26 septembre 2019

Un prélude à la campagne de Greta Thunberg?

Hier au 15-18, le chroniqueur Simon Jodoin amenait un élément intrigant à la controverse autour de Greta Thunberg. Certains la diabolisent, d’autres affirment qu’elle est un clone subventionné par les capitalistes du Green New Deal. D’autres la mettent sur un piédestal. Bref, on trouve de tout.

Même si le ton est radical et accusateur à l’égard des générations précédentes, son message pourrait susciter un questionnement, même une prise de conscience sincère chez les négationnistes purs et durs. Dans les années 1950/1960, la biologiste Rachel Carson sonnait l'alarme avec son Printemps silencieux (Silent Spring). Elle y exposait l'impact destructeur des activités humaines sur l'environnement et leurs conséquences pour le futur de la planète. On ne peut certainement pas qualifier ses écrits de "fake green". Et, qu'avons-nous fait? Rien.

Le plus marrant dans cette vidéo référée par Simon Jodoin, c'est que Greta reprend presque littéralement les accusations portées par un adolescent dans un clip publicitaire de Greenpeace d’il y a 12 ans. Simple coïncidence anecdotique?
   La campagne s’intitulait It’s not too late : Paris, 31 janvier 2007. La communauté scientifique internationale, le GIEC, se réunit à Paris pour faire le point sur le réchauffement de la planète. Au cours d’une conférence de presse, le GIEC attire l’attention sur les méfaits irrémédiables de ce réchauffement et prouve que l’activité humaine en est la cause essentielle. Ce film a été projeté à Paris sur la façade de plusieurs monuments dont l’Assemblée Nationale afin d'interpeller le public sur les conséquences du réchauffement climatique et d'inciter les gens à agir. La communauté scientifique est unanime : une augmentation de la température de plus de 2°C aurait des conséquences dramatiques : inondations, famines, exodes, déstabilisation de l'économie, appauvrissement de la biodiversité...



Les climatosceptiques font les gorges chaudes et affirment que rien de tout cela ne s’est produit durant la dernière décennie. Ils sont aveugles à ce qui se passe dans le monde, trop occupés à se regarder le nombril et d’en publier des photos sur le Net.   

Vu mon âge vénérable, je peux vous garantir que l’environnement que j’ai connu il y a une quarantaine d’années a dramatiquement changé, et pas pour le mieux. De grands pans de «La Belle Province» ont été défigurés, déboisés, pour faire place à du bâti commercial et industriel, des parcs immobiliers hideux, de la production intensive de bétail, des monocultures bourrées de pesticides, etc. Que faire? 
   Je n'insiste pas davantage. Si le sujet vous intéresse, visitez le libellé «Série noire» sur le blog Situation Planétaire; entre autres l'article En réponse aux stupidités propagées sur l'alarmisme climatique, 24 septembre 2019   

En complément : 

Climat : «heille, les jeunes, soyez pragmatiques!»
Paul Journet
La Presse, 27 septembre 2019

[...] Pourquoi on se focalise sur le discours d’une adolescente au lieu de parler du sujet lui-même : le climat. Reconnaissons au moins l’efficacité énergétique de la démarche, qui permet d’opiner sans perdre de temps avec les faits. Exagère-t-elle? On ouvre les lignes, jasez!
   Hélas, quand une adolescente montre du doigt ces documents [rapports du GIEC], une soudaine envie nous prend de faire de la sociologie. Est-ce qu’elle nous juge avec son doigt? Pourquoi son doigt ne la rend-il pas heureuse? Qui manipule vraiment ce doigt? Et qu’est-ce que ce doigt dit de notre époque? Est-il alarmiste? Devient-il la nouvelle religion?
   Ces questions sont fascinantes, on le concède. Mais peu importe la réponse, les glaciers continueront de fondre dans leur habituelle indifférence. Le débat reste ouvert quant à savoir s’ils se liquéfient de façon laïque ou alarmiste.
   Le plus absurde, c’est que des politiciens demandent aux jeunes d’être «pragmatiques». Nous aussi, on aime le pragmatisme. C’est une noble tradition philosophique. En gros, elle propose d’utiliser le monde physique comme point de départ. De partir de la réalité puis de s’y adapter. Bref, de s’intéresser moins aux idées qu’on se fait du monde et davantage aux conséquences pratiques de nos gestes.
   C’est précisément ce que font les jeunes dans la rue. Ils partent des faits. Certes, la climatologie est une science probabilistique, mais plus le temps avance, plus ses prévisions deviennent précises et consensuelles.
   La planète se réchauffe, la biodiversité chute et le niveau des océans monte. Pour en minimiser les dégâts, il faut limiter la hausse de la température à 1,5 degré. Et plus on attend, plus ce sera difficile, car les gaz à effet de serre (GES) s’accumulent.
   Des gens meurent et la croissance économique infinie est un leurre, a dit la jeune militante. On l’a ridiculisée. Pourtant, la même semaine, Foreign Affairs titrait que «les changements climatiques nous tuent déjà». [...]
   Mais on préfère approfondir la sociologie du doigt d’une adolescente. C’est plus facile à décrédibiliser. Plus rassurant pour se convaincre que tout va bien.
   Bien sûr, on peut débattre des moyens pour s’attaquer à la crise climatique. Mais ce qui n’est pas raisonnable, c’est de le faire en marge de la réalité physique.
   Un exemple : dire qu’il faut reconnaître qu’en 2050, les gens auront encore besoin de beaucoup de pétrole. C’est vrai, la demande pourrait exister. Mais le CO2 ne cessera pas son effet de serre par pragmatisme pour s’adapter aux besoins des gens. Il va continuer de s’accumuler dans l’atmosphère avec les conséquences prévues par la science. C’est cette prévision qui devrait servir de point de départ à la réflexion. Reste ensuite à savoir si on est prêts à en payer collectivement le prix.
   Voilà le cœur du débat. Il est hyper complexe et les solutions varieront d’une région à l’autre. Mais qu’on soit optimiste ou pessimiste, que le climat représente une menace existentielle ou un simple défi technologique, l’enjeu reste le même : trouver la façon la plus juste et efficace de réduire les GES. Alors lâchez vos adjectifs et montrez vos chiffres.        

Recentrer ainsi le débat permettrait de relativiser les accusations d’«alarmisme». [...]  

Si les jeunes sont surreprésentés dans la rue aujourd’hui, c’est parce qu’ils sont trop pragmatiques pour nier la science et les risques à venir. Parce qu’ils ne veulent pas en subir les conséquences. C’est normal, car pour eux, l’avenir risque de durer longtemps.

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