7 décembre 2015

L’illogisme des arguments pro-armes

Photo : ICI Radio-Canada. Les roses rouges symbolisaient toutes les femmes sans exception alors que les blanches évoquaient le souvenir des 14 femmes qui ont été tuées à l'École polytechnique de Montréal, le 6 décembre 1989. Les plumes illustraient les femmes autochtones surreprésentées dans les disparitions et les assassinats. Hier on commémorait... pour ne pas oublier.

En 1989, l'événement avait causé un mouvement social et politique qui déboucha sur un projet de loi visant à rendre obligatoire l'enregistrement de toutes les armes à feu dans le registre canadien des armes à feu. La loi ne fut votée qu’en 1995, et les populations rurales (les plus concernées) pratiquaient la résistance passive malgré la menace de sanctions financières et pénales. Avec l’arrivée au pouvoir du gouvernement conservateur, depuis 2006, le fédéral reportait l'application des sanctions. En 2012, le registre fut carrément aboli. Seul le Québec voulait maintenir un registre, mais il se heurtait à la volonté du fédéral de détruire toutes les données.

Décembre 2015
Au lendemain de l'annonce à Québec d'un registre provincial des armes, personne à Ottawa n'est encore prêt à dire si les données québécoises du défunt registre fédéral seront éventuellement livrées à Québec. 
   En faisant son annonce jeudi, le ministre québécois intérimaire de la Sécurité publique, Pierre Moreau, a dit qu'il discutait avec Ottawa du transfert de ce qui reste des données québécoises.



À chaque fusillade chez nos voisins du sud, la bataille entre démocrates et républicains au sujet du contrôle des armes reprend de plus belle. Et, la NRA en profite pour ramener ses arguments préférés – pleins de trous! Dans un article du site Mother Jones, Dave Wilson déboulonne 10 mythes parmi les préférés des associations pro-armes – avec vérification des faits. (1)  
http://www.motherjones.com/politics/2013/01/pro-gun-myths-fact-check

Un autre article de Wilson présente l’historique des promos de la NRA.
Malade? C’est ahurissant. À vous de juger.
http://www.motherjones.com/politics/2013/03/national-rifle-association-ads-history

Voici une traduction/maison des descriptions. 

Cette collection de pubs de la NRA illustre sa descente vers la folie
(Dave Gilson) 

En passant en revue les 90 années de publicité de la National Rifle Association on constate à quel point elle a sombré dans la paranoïa et les campagnes de peur.

Pendant plus de 140 ans d'histoire, la National Rifle Association a promu la possession d’armes à feu, le tir et la chasse comme une source de plaisir légitime, protégé par la constitution. Néanmoins, au cours des quatre dernières décennies la NRA s’est transformée en un groupe d'intransigeants étroitement lié à l'industrie des armes et à l'establishment conservateur pour qui la seule solution à la violence armée est de posséder encore plus d'armes à feu. Voyez l’évolution de ce changement à travers cette collection de publicités produites par l'association depuis le début du XXe siècle jusqu'à nos jours [2013].

1920 : «Le tir à la carabine est un sport de choix» Cette pub de Remington dans Boys Life prétendait que la NRA était «une organisation gouvernementale». Elle ne l'était pas, mais cela nous donne une idée à quel point le groupe pro-armes et le gouvernement étaient alliés autrefois – avant que la NRA ne devienne en perpétuel conflit avec le gouvernement fédéral qui voudrait soi-disant «empêcher les Américains de posséder des armes».


1951: «Une adhésion à 50 pourcent junior» Bien sûr, vous pourriez vous tirer dans l’oeil avec une carabine Red Ryder à air comprimé. Mais vous auriez aussi la chance de joindre la NRA et de gagner ses «magnifiques prix officiels». Les associations de produits continuent toujours : plusieurs fabricants d’armes offrent automatiquement une adhésion à leurs acheteurs.



1957 : «Plus de fun avec vos guns!» Dans cette annonce d’un magazine spécialisé, la NRA se décrit comme une «grande association de sportifs». Parmi les avantages de l’adhésion à la NRA : une épinglette à «caractère distinctif» et le «droit d'acheter des armes dans les surplus gouvernementaux».

1970: «Chasseurs, attention!» Similaire aux mises en garde de la NRA contemporaine, celle-ci s’en prend «aux puissants pouvoirs – peut-être bien intentionnés mais mal informés – qui travaillent sans relâche pour restreindre et éventuellement abolir le droit de chasser et d’autres privilèges et libertés dont vous jouissez aujourd'hui». Bonus : l’apparition d’un invité, Chris Hanburger, du futur pro football Hall of Famer.

1973 : «Vous êtes le seul à pouvoir sauver la chasse...» Le ton monte progressivement dans cette annonce, qui exhorte les chasseurs à lutter contre ceux qui «veulent que la chasse soit bannie à jamais» en joignant la NRA. «Demain, il sera trop tard».

 
1982 : «Je suis la NRA» Cette célèbre campagne, lancée en 1982, visait à démontrer les grands attraits de la NRA. Les annonces incluaient des enfants (tel l’enthousiaste Bryan Hardin avec sa carabine BB, âgé huit ans), des femmes, des Afro-Américains, des policiers, et des membres du clergé. Une version plus récente de la campagne présentait des membres célèbres de la NRA tels que Tom Selleck et Karl Malone.

Fin des années 1980 : «Pourquoi les policiers ne sont pas là quand vous avez besoin d’eux?» Les peurs au sujet des crimes violents ont suscité ces annonces visant à promouvoir des lois permettant le transport d’armes dissimulées. La notion que les lois sont inefficaces parce que les criminels ne les respectent pas reste l’argument massue de la NRA, tout comme l'idée que les citoyens armés dans la vie civile repoussent les agresseurs.

Fin des années 1980 : «Voici l’endroit le plus dangereux d’Amérique» «Ces rues, autrefois gouvernées par Jefferson, Lincoln, Truman, sont maintenant gouvernées par des criminels», entonnait le nouveau porte-parole de la NRA Charlton Heston en marchant dans les ruelles de Washington, DC. «À quelques rues d’ici, nos dirigeants dorment en sécurité». Ce slogan préfigurait les accusations post-Newtown de la NAR portées contre Obama, traité «d’élitiste hypocrite qui se cache derrière des gardes armés».

1993 : «Quelle est la première étape vers un État policier?» La photo des nazis au au pas de l’oie présageait la description des agents fédéraux par le vice-président exécutif de la NRA, Wayne LaPierre deux ans plus tard : «Ce sont les voyous bottés/musclés du gouvernement».

1993 : «Le criminel s’en tire à bon compte» (The Laughing Criminal) Si vous trouvez que House of Cards est réaliste, vous aimerez le spot TV de LaPierre suggérant que le contrôle des armes à feu est promu par des politiciens cyniques réticents à sévir contre le crime. Il suggère aussi que les criminels de carrière regardent aussi News Watchers. Bonus : remarquez les nerds stéréotypées des années 80 qui, comme par hasard, sont des militants en faveur du contrôle des armes.

1995 : Bill Clinton est «cinglé» Avec le nombre de chasseurs en déclin, on aurait cru que la NRA allait racoler des chasseurs prestigieux. Pourtant, avec ce poster, vendu à ses membres, la NRA s’est involontairement distancée de son affirmation que la chasse est fondamentale au droit de possession d’armes, en déclarant que «le deuxième amendement de M. Clinton, n'est pas une question de chasse aux canards».



1997: «Au dépens de nos enfants» (Gun rights are lost on our kids) Heston promettait de mener une campagne de 100 millions de dollars : «une croisade de trois ans ... pour redonner au deuxième amendement la place qui lui revient à titre de «première liberté en Amérique». Pour les enfants, bien sûr.

2013 : «Les enfants du Président sont-ils plus importants que les vôtres?» Toute la paranoïa anti-gouvernementale, tous les propos alarmistes et le leurre libéral des dernières décennies ont abouti à une vidéo réalisée dans le sillage du massacre de Newtown. Selon la NRA, Obama, en refusant de poster des gardes armés dans toutes les écoles américaines, se révélait être «juste un autre élitiste hypocrite» dont les enfants sont protégés par les services secrets.

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(1) D'après un sondage, un pourcentage élevé d'experts n'est pas d’accord avec les arguments de la NRA :

New Harvard Research Debunks the NRA's Favorite Talking Points
http://www.motherjones.com/politics/2015/04/gun-research-harvard-nra 

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