«Le roman qui
dépeint l'arrivée d'une épidémie contraignant les habitants à rester cloîtrer
chez eux, connaît une forte hausse des ventes depuis quelques semaines. Sur nos
télés, sur nos ondes, et dans nos journaux, dans nos comportements sociaux… il
est absolument partout. Et même dans notre consommation de culture.»
(Les Inrockuptibles)
En 2020 : même problème, mais mondial plutôt que régional.
Citations tirées du roman.
Ah! Si c'était
un tremblement de terre! Une bonne secousse et on n'en parle plus... on compte
les morts, les vivants, et le tour est joué. Mais cette cochonnerie de maladie!
Même ceux qui
ne l'ont pas la portent dans leur coeur.
La seule
façon de mettre les gens ensemble, c'est encore de leur envoyer la peste.
Le fléau
n'est pas à la mesure de l'homme, on se dit donc que le fléau est irréel, c'est
un mauvais rêve qui va passer.
Chez les uns,
la peste avait enraciné un scepticisme profond dont ils ne pouvaient se
débarrasser.
Les fléaux,
en effet, sont une chose commune, mais on croit difficilement aux fléaux
lorsqu'ils vous tombent sur la tête.
En même temps
que les secours envoyés par air et par route, tous les soirs, sur les ondes ou
dans la presse, des commentaires apitoyés ou admiratifs s'abattaient sur la
cité.
Des
imprimeurs de la ville virent très vite le parti qu'ils pouvaient tirer de cet
engouement et diffusèrent à de nombreux exemplaires les textes qui circulaient.
Les mesures
n'étaient pas draconiennes et l'on semblait avoir beaucoup sacrifié au désir de
ne pas inquiéter l'opinion publique.
Beaucoup de
gens réduits à l'inaction par la fermeture des magasins ou de certains bureaux
emplissaient les rues et les cafés. Pour le moment, ils n'étaient pas encore en
chômage, mais en congé.
Les foyers
d'infection sont en extension croissante. À l'allure où la maladie se répand,
si elle n'est pas stoppée, elle risque de tuer la moitié de la ville avant deux
mois.
Si l'épidémie
s'étend, la morale s'élargira aussi.
On avait
consigné des quartiers entiers pendant vingt-quatre heures afin de procéder à
des vérifications domiciliaires.
La situation
était grave, mais qu'est-ce que cela prouvait? Cela prouvait qu'il fallait des
mesures encore plus exceptionnelles.
Écoutez, dit
celui-ci, il faut l'isoler et tenter un traitement d'exception.
Tout d'abord,
le préfet prit des mesures concernant la circulation des véhicules et le
ravitaillement.
Il était au
courant des moindres détails du système d'évacuation immédiate qu'il avait
organisé pour ceux qui montraient subitement des signes de la maladie.
Diagnostiquer
la fièvre épidémique revenait à faire enlever rapidement le malade.
Ces salles
étaient d'ailleurs équipées pour soigner les malades dans le minimum de temps
et avec le maximum de chances de guérison.
Les malades
mouraient loin de leur famille et on avait interdit les veillées rituelles, si
bien que celui qui était mort dans la soirée passait sa nuit tout seul.
Hâtivement,
les corps étaient jetés dans les fosses. Ils n'avaient pas fini de basculer que
les pelletées de chaux s'écrasaient sur leurs visages et la terre les
recouvrait de façon anonyme.
Un arrêté
préfectoral expropria les occupants des concessions à perpétuité et l'on
achemina vers le four crématoire tous les restes exhumés.
La presse, si
bavarde dans l'affaire des rats, ne parlait plus de rien. C'est que les rats
meurent dans la rue et les hommes dans leur chambre. Et les journaux ne
s'occupent que de la rue.
Tout le monde
était d'accord pour penser que les commodités de la vie passée ne se
retrouveraient pas d'un coup et qu'il était plus facile de détruire que de
reconstruire.
Alors que le
prix de toutes choses montait irrésistiblement, on n'avait jamais tant gaspillé
d'argent, et quand le nécessaire manquait à la plupart, on n'avait jamais mieux
dissipé le superflu.
L'habitude du
désespoir est pire que le désespoir lui-même.
Le mal qui
est dans le monde vient presque toujours de l'ignorance, et la bonne volonté
peut faire autant de dégâts que la méchanceté, si elle n'est pas éclairée.
C'est au
moment du malheur qu'on s'habitue à la vérité, c'est-à-dire au silence.
Épilogue :
À l'aube d'une
belle matinée de février, les portes de la ville s'ouvrent enfin. Les
habitants, libérés savourent mais ils n'oublient pas cette épreuve «qui les a
confrontés à l'absurdité de leur existence et à la précarité de la condition
humaine». Le narrateur a voulu relater ces événements avec la plus grande
objectivité possible. Il sait que le virus de la peste peut revenir un jour et
appelle à la vigilance.
Source des citations tirées
du roman :
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