Il n’y a pas grand choix parmi les méthodes de persuasion : la séduction ou la contrainte (voire la violence). Internet est un royaume inespéré pour les séducteurs, marketeurs, arnaqueurs, recruteurs et prédateurs de tous acabits.
Dans son avant-dernier polar, Missing you (1), Harlan Coben nous fait suivre un escroc qui utilise les sites de rencontres pour trouver ses victimes. Des femmes et des hommes vivant préférablement seuls (célibataires, divorcés, veuves, etc.) et... riches. Il les kidnappe. Mais les victimes vont à sa rencontre de leur propre gré, motivées par l’impression d’être aimé et le désir de «recommencer à neuf».
“... Titus knew that patience was the key. You had to wait, letting the targets go by, so that you could find ones more ideal. ... Internet made the possibilities endless. He could hunt from a steady pool of targets on various dating sites. Many were deemed worthless immediately, but that was okay because there were so many more out there. It took time. It took patience. He wanted to make sure they didn’t have much family. He wanted to make sure that a lot of people wouldn’t miss them. He wanted to make sure that they had adequate funds to make the enterprise profitable. Take Martha for example. She had inherited money recently from her deceased mother. [...]
A live person leaves a lot of clues. A dead body leaves some clues. But with a person simply missing, supposedly alive and seeking contentment, there were virtually no clues. There was nothing for anyone, especially overworked law enforcement officers, to investigate. Eventually, family members might wonder and worry. They might, weeks or months later, go to the authorities. The authorities might investigate, but in the end, these “missing” people were consenting adults who had claimed they wanted to start anew.” (p. 258-259)
“Eventually, most online relationships had to progress to the point where you had in-person contact. Titus had been surprised, though, at how intimate you could become without ever meeting face-to-face. He’d had some form of online sex or sexting episode with more than half of his victims. He’d had phone sex, always using a disposable mobile device ... but most of the time he used a simple voice changer... In every case, words of love were exchanged before a face-to-face meeting was even set up. Odd.
The getaway – be it a weekend or a week – evolved into a given. [...] Titus had read about relationships like this, people who talked online for months or even years. That star linebacker from Notre Dame had fallen in love without ever seeing the “girl” who was conning him...
Love blinds, yes, but not nearly as much as wanting to be loved. That was what Titus had learned. People weren’t so much gullible as desperate. Or maybe, Titus concluded, those were two sides of the same coin.”
(p. 317-318)
(1) En français : «Tu me manques»; France Loisirs, 2014; Belfond, mars 2015)
Les dernières phrases ci-haut, résument le fond du problème : «L’amour aveugle, oui, mais pas autant que vouloir être aimé. Les gens ne sont pas tant crédules que désespérés.»
Une femme racontait que sa mère, après le décès de son conjoint, avait «rencontré» un type sur Internet dont elle s’était entichée à en perdre la raison. Sans l’avoir jamais rencontré physiquement, elle lui a donné peu à peu tous ses revenus des assurances/décès : environ 400 000 $ US. Une fois la cagnotte perçue, le type a disparu sans laisser de traces. Une victime consentante... Combien de vies brisées pour du pseudo-amour?
Il y a cette autre catégorie de séducteurs qui frappent durement sur le Net en ce moment. Je réfère à cette jeune journaliste d’enquête dont la tête est mise à prix par le recruteur/séducteur qui n’a pas du tout accepté de se faire rouler dans la farine. C’est pourtant ce qu’ils font eux-mêmes. Plutôt ahurissant.
Bref, face au racolage @ : vigilance, discernement et raison.
Dans la même veine «Le psychopathe d’à côté» :
http://artdanstout.blogspot.fr/2015/02/le-psychopathe-da-cote.html
Le 8 juin 2015 -- plus d'info au sujet des applications de traçage (réf. article ci-après) :
De l’anxiété du contrôle de soi
(...) Ce
croisement entre les technologies de mesure de soi et les technologies
comportementales pose néanmoins de nouveaux problèmes. Comme s'en inquiétait un
article du British Medical Journal : cette surveillance de soi génère aussi de
l'anxiété chez ceux qui les utilisent - à moins que cette anxiété ne soit une
conséquence de cette utilisation. Derrière cette critique des applications de
santé et de bien-être (voir notre dossier), on relève toujours le même constat
: ils se révèlent au final peu utiles pour les gens. (...)
L'angoisse de la collecte de données
(...) C'est
exactement ce que raconte, dans un style plus personnel, la chercheuse Candice
Lanius (@misclanius) pour Cyborgology, dans un article sur les angoisses
cachées de la mesure de soi.
Pour elle, l'utilisation de technologies
d'auto-surveillance créée de l'anxiété relative à la capture des données. Les
technologies de traçages et de documentation de soi créent des expériences
décourageantes notamment quand l'utilisateur est confronté à des choses qui ne
sont pas facilement quantifiables. (...)
Pas sûr ... que cela réponde aux angoisses
que le contrôle de soi génère. Car si demain les objets parviennent à développer
des mesures toujours plus fines et précises, ils ne parviendront pas pour
autant à faire s'éloigner l'angoisse que la mesure et le contrôle de soi
cherchent à combler : c'est-à-dire devenir cet inatteignable modèle idéal de
soi-même.
Article
intégral (6 juin 2015) :
http://internetactu.blog.lemonde.fr/2015/06/06/de-lanxiete-du-controle-de-soi/ Peut-on facilement vous influencer?
Par Susan Krauss Whitbourne Ph.D.
Nous faisons face à diverses forces contraignantes quand quelqu’un essaie de nous convaincre de faire ou d'acheter ou de dire quelque chose. Qu’il s’agisse d’un annonceur, d’un candidat politique ou d’un membre de la famille, il y a toujours quelqu’un qui essaie de nous faire changer d'idée ou de nous inciter à faire ce qu'ils veulent. Possible que vous le sachiez quand on vous tort le bras, mais il est tout aussi probable que vous ne vous en rendiez pas compte.
Selon une équipe de chercheurs néerlandais, dirigée par Maurits Kaptein (2015), nous devenons de meilleures cibles pour la persuasion quand nous sommes happés par le «bon message, au bon moment, de la bonne façon» (p. 38).
Le bon message est celui auquel nous sommes réceptifs parce que nous trouvons son objectif est valable. Si vous êtes préoccupé par le changement climatique, il sera plus facile de vous persuader avec un message qui vous dit comment économiser de l'énergie. Deuxièmement, il faut entendre/voir le message au moment où nous sommes plus susceptibles d'être influencés. Une annonce pour économiser de l'énergie va vous frapper davantage si vous êtes sur le point d'acheter des ampoules. Troisièmement, le message lui-même doit présenter des données que vous pourrez croire. La pub au sujet de ces ampoules devrait indiquer le nombre de watts que vous économiserez en les utilisant.
Kaptein et ses collègues ont testé une approche de persuasion personnalisée et adaptative qui repose sur la combinaison de ces trois critères. Pour tester l’efficacité de leurs messages, les chercheurs ont recruté des adultes dont ils ont traqué les habitudes de grignotage sur leurs téléphones cellulaires.
Peut-être que vous utilisez une application similaire pour traquer vos comportements. De temps en temps, vous recevez un message, soit pour vous récompenser d’avoir atteint votre objectif (par ex. le nombre de pas que vous avez faits) ou vous proposer quelque chose pour acquérir des habitudes de vie plus saines (ex. dormir plus). Les messages de l’application ne sont pas vraiment personnalisés, ce sont des rappels ou des récompenses corrélés aux comportements enregistrés; ils ne tiennent pas compte de votre personnalité ni du genre de messages qui pourrait vous influencer.
Cependant, imaginez un système qui pourrait modifier votre comportement parce qu'il connaît le type de messages qui vous accroche. (...) Kaptein et son équipe ont créé leurs messages anti-grignotage en combinant des informations sur la personnalité des participants et leur façon de réagir à des messages convaincants. Le but de l'étude était de développer des technologies adaptées tenant compte des trois critères «bon message, au bon moment, de la bonne façon» afin d’obtenir des changements d'attitude et de comportement.
L'étude soulève d'intéressantes questions sur ce qui nous rend vulnérables aux tactiques de persuasion. Même si la méthode de Kaptein est orientée sur quelque chose de positif, à savoir des comportements bénéfiques pour la santé, nous savons tous que les professionnels du marketing n'ont généralement pas nos intérêts à coeur quand ils cherchent à nous persuader d'acheter leurs produits.
Cependant, en décrivant les facteurs qui ne nous rendent vulnérables à la persuasion, Kaptein et son équipe nous permettent de prendre conscience de ce qui nous influence et pourquoi, et de prendre le contrôle des changements que nous voulons faire ou ne pas faire par rapport à notre style de vie, nos habitudes d'achat ou nos attitudes.
Voyons d’abord ce que Kaptein et ses collègues appellent les principes d'influence :
Autorité : Les gens ont tendance à suivre les conseils et les suggestions des personnes qu’ils considèrent comme des autorités; même si elles estiment n’avoir aucun choix en la matière, les cibles de la persuasion pourraient réagir contre le message.
Consensus : Si vous voyez les autres adopter un certain comportement, ou adhérer à une certaine croyance, vous suivrez probablement la majorité. Votre réaction pourrait refléter un véritable conformisme, ou être liée à la validation sociale «si c'est bon pour tout le monde, ça devrait être bon pour moi».
Cohérence et engagement : Nous aimons avoir l’air cohérent et nous comporter de manière à refléter nos croyances au sujet du bien et du mal. Un exemple classique de cette situation : le «pied-sur-la-porte» – quelqu'un vous demande une petite faveur pour vous préparer à vous en demander de plus grandes. Vous serez plus enclin à donner 25 $ à un organisme de bienfaisance auquel vous avez déjà donné 5 $.
Rareté : Lorsqu’une chose semble indisponible, vous la voudrez d’autant plus. C'est pourquoi les détaillants offrent des éditions limitées; même les marketeurs politiques vous laisseront croire que vous êtes la seule personne à attirer leur attention parce que vous êtes «spécial».
Aimer (liking) : Si vous aimez quelqu'un, vous serez plus enclin à être d’accord avec le message qu’il communique. Les politiciens misent gros sur leur image publique, et la plupart essayent d'être le plus aimable possible.
Réciprocité : Si quelqu'un fait quelque chose de gentil pour vous, vous aurez envie de lui retourner l’ascenseur. Voilà pourquoi vous serez davantage porté à acheter un produit quand vous avez reçu un échantillon gratuit.
À présent, voyons quels sont les facteurs de votre personnalité qui peuvent vous rendre vulnérable à la persuasion (tel que résumé par Kaptein) :
Besoin de connaître : Les gens hautement dotés de trait de personnalité aiment faire travailler leur cerveau. Ils examinent attentivement tous les messages entrants et se méfient des prétendues «autorités». Au lieu d’accepter simplement les conseils de quelqu'un, ils réfléchissent et décident d’eux-mêmes de les suivre ou non.
Conscience : Si ce trait est marquant chez vous, vous serez plus enclin à suivre des messages qui s'appuient sur un consensus ou une confirmation sociale. Vous aimez suivre les règles et les prescriptions, alors comme prévu, vous suivrez ceux qui les ont conçus pour vous.
Besoin de cohérence : On pourrait voir cela comme une forme de crédulité. Si vous répondez à la moindre petite demande, vous répondrez aux plus grandes pour avoir l’air cohérent. Pour résister à cette tendance, vous devez coller à vos propres principes.
Le dernier critère de l'équation est la synchronisation (le timing, le bon moment). Ces applications liées à la santé sont efficaces parce qu’elles vous envoient fréquemment des signaux pendant la journée, de telle sorte que vous pouvez toujours modifier votre comportement. Bien entendu, vous devez aussi vérifier l'application pour savoir où vous en êtes. L’analyse de Kaptein suggère que si vous voulez modifier un comportement et que les messages déclenchent le comportement visé, vous devez configurer des rappels automatiques qui vous rappelleront de mesurer vos progrès.
Être facilement influençable est-il positif? Cela dépend, bien sûr, du changement que vous recherchez. Si c’est votre santé ou votre consommation d'énergie que vous tentez d'améliorer, vous accepterez peut-être facilement d’être influencé. Toutefois, l’envers de la médaille est que si vous ne voulez pas être la cible des stratagèmes de marketing qui vous dépouilleront de votre argent, nuiront à votre santé ou à votre respect de soi, apprenez à développer votre résistance intérieure.
https://www.psychologytoday.com/
En complément : une série-web, coproduite par UPIAN, ONF, ARTE, BR – à faire dresser les cheveux sur la tête... Oui, on sait qu’ils savent à peu près tout sur nous, mais à ce point-là? Ça dépasse l’imagination la plus fertile.
Ce que le web sait sur vous
1. Routines matinales
2. Coup de pub
3. Paye ton «J’aime»
4. L’espion dans ma poche
5. Big Data : un monde d’algorithmes
6. Le journal du moi
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