Nous sommes
fatigués d’être blancs et nous sommes fatigués d’être noirs, et nous allons
cesser d’être blancs et nous allons cesser dorénavant d’être noirs. Nous allons
être des voix maintenant, des voix désincarnées dans le ciel bleu, des
harmonies plaisantes dans les cavités de votre détresse. Et nous allons être
ainsi jusqu’à ce que vous vous preniez en mains, jusqu’à ce que vos souffrances
vous calment, et que vous puissiez croire à la parole de D--u qui vous a dit de
tant de façons de vous aimer les uns les autres, ou à tout le moins de ne pas
torturer et assassiner au nom de quelque stupide idée à vomir et qui fait que
D--u se détourne de vous, en assombrissant le cosmos d’une inconcevable
tristesse. Nous sommes fatigués d’être blancs et nous sommes fatigués d’être
noirs, et nous allons cesser d’être blancs et nous allons cesser dorénavant
d’être noirs.
~ Leonard Cohen (Livre du constant désir; Éditions de l’Hexagone, 2007, p. 132)
CONTEXTE DE LA POLÉMIQUE
Source : ARP MEDIA
Dans le cadre du Festival international de Jazz de Montréal, le TNM présente SLĀV, une création de Betty Boniffasi, mise en scène par Robert Lepage. Ce spectacle qui, malgré toute la controverse qui l’entoure, divertit, émeut, et fait même réfléchir par moments.
Dans le cadre du Festival international de Jazz de Montréal, le TNM présente SLĀV, une création de Betty Boniffasi, mise en scène par Robert Lepage. Ce spectacle qui, malgré toute la controverse qui l’entoure, divertit, émeut, et fait même réfléchir par moments.
D’abord,
il est important de spécifier que nous avons volontairement choisi de parler de
SLĀV d’un point de vue strictement artistique,
laissant ainsi les experts se positionner sur les enjeux moraux
entourant la production.
Un intérêt
marqué de Betty Bonifassi
Donc, SLĀV s’amorce avec une mise en contexte
présentée par Betty Bonifassi, qui s’intéresse aux chants d’esclaves depuis
plus d’une quinzaine d’années. Celle-ci nous explique que le mot «esclave»
viendrait de l’Esclavonie, qu’on a ensuite rebaptisée Slavonie, une région faisant
maintenant partie de la Croatie. On nous mentionne que l’empire Ottoman a
assujetti le peuple bulgare pour en faire des esclaves. Les premiers chants du
spectacle sont d’ailleurs issus de cette période.
Article intégral :
Photo : Elias Djemil
Préalablement sur le même site :
La nouvelle pièce de Robert Lepage, SLĀV, vient
tout juste de commencer qu’elle s’attire déjà les foudres de manifestants.
Un
rassemblement de manifestants a eu lieu mardi en soirée devant le Théâtre du
Nouveau Monde. Ces derniers étaient présents pour décrier la pièce de Robert
Lepage, SLĀV : une odyssée théâtrale à travers les chants d’esclaves.
Selon ce qu’on peut lire sur le site Internet
: «SLĀV est une odyssée théâtrale à travers les chants traditionnels
afro-américains, des champs de coton aux chantiers de chemins de fer, des
chants d’esclaves aux chansons de prisonniers recueillies par John et Alan
Lomax dans les années 30».
D’après
certains manifestants, les chants d’esclaves n’ont pas été composés pour que
les Blancs puissent en bénéficier et les chanter. Selon eux, SLĀV est «irrespectueux
et insensible».
Ils
dénoncent l’appropriation culturelle qui est en fait et que Robert Lepage et
Betty Bonifassi, soient deux personnes blanches. «À l’intérieur de ce théâtre,
en ce moment, ils prennent nos souffrances, notre histoire et l’héritage de
notre résilience pour un billet qui coûte entre 60 et 90 $. Honte à vous!», a
décrié à La Presse, le militant Vincent Mousseau.
Dans une
publication partagée sur le compte Facebook d’Ex-Machina, le metteur en scène
et la chanteuse ont répondu à la controverse. Voici ce qu’ils ont dit :
«Oui,
l’histoire de l’esclavage sous ses multiples formes appartient d’abord à ceux
et celles qui l’ont subi, et à tous ceux qui en ont hérité.
Mais cette histoire a été écrite par les
oppresseurs autant que par les opprimés, par des blancs aussi bien que par des
noirs. Et il faut en témoigner, d’abord pour qu’elle soit connue, mais aussi
pour éviter qu’elle ne se perpétue.
Le métissage dans toute sa fécondité
artistique et culturelle est au cœur de SLĀV, tout autant que l’esclavage.
Avons-nous le droit de toucher à ces sujets? Le public en jugera après avoir
assisté au spectacle. De notre point de vue, nous avons surtout, blancs ou
noirs, un devoir, celui d’aborder les épisodes les plus sombres de l’histoire
pour tenter d’en tirer un peu de lumière.
La musique et le théâtre comptent
certainement parmi les moyens les plus nobles de le faire.»
Cela dit, je verrais mal un Afro-Américain jouer
le rôle d’Abraham Lincoln. Quand on retourne dans le passé il faut assurer un
minimum de crédibilité au contexte, en particulier au cinéma. Mais, dans un
spectacle musical, les créateurs devraient avoir plus de liberté (c’est le cas
de le dire!). Peut-être que les auteurs auraient pu présenter les chants d’esclaves
interprétés par Betty Boniffasi avec un visuel s’approchant de cette vidéo. Je
n’en sais trop rien, je ne l’ai pas vu... Quoiqu’il en soit, je trouve que les
revendications prennent des proportions déraisonnables de nos jours : faut-il empêcher un noir
de chanter du folklore blanc, mexicain ou amérindien et les blancs de chanter
du folklore noir, mexicain ou amérindien? On dirait une guerre de sécession...
Une interview au sujet du spectacle de Bonifassi Chants d’esclaves (Festival de Jazz 2014)
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