Pratiques actives
Chapitre 1
Exercice initiatique des sens
1. L’ouïe
J’entends au-dehors le murmure d’un ruisseau. Il remplit mes oreilles, il remplit mon esprit d’une certaine qualité auditive. Si je me plonge toujours plus profondément dans ce murmure, ce qu’il recouvre, il peut m’advenir d’«entendre» une qualité d’un caractère particulier, la qualité d’un inaudible associé à l’audible et qui, cependant, n’est pas le «rien». Ce que j’entends atteint une toute autre dimension où celui qui écoute laisse en quelque sorte derrière lui l’entendu spatial. Il entre alors – ou il est entraîné – dans une étendue et une profondeur qui dépassent l’horizon de son moi ordinaire et semblent appartenir à la dimension de son propre Être essentiel.
L’exercice qui consiste à pénétrer d’abord dans le son entendu, puis à entrer, par-delà ce son et à travers lui, dans un au-delà où l’on s’arrête, peut être pratiqué pendant un exercice d’assise de style Zazen. Mais la vie offre aussi de nombreuses occasions de répéter cet exercice. On peut ainsi prêter l’oreille au bruissement de la forêt, à celui de la mer, à la nuit et, si l’on s’y arrête assez longtemps, à la rumeur d’une grande ville. Quand on y réussit, c’est une expérience singulière que de percevoir, à travers le bruit, ce silence particulier qui semble être la tonalité d’un autre monde.
(p. 150)
Karlfried Graf Dürckheim
Méditer; Pourquoi et comment
Le Courrier du Livre
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