20 mars 2016

Erin go Bragh!

Bonne Saint-Patrick à nos amis irlandais.

Photo : archives Gouvernement du Canada

Le défilé de la Saint-Patrick a eu lieu à Montréal sans interruption depuis 1824. C’est le plus vieux et le plus important défilé irlandais en Amérique du nord  après celui de New-York. La première parade fut organisée par l’Ancient Order of Hibernians; dix ans plus tard, la St-Patrick Society prenait la relève. Depuis 1929, il est géré par l’ensemble des organismes d’United Irish Societies.

Aujourd’hui, pour le 193e défilé, 2500 figurants, une centaine de groupes, 22 chars allégoriques et 15 fanfares sont de la partie.

Le Québécois «pur laine» est un mythe : nous avons des gènes verts ...et du whiskey, de la Guinness et de l’Irish coffee dans le sang!
   Durant l’épidémie de choléra qui a frappé l’Europe au début du 19e siècle, plusieurs Irlandais se sont réfugiés en Amérique du nord pour échapper à cette maladie. Pendant la grande famine causée par la maladie de la pomme de terre, ils ont quitté l’Irlande par milliers; en 1847, plus de 100 000 Irlandais ont débarqué à Grosse-Île et à Québec.

Entre 1916 et 2016 l’Irlande en a vu de toutes les couleurs...  
À lire – Pâques 1916 – 2016, rencontre avec Pierre Joannon, plus grand spécialiste français de l’Irlande :
http://www.breizh-info.com/2016/03/07/40030/paques-1916-2016-pierre-joannon-specialiste-francais-irlande

Il y a 100 ans donc, le poète irlandais William Butler Yeats écrivit un poème intitulé Pâques 1916 (Easter 1916) après l’insurrection survenue le 24 avril à Dublin.

Pâques 1916
Willam Butler Yeats (1865-1939)

[Extraits]  

Je les ai rencontrés à la tombée du jour,
Venant, le visage éclatant,
De leur comptoir, de leur bureau, parmi les grises
Maisons du dix-huitième siècle.
Je suis passé avec un salut de la tête
Ou des mots polis dépourvus de sens,
Ou bien je me suis attardé un instant et j’ai dit
Des mots polis dépourvus de sens,
Et pensé avant de le faire
À une blague ou une raillerie,
Pour faire plaisir à un compagnon
Au coin du feu, dans un club
Étant certain qu’eux et moi
Nous vivions dans l’hétéroclite :
Tout a changé, changé du tout au tout :
Une beauté terrible est née.
[...]
Un sacrifice trop long
Peut changer le coeur en pierre.
Quand cela sera-t-il assez?
C’est le rôle du Ciel, notre rôle
Est de murmurer les noms l’un après l’autre
Comme une mère le nom de son enfant
Lorsqu’enfin le sommeil alourdit
Ses membres fatigués par la course.
Qu’est-ce d’autre que la nuit qui tombe?
Non, non, pas la nuit, mais la mort;
N’était-ce pas, après tout, une mort inutile?
Car l’Angleterre peut avoir confiance
En tout ce qui a été dit et fait.
Nous connaissons leur rêve; suffisamment
Pour savoir qu’ils ont rêvé et sont morts;
Et si l’excès d’amour
Les avait égarés jusqu’à en mourir?
[...]


Parallèlement à son engagement politique, Yeats exaltait l’amour, la nature, la simplicité et la pleine conscience.  

Si j’avais les voiles brodés du ciel,
Ouvrés de lumière d’or et d’argent,
Les voiles bleus et pâles et sombres
De la nuit, de la lumière, de la pénombre,
Je les déroulerais sous tes pas.
Mais moi qui suis pauvre et n’ai que mes rêves,
Sous tes pas je les ai déroulés.
Marche doucement, car tu marches sur mes rêves.

In Le vent dans les roseaux (1899), in La Rose et autres poèmes, trad. Jean Briat, © coll. Points Poésie, 2008

[Had I the heavens' embroised cloths,
Enwrought with golden and silver light,
The blue and the dim and the dark cloths
Of night and light and half light,
I would sprad the cloths under your feet:
But I, being poor, have only my dreams;
I have spread my dreams under your feets;
Tread softly because you tread on my dreams.]

Je vais me lever et partir à présent, partir pour Innisfree  
Y construire une petite cahute d’argile et de claies
J’y aurai neuf rangs de fèves, une ruche pour mes abeilles
et je vivrai seul dans la clairière bourdonnant d’abeilles

(1890)

Peinture et livre demeurent   
Un arpent d’herbe verte
Pour prendre l’air et faire de l’exercice
À présent que s’en va la force du corps
Minuit, une vieille maison
Où rien ne bouge qu’une souris
(1936)

«On ne peut donner corps à quelque chose qui vous transporte, si les mots ne sont pas aussi subtils, aussi complexes, aussi remplis de vie mystérieuse que le corps d’une fleur ou d’une femme». (W. B. Yeats)

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