si tu ne retrouves pas ta mère au supermarché...
t’as raison de paniquer!
Mme Thérèse Mac Guire, Montréal, 1974 – Pendant plus de deux ans, Claire Beaugrand-Champagne s’est intéressée aux personnes âgées. Visitant foyers, centres de loisirs, centres de rencontre et maisons privées, elle a photographié près d’une centaine d’hommes et de femmes qu’on dit âgés. Elle en a fait une exposition, La vieillesse, c’est dans la tête des autres, qui a circulé au Canada.
À visiter : http://www.clairebeaugrandchampagne.ca/about.html
«Je ne me sens aucun âge. De temps en temps, je constate que je n'ai pas la force que j'avais il y a vingt ans, mais c'est une infirmité qui aurait pu se produire aussi bien quand j'en avais quarante : j'aurais pu avoir une sciatique ou une insuffisance cardiaque à cet âge aussi bien qu'aujourd'hui. Autrement non, aucun âge. Si c'est un âge quelconque, c'est plutôt l'enfance; l'éternité et l'enfance.» ~ Marguerite Yourcenar (Les yeux ouverts)
J’ai enfin vu Floride – trois mois plus tard en Nouvelle France...
Habituellement, les cinéastes abordent l’Alzheimer avec sérieux. Compréhensible, si l’on songe qu’aux États-Unis une personne développe cette maladie à toutes les 67 secondes. C’est énorme! Tout le monde devrait suivre un cours de base en prévision d’un job d’aidant naturel surprise. Les déficiences cognitives et la démence sont très difficiles à gérer sans compétences adéquates (1).
Philippe Le Guay présente néanmoins l’affreuse situation avec humour. Je trouve ça génial simplement parce qu’on oublie trop souvent d’en rire – ce qui allégerait le côté sombre. Je me rappelle combien je m’entêtais à raisonner ma mère au début. Par exemple, elle était convaincue qu’une de ses sœurs avait été assassinée par la famille – ce qui était faux, bien sûr. Mais, impossible de lui faire entendre raison, elle n’avait plus de raison! Elle était ancrée dans son monde intérieur peuplé de fantasmes, de lubies, de fantômes, de peurs, d’angoisses, de rêves, hors du temps et de l’espace, confuse et incapable de discerner le vrai du faux.
Certains critiques ont jugé le film pessimiste (à noter que la maladie est incurable, alors...) et les flash-back/fast-forward un peu inutiles. Étrange parce que c’est une dynamique relationnelle importante de la maladie. La personne bondit comme une chèvre dans le réel et l’irréel, dans le passé, le présent et le futur, sans jamais créer de lien logique. Difficile à suivre et c’est là que le bât blesse. J’ai mis du temps à lâcher prise, oulala.
Floride m’a fait revivre ma colère, ma frustration, mon désarroi, mes impatiences, mais aussi des petits moments plus joyeux – c’est tellement «ça». Merci au cinéaste pour l’excellent exutoire. Et puis, Jean Rochefort et Sandrine Kiberlain sont impeccables, ainsi que tous les autres comédiens.
Note positive. La zoothérapie transformait ma mère : à chaque visite hebdomadaire elle s’allumait, riait et avait énormément de plaisir. Au moins ça de gagné.
Je vous souhaite de garder toute votre tête jusqu’à votre mort.
~ ~ ~
Muet. Le lien des mots commence à se défaire
aussi. Il sort des mots.
Frontière. Pour un peu de temps
nous le voyons encore.
Il n'entend presque plus.
Hélerons-nous cet étranger s'il a oublié
notre langue, s'il ne s'arrête plus pour écouter?
Il a affaire ailleurs.
Il n'a plus affaire à rien.
Même tourné vers nous,
c'est comme si on ne voyait plus que son dos.
Dos qui se voûte
pour passer sous quoi?
~ Philippe Jaccottet (À la lumière de l’hiver)
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(1) Plusieurs maladies causent la démence et celle-ci peut progresser ou rester stable selon la maladie qui en est à l'origine. Environ 8 % de la population canadienne souffre d'une certaine forme de démence, mais sa prévalence augmente considérablement avec l'âge. La démence touche environ 2 % des personnes de 65 à 74 ans, mais frappe 34 % de celles de plus de 85 ans.
La maladie d'Alzheimer représente environ 50 % de tous les cas. Elle provoque un dommage graduel aux neurones et éventuellement leur dégénérescence complète. Le premier symptôme le plus courant est la perte de mémoire et les oublis rapides. Les personnes atteintes ne parviennent pas à se souvenir d'événements comme des conversations récentes ou des événements personnels significatifs.
La difficulté de se rappeler le nom des personnes, même celui de membres de la famille, et la difficulté à trouver le mot le plus approprié à utiliser sont un autre symptôme précoce habituel de la maladie.
La maladie d'Alzheimer progresse lentement et peut durer plusieurs années avant le décès de la personne. À mesure que la maladie progresse de plus en plus d'aspects de la fonction cognitive sont affectés notamment le langage, la perception et la capacité d'exécuter des habiletés apprises. Le plus souvent, l'individu doit être alité au cours des dernières années de la maladie et il décède de causes secondaires comme des suites d'une chute ou d'une infection.
Dans la même veine :
http://artdanstout.blogspot.ca/2015/09/la-vie-au-coeur-de-lalzheimer.html
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