1 juillet 2018

Réponse de Leonard Cohen à la polémique SLĀV

FATIGUÉS

Nous sommes fatigués d’être blancs et nous sommes fatigués d’être noirs, et nous allons cesser d’être blancs et nous allons cesser dorénavant d’être noirs. Nous allons être des voix maintenant, des voix désincarnées dans le ciel bleu, des harmonies plaisantes dans les cavités de votre détresse. Et nous allons être ainsi jusqu’à ce que vous vous preniez en mains, jusqu’à ce que vos souffrances vous calment, et que vous puissiez croire à la parole de D--u qui vous a dit de tant de façons de vous aimer les uns les autres, ou à tout le moins de ne pas torturer et assassiner au nom de quelque stupide idée à vomir et qui fait que D--u se détourne de vous, en assombrissant le cosmos d’une inconcevable tristesse. Nous sommes fatigués d’être blancs et nous sommes fatigués d’être noirs, et nous allons cesser d’être blancs et nous allons cesser dorénavant d’être noirs.
~ Leonard Cohen (Livre du constant désir; Éditions de l’Hexagone, 2007, p. 132) 

CONTEXTE DE LA POLÉMIQUE

Source : ARP MEDIA

Dans le cadre du Festival international de Jazz de Montréal, le TNM présente  SLĀV, une création de Betty Boniffasi, mise en scène par Robert Lepage.  Ce spectacle qui, malgré toute la controverse qui l’entoure, divertit, émeut, et fait même réfléchir par moments.
   D’abord, il est important de spécifier que nous avons volontairement choisi de parler de SLĀV d’un point de vue strictement artistique,  laissant ainsi les experts se positionner sur les enjeux moraux entourant la production.

Un intérêt marqué de Betty Bonifassi

Donc, SLĀV s’amorce avec une mise en contexte présentée par Betty Bonifassi, qui s’intéresse aux chants d’esclaves depuis plus d’une quinzaine d’années. Celle-ci nous explique que le mot «esclave» viendrait de l’Esclavonie, qu’on a ensuite rebaptisée Slavonie, une région faisant maintenant partie de la Croatie. On nous mentionne que l’empire Ottoman a assujetti le peuple bulgare pour en faire des esclaves. Les premiers chants du spectacle sont d’ailleurs issus de cette période.

Article intégral :

Photo : Elias Djemil

Préalablement sur le même site :

La nouvelle pièce de Robert Lepage, SLĀV, vient tout juste de commencer qu’elle s’attire déjà les foudres de manifestants.
   Un rassemblement de manifestants a eu lieu mardi en soirée devant le Théâtre du Nouveau Monde. Ces derniers étaient présents pour décrier la pièce de Robert Lepage, SLĀV : une odyssée théâtrale à travers les chants d’esclaves.
   Selon ce qu’on peut lire sur le site Internet : «SLĀV est une odyssée théâtrale à travers les chants traditionnels afro-américains, des champs de coton aux chantiers de chemins de fer, des chants d’esclaves aux chansons de prisonniers recueillies par John et Alan Lomax dans les années 30».
   D’après certains manifestants, les chants d’esclaves n’ont pas été composés pour que les Blancs puissent en bénéficier et les chanter. Selon eux, SLĀV est «irrespectueux et insensible».
   Ils dénoncent l’appropriation culturelle qui est en fait et que Robert Lepage et Betty Bonifassi, soient deux personnes blanches. «À l’intérieur de ce théâtre, en ce moment, ils prennent nos souffrances, notre histoire et l’héritage de notre résilience pour un billet qui coûte entre 60 et 90 $. Honte à vous!», a décrié à La Presse, le militant Vincent Mousseau.
   Dans une publication partagée sur le compte Facebook d’Ex-Machina, le metteur en scène et la chanteuse ont répondu à la controverse. Voici ce qu’ils ont dit :
«Oui, l’histoire de l’esclavage sous ses multiples formes appartient d’abord à ceux et celles qui l’ont subi, et à tous ceux qui en ont hérité.
   Mais cette histoire a été écrite par les oppresseurs autant que par les opprimés, par des blancs aussi bien que par des noirs. Et il faut en témoigner, d’abord pour qu’elle soit connue, mais aussi pour éviter qu’elle ne se perpétue.
   Le métissage dans toute sa fécondité artistique et culturelle est au cœur de SLĀV, tout autant que l’esclavage. Avons-nous le droit de toucher à ces sujets? Le public en jugera après avoir assisté au spectacle. De notre point de vue, nous avons surtout, blancs ou noirs, un devoir, celui d’aborder les épisodes les plus sombres de l’histoire pour tenter d’en tirer un peu de lumière.
   La musique et le théâtre comptent certainement parmi les moyens les plus nobles de le faire.»


Cela dit, je verrais mal un Afro-Américain jouer le rôle d’Abraham Lincoln. Quand on retourne dans le passé il faut assurer un minimum de crédibilité au contexte, en particulier au cinéma. Mais, dans un spectacle musical, les créateurs devraient avoir plus de liberté (c’est le cas de le dire!). Peut-être que les auteurs auraient pu présenter les chants d’esclaves interprétés par Betty Boniffasi avec un visuel s’approchant de cette vidéo. Je n’en sais trop rien, je ne l’ai pas vu... Quoiqu’il en soit, je trouve que les revendications prennent des proportions déraisonnables de nos jours : faut-il empêcher un noir de chanter du folklore blanc, mexicain ou amérindien et les blancs de chanter du folklore noir, mexicain ou amérindien? On dirait une guerre de sécession... 



Une interview au sujet du spectacle de Bonifassi Chants d’esclaves (Festival de Jazz 2014) 

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