Désespéré par le monde qu'il voyait s'annoncer, Saint Exupéry écrivait dans une lettre adressée à Pierre Dalloz le 30 juillet 1944 :
«Si je suis descendu, je ne regretterai absolument rien. La termitière future m’épouvante. Et je hais leur vertu de robots. Moi, j’étais fait pour être jardinier.»
«Quand nous prendrons conscience de notre rôle même le plus effacé, alors seulement nous serons heureux. Alors seulement, nous pourrons vivre en paix, car ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort.» (Terre des hommes; 1938)
«Une démocratie doit être une fraternité; sinon, c'est une imposture.» (Écrits de guerre; 1982)
«Eau, tu n'as ni goût, ni couleur, ni arôme, on ne peut pas te définir, on te goûte, sans te connaître. Tu n'es pas nécessaire à la vie, tu es la vie.» (Terre des hommes; 1938)
~ Antoine de Saint Exupéry (29 juin 1900 – 31 juillet 1944)
Les deux côtés de la médaille :
Propagande nazie
Propagande américaine
Les cinq espions canadiens s'apprêtent à sauter en terre Française.
Photo : X COMPANY, série télé canadienne produite par CBC.ca
Si vous avez accès à la zone, les deux premières saisons sont disponibles (une troisième saison prévue en avril 2017) : http://www.cbc.ca/xcompany/
Camp X : 10 faits à propos de l’École d’espionnage canadienne
Camp X fut la première école internationale d'espionnage en Amérique du Nord au début de la Deuxième Guerre mondiale. Le but était de former une élite d’agents secrets. Tenue au plus grand secret, elle était installée sur une ferme entre Whitby et Oshawa, Ontario. Peu de gens connaissaient son existence à l’époque, et c’est encore le cas aujourd’hui. Les complots palpitants et dangereux de X COMPANY sont peut-être de la fiction, mais ils sont basés sur des faits réels :
http://www.cbc.ca/xcompany/dispatches/the-real-camp-x-10-facts-about-canadas-elite-spy-school
Mon appréciation de la première saison (la deuxième est tout aussi bonne) :
http://artdanstout.blogspot.ca/2015/04/lart-de-lespionnage.html
Le blogue de l’émission inclut une foule d’info et de liens intéressants, dont l'article ci-après.
Peu de Canadiens savaient que la région de Toronto était infestée d’espions allemands
D'après l'auteur, cette histoire est exceptionnelle car «Tout au long de son histoire, le Canada a été plutôt nul pour repérer les étrangers suspects immiscés dans son milieu. Immédiatement après l'assassinat de Martin Luther King Jr., le tueur James Earl Ray a vécu sans problème pendant des semaines à Toronto, même si son portrait était largement diffusé aux bulletins de nouvelles télévisés. Et, de l'holocauste au génocide rwandais, le Canada a eu la fâcheuse réputation d'être un refuge relativement sécuritaire pour d'anciens génocidaires.»
Le pire espion Nazi est capturé en quelques heures par le Canada
Tristin Hopper | 21 avril 2016 http://news.nationalpost.com/news
Premier indice : l'étranger utilisa des billets de banque bizarres pour payer sa note à l'hôtel Carlisle de New Carlisle *, QC. Il présenta des billets de 1 $ surdimensionnés qui n'étaient plus en circulation depuis la Première Guerre mondiale; l’équivalent de payer en billets de un dollar plutôt qu’en monnaie-huard.
L’espion prétendit s’appeler William Branton et résider au 323, avenue Danforth, à Toronto – une adresse aujourd'hui occupée par une boutique de vêtements pour femmes. Il arriva à New Carlisle par bus le matin, et mentionna qu'il était descendu parce qu’il voulait prendre un bain rapide et un petit-déjeuner avant d’aller à Montréal. Le prochain bus devait arriver à New Carlisle trois heures plus tard.
«Nous savions qu'il était étranger de par sa façon de parler ... il avait une sorte de langage guttural, de fond de gorge», déclara Marguerite (fille du propriétaire de l’hôtel) au journaliste Dean Beeby, auteur de Cargo of Lies, an account of the spy fiasco (1996).
En réalité, l'étranger arriva au Québec d’une façon peu orthodoxe. Ce matin-là, le sous-marin U-518 (un U-Boote, torpilleur submersible) eut l’audace de remonter à la surface dans les eaux côtières bien patrouillées du Québec, et amena l'homme à terre dans un canot pneumatique. C'était le 9 novembre 1942, le jour même où le Canada rompit ses relations diplomatiques avec le gouvernement français de Vichy, un état allemand fantoche situé dans le sud-est de la France.
New Carlisle fut le premier arrêt de Werner von Janowski, un officier allemand envoyé en mission d'espionnage au Canada. Il avait foulé le sol canadien revêtu d’un impressionnant et impeccable uniforme d'officier de la marine allemande, avec même une croix de fer épinglée sur sa poitrine. C'était la procédure normale des espions allemands. De cette façon, s'ils étaient capturés, ils pouvaient éviter de se faire exécuter pour espionnage en disant qu'ils avaient simplement déserté la marine allemande et nagé jusqu’à la rive.
Immédiatement après être descendu sur la plage dans les heures précédant l’aube, von Janowski troqua son costume d’officier contre des vêtements civils, enterra l'uniforme dans le sable et commença à utiliser sa nouvelle identité de vendeur parisien immigré au Canada en 1921. Il avait un fusil, 5 000 $ et des papiers d'identité qu’on soupçonna avoir été volés à des victimes canadiennes lors du débarquement de Dieppe en 1942. Les plans de l'agent sont restés nébuleux, mais il semble que son objectif était d'aller à Montréal pour trouver des sympathisants fascistes (selon Michael Hadley, auteur de U-Boats Against Canada). Le parti fasciste canadien était toujours en activité.
L’alcool déliant les langues, les gens racontèrent que des sous-mariniers allemands désireux de se dégourdir les jambes visitaient occasionnellement les bars de la péninsule gaspésienne.
Donc, dans la ville de New Carlisle endormie, en ce matin de novembre, les citoyens étaient sur leurs gardes. La bataille de l'Atlantique culminait et ils savaient que les côtes fourmillaient de sous-marins allemands. Bien sûr, les indices que laissait von Janowski éveillèrent la suspicion. L’étranger allumait ses cigarettes avec des allumettes fabriquées en Belgique – fait étrange puisque la Belgique avait été occupée par les Nazis pendant trois ans. Il portait des vêtements dont la coupe était nettement étrangère. Et il sentait mauvais, comme s’il avait été enfermé pendant plusieurs jours dans l'air vicié d'un tuyau métallique scellé.
Earle Annett Jr. (fils du propriétaire de l’hôtel), alerta les autorités de Carlisle dès que von Janowski partit à pied vers la gare. Après avoir pris place à bord du train en direction de Montréal, l'espion allemand fut tout de suite appréhendé par un agent de la Sûreté provinciale du Québec qui lui demanda ses papiers d’identité. «Je suis pris. Je suis un officier allemand», répondit von Janowski. Il avait été capturé en seulement 12 heures.
La presse dissimula cette capture historique aux Canadiens pendant la guerre. La Gendarmerie royale du Canada proposa à von Janowski d’agir comme agent double pour le compte du Canada. Mais, comme le signale Beeby dans Cargo of Lies, an account of the spy fiasco, les agents inexpérimentés de la GRC furent probablement bernés par l’espion allemand. Le potentiel agent double donna juste assez de renseignements ambigus pour débarrasser le U-Boat de la chasse organisée par la Marine royale canadienne. Et comme agent double, il ne livra aucune information sur les déplacements des sous-marins allemands. Finalement, le Canada expédia von Janowski dans un camp de prisonniers anglais pour le reste de la guerre.
L'Allemagne nazie envoya au moins un autre espion au Canada pendant la Deuxième guerre mondiale. Alfred Langbein fut largué d’un U-Boat en 1942, et il put quitter la côte atlantique sans susciter de soupçons. Il avait jeté sa radio à l'eau dès son arrivée, il déménagea à Ottawa et dépensa les quelques milliers de dollars que ses supérieurs lui avaient donnés. Tandis que ses compatriotes subissaient une cuisante défaite à Stalingrad et que les troupes étaient lentement rapatriées vers Berlin, Langbein se la coulait douce le long de la rivière des Outaouais. Néanmoins, il ne fut pas nécessaire de le capturer, il se rendit volontairement quand il ne lui resta plus d'argent.
Des opérations nazies semblables tombèrent également à plat aux États-Unis. En juin 1942, quelques mois après l'attaque de Pearl Harbour, huit officiers allemands parlant anglais furent largués d’un U-Boat en Floride et dans l'État de New York. En possession d’une grande quantité d'explosifs, les espions avaient des plans précis pour agir en tant que cellule terroriste nazie aux États-Unis. Cependant, quelques jours plus tard, le leader du groupe de sabotage, George Dasch, apparemment déçu du régime nazi, livra tout le groupe au FBI. Dasch aurait dit à un gardien de prison américain : «comme ça, je ne peux pas causer la mort d'un innocent».
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* Le
citoyen le plus célèbre de New Carlisle est bien entendu René Lévesque. Natif du Nouveau-Brunswick,
il a cependant grandi à New Carlisle. Il fut correspondant de guerre en Europe en
1944-45, et premier ministre du Québec entre 1976 et 1985.
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