François Coppée
À Edmond
de Guerle.
Quand son
enseignement eut consolé le monde,
Le
Bouddha, retiré dans la djongle profonde
Et du
seul Nirvâna désormais soucieux,
S’assit
pour méditer, les bras levés aux cieux;
Et
gardant pour toujours cette sainte attitude,
Il vécut
dans l’extase et dans la solitude,
Concentrant
son esprit sur un rêve sans fin
Avant
d’être absorbé par le Néant divin.
Le temps
avait rendu tout maigre et tout débile
Le corps
ossifié de l’ascète immobile;
Les
lianes grimpaient sur son torse engourdi
Que ne
réchauffait plus le soleil de midi;
Et ses
yeux sans regard, dans leurs mornes paupières,
Semblaient
avoir acquis la dureté des pierres.
Il aurait
dû mourir, par la faim consumé;
Mais les
petits oiseaux, dont il était aimé,
Les
oiseaux qui chantaient dans les branches fleuries,
Venaient
poser des fruits sur ses lèvres flétries.
Et,
depuis très longtemps, c’est ainsi que vivait
Le
Bouddha vénérable, absolument parfait.
Donc
mille et mille fois, et mille fois encore,
La lune
qui blanchit et le soleil qui dore
Les
forêts, sur son front tour à tour avaient lui,
Sans que
se fût distraite un seul instant en lui
Sa
pensée, en un songe immuable perdue,
Lorsque
dans sa main droite, au ciel toujours tendue,
Dans sa
main sèche et grise ainsi que du granit,
Une
hirondelle vint, un jour, et fit son nid.
L’extase
du Bouddha ne parut point troublée
Par cette
confiante et fidèle exilée
Qui,
franchissant du vol la montagne et la mer,
Des
froids climats du Nord revenait, chaque hiver,
Et
retrouvait toujours son nid chaud et paisible
Dans le
creux de la main du rêveur impassible.
À la fin,
cependant, elle ne revint plus.
Hirondelles
des granges; gravement menacée d'extinction au Canada.
Et, quand
les derniers temps furent bien révolus
Du retour
des oiseaux que l’exil seul protège,
Lorsque
l’Hymalaya se fut couvert de neige
Et
lorsque tout espoir fut perdu, le Bouddha
Détourna
lentement la tête; il regarda
Sa main vide;
et les yeux du divin solitaire,
Qui
depuis si longtemps n’avaient rien vu sur terre,
Ses yeux
tout éblouis d’immensité, ses yeux
Éteints
et fatigués de contempler les cieux,
Ses yeux
aux cils brûlés, aux paupières sanglantes.
S’emplirent
tout à coup de deux larmes brûlantes;
Et celui dont l’esprit était resté béant
Devant l’amour du vide et l’espoir du néant,
Et qui fuyait la vie et ne voulait rien
d’elle,
Pleura, comme un enfant, la mort d’une
hirondelle.
Les récits et les élégies (1878)
Cueilli
sur https://www.poetica.fr/
Dans le monde superficiel de la monarchie
Difficile
d’éviter le tapage médiatique sur le couple Harry & Meghan. Peut-être parce
le Canada est un dominion du
Commonwealth. Si on m’avait demandé ce qu’était un dominion quand j’étais jeune,
j’aurais répondu une chaîne canadienne de supermarchés (Dominion
supermarket). Assez ironique.
Je l’avoue, j’ai regardé un bout de la cérémonie. Rafraichissant de voir des visages souriants à l’œil coquin parmi les mines renfrognées de
la famille royale. Inviter des musiciens et choristes noirs à un événement aussi protocolaire et suranné était
audacieux. Chapeau! c’est le cas de le dire. Je ne sais pas si les membres de la famille proche ont le droit de se
déclarer ouvertement athées puisque la reine est de facto la cheffe de l’Église
Anglicane, hum... Pauvre Elizabeth, une roturière (of common birth)
de plus (1). On dit que Meghan est
féministe et que désormais elle n’aura plus le droit d’exprimer son opinion sur
des sujets pouvant porter à controverse. Or on sait que la reine mène sa cour
de façon spartiate, de sorte qu’il pourrait y avoir de petites étincelles.
Bref, je ne suis
pas monarchiste, mais plutôt
allergique à ce monde artificiel.
Donc je me fiche royalement du mariage de H & M, mais je leur souhaite quand
même une belle et bonne vie dans la prison Windsor. En tout cas, c’est le
couple qui me semble le plus sympa de la bande.
Le
branding de la famille royale est surveillé, mais je crois que des souvenirs
de très mauvais goût ont échappé à sa vigilance. Tel ce maillot de bain : dévotion
ou dérision? Qui voudrait se voir dans cette position?
Si vous
avez envie de rigoler des mascarades vestimentaires royales :
https://artdanstout.blogspot.ca/2013/12/bede-decoiffante.html
(1) Cette idée de naissance qui n'est pas noble ou de rang inférieur est complètement stupide. Je suis persuadée que si on analysait l'ADN de beaucoup de noirs et de métis, on y trouverait du sang bleu car les membres des familles royales et les aristocrates ont violé et engrossé des esclaves tout au long de la traite négrière.
«Je souhaiterais vivre cinquante ans de plus; je crois que je verrais les trônes de l'Europe vendus aux enchères contre de la vieille ferraille. Je crois que je verrais réellement la fin de ce qui est sûrement la plus grotesque de toutes les escroqueries jamais inventées par l'homme : la monarchie. Il y a imposture et imposture; il y a fraude et fraude, mais la plus limpide de toutes est celle des couronnés, disait Mark Twain en 1889. La monarchie a la parole, et celle-ci lui a permis de convaincre l'homme qu'elle différait du serpent à sonnette, que quelque part elle avait quelque chose de précieux, quelque chose qu’il valait la peine de préserver, quelque chose de bon et de grand, lorsqu'elle était bien «modifiée», quelque chose lui donnant droit à la protection contre le bâton du premier venu qui l’attraperait si elle sortait de son trou.»
Les bonnes œuvres ne compensent pas les privilèges que s’accordent ceux qui se prétendent supérieurs – «la brutalité sous un vernis de luxe, la vantardise de comédien, par quoi le riche fait étalage de ses jouissances, évoquent, chez le pauvre, l'idée que l'argent seul importe, tandis qu'en réalité, si l'argent importe quelque peu, l'esprit importe bien davantage», disait Nietzsche.
(1) Cette idée de naissance qui n'est pas noble ou de rang inférieur est complètement stupide. Je suis persuadée que si on analysait l'ADN de beaucoup de noirs et de métis, on y trouverait du sang bleu car les membres des familles royales et les aristocrates ont violé et engrossé des esclaves tout au long de la traite négrière.
«Je souhaiterais vivre cinquante ans de plus; je crois que je verrais les trônes de l'Europe vendus aux enchères contre de la vieille ferraille. Je crois que je verrais réellement la fin de ce qui est sûrement la plus grotesque de toutes les escroqueries jamais inventées par l'homme : la monarchie. Il y a imposture et imposture; il y a fraude et fraude, mais la plus limpide de toutes est celle des couronnés, disait Mark Twain en 1889. La monarchie a la parole, et celle-ci lui a permis de convaincre l'homme qu'elle différait du serpent à sonnette, que quelque part elle avait quelque chose de précieux, quelque chose qu’il valait la peine de préserver, quelque chose de bon et de grand, lorsqu'elle était bien «modifiée», quelque chose lui donnant droit à la protection contre le bâton du premier venu qui l’attraperait si elle sortait de son trou.»
Les bonnes œuvres ne compensent pas les privilèges que s’accordent ceux qui se prétendent supérieurs – «la brutalité sous un vernis de luxe, la vantardise de comédien, par quoi le riche fait étalage de ses jouissances, évoquent, chez le pauvre, l'idée que l'argent seul importe, tandis qu'en réalité, si l'argent importe quelque peu, l'esprit importe bien davantage», disait Nietzsche.
Dans ce
monde de vanité, l’important est de rester au-dessus de la masse en suivant des
codes complexes de démarcation allant de l’habillement à la posture, à
l’étiquette (façon de converser, de manger, de traiter les domestiques) jusqu’à
la manière de gérer les écarts de la moralité souvent trahie. Les aristocrates et les parvenus copient les comportements de la royauté à échelle réduite. Ils héritent de la
fortune familiale, ne travaillent pas, profitent du travail de leurs métayers
sous-payés ou simplement nourris/logés, et récoltent les revenus de
l’exploitation. L'aristocratie garde des signes distinctifs d'identité sociale
: un train de vie mondain, la double résidence (dans l'idéal un hôtel
particulier en ville et un château à la campagne), des loisirs coûteux en temps
et en espace (chasse, tourisme). L'indécrottable sentiment de supériorité (créé de toute pièce) ne disparaîtra qu'avec eux.
Les
monarques encore bien présents partout dans le monde
ICI Radio-Canada | 18 mai 2018
Dans 44 pays du monde, soit 23 % des États reconnus
par l'ONU, le chef de l'État est un roi ou une reine. Pourquoi, plus de deux
siècles après les révolutions américaine et française, cette forme de
gouvernement perdure-t-elle?
Principauté,
royaume, émirat, grand-duché, sultanat… les titres varient, mais une réalité
demeure : celle du monarque propulsé sur le trône en raison de sa naissance
plutôt que par la volonté expresse du peuple.
Seize pays
dans le monde ont la reine Élizabeth II comme chef d’État. Outre le
Royaume-Uni, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, il y a des États
comme la Jamaïque, la Barbade et d’autres petites îles des Caraïbes. C’est
avant tout un héritage du temps de l’Empire.
Les
Australiens ont bien tenté, en 1999, un référendum proposant que le pays
devienne une république, mais les tenants du statu quo l’ont emporté.
Au Canada,
ceux qui veulent abolir la monarchie se heurtent à la difficulté d'obtenir le
consentement unanime des 10 provinces et du Parlement fédéral.
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