus fort que la certitude parce que la certitude, tu t’assoies dessus, pis tu l’imposes aux autres. Tandis que l’espérance, ça te fait travailler fort sur toi-même, sur tes relations avec les autres. Qu’est-ce que je dois faire pour être meilleur ? Tu te poses plein de questions. C’est l’espérance qui te fait faire ça. (…) L’espérance de vivre autrement.
       Quand tu es dans la souffrance tu peux dire ça «chienne de vie». Sauf que quand la souffrance s’est apaisée tu te ressaisis et puis tu te dis «non, non, c’est pas une chienne de vie. C’est une belle vie, sauf qu’elle est faite de hauts et de bas». Elle est cruelle parfois.
       J’ai redécouvert la rivière chez nous depuis que je suis malade. J’avais vu la rivière, je reste à côté! Mais le fait d’être malade et de revenir un peu en santé, j’apprécie vraiment la rivière, j’apprécie la nature, j’apprécie tout ce que j’ai.
       C’est la force spirituelle qui m’habite qui m’aide. Mais j’ai des doutes encore. Puis, je vais en avoir toute le temps, jusqu’à la fin.»

Vous aimerez peut-être :
http://situationplanetaire.blogspot.fr/2014/08/resistance-au-changement.html

10 août 2014

Boudacool est «tannée» des mouches

Ah… les plaisirs du camping et de la randonnée à la saison des mouches à chevreuils – ces cannibales qui partent avec un morceau de viande (humain/animal); très douloureux. Même le «cool Shiva» s’exaspère malgré ses six bras – nous n’en avons que deux!  

«The God»



Produit par :  Sergeu Selvvanoy, Alexander Boyarsky, Melnitsa Animatio Studio
Crédits : Konstantin Bronzit, Yury ilin, Valentin Vasenkov, Vladimir Golounin, Olec Belvaey, Alexey Shulga, Vladimiar Chernish. Produced with the financial support of the Russian Federation's ministry of culture.

Les mouches (qu'elles soient physiques ou mentales, c’est du pareil au même…). Y a-t-il quelque chose de plus IRRITANT pour gâcher son plaisir? NON. En tout cas, en ce qui me concerne, ça peut bousiller ma randonnée physique (si je n’ai pas badigeonné mes vêtements et mon packsack avec mon anti-moustiques – voyez : http://artdanstout.blogspot.fr/2013/07/etes-vous-un-aimant-moustiques.html
et testez la recette pour savoir si vous êtes allergique ou non. (Pour les jeunes enfants, la meilleure protection reste la moustiquaire.)

Deux possibilités pour se calmer au retour d'une frustrante excursion -- si l'on n'a pas réussi à «transcender» l'assaut des vampires et perdu la bataille :

1. Pour les gens plus «zen», suivez la mouche du KODAIJI-TEMPLE :
http://www.do-not-zzz.com/ 

2. Pour les gens proactifs ayant besoin de «résultats» (formidable parce que ça défoule, ne coûte rien et ne tue personne!); attendez l'image, vous n'avez pas besoin de vous abonner :
The fly swatter http://www.majman.net/flyswatter/
(Grab the Fly Swatter and squash 10 flies as fast as possible & with as few swats as possible!)