19 janvier 2019

Plus dur pour les uns que pour les autres

À moins 40°C on nous conseille de ne pas rester longtemps dehors. Sage conseil, pour les gens qui ont le choix.

Photo : Michael Charles Cole, Radio-Canada 

Dans certains refuges pour sans-abri, on n’admet pas leurs chiens. Cruel. J’imagine qu’ils ont leurs raisons... Mais la personne va-t-elle abandonner son fidèle compagnon d’infortune, son meilleur ami? Par contre, cette année, l’hôpital Victoria (à Montréal) admet les chiens. Chapeau!

La Fête des neiges débutait aujourd’hui au Parc Jean-Drapeau (Montréal). Vu le froid intense (moins 30°C), on a prévu des endroits où les familles peuvent se réchauffer entre les activités. On comprend, le tourisme du divertissement c’est bon pour l’économie (le festival accueille en moyenne 100 000 visiteurs). Alors, laissons les OSBL et les bénévoles s’occuper des itinérants... Nous avons un bloc de glace à la place du cœur.

Photo : Muriel Draismaa, CBC News (Toronto) 

Photo : John Schults, Reuters 

Pire scénario demain : même froid, plus 15 à 20 cm de neige, des vents de 40/60 km/h, et poudrerie bien sûr. Pf! 

Combattre l’itinérance en période de grand froid
Par Ismaël Houdassine 
RCI Net, vendredi 18 janvier, 2019

Photo : Mike Albans, La Presse canadienne (Ce matin, on a dû amputer la main d'un homme itinérant à Mtl)

Pendant l’hiver, les centres d’hébergement sont pris d’assaut. C’est encore le cas cette année avec des records de fréquentations. Les programmes d’urgence destinés aux itinérants doivent trouver des réponses pour loger, mais aussi pour soigner les personnes en situation de vulnérabilité.
   Les activités de la Mission Bon Accueil ont commencé dès le mois de novembre avec le froid. À Montréal, l’organisme est capable de réagir aux différentes périodes hivernales, mais avec la réalité des situations d’itinérance, les semaines sont très occupées.
   «Le phénomène de l’itinérance dans la métropole est un phénomène qui touche les 365 jours de l’année, explique Sam Watts en entrevue. Dans les périodes de grands froids, on va voir un peu plus de monde, mais honnêtement,  la plupart du temps on fonctionne déjà à pleine capacité.» [...]


L’omelette des gilets jaunes : 

La grasse matinée
Jacques Prévert

Il est terrible
le petit bruit de l'oeuf dur cassé sur un comptoir d'étain
il est terrible ce bruit
quand il remue dans la mémoire de l'homme qui a faim
elle est terrible aussi la tête de l'homme
la tête de l'homme qui a faim
quand il se regarde à six heures du matin
dans la glace du grand magasin
une tête couleur de poussière
ce n'est pas sa tête pourtant qu'il regarde
dans la vitrine de chez Potin
il s'en fout de sa tête l'homme
il n'y pense pas
il songe
il imagine une autre tête
une tête de veau par exemple
avec une sauce de vinaigre
ou une tête de n'importe quoi qui se mange
et il remue doucement la mâchoire
doucement
et il grince des dents doucement
car le monde se paye sa tête
et il ne peut rien contre ce monde
et il compte sur ses doigts un deux trois
un deux trois
cela fait trois jours qu'il n'a pas mangé
et il a beau se répéter depuis trois jours
Ça ne peut pas durer
ça dure
trois jours
trois nuits
sans manger
et derrière ces vitres
ces pâtés ces bouteilles ces conserves
poissons morts protégés par les boîtes
boîtes protégées par les vitres
vitres protégées par les flics
flics protégés par la crainte
que de barricades pour six malheureuses sardines.
Un peu plus loin le bistrot
café-crème et croissants chauds
l'homme titube
et dans l'intérieur de sa tête
un brouillard de mots
un brouillard de mots
sardines à manger
oeuf dur café-crème
café arrosé rhum
café-crème
café-crème
café-crime arrosé sang!...
Un homme très estimé dans son quartier
a été égorgé en plein jour
l'assassin le vagabond lui a volé
deux francs
soit un café arrosé
zéro franc soixante-dix
deux tartines beurrées
et vingt-cinq centimes pour le pourboire du garçon.
Il est terrible
le petit bruit de l’œuf dur cassé sur un comptoir d'étain
il est terrible ce bruit
quand il remue dans la mémoire de l'homme qui a faim.

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Assis sous un arbre, il parabolait «Heureux les pauvres d'esprit, ceux qui ne cherchent pas à comprendre, ils travailleront dur, ils recevront des coups de pied au cul, ils feront des heures supplémentaires qui leur seront comptées plus tard dans le royaume de mon père.» Il guérissait aussi les hydropiques, il leur marchait sur le ventre en leur disant qu'il marchait sur l'eau, et l'eau qu'il leur sortait du ventre il la changeait en vin; à ceux qui voulaient bien en boire, il disait que c'était son sang.

Jacques Prévert

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