Multitâches...
Parce que nous avions besoin d’un mot pour «incapable de se concentrer sur la
tâche à accomplir»
Peut-on vivre sans téléphone intelligent?
Charlotte-May
Mondoux-Fournier
ICI
Radio-Canada Nouvelle, le 6 février 2019
Du 6 au 8 février se déroulent les journées
mondiales sans téléphone portable. Durant ces trois jours, le public est invité à déconnecter et
réfléchir sur sa relation avec ces appareils.
Les données avancées par l’Autorité
canadienne pour les enregistrements Internet (ACEI) et le Conseil de la
radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) démontrent que les
téléphones intelligents occupent une place de choix dans la vie des Canadiens.
"On ne peut plus vivre sans téléphone
cellulaire… c’est un passage obligé", affirme Diane Pacom, professeure
émérite à l’École d’études sociologiques de l’Université d’Ottawa. "Le
côté séduisant de cette nouvelle réalité numérique fait que les gens veulent
absolument y accéder. La clé, c’est le cellulaire."
Sources :
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes et Autorité
canadienne pour les enregistrements Internet. Photo : Radio-Canada / Vincent
Wallon / Icônes : Freepik de www.flaticon.com
«Essayez
de vous en défaire pendant trois jours, vous allez vous rendre compte à quel
point c’est difficile, voire impossible », assure Steve Joordens,
professeur de psychologie et directeur du Advanced Learning Technology Lab à
l’Université de Toronto.
Selon M. Joordens, nous sommes
collectivement dépendants de la technologie mobile. Si certaines personnes sont
capables de gérer ce type de dépendance plus sainement, pour plusieurs, une
abstention se traduira en une foule de sentiments négatifs, telles l’angoisse
ou l’obsession.
Le professeur explique qu’il existe des
parallèles à faire entre les sensations provoquées par l’utilisation d’un
téléphone intelligent et d'une machine à sous.
Article
intégral :
«Pendant
longtemps, j'ai été perplexe quant à la façon dont quelque chose d'aussi cher,
d'aussi avant-gardiste, pouvait être aussi inutile. Et puis il m'est venu à l'esprit qu'un
ordinateur est une machine stupide avec la capacité de faire des choses incroyablement
intelligentes, alors que les programmeurs informatiques sont des gens
intelligents avec la capacité de faire des choses incroyablement stupides. Ils sont, en bref, parfaitement assortis.» ~
Bill Bryson
Robocratie
William Braumann (2016)
Nous
sommes les machines
Et nous
voilà debout
Sur les
quatre pattes motrices
De
chimpanzés de fer,
Dressés à
rouler
Nos
toutes dernières voitures singes
Quadrupèdes
modernes et horodatés
Filent
sur le sol caoutchouc de nos voies rapides,
Avec en
dedans cette soif de carburant plasma
Qui
dévore les circuits numériques
De leur
mécanique pétrochimiesque
En
passant, nos véhicules mammifères
Saluent
les arbres mous de nos villes
Automates,
Aux
tomates
Ultraviolettes
Nous
avons dompté l’animal,
Imposé
nos empreintes
Digitales
Et enfin
donné une âme
Au métal.
Source :
http://www.poetica.fr/a-propos/
À mon
avis, l’exemple le plus absurde de soumission
totale à la technologie de contrôle est la «maison intelligente» (domotique
sans fil). Quand on n’est plus capable de tourner un bouton pour démarrer un
appareil, autant déménager illico au centre d’hébergement du quartier. En
outre, il suffit de se rappeler des grandes pannes hydroélectriques, ou de revoir
des films de science-fiction, pour imaginer les dégâts qu’occasionnerait un
plantage global dans les réseaux de télécommunication...
Maisons intelligentes
«Un robot n’a nul besoin d’un corps individuel. Nous autres humains sommes limités par nos deux yeux, mais un robot dématérialisé peut nous observer depuis n’importe quelle caméra installée dans le ville (au Royaume-Uni, il existe plus de quatre millions de caméras disséminées dans les lieux publics), ou nous écouter depuis mille microphones posés du fond de la mer. Un environnement n’est plus un espace vide s’il est truffé de capteurs reliés à une intelligence artificielle centrale. Un tel environnement est en soi un robot conscient, un environnement intelligent.
L’environnement intelligent le plus courant
relève de la domotique. On l’appelle «maison intelligente». Les maisons
intelligentes sont conçues pour surveiller leurs occupants. À la Carnegie
Mellon University, l’Environnement Intelligent Assisté veille sur des personnes
du troisième âge et anticipe leurs actes – tout ça grâce aux capteurs installés
dans les systèmes de sécurité usuels. À l’Intel Research de Seattle, les
membres du projet SHARP développent un bracelet électronique amélioré
permettant à une maison intelligente de suivre les activités de celui qui le
porte. En clair, si vous vous méfiez d’Intel, ôtez le bracelet de votre
poignet.
Les robots les plus proches seront ceux à l’intérieur
desquels nous vivrons. Non seulement les maisons intelligentes nous surveillent
et analysent nos activités, mais elles peuvent aussi établir nos modèles comportements en enregistrant les nuances de notre vie quotidienne –
de notre programme télé favori à nos horaires de salle de bains. En nous
observant avec attention, en découvrant des règles
causales (quelles circonstances
entraînent quelles conséquences), une maison intelligente pourrait même
parvenir à nous manipuler. [...] Une maison intelligente grouille de capteurs
conçus pour épier le moindre de vos mouvements. Au fil des mois, la maison
robot construit peu à peu un modèle (ce que vous êtes et votre comportement
habituel). Nous ne pouvons même pas concevoir l’étendu et la profondeur des
informations dont ils disposent. Même si nous comprenons leurs capteurs en termes
de capacités humaines, les robots sont réellement
surhumains. Un capteur est un engin
qui convertit une propriété du monde physique en signal électrique. Les cinq
sens humains sont la vision, l’ouïe, le toucher, l’odorat et le goût. Les
robots disposent d’une palette bien plus large de capteurs.
Comme nous tous, les robots perçoivent leur
environnement, choisissent une action, puis l’accomplissent. Ce processus porte
un nom : le paradigme perception
– réflexion – action. Tous les robots suivent ce principe. Ils amassent des
informations via leurs capteurs,
prennent des décisions grâce à leur intelligence
artificielle et se servent de leurs effecteurs
pour agir sur leur environnement.
La forme des robots découle des recherches
en robotique – et de l’argent qu’on y injecte. Aujourd’hui, des entreprises
spécialisées dans la robotique grand public produisent quotidiennement des
robots jouets, des robots ménagers et des maisons intelligentes. Dans un avenir
proche, nous vivrons avec – voire à
l’intérieur de nos robots domestiques. Les robots les plus sophistiqués
sont conçus par les laboratoires universitaires et les entreprises privées
liées au gouvernement par des contrats
très lucratifs. Le DARPA (Pentagon’s
Defense Advanced Research Project Agency) finance la recherche robotique
militaire. Les machines développées dans ce contexte sont conçues pour
fonctionner dans quasiment n’importe quel environnement terrestre. Des robots
de soutien appuient les troupes au sol, s’infiltrent derrière les lignes
ennemies, traquent les ennemis sur le terrain, dans le ciel et depuis l’espace.
Des agences gouvernementales moins sinistres, comme la NASA (National Aeronautics adn Space
Administration), financent la conception de robots capables d’explorer les
coins les plus inhospitaliers du globe et du système solaire. La combinaison
d’intérêts commerciaux, scientifiques et militaires produira une grande
quantité de robots dont l’aspect variera énormément en fonction des modèles,
qui opéreront n’importe où et travaillent seuls, en équipes ou en meutes. Face
à des ennemis si ostensiblement supérieurs d’un point de vue physique, il n’y
aura pas trente-six solutions. Il nous faudra exploiter nos qualités humaines
naturelles – qui correspondent justement aux faiblesses «naturelles» des
robots.
Les clés de la survie humaine ont toujours
été l’ingéniosité, l’adaptabilité et l’instinct social. Un homme seul peut
difficilement survivre dans un environnement hostile, mais en groupe, les
humains coopèrent naturellement et développent des sociétés complexes et
sophistiquées. Enfants, nous apprenons à parler, à reconnaître les visages, à
comprendre le langage de nos aînés, sans effort conscient. Aujourd’hui, les
robots nous rattrapent. Les prochaines générations d’androïdes sont
spécialement conçues pour imiter la voix, le langage corporel et les expressions
faciales des humains. Mais on ne berne pas si facilement plusieurs millions
d’années d’évolution. Faisons confiance à notre instinct social pour séparer
les loups des agneaux.
L’entité robot dans son ensemble est une
immense solution métallique aux problèmes que l’humanité refuse d’affronter,
par paresse ou incapacité. Bien qu’un robot puisse résoudre un problème avec
une précision inégalée, il manque souvent de connaissances extérieures. La
plupart des robots ne maîtrisent pas le contexte
– la vision du monde. En conséquence, ils ne savent pas s’adapter, et c’est
justement cette capacité d’adaptation qui a permis à l’humanité de survivre.»
Source :
Survivre
à une invasion robot; Ils arrivent.
Soyez prêts par Daniel H. Wilson; Calmann-Lévy, Orbit, 2012
À quoi ressemble la «maison intelligente»?
... Les maisons intelligentes impliquent une batterie de dispositifs et d’appareils du quotidien qui peuvent être surveillés et contrôlés à distance. Ces derniers peuvent notamment inclure des réfrigérateurs, des machines à laver, des lave-vaisselles, des téléviseurs, des ordinateurs, des systèmes de surveillance ou de sécurité et même des distributeurs de croquettes pour nos animaux de compagnie.
Chaque appareil est connecté à une
«passerelle» ou une centrale, le tout contrôlé par un émetteur qui peut être
votre téléphone portable, un ordinateur ou une interface Internet.
Vous pouvez à titre d’exemple :
– Recevoir
des colis même lorsque vous n’êtes pas chez vous grâce aux boites aux lettres
intelligentes
– Verrouiller
vos portes et fenêtres si vous avez oublié de les fermer en partant le matin
– Démarrer
un thermostat de radiateur à distance
– Nourrir
les animaux domestiques en déterminant l’horaire de votre choix, lorsque vous
n’êtes pas à la maison
– Programmer
la température idéale pour votre couette (connectée).
On est ainsi en mesure de programmer toutes
les tâches ménagères selon ses propres besoins. En outre, avoir la possibilité
de surveiller et de contrôler ce qui se passe chez soi, et ce de n’importe où
(dans le monde).
La domotique récente intègre des disques
durs qui permettent aux propriétaires de visionner des vidéos ou d’écouter ce
qui se passe dans toute la maison, et ce de n’importe quelle pièce. Les
interphones vidéo facilitent la communication avec les visiteurs impromptus,
que l’on soit chez soi ou au bureau.
Les maisons intelligentes offrent des systèmes
de sécurité avancés qui incluent notamment des caméras, des détecteurs de
mouvement avec un relais vers le poste de police local ou une société de
sécurité privée. Les maisons intelligentes peuvent également utiliser des
cartes-clés ou des systèmes à empreintes digitales au lieu des traditionnelles
serrures conventionnelles, rendant l’effraction pour des personnes
malintentionnées plus complexe.
Les systèmes à commande vocale peuvent aussi
contrôler la luminosité d’une pièce, verrouiller les portes, faire fonctionner
un téléphone ou allumer un ordinateur. La domotique permet à un individu de
fixer un calendrier pour les tâches automatiques dont l’arrosage du gazon.
Une maison intelligente sera très dépendante de votre connexion Internet
et de sa fiabilité. Si votre connexion Internet vient à s’arrêter, un bon
nombre d’appareils dits intelligents cesseront de fonctionner. En outre, les
signaux sans fil peuvent éventuellement être interrompus par d’autres appareils
électroniques dans votre maison et provoquer des conflits, empêchant certains
de vos produits intelligents de fonctionner normalement.
Article
intégral :
Dans
l’univers de la robotisation, de l’intelligence artificielle et de la
nanotechnologie, plusieurs systèmes ont certes fait progresser les
intercommunications, mais plusieurs auraient mérité de rester sur les tablettes...
Caricature : «Ne m'attends pas pour souper» par Serge Chapleau, La Presse 09.03.2017
Toutes
sortes de robots (aussi petits que des moustiques ou de la taille des
satellites) nous bombardent de fréquences perturbatrices et nocives nuit et
jour sans notre consentement, et contrôlent nos vies de façon insidieuse et
absurde.
Qui plus est, bien des gens sont dépendants
de leurs bidules au point de ne plus utiliser leur propre mémoire et
intelligence, au risque d’être frappés d’Alzheimer bien avant l’échéance
probable. C’est connu, les neurones non utilisés ratatinent, tout comme les
muscles.
Un journaliste disait que son fils
préfèrerait se faire amputer un bras plutôt que de renoncer à son iPad ou son
smartphone!
La chaine des répercussions sur le plan
physique, mental et émotionnel reste floue malgré les recherches plus pointues
– peut être qu’on ne les divulgue pas pour éviter de nuire à une source de
revenus colossale. (Délirium roboticum, Situation planétaire, 25.04.2012)
Panorama techno
«L'erreur
est humaine, mais pour tout ficher en l’air, il faut un ordinateur.» ~ Paul Ehrlich
«Pensez-y,
il y a déjà un million de singes derrière un million de claviers, et Usernet n’a
rien à voir avec Shakespeare.» ~ Blair Houghton
(années 70; des milliards aujourd’hui)
«C'est
ridicule de vivre 100 ans et de ne pouvoir se souvenir que de 30 millions
d'octets. Moins qu'un disque compact. La
condition humaine devient de plus en plus obsolète.» ~ Marvin
Minsky
«Si ça
continue, l'homme va atrophier tous ses membres sauf le doigt du
bouton-poussoir.» ~ Frank Lloyd Wright [De nos jours, les pouces sont saufs...]
«Il ne
s'agit pas de bits, d'octets et de protocoles, mais de profits, de pertes et de
marges.» ~ Lou Gerstner
«N'importe
quel idiot peut utiliser un ordinateur.
Beaucoup le font.» ~ Ted Nelson
«Les programmeurs sont dans une course avec
l'Univers pour créer des programmes plus puissants à l’épreuve des idiots,
tandis que l'Univers essaie de créer des idiots plus puissants. Jusqu'à présent,
l'Univers l’emporte.» ~ Rich Cook
«Un
ordinateur vous permet de faire plus d'erreurs plus vite que n'importe quelle
invention de l'histoire humaine, à l'exception peut-être des armes de poing et
de la tequila.» ~ Mitch Radcliffe
Pour conclure :
«[...] je pense que l’ordinateur est un bon outil pour collectionner les informations, mais le meilleur outil pour penser, c’est la main. On pense avec la main, il y a un rythme de pensée, on écrit avec la main, il y a un déroulement de la pensée qui est lent, qu’on peut retravailler, alors qu’avec l’ordinateur, on va plus vite, mais on collectionne préférentiellement les idées des autres, alors qu’avec la main, on est étonné de l’enchaînement des idées. On part d’une idée, souvent de l’autre, et puis – toc! – quelque chose s’enchaîne et on ne sait pas ce qui en résultera... Ce travail-là ne se fait pas avec l’ordinateur. Si on veut être efficace, il vaut mieux avoir un ordinateur, si on veut être authentique, il vaut mieux écrire et penser avec la main.» ~ Boris Cyrulnik
«[...] je pense que l’ordinateur est un bon outil pour collectionner les informations, mais le meilleur outil pour penser, c’est la main. On pense avec la main, il y a un rythme de pensée, on écrit avec la main, il y a un déroulement de la pensée qui est lent, qu’on peut retravailler, alors qu’avec l’ordinateur, on va plus vite, mais on collectionne préférentiellement les idées des autres, alors qu’avec la main, on est étonné de l’enchaînement des idées. On part d’une idée, souvent de l’autre, et puis – toc! – quelque chose s’enchaîne et on ne sait pas ce qui en résultera... Ce travail-là ne se fait pas avec l’ordinateur. Si on veut être efficace, il vaut mieux avoir un ordinateur, si on veut être authentique, il vaut mieux écrire et penser avec la main.» ~ Boris Cyrulnik
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