«L’histoire enseigne comment il faut falsifier.» ~ Stanislaw
Jerzy Lec
Auteur de ce chef-d’œuvre pictural : Ricardo. Cueilli sur
le site d’un journaliste américain vivant en Espagne https://twitter.com/David_Seaton
Certaines personnalités historiques connaissent la
disgrâce en ce moment au Canada. Voilà ce que disait l’historien Frédéric
Bastien à Gravel le matin au
sujet de Macdonald et Amherst :
«Des groupes militants sont responsables d’une
certaine diabolisation de l’histoire du Canada. Ces groupes veulent
criminaliser les personnages du passé, pour stimuler la honte et la
culpabilité, pour faire passer [une ligne] diversitaire. On prend une figure,
on la sort de son contexte et on lui applique des critères du 21e siècle pour
la diaboliser. John A. Macdonald n’a pas été célébré pour ce qu’il a fait contre
les Indiens. Ce n’est pas la raison pour laquelle on se souvient de lui. Il est
un des Pères de la Confédération, et c’est pour ça qu’on voit autant son nom.
Quant à Amherst, il a une rue à son nom parce qu’il est le fondateur du
Montréal anglophone, non pas parce qu’il a voulu distribuer des couvertures
infectées à la variole aux Amérindiens.»
C’est un point de vue. Aucune raison
valable de rendre hommage à des génocidaires colonialistes. Si j’étais autochtone,
je ne voudrais pas voir la face de l’initiateur des pensionnats autochtones.
Photo : Jacques Grenier / Le Devoir. À Montréal, en
2010, la statue de John A. Macdonald avait été descendue de son socle, mais
c’était alors pour effacer les outrages du temps et des vandales.
Les conservateurs de l’Ontario veulent récupérer cette
statue. Pf!
Que voulez-vous, les individus admirent des traits
de personnalité s’accordant avec leur propre système idéologique. Qui déterminera
le mérite ou le démérite? En vertu de quelles valeurs? Certains valorisent la
violence et la guerre, d’autres préfèrent la bienveillance et la paix. «En
enfer le Diable est un personnage positif.» (Stanislaw Jerzy Lec)
L’idéal serait de rassembler dans un musée
d’histoire, doté d’un grand parc, les statues, monuments et autres objets
commémoratifs déjà existants. Le guide du Musée devrait inclure des mises à
jour historiques basées sur des faits
réels maintenant reconnus.
Et, à l’avenir, il vaudrait mieux éviter de mettre
des humains aussi ordinaires que vous et moi (malgré leur célébrité ou leur
succès) sur des piédestaux dont ils tomberont peut-être un jour si l’on découvre
des faits peu reluisants de leur vie personnelle et publique. Cela inclut les
célébrités du milieu artistique, politique, religieux, et même autochtone. Pas de statues, ainsi la prochaine génération n'aura pas besoin de les déboulonner dans 10 ou 20 ans.
Cela dit, ne faisons pas en sorte que les artistes
(sculpteurs, peintres, etc.) crèvent de faim. Je propose donc la création
d’œuvres d’art rendant hommage aux espèces animales disparues depuis les trente dernières années ou en voie
d’extinction, des grands mammifères aux insectes (pas taxidermisés, bien sûr!) en guise d'aide-mémoire. Pour ce
qui est de la toponymie, oiseaux, fleurs et plantes seraient une source
d’inspiration intarissable. Considérant la rapidité avec laquelle le vivant disparait, les artistes ne
manqueraient pas de boulot.
Choix cornélien : John McCain vient de mourir
et on le louange de tous bords et tous côtés – le Sénat érigera-t-il une statue
à sa mémoire? À suivre...
Retenez vos
applaudissements, la campagne de 2008 de John McCain a ouvert la voie à Donald
Trump
Mehdi
Hasan | The Intercept | August 27, 2018
Quelle belle complicité... Photo:
Darren Hauck / Getty Images. Sen. John McCain, R-Ariz., and former Alaska Gov.
Sarah Palin attend a campaign rally at Pima County Fairgrounds, March 26, 2010,
in Tucson, Ariz.
Et si John
McCain n'avait pas été candidat à la présidence en 2008?
Donald Trump ne serait peut-être pas à la Maison Blanche
aujourd'hui.
À première vue, cela peut sembler bizarre. Le
sénateur républicain de six mandats, qui est décédé samedi, a été reconnu comme
un franc adversaire du président, tandis que Trump lui-même méprisait McCain et
avait déclaré que l'ancien prisonnier du Viêt-Cong n’était «pas un héros de
guerre».
Mccain a aussi été considéré, par la droite comme
par la gauche, comme un modèle de civilité politique, d'intégrité et de
décence; un républicain non raciste; l'anti-Trump. Bernie Sanders l'a appelé «un
homme de décence et d'honneur»; Alexandria Ocasio-Cortez l'a louangé comme «un
exemple sans précédent de décence humaine».
Rien n'est plus faux. Même si vous ne tenez pas
compte du fait que McCain a déjà traité sa femme de «salope» en public. Ou
qu'il a qualifié deux de ses collègues sénateurs républicains de «connards» et
de «trous-de-cul». Ou qu'il se moquait de Chelsea Clinton, alors adolescente, disant
qu’elle était «laide». Ou qu'il a refusé de s'excuser pour avoir traité ses
ravisseurs vietnamiens d’«idiots». Ou qu'il a traité les manifestants
anti-guerre de «racaille».
Ignorez tout cela et il vous restera l’incitation
à la haine et au racisme – en précurseur
de Trump durant sa campagne présidentielle en 2008 – contre le premier candidat démocrate noir à la Maison Blanche.
Comment le vitriol et les diffamations d'il y a dix ans ont-ils été si facilement
oubliés par ses panégyristes? Relégués avec tant de désinvolte au trou de
mémoire des médias?
Souvenez-vous que McCain a présenté la détestable
Palin au monde en août 2008, quand il l'a soustraite de l'obscurité de l'Alaska
et fait d'elle sa colistière. Ce faisant, il accorda du prestige, de
l'influence et de la crédibilité à une démagogue ignorante et à une théoricienne
de la conspiration; une femme qui prospérait sur le ressentiment racial et
culturel, et qui allait devenir plus tard une figure de proue du Tea party et
du “birther movement” [ndlr :
contestation de la citoyenneté américaine d’Obama]. C’est familier? «Palin, écrivait Dana Milbank du Washington Post
en 2016, est politiquement, la mère de Trump.»
Article intégral en anglais :
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