4 septembre 2018

Quand on existe par le regard des autres

Un sujet très important quand on parle des femmes : la confiance en soi; on est encore très nombreuses à dire que c’est pas quelque chose qui nous habite de façon spectaculaire... «La confiance ne fait pas partie de notre ADN. Depuis le début de l’humanité, je pense que c’est ainsi. Le propre de la gente féminine c’est d’attendre d’exister dans le regard d’autrui, c’est pour ça qu’on a un genre, qu’on a été mises au monde... pour avoir cette permission-là d’exister dans le regard d’autrui. Alors, le premier regard c’est tes parents, pis après ça, ben c’est ton petit chum. Pis après ça, c’est ton employeur, pis après c’est toujours par le regard des autres que t’existes.» ~ Sophie Lorain (comédienne, réalisatrice et productrice)

Source : Plus on est de fous, plus on lit : des conseils pour survivre à l’adolescence.
Segment : La série L’Académie, entrevue avec Sarah-Maude Beauchesne

Vient un moment où l’on cesse de s’identifier à des symboles de beauté, de succès, de richesse, d’intelligence ou autres. Se détacher des choses qui nous tiennent en laisse est extrêmement libérateur, et ça peut arriver à n’importe quel âge; c’est souvent la sagesse acquise par l’expérience qui nous y conduit (1).

Elle est peut-être la personne la plus âgée du monde, mais à 117 ans elle est trop occupée pour s'en soucier

Photo : Juan Karita / AP. Julia Flores Colque, 117 ans, regarde la caméra alors qu'elle est assise devant chez elle à Sacaba, en Bolivie, le 23 août. Sa carte d'identité nationale, vérifiée par le gouvernement, dit qu'elle est née le 26 octobre 1900 dans un camp minier des montagnes boliviennes.

Au cours de sa longue vie, elle a été témoin de deux guerres mondiales, de révolutions dans sa Bolivie natale, et de la transformation de sa ville rurale Sacaba qui, en cinq décennies, est passée de 3000 habitants à 175 000. (...)
   Ces jours-ci, elle apprécie la compagnie de ses chiens et chats, et de son coq. Elle est lucide et pleine de vie. Elle aime les bons gâteaux et les chants folkloriques en quechua, qu’elle chante à quiconque vient la visiter à sa maison qu'elle partage avec sa petite-nièce de 65 ans. (...)
   «Elle a toujours été active, facile à vivre et amusante», dit la petite-nièce, Agustina Berna.

Seattle Time, August 29, 2018  

Ma vie
Mireille Bergès

J’ai eu vingt ans et bientôt trente,
les quarante ont suivi et aussi les cinquante,
avec quelques unités pour perturber les comptes.
J’ai lu des magazines qui parlaient de mes rides,
de bouchers qui taillaient dans les bides
et remontaient des seins à la file
comme dans les usines pour les automobiles.
Rester jeune, peu importe le prix!
Info, intox, il paraît même que le botox...
Alors, là, moi, j’dis stop.
Remonter le temps? Avoir encore vingt ans?
Ça va pas, non? Tu sais quoi? J’ai pas le temps.
                
Demain, dans un mois, dans un an,
j’irai me balader pas très loin sur la plage
et je ramasserai des galets arrondis
que je colorierai aux couleurs du bonheur.
Je lirai des légendes, écouterai des contes
et puis les offrirai à qui voudra entendre.
Je me ferai des amis, au hasard
sur la toile, dans la rue ou au bar;
on discutera jusqu’au bout de la nuit
de la vie, de l’amour et de la mort aussi.

Demain, dans un mois, dans un an,
j’aurai les bras câlins de mes petits enfants
à mon cou enroulés pour mieux me protéger.
Mes enfants seront là et nous nous sourirons,
heureux d’avoir su traverser sans sombrer
les tempêtes, les naufrages et puis quelques orages.
Il m’arrivera encore de chanter, de danser
et de me régaler de gâteaux, de bonbons,
de p’tits plats mijotés
sans penser aux kilos ou bien à ma santé.

Demain, dans un mois, dans un an,
je sortirai la nuit avec tous les hiboux
et verrai le soleil sur la mer se lever.
Je marcherai longtemps en goûtant le silence
j’aimerai les odeurs de la mousse en automne
et du foin en été
et le chant des cigales et le soleil brûlant.
J’écouterai toujours le malheur qui se plaint.
J’éprouverai encore les bouffées de colère
face à la bêtise et la haine étalées.
Jamais ni l’injustice ni l’infamie je n’accepterai
et lèverai en l’air, mon poing avec rage.

Demain, dans un mois, dans un an...
Et si la mort survient,
car elle survient toujours, la garce,
elle me trouvera debout, occupée et ridée.

Une auteure à suivre :

(1) Pour se laisser duper, il faut d’abord se duper soi-même. «[Chacun] s’impose sa propre illusion : nul ne peut faire cela pour lui, c’est lui seul qui le fait. Nous créons notre illusion et en devenons esclaves. Le facteur fondamental de ce processus est notre constant désir d’être quelque chose. Nous en connaissons l’effet dans ce monde : c’est une confusion totale où chacun de nous est en lutte avec les autres, où l’on se détruit au nom de la paix. Vous connaissez les ruses de ce jeu. C’est une extraordinaire façon de nous mentir à nous-mêmes.
   Nous commençons à tricher dès que nous avons cette soif d’être, de devenir, de nous accomplir, d’acquérir l’estime des autres, une situation, du prestige, du pouvoir. Ce désir d’être socialement reconnu, n’est-il pas la raison même pour laquelle nous nous dupons? C’est un des problèmes fondamentaux de notre existence. Est-il possible de vivre en ce monde et de n’être rien? Alors seulement serions-nous affranchis de toute illusion.
   La vérité n’est pas quelque chose qui peut s’acquérir. L’amour ne peut pas venir à ceux qui ont le désir de le posséder ou qui voudraient s’identifier à lui. Mais il peut se produire lorsque l’esprit ne cherche pas, lorsqu’il est complètement tranquille, lorsqu’il ne crée plus des mouvements et des croyances sur lesquelles il puisse s’appuyer ou dont il tire une certaine énergie, symptôme de ses illusions. Et l’esprit ne peut être ainsi immobile que lorsqu’il comprend le processus du désir. Lorsqu’il n’est plus en mouvement pour être ou pour ne pas être, il rend possible l’existence d’un état dépouillé de toute duperie.»
~ Krishnamurti, 1895-1986 (La première et la dernière liberté)

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